Ici, comme là-bas, démocratie, progrès social

le 17 février 2011

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Une fois de plus, la semaine dernière, le président de la République s’est invité sur une chaîne privée de télévision avec des interlocuteurs  qu’il avait préalablement choisis. Il paraît que cette émission s’appelait « Paroles de Français »… En fait c’est M. Sarkozy qui a parlé ! Beaucoup parlé. Sans cesse parlé ! Il défend bec et ongles son système désormais largement contesté. Le télé-président est venu confirmer ses choix ultra-libéraux et liberticides. Le choix de supprimer l’impôt sur les grandes fortunes pour une partie des fortunés, tout en maintenant le bouclier fiscal, alors que l’harmonisation envisagée de la fiscalité entre la France et l’Allemagne va conduire à une augmentation de l’impôt sur le revenu, et peut-être de la TVA. Le risque dépendance ne servira qu’à ponctionner plus le travail et les retraites par l’augmentation de la contribution sociale généralisée et la privatisation de cette part de solidarité par les assurances privées. Les services publics seront de plus en plus affaiblis, dénaturés, démantelés, privatisés.

Voilà maintenant qu’il attaque avec violence, mépris et populisme d’extrême-droite les services de l’Etat, de l’administration aux enseignants et la justice, jusqu’aux magistrats. Jamais il ne se pose la question des moyens d’une justice efficace, pas plus que ceux de l’éducation nationale. Il applique avec zèle la loi des banques et de leurs agences de notation qui imposent de réduire les investissements publics utiles. Il compte laisser instaurer sur le budget national la dictature de la Commission de Bruxelles en rendant les déficits, donc des dépenses publiques, anticonstitutionnels. Il oublie qu’en tant que président de la République il doit être le garant et le gardien de l’indépendance de la Justice. Moins que quiconque il n’a à intervenir dans des affaires en cours. Il attaque la justice professionnelle rendant la justice au nom de la loi, pour y inclure de prétendus « jurys populaires ».

Toujours sur les terres de l’extrême-droite, il s’est permis de dénoncer « l’échec du multiculturalisme », et revient donc à sa fameuse thèse du communautarisme en désignant « nos compatriotes musulmans », comme s’il parlait de la même manière aux autres compatriotes d’autres religions. Bientôt, avec Mme Le Pen, ils nous expliqueront que les Talibans sont au coin de la rue. C’est d’ailleurs cette vision archaïque qui les empêche de voir les bouleversements qui secouent le monde arabe dans son ensemble. Sous couvert de lutte contre l’islamisme, le président de la République et les dirigeants européens ont soutenu et soutiennent toutes les dictatures arabes qui maintiennent les peuples dans un état de soumission intenable et de pauvreté insupportable. C’est au courage de Moubarak qu’ils rendent aujourd’hui hommage, pas à celui des manifestants pour la liberté !

L’Égypte compte sept millions de chômeurs, les salariés du secteur public gagnent en moyenne 70 dollars par mois, ceux du privé 110 dollars, 40 % des Égyptiens vivent sous le seuil de pauvreté. Le mouvement populaire égyptien va très au-delà des images de la télévision de la place Tahrir. Les travailleurs du textile, des transports, les infirmières, les médecins, les avocats sont en lutte depuis des mois et des mois. Ce sont des soulèvements à la fois pour la démocratie, les libertés, et pour le progrès social. Cette facette est trop cachée. Pourtant c’est la vague néolibérale imposée depuis trente ans au Sud de la Méditerranée qui a permis la constitution d’oligarchies d’affaires dans lesquelles participent et profitent activement de grandes firmes européennes. Les programmes de l’Union européenne en direction des pays du Sud n’ont pas visé la coopération, le développement humain et social, mais ont poussé au libre-échangisme capitaliste. On peut même dire qu’il y a aujourd’hui un lien ténu entre les pouvoirs politiques soutenus au Sud, et les pouvoirs européens, américain et de grandes firmes multinationales.

Les forces progressistes européennes doivent donc être moins passives vis-à-vis des révolutions arabes. Autant nous saluons et soutenons la marche vers la liberté et la démocratie, autant nous restons lucides. Tout est fait pour qu’il n’y ait pas de processus transformateur en Tunisie, en Égypte et ailleurs. Les Etats-Unis comme l’Union européenne, en lien avec la direction Israélienne, veulent rester maîtres du jeu pour maintenir leur domination et les systèmes financiers globalisés. Pour que les choses changent en faveur des peuples de manière durable et dans un processus progressiste, dans un espace euro-méditerranéen, coopératif, solidaire, les citoyens et tous les travailleurs européens doivent eux-aussi agir dans l’unité contre leurs gouvernements, les institutions européennes et les oligarchies capitalistes qui les appauvrissent, réduisent le travail des deux côtés de la Méditerranée et y développent le précariat des européens de toutes nationalités. Il faut commencer à repenser un avenir progressiste des deux rives de la Méditerranée. Ce n’est pas la vision des pouvoirs en place, ni à l’intérieur de l’Union européenne, ni à l’extérieur. Ce qui se passe montre l’inanité  des thèses conjointes sur l’identité nationale ici, et le rejet de la démocratie là bas, au nom de la lutte contre l’islamisme fondamentaliste. Celui-ci ne se développe que sur le manque de liberté, la pauvreté et la misère. Mais la grande nouveauté réside dans la prise en main par la jeunesse, les travailleurs, les femmes, de leurs propres affaires, tous ensemble pas delà les religions et les opinions. Quelle belle leçon nous offrent-ils ainsi. Ce regard nouveau que nous devons porter ici sur les immigrés et enfants d’immigrés dans nos quartiers, nos écoles, nos usines doit être emprunt de ces évènements du monde. Une nouvelle étape de solidarité, du vivre ensemble, peut éclore.

Le combat commun des peuples du monde doit se développer urgemment pour faire cesser la spéculation sur les matières premières alimentaires, textiles et énergétiques. Si elle se poursuivait, ce sont les populations du monde entier qui en subiraient les terribles conséquences dans les prochains mois. L’intervention publique pour la constitution de stocks de sécurité et de mécanismes de stabilisation des prix le permettrait. Il y a urgence ! Entre temps, le combat pour l’augmentation des salaires doit reprendre.

Ensemble, pensons, inventons un autre avenir commun. Justice, démocratie, dignité, paix ! Là-bas. Comme ici.

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0 commentaires


Canelle 17 février 2011 à 11 h 31 min

Pfff, il y a bien longtemps que mon mari et moi ne regardons plus les gesticulations du président Sarkozy ; notre seule pensée : encore lui, toujours lui… Et comme crier ASSEZ à une télé ne sert à rien, nous éteignons.

Sarkozy n’aime ni la France, ni les français, alors les autres peuples……….. !! Sarkozy aime Sarkozy et son tas d’or…. !
Nous n’aimons pas Sarkozy et nous n’avons pas honte de le dire, notre conscience est en paix !

Poncelet-Kirstetter Jocelyne 17 février 2011 à 12 h 37 min

Combat pour l’augmentation des salaires ,oui, et combat pour la défense des services publics! A quand une grande mobilisation du Front de Gauche pour la défense de ce bien commun? A quand des propositions ?…Ce combat serait pertinent , grandement mobilisateur et unificateur…Nous sommes tous concernés! Cordialement.

Tess Angelica 21 février 2011 à 11 h 11 min

On dirait que pour l’heure ce n’est pas la spéculation sur les matières premières alimentaires qui en font augmenter les prix, mais bien les révoltes poupulaires, notamment dans les pays arabes. D’une façon plus générale et sérieuse tout laisse à penser que le libéral-capitalisme planétaire est en train de détruire un peu partout les régimes politiques traditionnels dictatoriaux ou démocratiques parlementaires exposant les populations à des désordres croissants. Faire croire que c’est la démocratie populaire à tous les échelons (comme le suggère Hervé Kempf dans l’HD 249) ou que c’est en rendant le “vote citoyen” obligatoire, qui va permettre de mettre un peu d’ordre dans le chaos, c’est s’illusionner et c’est surtout accélérer la chute dans le précipice en ne lui opposant que des mots, des mots, des mots!

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