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Après le papetier Arjowiggins, les Fonderies du Poitou, l’usine d’aciers fins Ascoval, Bosch à Rodez, c’est au tour du site de Blanquefort, propriété du groupe Ford, d’entrer dans le tourbillon des fermetures de sites industriels. En quelques jours, plus de 2000 emplois industriels ont été directement menacés, sans compter les milliers d’emplois induits et les fermetures silencieuses de petites et moyennes entreprises. Et, pourtant que n’a-t-on répété que l’arrosage des fonds publics allait sauver les emplois et l’activité industrielle !
Les coups de mentons ministériels devant micros et caméras pour sauver les apparences, les appels à la responsabilité des entreprises paraissent comme autant de paroles creuses et vaines. Le volontarisme affiché s’arrête au seuil du pouvoir de décision des conseils d’administration soumis aux exigences toujours plus folles mais toujours plus libres des banques et des actionnaires. La puissance publique se révèle au mieux impuissante, au pire complice des licencieurs.
Récriminer le groupe Ford pour son « indignité », comme l’a fait le ministre de l’économie, a dû faire rire outre-Atlantique, sans parvenir à convaincre ici. En dix ans, 50 millions d’aides publiques ont été déversés dans le géant de l’automobile pour arriver à ce triste résultat. Au lieu de verser à fonds perdus de l’argent public pour soutenir une hypothétique activité, la puissance publique doit s’affirmer au cœur des stratégies industrielles.
Des nationalisations temporaires sont indispensables pour sauver les emplois et trouver des repreneurs. Mais elles se révèlent insuffisantes dès lors qu’elles ne sont pas adossées à une ambition industrielle planifiée par filières autour d’un pôle public bancaire puissant, capable de mobiliser dans les territoires le crédit nécessaire, selon des critères sociaux, écologiques ou d’intérêt national ; une puissance publique actrice décisive au cœur des grandes infrastructures de l’industrie et des échanges commerciaux, pilote pour réaliser la transition écologique.
Au jeu de la libre concurrence, la France apparait aujourd’hui comme le dindon de la farce, laissant aux marchés la volonté de faire ou défaire à leur bon vouloir le tissu industriel quand, partout ailleurs, l’État ou les régions affirment un rôle pivot.
L’offensive des Pays-Bas dans le capital de l’entreprise Air-France-KLM est révélatrice de ce changement d’époque. Au moment où le gouvernement décide de brader les aéroports de Paris largement rentables – véritable offrande au « dieu-marché » comme ce fut le cas pour les autoroutes – et alors que le gouvernement préparait une transformation de Air-France, les Pays-Bas réputés libéraux n’ont pas hésité à intervenir de la plus brutale des manières dans le capital de l’entreprise aérienne binationale, agitant le bras de la puissance publique pour garantir leurs intérêts, loin, très loin d’un quelconque projet de coopération européenne. Surtout, KLM s’équipe exclusivement auprès de l’avionneur américain Boeing au détriment d’Airbus, rare exemple d’une coopération industrielle européenne. Curieux que le pouvoir soit pris par surprise alors qu’il y a quelques semaines, il avait pourtant reçu un bruyant avertissement dans l’affaire Renault-Nissan.
Le retour des puissances publiques dans les grands choix industriels est aujourd’hui le signe avant-coureur d’une guerre économique qui redouble d’intensité. Le protectionnisme trumpiste en témoigne. La France va-t-elle continuer à adhérer à cet ultra-libéralisme ravageur ? N’est-il pas urgent de transformer la monnaie unique et d’avoir d’autres exigences envers la Banque centrale européenne pour l’emploi et le déploiement industriel ? Un tout autre projet social, écologique et démocratique au cœur même de la production, doit être mis en chantier en maintenant et développant les services publics, condition de la ré-industrialisation. Pour cela le pouvoir doit se donner une stratégie industrielle nationale en coopérant véritablement en Europe. Un tel projet se soucierait de revitaliser les territoires, de réorienter l’argent et le crédit vers l’investissement, la recherche, les PME et les salaires, en finançant les indispensables bifurcations écologiques et des projets de coopération continentale à travers des fonds dédiés, tout en modifiant les critères de gestion des entreprises pour donner aux salariés de nouveaux pouvoirs décisionnels. Il n’y a aucune fatalité à laisser mourir l’industrie si la puissance publique s’en mêle avec les citoyens et les travailleurs eux-mêmes.
2 commentaires
la reindustrialisation passera par un retour au service public ferroviaire marchandises et voyageurs pour assurer un transport massif
économe ènenergie et sur
ils ne savent que détruire au nom des intérêts financiers …