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Voilà donc qu’au sommet de l’État, a été organisé une semaine d’agitation des grandes peurs. Les plus hauts responsables de la sécurité intérieure, des armées, dont les fonctions doivent plutôt s’accomplir dans la plus grande discrétion, ont été mobilisés par le président de la République pour catapulter une pédagogie préparant l’acceptation de sacrifices nouveaux et de nouvelles entailles dans les libertés publiques, contre l’accélération du militarisme.
Le terrain était ainsi dégagé pour que, devant un pupitre installé au ministère des armées, le président de la République – qui, soit dit en passant, n’a pas fait son service militaire – revête un rigide costume de chef de guerre. Lui, qui promettait de consulter désormais nos concitoyens – pour tout et rien -, ne consulte même pas le Parlement avant d’annoncer des dizaines de milliards de rallonges budgétaires pour le réarmement et refouler la diplomatie au profit de la politique de la force.
Pour cela, il ordonne à la représentation nationale non seulement de voter une révision à la hausse de la loi de programmation militaire, mais aussi de ne pas voter de censure contre l’attelage gouvernemental branlant de M. Bayrou, chargé de passer le coup de rabot final aux investissements humain. De déclarations en déclarations donc, du sommet de l’OTAN, aux rencontres avec le Premier ministre britannique, le Chancelier allemand et les dirigeants Polonais, la guerre est devenue le projet politique du macronisme décadent.
Le chef de l’État se vante de faire doubler le budget militaire depuis 2015, pour le propulser à 64 milliards d’euros et justifie des augmentations à venir en évoquant la fragilité de l’armée française. Il est indéniable que l’armée française au service de la défense nationale a désormais de multiples « fragilités ». Et pour cause ! Depuis des décennies plus de 10 % du budget militaire a été consacré à l’arme nucléaire au détriment de l’armée conventionnelle et des nouveaux outils indispensables à la défense, alors que nos soldats étaient « projetés » pour mettre de l’ordre dans différents pays en Afrique.
M. Macron propose de poursuivre cette stratégie comme on le voit dans son préoccupant accord avec le Premier ministre britannique, Keir Starmer, dont le pays a de longue date des accords militaires, très particuliers, avec les États-Unis, puisqu’il ne peut utiliser ses armes nucléaires sans autorisation de l’imperium. Par effet de domino notre prétendue « dissuasion nucléaire » sera-t-elle soumise au même sort dans les brouillards produits par les expectorations permanentes du mot « souveraineté ».
Le chef d’état-major des armées, M. Thierry Burkhard a donné deux grandes raisons au surarmement : « La France ne peut pas se désintéresser de l’Afrique, car elle y a des intérêts » et « la Russie constitue une menace d’ici 2030 ».
Autrement dit, la stratégie est double : d’une part, poursuivre le néocolonialisme vers le sud pour permettre aux firmes capitalistes de contrôler des territoires, s’accaparer les ressources du sol et du sous-sol, de l’uranium pour les centrales nucléaires, le pétrole et le gaz alors que l’industrie fossile nous mène chaque jour un peu plus vers l’abîme, ainsi que tous les métaux rares nécessaire aux voitures électriques et aux téléphones portables, pendant que les peuples africains affrontent misère, surexploitation et réchauffement climatique. Une stratégie militariste pour faire perdurer, donc, un capitalisme de prédation.
D’autre part, le réarmement de l’Union européenne répond à la double injonction des États-Unis confirmée au sommet de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) du 25 juin : tenir le flanc Est, pour permettre aux États-Unis de poursuivre l’affrontement avec la Chine et augmenter les budgets militaires pour acheter du matériel nord-américain. En s’inscrivant dans le droit-fil des conclusions de l’OTAN, le président de la République a continué de distordre le sens même de la Fête nationale française, en saisissant cette occasion pour opérer une bascule supplémentaire de l’entreprise majeure de transformation de l’Europe en une sphère d’influence du « nouveau shérif en ville », Trump.
Le couplage de sécurité transatlantique va de pair avec l’achat du matériel américain, comme l’a revendiqué le ministre des affaires étrangères américain Marc Rubio après l’adoption du plan « réarmer l’Europe » qui consacre 800 milliards d’euros. Une industrie d’armement américaine qui fonctionne désormais en couple avec les oligopoles technologiques qui assurent une intégration numérique, prenant de plus en plus la forme d’une camisole de force pour l’Union européenne. Toute arme vendue dans les pays européens est soumise à l’accord du Pentagone et de la Maison-Blanche avant toute utilisation.
Nous sommes ici bien loin de l’Europe de l’armement dont on se vante dans les couloirs de nos palais et ceux de la Commission européenne. Et l’agitation de la menace russe sur l’Europe n’est qu’un leurre pour cacher la guerre que se livrent Occidentaux et Russes, sur le dos du peuple Ukrainien victime d’une guerre de conquête visant soit son arrimage à l’Union européenne ultra-libérale soit son intégration de force au projet d’empire eurasiatique de M. Poutine.
L’objectif de de V. Poutine n’est pas d’envahir l’Europe et la France n’est pas « son ennemi prioritaire » comme le racontent les agitateurs des peurs. Le dessein de Poutine est de reconstruire « l’empire grand-russe » entre la Chine et l’Union européenne pour ouvrir de nouveaux espaces d’exploitation au capitalisme de son pays. Le peuple Ukrainien le paie dans sa chair et par son sang, de mille souffrances et de pertes dans les familles ukrainiennes et russes sous le profitable chantier du commerce des armes qui régalent quelques actionnaires du complexe militaro-industriel-numérique mondial.
M. Macron a expliqué le 13 juillet qu’il escomptait récolter des miettes de cette stratégie pour le capitalisme français, car, a-t-il expliqué, cela relancerait la croissance et améliorerait le produit intérieur brut. Bref, au nom de cette stratégie, il demande à la classe ouvrière et à toutes les travailleuses et travailleurs de se ranger sous le drapeau flétri de « l’union nationale » excluant tout conflit social et politique afin que les puissances industrielles et financières soient libre et soutenues par l’État mis toujours plus au service du transfert vers le grand capital des richesses produite par le travail qui sera encore moins bien rémunéré – et les chômeurs ainsi que les plus démunis de plus en plus privés de leur maigre allocation de subsistance.
L’industrie privatisée de l’armement est aux anges avec ce chef de l’État permettant à notre pays de rester le deuxième exportateur d’armes au monde et faisant fonctionner un capitalisme de guerre à partir de la commande publique qui atteint déjà 22 milliards d’euros.
En affirmant que ces dépenses supplémentaires doivent se faire sans endettement supplémentaire, le chef de l’État confirme implicitement que ce sont les travailleuses et les travailleurs qui verront les cadences accentuées, les salaires bloqués, les allocataires de prestations sociales mis à la diète, les chômeurs moins indemnisés, les services publics, les collectivités locales, les associations asséchées, l’épargne populaire ponctionnée pendant que les entreprises étrangères fournisseuses de matières premières, notamment les semi-conducteurs, et les institutions financières feront leur beurre sur la course à la fabrication d’engins de mort.
Décidément, le capitalisme international et ses petits laquais locaux sont engagés dans une dangereuse course au goût de sueur, de sang et de larmes, rythmée par des bruits de bottes généralisés, au moment même où il faudrait investir pour le développement humain et la stabilisation du climat.
La phrase de M. Macron bombant le torse selon laquelle : « Pour être libre dans ce monde, il faut être craint. Pour être craint, il faut être puissant », dit tout du cynisme et de la brutalité d’un petit homme qui fait rire dans les chancelleries au Burkina Faso, au Congo, au Niger, au Mali, le Tchad, au Sénégal et ailleurs après avoir dû plier bagage sous les crachats de la population, tout en étant incapable ici de financer la construction de Canadair et du matériel nécessaire à la lutte contre les feux de forêt. Nous ne nous en réjouissons pas. Nous avons mal à la France des Lumières, à celle de Jaurès et des résistants communistes et gaullistes.
Cela fait rire aussi à la Maison-Blanche qui, au même moment, nous impose de considérables augmentations des droits de douane, fait fluctuer le dollar pour soutenir le capitalisme nord-américain, alors que l’Union européenne vient d’abandonner le projet de taxation minimale des multinationales et se réjouit que les budgets militaires aillent constituer des transferts conséquents vers l’industrie militaire et numérique états-unienne. A cette heure ce n’est pas Poutine qui menace l’Europe mais bien Trump qui la ponctionne et l’affaiblit.
Des initiatives nouvelles parlementaires, municipales, citoyennes, syndicales sont indispensables pour stopper cette marche en avant vers l’abîme. Le monarque présidentiel devient dangereux.
Il est totalement irresponsable de faire battre les tambours de la guerre, pendant que la diplomatie est sciemment retirée de l’Aventin à Gaza, en Ukraine, en Algérie, au Soudan et en temps d’autres lieux en proie aux conflits et aux guerres.
Nous sommes à ce moment où les travailleuses et les travailleurs, les créateurs et les penseurs doivent bâtir leur unité internationale contre les fauteurs de guerre sociale et militaire.
Nous sommes à ce moment où doit être mis en débat et en actions l’invention de l’après-capitalisme pour éviter que le genre humain ne soit poussé dans le précipice.
Ce moment où travailleuses et travailleurs doivent porter leurs combats unis pour prendre le pouvoir sur les productions et le travail. S’ils en avaient le pouvoir, ils ne choisiraient certainement pas la fabrication des engins de destruction massive, mais des productions pour les œuvres de vie, de protection du climat et de tout le vivant dans un monde de paix, fraternel et du mieux-vivre. Ce combat pour la vie doit être mené.
Patrick Le Hyaric
15 juillet 2025
1 commentaire
On n’ose pas commenter de semblables Lettres qui pour l’essentiel ciblent tellement juste.S’il m’est permis cependant, autant la politique russe est ignoble, et sa rhétorique inaudible, autant je ne vois rien d’essentiel lement différent dans le positionnement ukrainien.Le Président ukrainien a tenu des propos scandaleux devant la Knesset.Banderasupplétif des nazis est un héros ukrainien…..et ne parlons pas du fait qu’il y a autant d’oligarques capitalistes en Ukraine qu’en Russie…..Les deux discours sont pour moi aussi inaudibles l’un que l’autre.Cela dit notre rôle devrait être de tout faire pour arrêter ça…..Ne pas innocenter Poutine n’implique aucune indulgence face à une hystérie belliciste et ultra nationaliste…..Le vrai camp d’un progressiste aujourd’hui c’est une politique de paix et de sécurité collective.