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De nouveaux mots aux odeurs de poudre et de mort sont de plus en plus prononcés par le président de la République et plusieurs gouvernements occidentaux : « économie de guerre », « nous sommes en guerre » a récemment déclaré M. Macron avant d’en appeler à préparer « une guerre d’avance ».
Fou qui banaliserait ces mots qui sifflent comme des missiles. Ils ne racontent pas une fiction, mais témoignent de l’ambiance aride qui règne dans les chancelleries dans le monde. Nous venons de basculer dans une nouvelle période inquiétante, dangereuse, où les puissants de ce monde palabrent sur l’arme atomique comme d’un jouet dont ils peuvent se servir.
Souhaitons que le Parlement, qui commence cette semaine à l’examen de la nouvelle loi de programmation militaire, mesure la tragique portée d’une telle stratégie.
L’inadmissible guerre déclenchée par la Russie de M. Poutine contre l’Ukraine sert ici de prétexte, mais le tournant de ce surarmement mortifère est pris depuis longtemps. Dans ce contexte les mouvements internationaux pour la paix ont été comme paralysés lors du sommet des sept grands pays capitalistes qui s’est tenu en ce lieu emblématique de la ville martyre de Hiroshima. Le président de la Russie qui n’atteint aucun objectif qu’il avait prétendu fixer, aura réussi cette sale besogne : faire taire les pacifistes, réhabiliter l’OTAN et réinstaller les États-Unis en Europe.
L’occident capitaliste, promoteur de la guerre économique, estime à juste titre sa domination sur le monde menacée. Dès lors, il considère que cette domination doit passer non plus par le commerce et la politique, mais par la force.
Il se réarme sous la houlette de l’OTAN sous commandement nord-américain. D’autres grands pays comme la Chine ou l’Inde font de même. Et les tensions intra-capitalistes et inter-impérialistes sèment les germes de guerre tout en aggravant toutes les insécurités humaines : famines, insécurités sociales, sanitaires, alimentaires, bouleversement climatique, migrations décuplées. Au lieu d’être orientées vers les œuvres de vie, et le combat contre les bouleversements climatiques, de colossales sommes d’argent nourrissent la grande industrie d’armement, poussant le monde au bord de l’apocalypse.
C’est dans ce contexte que le chef d’État-Major des armées et le président de la République modifient la doctrine militaire du pays et affaiblissent notre corps diplomatique. On ne parle plus de « défense du territoire », mais de plus en plus de préparation à la « guerre de haute intensité » ou du concept de « guerre avant la guerre ». Jamais il n’est dit contre qui se prépare la guerre, ni pour les objectifs de celle-ci !
Évidemment l’objectif fondamental est de défendre les grands intérêts capitalistes et de désigner la Chine ou peut-être demain l’Afrique comme l’ennemi.
Au lieu de reprendre l’ardu chemin d’une diplomatie de paix, le pouvoir arrime et intègre de plus en plus – sans débat public – la France à la stratégie militaire de l’OTAN, c’est-à-dire à celle des États-Unis, qui sont les grands gagnants de la guerre contre le peuple ukrainien.
Cette intégration va jusqu’à rendre de plus en plus dépendants nos matériels militaires des technologies nord-américaines pendant que plusieurs pays européens achètent déjà des chars, des avions, des missiles aux industriels américains, bien loin des lénifiantes déclarations sur une industrie européenne de défense.
Les industries d’armement combinées à celle du numérique, aux États-Unis notamment, tournent à plein et engrangent des profits records.
Persévérer dans cette stratégie annonce de rudes épreuves pour les peuples. Outre le fait qu’elle étouffe la voix indépendante de la France, qu’elle participe de l’insécurisation du monde, elle va coûter très cher.
La loi de programmation militaire en discussion au Parlement prévoit une dépense de 413 milliards d’euros. C’est une augmentation de 40% par rapport à la précédente. Le budget annuel de la Défense passerait de 43,9 milliards d’euros en 2023 à 69 milliards d’euros d’ici sept ans. Sur quoi sera prise une telle somme ?
Sur les budgets sociaux, ceux de l’école ou de l’hôpital. Plusieurs parlementaires, dont Pierre Laurent et Fabien Roussel, ont demandé un grand débat national sur ces orientations, afin que le peuple puisse donner son avis et décider sur une telle orientation.
De multiples questions sont en effet posées : À quoi sert de dépenser environ 54 milliards d’euros dans la force de frappe nucléaire ? La France ne se grandirait-elle pas en impulsant des discussions mondiales sur la diminution des arsenaux nucléaires déjà capables d’anéantir plusieurs fois la planète ?
Il est urgent de reprendre des discussions sur la non-prolifération nucléaire et un désarmement nucléaire multilatéral. Et, la France devrait s’inscrire, au moins comme membre observateur, dans le processus du traité pour l’interdiction des armes nucléaires (TIAN).
À quoi sert de construire un porte-avions supplémentaire si ce n’est pour se projeter loin de notre territoire ? Quand, un bilan sérieux sera présenté à nos concitoyens sur les « opérations extérieures » de la France, qui se sont toutes mal terminées, et qui nous valent d’être haïs par des peuples avec qui nous sommes historiquement liés ?
Enfin quand reprendra-t-on en France, à l’instar de Jean Jaurès et du général de Gaulle, un débat fructueux sur la nature, les conditions et les moyens d’une véritable défense nationale et sur le lien entre le peuple et la nation, loin des volontés présidentialistes actuelles ?
Ce n’est pas à « une guerre d’avance » qu’il faut se préparer, mais à un combat pour construire une « paix perpétuelle ». Même une paix armée n’est qu’une fausse paix nourrissant de nouvelles guerres. On ne pourra entraîner la nation vers un ambitieux projet de transformation sociale, écologique, démocratique si elle se sent insécurisée, menacée comme l’instille chaque jour la propagande des bellicistes.
Rien n’est plus fort, plus solide, plus prometteur que le grand mariage entre patriotisme et internationalisme. L’inlassable action pour la paix appelle un engagement citoyen pour repenser notre défense nationale et notre diplomatie, tout en imaginant une France progressiste faisant vivre la coopération, la solidarité internationale afin de conquérir enfin une sécurité humaine globale. La France serait bien plus forte si elle appuyait et s’inscrivait dans les initiatives de la Chine, du Brésil, des pays africains et du pape pour rechercher urgemment le chemin d’un cessez-le-feu en Ukraine, puis des discussions pour bâtir un projet de sécurité commune et de désarmement. Les mouvements pour la paix sont plus utiles que jamais.
Patrick Le Hyaric
22 mai 2022
1 commentaire
Bonjour.
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