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Le mensonge est devenu une seconde nature du pouvoir actuel dans l’art de gouverner. On sait comment son argumentaire présentant sa loi des 64 ans comme « une réforme de justice » s’est écroulé comme un château de cartes.
Il n’y a en effet aucune justice à voler deux années de la vie des travailleurs quand la partie lucrative et financière des grandes entreprises et des banques ne finance en rien le bien commun et une complète sécurité sociale des citoyens.
Ajoutons que l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, l’augmentation des rémunérations du travail, un plein emploi effectif permettrait de reprendre la marche en avant du progrès social. C’est de vie humaine, de qualité de la vie dont nous parlons ici. Le pouvoir ment effrontément quand il répète que les forces syndicales et la gauche progressiste n’ont pas présenté de projet alternatif.
Le pouvoir ne ment pas que sur les retraites. Ces dernières semaines sur une multitude de sujets il a développé une culture intensive du mensonge.
Il est désormais établi que l’ajout de nitrites dans les charcuteries provoque chaque année au moins 4300 cancers. Un gouvernement ayant le souci de la santé humaine engagerait sans attendre un processus d’élimination de ces produits cancérigènes incluant la recherche pour un autre mode de production et de conservation des charcuteries.
Cela heurterait à coup sûr les intérêts des quelques géants de la transformation agro-alimentaire qui retirent d’énormes profits de cette production de masse. Alors, pour les protéger le pouvoir a ces derniers jours publié un faux « plan d’action » non contraignant. Les industriels continueront donc à faire ce qu’ils veulent et leur communication servira à nous faire avaler des nitrites lorsque nous mangeons du jambon.
Quelle violence ainsi infligée à quatre-mille-trois-cents personnes atteintes de ce fait d’un cancer. Oui 4300 ! Voilà qui rend encore plus indécents les propos du petit Bonaparte de la place Beauvau sur « l’éco-terrorisme ».
La même opération est à l’œuvre à propos du scandale de l’eau potable dont on parle trop peu. L’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)* a annoncé que plus d’un tiers de l’eau potable consommée en France ne répond pas aux critères de qualité du fait d’un taux trop élevé en pesticides.
Face à cette gravissime information, les propos du ministre de l’Agriculture relèvent d’un comique affligeant : « ces résultats confortent le travail mené par les autorités françaises pour réduire les dépendances des productions agricoles aux produits phytosanitaires ». Ubuesque !
Les mots, ici triturés, servent à cacher le mensonge officiel. Pire, le même ministre sans doute très éloigné de la santé humaine s’est permis de demander à l’Anses de revenir sur sa décision d’interdire le dangereux herbicide : S-métolachrore, classé cancérigène, responsable d’une pollution quasi généralisé des nappes phréatiques.
Il s’agit, de plus ici, d’un non-respect d’une directive européenne interdisant de dépasser 0,1 microgramme de cette substance par litre d’eau. Face à un tel comportement, il est souhaitable que citoyens, associations, collectivités s’organisent pour poursuivre l’État et le ministre pour « carence fautive » et non-respect de la réglementation. Comment qualifier de tels actes que des mots de scandale national. Le pouvoir choisit les profits des multinationales de l’agrochimie avant la santé et l’environnement. Il s’agit pour lui de continuer à soumettre les travailleurs de la terre au capital industriel qui fait aussi peu de cas de ses salariés, des travailleurs paysans, des citoyens-consommateurs, de la santé humaine et animale, tout comme de l’environnement.
Au lieu d’engager un processus de transition de nos modes de production agricole et alimentaire, ils ont choisi de diviser la société, d’opposer travailleurs des champs à ceux des villes et à la jeunesse. À toutes et tous se pose une question : conquérir une souveraineté sur le travail et la production afin de bâtir les conditions d’une sécurité alimentaire de qualité et la préservation de l’environnement.
De même l’enjeu caché des projets de « méga bassines ». Elles provoqueront l’assèchement des nappes phréatiques et donc des cours d’eau au profit de la poursuite d’une privatisation de l’eau pour une industrialisation de l’agriculture, dans laquelle les paysans sont les esclaves des nécessités d’un travail sous rémunéré.
Ce modèle est autant antihumaniste, qu’anti-écologique. Les déploiements de CRS surarmés jusqu’aux dents visent à diviser, à détourner l’attention sur les causes de nos crises et à empêcher de faire société commune pour dépasser ensemble l’ordre mortifère existant.
Nous pourrions prendre d’autres exemples comme ceux de la pêche où l’agitation ministérielle pour la défense du chalutage en haute mer sert à protéger la pêche industrielle au détriment de la pêche artisanale et de la vie de nos petits ports de pêche. Celui de la sobriété énergétique qui s’applique aux familles populaires, alors qu’aucune réglementation pour les panneaux lumineux de publicité n’est appliquée. Et que dire des sempiternelles discussions sur les énergies carbonées lorsque rien n’est dit pour réduire les longues files de camions conduits par des travailleurs prolétarisés, qui encombrent nos routes au détriment du fret ferroviaire en faveur duquel si peu d’efforts sont faits. Sur chaque question le pouvoir tente de brouiller les cartes, de diviser les citoyens entre eux, en mettant en contradiction emploi et environnement, au lieu de mettre en débat un processus neuf de bifurcation des modes de production et de consommation favorable à un nouveau travail intéressant, correctement rémunéré sur lequel les travailleurs seraient souverains.
Il ne le fait pas, car il ne veut pas remettre en cause le capitalisme. Il peut le repeindre en vert pâle sans jamais entamer les injustices sociales et environnementales. Il ne le fait pas, car il devrait lancer une véritable planification démocratique de la transition écologique impossible sans une appropriation publique et sociale des grands moyens de productions et d’échanges. C’est la raison fondamentale pour laquelle le mensonge politique est de plus en plus une arme de gouvernance au service de la minorité. En toute chose la vigilance s’impose donc !
Patrick Le Hyaric
Le 12 avril 2023
*Anses : Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail est un organisme officiel dépendant du gouvernement chargé de l’évaluation des risques et dispose du pouvoir d’autoriser ou non des pesticides.