- Views 200
- Likes 0
Le Premier ministre a montré avec morgue comment on peut parler longuement, lors d’un soi-disant « moment de vérité », pour manigancer une grotesque supercherie. Celle-ci appelle une forte réplique populaire.
Retenons d’abord la grossièreté de l’insulte faite aux Françaises et aux Français. Au nom de « sa » vérité, M. Bayrou a exposé un programme à des citoyens qu’ils considèrent comme inconscients tant ils seraient dopés par leur dépendance à l’argent public et à la redistribution sociale. Pourtant, nous étions seulement deux jours après la remise du rapport de la commission d’enquête sénatoriale initié par Fabien Gay, montrant, chiffres – astronomiques – à l’appui, que c’est – au contraire – le grand capital qui suce le sang de toutes les veines des dépenses publiques.
Mieux encore, les salariés français compris au sens large rechigneraient à travailler. Ils auraient trop de congés et ne produisent pas assez. Par-dessus le marché, ils consomment trop de médicaments, se rendent trop chez le médecin, utilisent trop de scanners et de lits d’hôpitaux. Tout ceci entraînant dans une course effrénée, selon M. Bayrou et ses affidés, à l’augmentation de la dette de « 5 000 euros par seconde ».
Soyons francs. Ces déclarations sont plus proches de celles d’un saligaud que celles d’un homme d’État. Ce discours est d’autant plus abject que cet homme a préconisé, soutenu et voté depuis des décennies, les politiques qui ont conduit à la situation que nous connaissons aujourd’hui.
Lui et toutes les variétés de la droite et du social-libéralisme n’ont cessé d’expliquer que les diminutions des impôts de production, les entailles dans le code du travail, les déremboursements de médicaments, les reculs successifs de l’âge de départ à la retraite allaient rendre les entreprises françaises plus compétitives. Lesquelles allaient investir dans les nouvelles technologies pour permettre des gains de productivité. Et, oh miracle, à la fin, les caisses de l’État allaient se remplir.
Le bilan est évidemment le contraire de ces contes capitalistes. La raison en est simple : cette politique n’a jamais été destinée ni à améliorer le sort général des citoyennes et des citoyens, ni la santé du pays et de l’État. Les caisses publiques ont été vidées pour soutenir le capitalisme français, et les marchés financiers avec les intérêts de la dette, la montée en charge des dépenses d’armement depuis plusieurs années.
Bayrou propose d’amplifier cette politique de classe qui dirige de plus en plus de richesses issues du travail vers le capital. Il amplifiera donc le désastre.
Voilà ce qui se cache derrière ce bestial bêlement : « En-avant la production » consistant à supprimer des jours fériés, à réduire encore les droits de l’assurance-chômage, le niveau des retraites et des prestations sociales alors que les prix des produits de première nécessité augmentent.
Loin d’être sous l’emprise de « l’absurdie », le pouvoir branlant amplifie une politique qui enrichit les plus fortunés et appauvrit les plus pauvres.
Le magazine Challenges vient de montrer que l’avoir total des 500 plus grandes fortunes françaises, qui était de 454 milliards d’euros en 2016, est passé à 1228 milliards d’euros en 2024, soit un gain de 774 milliards en une huitaine d’années. Cela représente pas moins de 170 % d’augmentation, soit 100 milliards de plus chaque année. Deux fois le budget de l’éducation nationale.
Ces chiffres démontrent le niveau de la spoliation des richesses du pays. Ils permettent de mesurer l’ampleur du « séparatisme de classe », le niveau de l’atteinte aux valeurs de la République.
Ils doivent être connus, diffusés, expliqués afin de provoquer un véritable sursaut populaire.
Les droites, l’extrême droite et les macronistes, refusent de prendre en compte l’idée d’une taxe dite « Zucman » du nom de son auteur consistant à taxer à 2 % ce que l’on peut baptiser « d’ultra-riches », dès lors que leur patrimoine dépasse 100 millions d’euros. Ils sont 1800 en France. Ils possèdent à eux seuls 1000 milliards d’euros. S’ils étaient taxés à 4 %, cela permettrait une rentrée de 40 milliards d’euros dans les caisses de l’État. Exactement la facture que présente le sinistre Bayrou aux travailleurs alors que le nombre de citoyens tombés dans la pauvreté vient d’augmenter de 650 000.
D’autres ressources financières peuvent être trouvées avec un impôt de solidarité sur la fortune qui pourrait rapporter jusqu’à 15 milliards, la suppression de la fameuse flat tax qui représente 9 milliards, une taxation unitaire contre l’évasion fiscale organisée par les multinationales pour 18 milliards.
Évidemment, le pouvoir et les extrêmes droites s’opposent à de telles orientations de justice.
Seule une grande mobilisation populaire unitaire, déterminée, pourra les y contraindre. Leur malsain refrain sur le « travailler plus » est une insulte à tous les précaires, les privés de travail et ceux qui en ce moment même font face dans l’angoisse à des plans de licenciements dont les mandataires du capital ne disent mot. C’est bien la mondialisation capitaliste, la financiarisation de l’économie, la concurrence « libre et – prétendument – non faussée », « le marché ouvert » et ses traités de libre-échange, que M. Bayrou a soutenu, qui détruisent l’industrie et l’agriculture, malmènent le travail vivant, fracturent nos territoires, déchiquètent des vies, bouchent l’avenir.
Non-content d’avoir manipulé les gens avec son conclave sur les retraites, voici que les deux jours fériés que le gouvernement veut supprimer représentent un nouvel allongement de la durée du travail d’un trimestre supplémentaire sur une carrière complète. En définitive, ils visent la suppression de la cinquième semaine de congé payé.
Au-delà, il convient d’interroger plus fortement la notion rabâchée de « produire plus ». Produire plus de quoi exactement ? Des armes ? Des pesticides ou des médicaments ? Une alimentation de qualité, des soins, des enseignements et des formations ?
Une divergence fondamentale doit être mise à nu, puisque les droites au service du capital ne considèrent pas la production de soins et de formations comme d’indispensables investissements, mais comme des « coûts » inacceptables.
Le travail lui-même est considéré par eux comme un coût, alors qu’aujourd’hui, c’est la rémunération du capital et la fonction de l’État mis au service de ce capital qui constitue le véritable coût.
Loin du discours macroniste sur la dépendance de nos concitoyens à la dépense publique – soit dans ce qui devrait être appelé des investissements sociaux, humains et écologiques -, il convient de rappeler que ceux-ci sont passés de 57,7 % des richesses produites en 2017 à 57,2 % en 2024. Ce mensonge doit être mis au grand jour. Le problème fondamental reste donc bien l’insuffisance des recettes liée aux diminutions des contributions du capital.
Doit-on continuer à laisser le capitalisme et ses fondés de pouvoir dicter la nature et le sens de la production ? Non !
Le pompage permanent des fruits du travail, l’économie basée sur l’exploitation d’énergie carbonée et la surexploitation des métaux rares, la militarisation mènent à la ruine et au risque d’extinction de la civilisation. Seul un mouvement unitaire des travailleuses et des travailleurs pour diriger la production et en étant maîtres de leur travail peut nous sortir de cette pente mortifère. Seule une démocratie poussée jusqu’au bout permettra de décider de la qualité du travail, du chemin de la bifurcation écologique et des nouveaux modes de consommation. Cela induit d’affronter la question de la propriété lucrative qui agit contre les êtres humains et la nature.
C’est un autre projet de société dépassant le capitalisme. Bayrou comme Trump le mettent eux-mêmes à l’ordre du jour. En effet, bien au-delà de la présentation de budget, les dirigeants en France comme aux États-Unis et ailleurs présentent de véritables programmes antisociaux, anti-démocratiques, anti-écologiques, jetant les travailleuses et les travailleurs les uns contre les autres dans une guerre sociale sans fin pour alimenter l’accumulation capitaliste et le risque de plus en plus élevée d’élargissement des guerres militaires. Mandataires des intérêts du grand capital, ils dessinent les contours d’une société qui pousse à la barbarie sous couvert de débats budgétaires présentés comme « raisonnables » ou de « mauvais moment à passer ». Non, ce n’est pas un mauvais moment, c’est une stratégie politique pour faire perdurer un système miné par ses insolubles contradictions. Les dépasser implique de dépasser le système lui-même, jusqu’à l’abolir.
Il n’y a pas de temps à perdre pour mener des campagnes d’explications, des actions unies et pour rassembler toutes celles et ceux qui vont souffrir de cette politique si elle est mise en œuvre. Au-delà, tout ce qui peut être fait pour se réunir et agir avec les comités locaux du Nouveau Front Populaire doit être fait. Il n’y a qu’une à se donner : le changement de politique et de société à préparer sans attendre.
Patrick Le Hyaric
21 juillet 2025
1 commentaire
Le RN n’est pas assez cité
Sans ses votes rien ne passe