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Branle-bas de combat. Réunions nocturnes sous les ors du palais de l’Élysée, conférence de presse à Bercy, entretiens aux journaux et télévisions, cris d’alarme en tous genres. Sur fond de guerre et de terrorisme, le pouvoir prépare les esprits à une nouvelle cure d’austérité.
Comme une poule devant un couteau, un beau matin de fin d’hiver, les ministres font mine de découvrir l’ampleur du déficit de l’État. Pourtant, depuis sept ans, le président et son ministre des Finances nous racontent avec aplomb que grâce à eux tout va mieux. Or, leurs choix économiques et les intérêts prioritaires qu’ils servent creusent les déficits et la dette.
Comment ? Deux-cents milliards d’euros de cadeaux fiscaux et sociaux aux grandes entreprises, suppression de l’impôt sur la fortune, 80 milliards d’euros d’évasion fiscale, 40 milliards annuels versés aux institutions financières d’intérêts de la dette.
Bref, au moment où Bruno Le Maire envisage d’affaiblir la sécurité sociale, il assure la « sécurité sociale du grand capital ». Ajoutons la volonté de camoufler le niveau du chômage en développant massivement « l’apprentissage » pour une somme de 20 milliards d’euros, sans effet sur la garantie d’un travail pour chacune et chacun.
Invoquer la non-augmentation des impôts est un mensonge : les impôts indirects, les plus injustes et inégalitaires, ne cessent de progresser alors que les impôts sur le capital sont diminués.
Au nom de la dette que creusent les gouvernements successifs pour servir les puissances d’argent, une attaque en règle est en cours contre les dispositifs de protection des plus démunis comme l’assurance-chômage, l’augmentation du prix des médicaments, la limitation de l’accès à certaines prestations. Les derniers filets de sécurité sont dans l’œil du cyclone gouvernemental. Des millions de concitoyens supplémentaires vont plonger dans la précarité et dans la pauvreté.
La nouvelle étape en préparation est la tentative de détruire notre système de sécurité sociale. C’est le sens de la déclaration de M. Le Maire contre le prétendu « tout gratuit ». Un parti-pris idéologique visant à cacher l’originalité de la sécurité sociale telle qu’elle a été conçue par le ministre communiste Ambroise Croizat : la mutualisation d’une part de la valeur produite par le travail, à partir de cotisations sociales, pour protéger des aléas de la vie. Voilà le projet commun des tenants du pouvoir en alliance avec les droites et l’extrême droite au service des intérêts capitalistes.
Leur objectif est d’ouvrir en grand les portes aux assurances privées tout en diminuant les cotisations des employeurs et en faisant croire aux travailleurs qu’ils pourront augmenter leurs rémunérations par la réduction des cotisations salariales. C’est le moyen d’augmenter les profits du capital, tandis que les travailleurs seront placés dans une insécurité toujours plus grande. Et il est demandé aux collectivités locales déjà en difficulté de réduire leurs moyens et leurs investissements.
Le président de la République ne peut pas dire qu’il a été surpris puisqu’il a été le fer de lance au Conseil européen pour faire adopter – contre la proposition de la Commission européenne – un nouveau pacte d’austérité camouflé derrière le vocable de « pacte de stabilité » qui impose des réductions considérables de crédits publics, dès cette année.
Le mécanisme adopté oblige les États à réduire leurs déficits publics sous peine d’application de sanctions financières automatiques. Il ne s’agit donc pas pour le pouvoir d’une découverte. Il a activement participé à l’instauration de ce nouveau corset de fer contre les travailleurs, les retraités européens et contre les services publics.
Les hausses des taux d’intérêt par la banque centrale européenne aggravent encore la situation et accélèrent le pillage des finances publiques. Le gouvernement lui-même estime que les intérêts de la dette vont atteindre 74 milliards d’euros en 2027.
Autant d’argent qui ira alimenter les marchés financiers contre les besoins pour l’école, la santé, la recherche, la transition énergétique ou la préservation du climat et de la biodiversité impossible sans repenser les transports, le logement, les orientations industrielles et agricoles. Ces choix mènent à la ruine et à une insécurité sociale et environnementale aggravée.
La bonne santé économique du pays et de l’Union européenne passe par une refonte de la fiscalité et du crédit. Plusieurs enquêtes d’opinion montrent qu’une majorité d’Européens souhaitent une taxation des plus fortunée et du capital. La création d’un impôt sur la fortune européen est d’ailleurs évoquée. Selon une enquête Viavoice pour nos confrères de Libération, 65 % des sondés jugent prioritaire de « taxer temporairement les superprofits » Ceux dont M. Le Maire a dit qu’ils n’existaient pas ! L’exigence de justice fiscale n’a pas disparu.
D’autre part, les institutions européennes et le pouvoir ne peuvent persister dans le refus de construire un fonds européen de développement humain, social et écologique quand ils se disent prêts à créer un fond pour soutenir la guerre en Ukraine.
À la militarisation, nous opposons la recherche de la paix par la diplomatie et militons pour orienter l’argent vers le progrès social et écologique. Un fonds de développement humain adossé à la banque centrale européenne, serait en mesure d’absorber une grande partie des dettes des États tout en lançant un grand plan de développement des services publics, en lien avec une planification écologique démocratique.
L’urgence pour les générations futures est de cesser d’accumuler l’inquiétante dette écologique qui menace l’humanité.
Du reste, il n’est nulle part, écrit sauf dans les obscures bibles du capitalisme, que ce sont les marchés financiers qui doivent décider de l’allocation des ressources et des richesses issues du travail. La réappropriation, par les travailleurs et les citoyens, de l’outil de création monétaire que constituent la banque centrale et le système européen des banques, doit être posée avec force.
Les mouvements en cours dans toute l’Europe comme celui réclamant un plan d’urgence pour l’école en Seine-Saint-Denis ou ceux des travailleurs de la santé, des professions de justice, des paysans-travailleurs, des cheminots, des jeunes pour le climat, appellent non pas à réduire les services publics indispensables, mais au contraire à les développer. À refuser donc le pacte d’austérité. Les élections européennes le 9 juin sont une occasion de le dire avec force.
Patrick Le Hyaric
25 mars 2024
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