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Que devient la civilisation lorsque qu’il paraît de plus en plus évident que, les maîtres protégeant les possédants, l’oligarchie mondiale et ses mandataires politiques perpétuent en son nom les pires violences, les pires injustices, répandent la guerre et se moquent des bouleversements climatiques à l’œuvre ?
Des temps de sauvagerie politique
La sauvagerie politique est en marche. Ses effets sautent aux yeux d’Ukraine à Gaza, du Congo au Soudan, transformés en vastes cimetières, en champs de mines et de ruines. Ailleurs, d’immenses broyeuses aux longs couteaux happent tout ce qui peut ressembler à un État social, à l’égalité des droits, au droit international – comme on vient de le voir encore avec les levées de bouclier et les hypocrisies contestant la décision de la Cour pénale internationale (CPI) d’émettre un mandat d’arrêt contre Benyamin Netanyahou pour « crimes contre l’humanité et crimes de guerre ». Les États-Unis, qui se hissent sur le podium des nations bafouant le droit international, n’ont pas hésité à menacer la CPI de sanctions. Ici, Marine Le Pen veut un « État fort », une justice « sans compromis » contre tout voleur de poules et de mobylettes, mais refuse les délibérations de l’instance judiciaire lorsque cela la concerne. La sauvagerie, c’est aussi le refus de la démocratie, la négation du suffrage.
La dramatique banalisation du péril écologique et du péril nucléaire
Faut-il que les classes dominantes et possédantes, mues par leur inextinguible soif d’accumulation des capitaux, aient à ce point perdu toute raison pour ne plus hésiter à manier des allumettes au-dessus des plaques chauffantes du monde ? La semaine dernière, comme pour ne pas éveiller les consciences des dangers qui guettent, les deux terribles maux qui menacent la vie sur Terre ont été traités avec distance, mépris, quand ils n’ont pas été engloutis dans les noirs nuages de la banalité.
Pendant qu’à Bakou, lors de la 29e Conférence pour le climat, une fin de non-recevoir était adressée aux pays du Sud dans leur exigence de soutien dans la lutte contre le réchauffement climatique et ses conséquences, Biden et Poutine sortaient de leurs hangars kaki des missiles aux incommensurables périls. Dans les deux cas, la sauvagerie politique et économique prime sur les voies de la raison et sur les cris des chercheurs de rêves pour la planète bleue.
En effet, les pires menaces qui pèsent sur l’humanité – les bouleversements climatiques, la perte vertigineuse de biodiversité et l’utilisation de la bombe nucléaire – sont de toutes parts dramatiquement banalisées.
La Conférence de Bakou a, sous les applaudissements des oligopoles mondiaux du pétrole et du gaz, viré à la farce et au mépris des peuples du Sud menacés tantôt par les sécheresses détruisant toute possibilité de production alimentaire, tantôt par la montée des eaux pouvant engloutir des îles entières et modifier les rivages de plusieurs pays. Les pays du Nord, qui sont pourtant les premiers responsables des bouleversements climatiques, ont refusé d’engager 1 000 milliards de dollars par an pour les pays du Sud, alors qu’ils consacrent près de 2 450 milliards de dollars à la course aux armements chaque année.
Conflit mondialisé
Pendant ce temps, à quelques encablures de Bakou, le président Poutine évoquait froidement la possible utilisation de la bombe nucléaire en réponse à la folle décision du président Biden de permettre à l’Ukraine d’utiliser des missiles nord-américains (baptisés ATACMS) pour frapper le sol russe en profondeur ; missiles qui ne peuvent être projetés sans les techniciens militaires étatsuniens présents sur le sol ukrainien. Ce faisant, les dirigeants nord-américains sont conscients qu’ils rapprochent le moment où l’agression guerrière de la Russie contre l’Ukraine se transformera en un dangereux conflit plus mondialisé qu’il ne l’est déjà, entre l’Otan et la Russie. M. Poutine n’a d’ailleurs pas tardé à expliquer que la guerre prenait « un caractère mondial », tout en expérimentant contre les populations ukrainiennes un nouveau missile balistique de moyenne portée, conçu pour transporter des ogives nucléaires.
Les complexes militaro-industriels tournent à plein régime, et les populations doivent se serrer de plus en plus la ceinture conformément à « l’économie de guerre » décrétée.
Dans le même temps, encore, la nouvelle batterie de sanctions économiques décidées contre la Russie – non pas dans un but de paix, mais pour faire exister la guerre économique et consolider le grand capital militaire, numérique, financier nord-américain – exacerbe encore les contradictions intracapitalistes dont les peuples européens font de plus en plus les frais.
Dégager la France de ces entreprises de destruction
Parce qu’elle est une puissance nucléaire, membre du Conseil de sécurité de l’ONU, la France devrait être dégagée de ces entreprises de mort et de destruction. Le président Macron, au sens politique titubant, fait le contraire. Au lieu de se démener pour ouvrir des chemins pour la paix, il aligne notre diplomatie sur celle des États-Unis à propos de l’Ukraine. Et avec de fiévreuses nuances, et beaucoup de contorsions, il mêle sa voix aux soutiens du pouvoir criminel d’extrême droite israélien.
À ce moment si critique, la France devrait pourtant, comme elle a su le faire en d’autres temps, agir pour les cessez-le-feu en vue de la paix. Elle doit se déployer pour permettre l’ouverture de processus de négociations incluant un système européen de sécurité commune en dehors de l’Otan, dont l’objectif serait de garantir la sécurité de l’Ukraine comme de la Russie et de tout le continent européen. La France doit reconnaître l’État palestinien et rompre avec le pouvoir israélien tant que celui-ci colonise, annexe les territoires palestiniens, détruit des vies, des hôpitaux et des écoles à Gaza comme au Liban.
Abolir la guerre…
Il est vrai que l’oligarchie capitaliste mondiale trouve son compte à souffler sans discontinuer sur les braises et les flammes qui ravagent une cinquantaine de pays dans le monde. Elle profite aussi de la destruction en cours de la Terre, combinée à la surexploitation des êtres humains et des animaux. Le surarmement et les guerres surpassent l’indispensable souci de ralentir le réchauffement planétaire et de lutter contre la disparition de la biodiversité sur Terre et dans les océans. Abolir la guerre appelle à abolir la guerre économique.
C’est la grande lutte universelle pour la vie qu’il faudrait engager quand les actuels défis portent sur la possibilité d’un anéantissement des fondements de toute vie humaine sur Terre.
Même les progrès généraux des sciences, de la médecine, et la révolution informationnelle qui permettraient de créer les conditions du progrès humain, la préservation d’une nature vivante, sont détournés en leur contraire. Aux États-Unis, c’est le grand capital incarné par E. Musk qui veut démembrer l’État fédéral en utilisant l’intelligence artificielle.
… gagner la paix !
À la sauvagerie politique indispensable au grand capital, faite de divisions et de guerres, de haines, de diffusion des nationalismes et d’excitation des extrêmes droites, de criminalité organisée autour des trafics de drogues, doit répondre une levée unitaire des peuples pour construire l’après capitalisme. Il n’y a pas de paix réelle sans justice. Il n’y a pas de paix sans penser à partir « des communs ». C’est le processus par lequel les travailleurs, les peuples, enfin maîtres de leur destin, pourront gérer les ressources en respectant la nature et les animaux – condition de la prévention des conflits. Les projets humains viseraient ainsi non plus à gagner des guerres, mais à gagner la paix. Cette paix qui est elle-même un bien commun.
Le capitalisme à son stade actuel, avec sa concurrence libre, sa compétitivité, ses taux de croissance des profits, ses privatisations et sa marchandisation de tout contre toute mise en commun, contre les solidarités internationales et la sécurité humaine globale, va aujourd’hui jusqu’à mettre en danger toute vie sur Terre. Contre cette sauvagerie, frappe à la porte le projet d’un monde « des communs », un monde commun possible dans l’invention d’un processus communiste jamais tenté jusque-là.
Transformons les inquiétudes, les pessimismes, les anxiétés en une irrésistible force pour faire vivre, par-delà les frontières, nos communs et la paix. Une force populaire contre la sauvagerie et pour un haut degré de civilisation.
Patrick Le Hyaric
25 novembre 2024
1 commentaire
Qui, depuis l’embargo sur Cuba à la guerre contre la Russie (Poutine achevant la Révolution de 1917). guerre par procuration dont la tâche est l’affaiblissement de celle-ci. Le tournure de cette guerre n’est-il pas un indice. Quant à Israël (souhaité par la branche religieuse US, et le retour du Sauveur) il faut lire “l’ultime retour des barbares” de Fethi Gharbi.
Aujourd’hui, notre connaissance de nos origines et de la faiblesse de plus en plus flagrante des fondements religieux (du christianisme aux croyances en Inde), mythes incroyables qu’on nous apprends dès l’enfance ou en panne de sens à sa vie, le facteur psycho-émotionnel l’emportant à moins d’une prise de conscience débouchant sur une lucidité douloureuse menant à une saine conscience. Il faut lire le livre de Jean-Marie Abgrall, tous manipulés tous manipulateurs.
Puisque la crise climatique qui poindre, nous fait réfléchir sur notre comportement face à la flore et la faune, il faut voir le documentaire: Serengeti, les clefs de notre avenir.
Prendre bonne note de notre condition d’humain dans le continuum qu’a souligné Edgar Morin:
Edgar Morin et le réenchantement des sociétés humaines
Par Emmanuel M. Banywesize
Pages 23 à 39
https://shs.cairn.info/revue-societes-2007-4-page-23?lang=fr
Un extrait:
«« Après Hiroshima et Nagasaki, il a été posé en effet le problème de la morale scientifique. À l’intérieur et à l’extérieur de la science, il a été reposé la question du devenir de la science en tant que phénomène social et surtout en tant que pouvoir apprivoisés et contrôlés, totalement ou presque, par les politiques et les détenteurs des capitaux. Depuis quelques décennies, cette question se pose dans les pays anciennement conquis, colonisés et exploités par l’Occident. Car l’on s’y rend de plus en plus compte que leur conquête, leur domination et leur exploitation ont certes été rendues possibles par les noces de l’armée et de la religion, mais surtout par les sciences au service du capital en expansion. Libératrice, la science classique comportait des possibilités terrifiantes d’asservissement, voire d’anéantissement de l’humanité [3].
L’accroissement scientifique des victoires aura été concomitant à l’accroissement de l’affaiblissement de la protection mythologique et idéologique dont bénéficiait la dignité humaine. Sous la pression du scientisme et de l’État-nation, planificateur des recherches et utilisateur ultime et décisif des résultats scientifiques, l’humanisme anthropologique donné comme le vainqueur de la religion, ou mieux de Dieu, ne cesse de s’effondrer « en un véritable cataclysme idéologique » [4]. Quant à la foi humaniste de conquête et de domination de la nature, elle ne sert désormais plus qu’au camouflage de « la nouvelle maîtrise sur le destin de l’homme » [5] contre laquelle s’élèvent de plus en plus des critiques pertinentes. Le progrès tant chanté par la science classique serait-il chimérique ? »»
Ce n’est pas la science qui est le problème, c’est l’arbitraire que l’homme lui impose, pour preuve le tandem Trump-Musk qui implique bien ce que dit Krishnamurti: tout part de nous. Et plus loin dans le passé: «« Connais-toi toi-même et tu connaîtras l’univers et les dieux »» dit encore la sagesse hermétique. Alors que dans les cas du tandem, il ne s’agit que de leur ridicule projection sur lle monde.
Mais une question demeure. Qu’et-ce qui est en jeu, réellement, à notre époque ?
Dans la suite.