Le despotisme d’usine

le 13 octobre 2022

« Despotisme d’usine ». Voilà comment Karl Marx qualifie la manière dont les forces capitalistes traitent les ouvriers. Nous en avons aujourd’hui un nouvel exemple devant nous.

Les salariés des multinationales Total et Exxon Mobil réclament à juste titre des augmentations de leurs rémunérations à hauteur de l’inflation prévisible. Aussitôt, une cohorte de laquais et de perroquets, qui pour la plupart n’ont guère de soucis de fin de mois et font tout pour empêcher un prélèvement supplémentaire sur les « superprofits », appellent à l’ordre et colportent des mensonges sur de prétendus niveaux de rémunérations que les travailleurs de Total ne touchent évidemment pas.

Selon les coefficients et la qualification, les salaires bruts fluctuent dans l’entreprise du SMIC à 2995,92 €. À cette somme, il faut ajouter des primes pour les salariés qui travaillent en 3/8, week-end end compris, dans des conditions sanitaires difficiles.

Rappelons que les primes ne sont pas prises en compte dans « le salaire continué » au moment de la retraite. Ceux qui poussent des cris d’orfraie et crachent des mensonges, bien au chaud dans des studios de télévision climatisés et au sein de l’union des ministres et parlementaires qui siègent des bancs du parti macroniste jusqu’à l’extrême droite, ne savent évidemment pas de quoi ils parlent.

Surtout, ils veulent à tout prix cacher les faits incontestables qui disent tout du système qu’ils défendent. Total a réalisé un profit de 18 milliards d’euros au premier semestre et vient de verser 2,5 milliards d’euros de dividendes à ses actionnaires. Comment ? Par le génie du PDG ?  Évidemment pas ! Il s’agit d’une rente.

 L’argent leur ruisselle dessus tel un torrent sous le double effet de la spéculation et de la guerre en Ukraine.

Cet argent résultant du travail et soutiré depuis des mois des poches des automobilistes, avec la complicité de l’État qui en prélève sa part.

Ce système, sa loi d’airain, commande de refuser aux salariés une augmentation de 10% tandis que leur PDG reçoit pour seule rémunération (sans compter jetons de présence, actions et autres commodités) 500 000 euros par mois. Oui. Un demi-million d’€ mensuel !

Le travailleur rémunéré 2900 euros ne réclame que 290 euros de mieux. Avec cette somme il ne fera que maintenir son pouvoir d’achat. Et, le pouvoir, qui a milité pour détruire les conventions collectives et les négociations nationales au profit des négociations internes aux entreprises prend, aujourd’hui parti non pas pour l’intérêt général, mais pour un groupe capitaliste privé qui s’enrichit de la force de travail, l’exploitation des sous-sols et des océans, et sur le dos des usagers avec des prix de carburants toujours plus élevés, sans parler des années où le groupe Total est exonéré d’impôts.

Et cette prise de parti en faveur des groupes pétroliers va jusqu’à la décision de réquisitionner les travailleurs pour faire fonctionner les raffineries dont il faut rappeler qu’elles sont… propriété privée.

Voilà donc un pouvoir et des dirigeants de grandes multinationales sur-vitaminés qui font tout pour que durent le conflit et la gêne bien réelle qu’il produit afin d’être en mesure de livrer à la vindicte populaire des travailleurs qui ne réclament que leur dû et font le sacrifice de journées de salaires pour y parvenir.

C’est dire combien obtenir que Total et Exxon passent à la caisse, cette fois pour rémunérer le travail  et non pas pour le ponctionner, devient un enjeu de très grande portée politique.

Nos concitoyens, dans leur grande majorité, ont compris que ces grandes entreprises et leurs actionnaires peuvent payer. Il reste à gagner qu’ils puissent l’exprimer ensemble au nom d’intérêts qui nous concernent tous et toutes. La victoire des salariés en lutte sera celle de tout le monde du travail et de la création.

Cela constituerait pour toutes et tous un atout pour poser, en grand et partout, avec plus de force, la question de la rémunération du travail et de l’emploi.

Voilà ce que ne veulent ni le pouvoir, ni les grandes entreprises.

En combattant ce mouvement, c’est contre tous les travailleurs que se battent les fondés de pouvoir du capitalisme mondialisé. De la même manière, ce même pouvoir transforme l’acte parlementaire le plus important, le vote du budget de la nation en un acte d’autoritarisme en se préparant à utiliser l’article 49.3 de la Constitution.

Nous assistons donc à la poursuite d’une transformation des formes politiques de la domination capitaliste. Les centres de pouvoir politiques et économiques ne parvenant plus, par les moyens du parlementarisme et du présidentialisme, à surmonter les contradictions inhérentes au capitalisme, ils décident comme ailleurs dans le monde une régression structurelle des droits sociaux et démocratiques en alliance plus ou moins affichée avec les forces d’extrême droite.

C’est dire si le mouvement en cours dans les raffineries porte sur de multiples enjeux sociaux, démocratiques et politiques. À nous d’aider à son élargissement contre le « despotisme d’usine » avec les mobilisations nouvelles que proposent les syndicats notamment la CGT, et pour que réussisse dimanche prochain la marche sur Paris, à l’appel de toutes les composantes unies de la Nupes et d’une dizaine d’organisations.

Patrick Le Hyaric, 13 octobre 2022.


4 commentaires


alain harrison 10 novembre 2022 à 19 h 30 min

Pour le salaire, l’emploi…. ce que craint le patronat.

Autrement dit, au sein du système capitaliste: concession sous pression, mais dans le continuum mortifère.

Il est temps de propager, et de la pédagogie sur la Constituante Citoyenne et le Parti Citoyen.
Un premier pas véritable pour actualiser la Démocratie. Et cela reconnu (juridiquement) par la Communauté Internationale au sein de l’ONU.

Mais qu’attendez-vous pour en faire le faire de lance (Liberté, Égalité et Fraternité).

Le siècle des lumières en quasi chevauchement avec la Révolution Française dont l’historique est et a été manipulé.

Il y a la réalité et nos projections.
Seul la vue d’ensemble nous donne accès aux tenants et aboutissants, aux causes et acteurs responsables. Le questionnement aux solutions.

La Constituante Citoyenne
Le Parti Citoyen
La vue d’ensemble

L’économie, quel alternative ?
Pour un monde cohérent.

alain harrison 10 novembre 2022 à 20 h 05 min

Jean Jaurès (le devoir de philos) n’a-t’il pas été claire ?
Mais les gauches s’en tiennent à leur clocher.

Quels sont les obstacles inflexibles et pourtant, paradoxalement, intangible.
M. Friot n’en fait-il pas la démonstration (Salaire, retraite, l’employeur frappe toujours deux fois) ?
Les gauches sont truffées, les citoyens doivent trouver leurs représentants. La FI a été une tentative, mais les gauches se sont braquées. JLM a raté le momentum pédagogique (?) et les autres gauches aussi. Du braquage au continuum de la division de la gauche.

Friot dans son livre, Vaincre Macron, …….., changer l’organisation de la contestation : en finir avec les luttes défensives.

‘analyse du système d’exploitation est faite. Le capitalisme passe à l’automatisation. Il passe à un autre niveau. La gauche versus la vue d’ensemble (pédagogie, mais la gauche rejette cette notion. Quelle en est la raison ?).

alain harrison 10 novembre 2022 à 20 h 31 min

Le dispersement, une erreur fatale. Et le capitalisme avance ses pions, avec cohérence: la mode (60), le clientélisme (cultivé), l’individu entrepreneur, maintenant les start-up, comme exemple. Dans les années 80, la déréglementation nous a mené à la désinstitutionnalisation, et à la monté inexorable des privatisations (système de santé comme exemple).
La crise actuelle (exacerbée) serait-il le nouveau momentum ?

alain harrison 13 novembre 2022 à 7 h 12 min

L’UE dans l’étau US-Ukraine ?

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