L’étincelle George Floyd

le 10 juin 2020

Les Etats-Unis ont enterré George Floyd dans le recueillement, le calme et  la détermination à faire vivre l’idéal de justice. Par dizaines, des pays se sont mis au diapason des Etats-Unis célébrant à la même heure la mémoire  de l’homme qui succomba aux coups d’une police gangrénée par le racisme le plus bornée, réservant ses coups les plus durs à la population noire cinquante ans à peine après l’égalité en droit  conquise par Martin Luther King.

La vague est historique. Jamais depuis la lutte victorieuse pour la libération de Nelson Mandela, le monde ne s’était dressé avec cette splendide vigueur contre la persistance des discriminations raciales. Le sentiment de fraternité à l’égard de George Floyd et de ses proches traverse les frontières et vogue de capitale en capitale, et désormais de ville en ville, avec la même puissance, contribuant à souder une génération autour du combat antiraciste et contre les violences policières.

Le racisme rencontre désormais la condamnation de franges toujours plus grande des sociétés. La mondialisation aura aussi créé les conditions d’un heureux sentiment d’appartenance commune entre les êtres humains. C’est l’inéluctable destin d’une humanité vouée à se connaitre, à échanger, à coopérer. Le rejet de l’autre en fonction de sa religion ou sa couleur de peau n’est plus toléré. C’est une excellente nouvelle qui doit donner plus de force aux combats contre l’exploitation capitaliste sur laquelle se fondent également les discriminations.

Evidemment, les outrances et provocations du satrape Trump renforcent l’abnégation du mouvement antiraciste. Mais Trump n’est-il pas l’un des derniers avatars, certes puissant, d’un nationalisme teinté de suprématisme qui mêle l’arrogance de classe aux thèses racistes et dont la France connait, elle aussi, la résurgence ?

La force de la réponse qui lui est opposée spontanément par les peuples eux-mêmes marque un point de bascule. Et les pouvoirs institués le sentent bien. Aussi le mouvement a-t-il déjà permis d’arracher des victoires que l’on croyait hier inatteignables. Parmi elles, le démantèlement de la police de Minneapolis et, en France, la reconnaissance des faits ou paroles racistes à l’intérieur de l’institution policière assortie de promesses de sanctions et l’interdiction – enfin ! – de la technique d’immobilisation dite « d’étranglement », en attendant l’interdiction du plaquage ventral, cette méthode d’interpellation barbare qui aura couté la vie à George Floyd et vraisemblablement à Adama Traoré. Mais il en faudra bien plus pour tourner la page des contrôles au faciès, des discriminations de toutes sortes et des violences policières, phénomènes inquiétants qui touchent de si nombreux pays.

La mue des sociétés et les ébullitions sociales trouvent en effet face à elles des Etats qui usent sans discernement du « monopole de la violence physique légitime » décrite par Max Weber. La répression féroce du mouvement des gilets jaunes fut un révélateur de cette tendance délétère. La police ne peut rester la gardienne de l’ordre inique qui caractérise les sociétés contemporaines qu’au prix d’une violence que personne ou presque ne souhaite. Le chemin est encore long pour que l’institution policière se transforme en force de sureté et de paix au service de sa population et non comme le bras armé actionné à échéance régulière par l’Etat dans les quartiers populaires en proie aux difficultés sociales et où sont regroupées les populations issues de l’immigration, comme dans les cortèges de manifestants.

Les potentialités de cette révolte mondiale sont gigantesques. Elle proclame une soif d’égalité nécessaire à toute visée révolutionnaire. A condition bien sûr que les classes populaires déjouent les pièges diviseurs pour rester unies et déterminées à construire un monde débarrassé de toutes les discriminations et dominations. Car si le racisme est avant tout une épreuve pour ceux qui en sont victimes, une manifestation de l’instinct de domination le plus bestial, il vise également à la division des classes populaires selon des critères aussi absurdes que subjectifs, neutralisant l’indispensable unité du camp des travailleurs pour transformer radicalement la société.

C’est le racisme qu’il faut étouffer pour permettre à la société toute entière de respirer, de s’épanouir, de s’émanciper, de progresser vers l’unité populaire. La puissante manifestation qui se prépare à Paris samedi prochain retentira de cette aspiration.

Patrick Le Hyaric

09/O6/2020


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