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Les contre-réformes de l’école préfigurent toujours le projet de société des tenants du pouvoir. La République produit aujourd’hui une instruction parmi les plus inégalitaires d’Europe qui trahit sa promesse d’émancipation. Les efforts, le dévouement et la conscience professionnelle des équipes pédagogiques, qui sont les premières à en souffrir, n’y changent rien. Le projet de loi proposé par M. Blanquer, s’inscrit dans le flot de ces contre réformes qui dessinent l’architecture du « nouveau monde » macronien, inégalitaire et autoritaire. La procédure accélérée pour limiter les débats, était le plus sûr moyen de soulever la défiance de onze syndicats et des parents d’élèves largement mobilisés contre un projet bien mal-nommé de « confiance » alors que la demande de démocratie parcourt toute la société.
Ainsi, M. Blanquer a fait grand bruit de la scolarisation obligatoire des enfants dès 3 ans alors que 97,3 % d’entre eux le sont déjà. La mesure gouvernementale va surtout se traduire par un chèque de 150 millions d’euros à l’enseignement maternel privé que les municipalités auront désormais l’obligation de financer. Leur remboursement promis par l’Etat va encore aggraver la mise sous tutelle des communes. Surtout, comment être dupe du fait que cette obligation va liquider la possibilité offerte aux parents de pouvoir scolariser les enfants dès 2 ans ? De nombreuses municipalités de gauche, notamment communistes, s’y sont depuis longtemps engagées au grand bénéfice des familles et des enfants les plus en difficultés.
Et voici que le ministre veut dissocier l’acquisition des savoirs fondamentaux de l’excellence. Des « Etablissement publics de savoirs fondamentaux » uniront sous une même tutelle administrative écoles primaires et collèges éloignant les directions d’établissement de la population notamment en territoire rural, quand, à l’autre bout de la chaine éducative, la sélection se fait plus drastique avec des dispositifs tels que « Parcoursup » ou de coûteux et élitistes « Etablissements publics locaux internationaux » à destination des enfants des cadres des entreprises multinationales. On retrouve là une des caractéristiques de la macronie : le mépris des classes populaires.
On trouve la source de ces « contre-réformes » dans la littérature du MEDEF et dans celle du Conseil européen cosignée donc par notre gouvernement. Dans la recommandation du Conseil européen publiée le 23 mai dernier on peut ainsi lire cette sentence : « le système actuel d’enseignement et de formation initiaux ne favorise pas suffisamment l’intégration sur le marché du travail ». Tel est le sens des choix : fournir de la main d’œuvre adaptable au marché… du travail. Loin d’un projet d’émancipation.
La tendance à modeler l’école aux inégalités et à faire entrer les élèves dans les cases d’un marché du travail sclérosé s’accompagne d’une mise au pas sans précédent du personnel enseignant. Déjà déconsidérés par une rémunération scandaleusement basse, ils sont appelés à un « devoir d’exemplarité » qui s’apparente à une mise en cause de leur probité. La majorité macroniste revendique le retour de l’Etat dans la formation des enseignants à travers la nomination des directeurs par les recteurs. Ce retour assumé de l’Etat, observable dans différents aspects de la politique macronienne, s’effectue généralement pour briser les résistances du modèle français à l’intégration capitaliste et imposer les politiques d’austérité. On peut donc s’interroger : vise-t-il à faire rentrer la réforme de l’éducation dans les clous budgétaires imposés par les traités européens ? Vise-t-il aussi à préparer la « réforme » de la fonction publique, la suppression de 120 000 postes et la casse du statut des agents au nom, là encore, de l’application des traités européens ?
Le vote du 26 mai à l’occasion des élections européennes doit servir à refuser, avec le même bulletin de vote de la liste Ian Brossat, les choix macronistes et ceux des institutions européennes.
Nous sommes en tous cas loin, très loin d’une ambition élitaire pour toutes et tous telle que la font prévaloir les enseignants et parents d’élèves en lutte contre cette énième loi régressive qui, empilées, ont produit ce système éducatif très éloigné de l’égalité et la réussite de tous les enfants.
1 commentaire
Casse des statuts ?
Un exemple dans l’école : les classes “généreusement” limitées à 24 vont contraindre l’administration à recruter des contractuels, peut-être 10000 d’entre eux arriveront cet été, moins chers et plus malléables. Et, comme à la poste, on pourra alors cesser de recruter des fonctionnaires.
Deuxième exemple dans les lycées pro : le temps de travail va être annualisé dans les CFA publics, où l’accroissement des horaires de 25 % sans compensation salariale est déjà lancé.