Le désarroi de Didier, producteur de lait, et les négociateurs de l’ombre

le 24 août 2010

 

Didier est sans doute le plus important producteur individuel de lait du département du Lot et Garonne. Il produit un million de litres par an. Un millions de litres !  Il aurait sûrement été considéré comme un « gros » producteur il n’y a pas si longtemps dans nos colonnes. Je l’avais rencontré il y a un an, au cœur de la crise du lait. Combatif, il avait participé au lancement de l’association des producteurs de lait, l’APPLI. Sa situation n’a fait que se détériorer à cause des bas prix à la production, alors qu’il était contraint de dépenser de l’argent pour mettre son exploitation aux normes environnementales.

Aujourd’hui, il est au bord de la faillite. Il produit un million de litres de lait mais il a dû demander le  « Revenu de Solidarité Active ». Quelle société que celle qui pousse des travailleurs de la terre, si jeunes, si compétents, si performants, si passionnés par leur métier vers l’abîme, une société où se répand un antihumanisme glacial. D’autant plus glacial et insupportable qu’à quelques heures d’avion de la ferme de Didier des enfants meurent au rythme d’un toutes les cinq secondes parce qu’ils n’ont pas accès au lait. Et le plus scandaleux encore, le plus révoltant est cette lettre qu’a reçu Didier après avoir demandé le RSA. Voici l’extrait principal : « « Suite à votre demande, nous vous informons que Monsieur le Président du Conseil Général vous a ouvert un droit au Revenu de Solidarité Active à compter du 01/06/2010. Le montant mensuel de votre allocation est de 4,57€ pour la période du 01/06/2010 au 30/06/2010. Nous vous adresserons une déclaration trimestrielle RSA à compléter et à nous retourner ». Honteux, scandaleux, révoltant !

Oui, Didier produit un bien alimentaire indispensable à la vie. Non seulement on tolère qu’il perde de l’argent en travaillant, que les banques, renflouées par l’argent public ne lui accordent pas le moindre prêt, qu’il est acculé à la ruine, mais on lui propose, très …. généreusement… 4,57€. Et après cela des biens pensants au compte en banque bien garni s’offusquent d’accès de révolte. Le plus étonnant est qu’il n’y ait pas plus de… révoltes !

Et ce qui est annoncé comme le nouvel accord producteurs-transformateurs-distributeurs de lait est une tromperie, un marché de dupes. Il consiste à augmenter le prix de 10% par rapport au prix de …. l’an passé à la même époque. Comme les prix étaient très bas il y a un an, environ 27 centimes le litre, et qu’en 2008 il était de 38,5 centimes, cela signifie qu’il n’y aura quasiment aucune augmentation de prix à la production. Les prix l’année dernière étaient de 20% inférieurs à 2008. En vérité, le tour de passe-passe revient à un prix du lait abaissé de 10% par rapport à 2008, au moment même où le prix du beurre augmente de 60% et celui de la poudre de lait de 40%.

De plus, le prix du lait français sera indexé sur le prix allemand qui est en moyenne inférieur pour plusieurs raisons : l’Allemagne valorise moins son lait dans des produits à grande valeur ajoutée comme les fromages. Et les coûts de production en Allemagne sont moins élevés parce qu’une grande partie de la production se fait dans de grandes exploitations « industrielles » et les producteurs sont plus aidés qu’en France.

D’ailleurs quand les transformateurs et la grande distribution réclament plus de compétitivité pour notre production laitière, cela veut dire qu’ils souhaitent éliminer encore plus de petits et moyens producteurs et créer de grandes unités industrialisées pour réduire encore les coûts de collecte, que pourtant le consommateur paie.

Il n’y a pas de revenu décent pour un producteur de lait à moins de 350 à 400€ la tonne. Pour l’emploi, la qualité du lait, la vie des territoires, c’est d’un prix minimum de base pour une production moyenne dont ont besoin les producteurs de lait, et non de cette mise en concurrence insupportable.

Pour Didier et tous ses collègues agriculteurs, il faut réagir solidairement. Mais ce sont les Didier des fermes comme François l’ouvrier, Madeleine l’enseignante, Michelle Cadre, Jean-Luc, privé d’emploi, qui doivent s’unir, se solidariser pour changer radicalement la donne.


0 commentaires


lismonde jean 24 août 2010 à 17 h 28 min

Cet article confirme l’opinion que j’ai émise dans ma précédente réponse; les producteurs de lait, comme me semble-t-il les agriculteurs (voir les melons à la déchetterie – on aurait pu les donnes au Secours populaires pour les vacances des enfants par exemple- n’ont pas compris qu’à défaut de sortir de l’économie libérale, ils ont besoin d’un forte régulation qui mettent à la raison les industriels de la commerclalisation des produits agricoles et des transformateurs;
Voila une bonne idée de négociation avec le PS et les Europe ecologie.

René Gomis 30 août 2010 à 19 h 24 min

Les riches agriculteurs éleveurs d’hier, méritent-ils de recevoir une allocation d’aide du RSA de 4,57 euro. Je ne ferai pas l’injure de dire oui! Travailler la terre est un sacerdoce, et les travailleurs de l’agriculture, sont prêt à crever dans leurs champs. Il faut dire quand même que leur autisme a permis, que la France se dote de politique agricole suicidaire depuis prés de quarante ans. Nos gouvernants en exercice, encore aujourd’hui n’ont eu de cesse que de sacrifier notre agriculture, avec la complicité des syndicats majoritaires et l’aval de la grande distribution.
Seul le Mouvement de Défense Familiale(MODEF), dont la presse bien pensante n’oubliait jamais de l’inféoder au Parti Communiste, dénonçait cette politique de casse du Marché Commun,dans un premier temps puis celle de la Constitution Européenne, avec comme objectif final, que notre pays devienne un lieu de consommation, en abandonnant la plupart des productions agricoles.
Le conseil que je donnerai à ces grands propriétaires ou grands fermiers tombés dans la panade, est de faire une volte face de 180° et d’adhérer au MODEF, et dans les prochaines consultations électorales, de voter communiste.
Vous êtes les derniers témoins en exercice, qui subissez de plein fouet la politique néfaste de l’Europe, refusée par 55% des français en 2005, et conscients cette fois que ce ne sont pas les Bolcheviks Français qui vous dépouilleront de vos terres.
Bien au contraire, notre programme encourage la production agricole dans son l’ensemble et relance l’agriculture familiale, qui est la base de notre combat contre la dépendance alimentaire de notre pays.

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