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Photo : Attila Kisbenedek/AFP
Par Patrick Le Hyaric
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La terrible image du petit enfant rejeté par une mer devenue son linceul sur une plage ensoleillée de Turquie a choqué, secoué, bouleversé bien des consciences. Ce déchirant drame humain, ajouté à des milliers d’autres, surpasse tous nos cauchemars. Il appelle à ce que se soulève une vague de solidarité. Déjà, des dirigeants Européens, les Nations-Unies ont commencé à se bouger. Jusqu’où ? Telle est bien la question tant sont nécessaires des actes qui, à la fois, répondent à l’urgence et s’en prennent aux causes profondes d’un mouvement migratoire historique. D’un même élan, devraient s’imposer l’aide et le soutien à celles et ceux contraints à l’exil et la recherche des conditions de la paix et de la justice au Proche et Moyen-Orient, en Afrique, sans quoi tout continuera et empirera ! Tout commence par l’abandon de la politique de la porte close. Devenu le symbole des désastres et des chaos de ce monde, l’enfant noyé s’ajoute aux vingt-cinq-milles personnes -oui 25 000-, l’équivalent de la population de l’une de nos villes moyennes qui, depuis l’année 2000 ont perdu la vie dans les flots de la mer Méditerranée. Il n’avait que quatre ans. Il avait un prénom et un nom : Aylan Kurdi. Pas du tout cette figure de l’envahisseur brandie à droite et à l’extrême-droite depuis des mois et des mois. Il n’aura connu que la peur, le bruit sourd des mortiers aux abords de son petit lit ou dans la cour, quand il essayait de jouer un peu avec ses frères et sœurs ou ses petits voisins. Comme le font des millions d’autres, sa famille cherchait à le mettre à l’abri, le cœur déchiré, loin de chez lui, loin de son pays. La photo de l’enfant se juxtapose à celle d’autres enfants, décapités par les sinistres fascisants de Daech, ou à ces images et ces cris de désespoir dans des gares d’Europe, assaillies par des migrants forcés, demandeurs d’asile, ou à d’autres encore, tentant de franchir des murs de barbelés érigés par des gouvernements convaincus qu’ils garantiront ainsi leur pouvoir. Les institutions européennes, si autoritaires et si violentes pour obliger les peuples à subir leurs froids critères comptables, n’ont-elles rien à exiger du premier ministre Hongrois alors qu’il bafoue la charte européenne des droits fondamentaux ? Tous ces partisans de l’acceptation du traité de Lisbonne qui nous ont tant rebattu les oreilles sur les mérites de la dite charte ont-ils perdu la mémoire ? Qu’ont-ils retenu du salutaire effondrement du mur de Berlin eux qui restent sans voix alors que s’érigent en Europe et ailleurs de nouveaux murs de barbelés, doublés de chiens policiers ? Ah, la fameuse liberté de circulation des marchandises et des capitaux ! Mais, point pour les êtres humains ! Pourtant l’asile est un droit universel, inscrit dans les conventions internationales. Continuateurs des révolutionnaires de 1793, nous lui restons fidèles en proclamant que «Le peuple Français est l’ami et l’allié naturel des peuples libres »… « Il donne asile aux étrangers bannis de leur patrie pour cause de la liberté, il le refuse aux tyrans …. »
Il fut un temps, depuis la fin du dix huitième siècle, où notre main était successivement tendue aux 150 000 juifs russes, aux 700 000 catalans fuyant le franquisme, aux 170 000 vietnamiens ou encore aux dizaines de milliers d’arméniens. Agir pour que les consciences de notre époque s’en inspirent ne tient pas de la nostalgie mais bien, tout simplement, de l’humanité qu’il nous reste à construire.
Inutile de se voiler la face, les mouvements migratoires vont s’intensifier, quels que soient les efforts déployés aujourd’hui pour remédier aux causes du désastre. Le temps long de l’histoire et des mouvements du monde est à l’œuvre. Nous devrons y répondre par le temps long de la détermination et du courage politique. Bien loin du néant politicien en cours. Que vaut le concept de mondialisation s’il exclut la mondialisation des solidarités ? Pour être commun, notre monde devra s’extirper du chaos des guerres, de celui qu’enfante la brutalité de la guerre économique, du pillage les ressources naturelles et celles issues du travail, de cette furieuse guerre qu’aggraverait encore le traité de libre échange transatlantique.
Notre monde devra tout autant se prémunir des dérèglements climatiques dont les conséquences commencent à être palpables, poussant sur les tortueuses routes de l’exode des populations de plus en plus nombreuses.
Citoyens de tous les pays, nos sorts sont liés ! Croire que l’on pourrait être heureux ici dans des océans de malheurs et de drames est un leurre. Désormais toutes et tous ensemble, par delà nos origines, nous devons faire monde commun. Pour cela, il faudra avoir le courage de s’attaquer aux racines des maux du monde, à la loi de la jungle de l’argent-roi, aux divisions et aux concurrences organisées au service de l’ordre capitaliste marchand, aux commerce des armes, à la course aux armes de destruction massive et aux guerres. Toutes nos intelligences et nos forces devraient être mises au service de la reconstruction de l’humanité commune, de la santé à l’éducation, de la souveraineté alimentaire à la satisfaction de tous les besoins humains et à la préservation de la planète. Ce sont de nouveaux ponts qu’il faudrait construire et non plus ces hideux murs de séparation.
La politique devrait conduire d’abord à garantir la survie et la vie de chaque migrant-réfugié. Pour cela il est indispensable de sécuriser sans attendre les couloirs d’accès et d’établir des voies légales d’entrée sur le continent. Un dispositif de sauvetage et d’accueil dans notre mer commune doit être rétabli. L’inepte directive de Dublin doit être abrogée car les pays du pourtour Méditerranéen ne peuvent assumer seuls la charge de l’accueil des réfugiés. Notre universelle humanité commune ne pourra progresser qu’en dépassant les divisions organisées. Celui qui est privé de travail ou de logement ici doit pouvoir y avoir accès sans être mis en compétition ou en opposition avec le réfugié qui lui aussi doit pouvoir bénéficier de tous ses droits humains, dont celui de pouvoir retourner en son pays sécurisé et en paix s’il le souhaite. Est donc posée l’ambition d’un co-développement humain mondial. La France membre du Conseil de sécurité des Nations-Unies devrait se porter à la pointe du combat pour le règlement des conflits au Proche et au Moyen-Orient, avec l’ensemble des puissances mondiales et régionales. Elle doit porter le débat au sein des instances de l’ONU car les Etats-Unis et d’autres puissances, qui ont semé la terreur et la guerre dans cette région, ne peuvent être exonérées de leurs responsabilités. Laisser la mort de nos frères étrangers devenir banale, c’est laisser pousser l’herbe mauvaise de la haine et du repli, du mépris et de l’indifférence avec son lot de substances vénéneuses qui déjà se répandent sur notre continent et en France. Contrairement à ce qui se dit parfois, ce n’est pas l’accueil de l’autre, des « étrangers et nos frères pourtant » qui fera progresser l’extrême-droite et ses idées, mais bien l’inaction, la pagaille et le reniement des belles valeurs humanistes et progressistes. « Quel que soit l’être de chair et de sang qui vient à la vie, s’il a figure d’homme, il porte en lui le droit humain » disait J Jaurès. Nous y restons fidèles. Fidèle à la fraternité humaine.
7 commentaires
Très bien pour cette citation de Jean Jaurès : quel que soit l’être de chair et de sang qui vient à la vie, s’il a figure d’homme, il porte le droit humain :Jean Jaurès a bien dit le droit et non le thème. Or des droites non républicaines authentiques par le fait remplace le droit qu’elles suppriment ainsi le droit par le thème, c’est un crime contre l’Humanité qui délite en tout cas beaucoup de monde. De la même façon, aucun parti de droite ne peut se dire républicain et remplacer à lui seul l’ONU ! Un Républicain a voulu l’ONU et il a eu raison de la vouloir : Charles De Gaulle.
Jamais le Conseil Constitutionnel n’aurait dû faire passer ceci ou cela supprimant le droit humain pour le thème inhumain. C’est avec une pareille escalade que tel ou tel parti entend remplacer l’ONU ! Les personnes qui ont toujours souffert du régime capitaliste en France n’avaient pas besoin d’une telle escalade qui fragilise forcément la construction de l’Union Européenne, et il est ô combien important de dire et de rappeler chaque jour que si des pauvres gens vivant sous le seuil de pauvreté veulent le changement politique réel, ils ne veulent pas la fin de l’Union Européenne ou la fin de l’euro pour un retour en arrière, et pour passer à la monnaie mondiale il faut supplanter l’économie de marché en la faisant devenir en équilibre avec l’économie solidaire et équitable, et ça ce n’est possible que par le développement associatif et il faudrait que les communistes disent qu’ils reviendront sur le système de la retraite pour supprimer le travail forcé de personnes âgées, et donneront plutôt à choisir aux personnes âgées victime une activité associative choisie par elles… Le travail forcé, c’est de la barbarie et il faut y mettre fin partout dans l’Union Européenne, non, non, et non ; au travail forcé de personnes âgées !
Il ne suffit pas d’annoncer que les communistes ont un beau projet régional par exemple si ce projet n’est dénichable pour le lire nulle part, il faut proposer, ou ce sera l’abstention. Les migrations sont des libertés, les libertés sont des droits humains, le Droit doit être bien écrit, c’est dire qu’il ne doit pas être écrit par des clampins qui se réunissent ici ou là et qui se prêtent à ce que le Droit soit remplacé par l’Escroquerie !
Et d’avoir en commun le droit humain, rejoint ce que j’ai dit et écrit : le mot étranger est inepte dans le Droit et doit disparaître, l’Homme n’est pas étranger, seule une chose matérielle peut l’être.
Je ne vois pas le mot « impérialisme » dans cet article. Dommage. Comme pour le soutien inconditionnel à Nettaniahu, il faut pourtant caractériser le crime avant d’espérer le faire cesser.
Oh, je lis « les Etats-Unis et d’autres puissances, qui ont semé la terreur et la guerre dans cette région, ne peuvent être exonérées de leurs responsabilités ». Bon, alors quoi ? On les débusque et on les met au trou, les fauteurs de guerre ?
Même pas.
Ce bel édito de Patrick rate donc un aspect essentiel de la médiatisation mondiale de la mort de l’enfant kurde : alors que nos pays riches sont pour l’essentiel responsables du martyre des syriens (après celui des irakiens, et celui des libyens etc.), alors que l’ingérence française va contribuer à plus de destructions et aggraver l’expulsion de gens du coin, la bien-pensance européenne va se contenter de prendre quelques dizaines de milliers de réfugiés. Puisqu’évidemment on ne peut accueillir toute la misère du monde.
Or Hollande, qui cherche depuis des années à renverser al Assad, a trouvé grâce à Aylan de quoi persuader la France qu’il faut « faire quelquechose ». Voici que sa cible est ouvertement, outre la Daèche, le régime syrien. Celui-là même qui tente depuis 5 ans de repousser les assassins internationaux à l’oeuvre dans son pays, on va non seulement l’ignorer mais le virer !? Sans même s’encombrer d’une résolution du Conseil de Sécurité cette fois, on y va franco en violation des lois internationales. Les terroristes sont instrumentalisés comme cible après avoir été aidés comme rebelles pro démocratie (ne me dites pas que ce ne sont pas les mêmes!).
Un journaliste, même généreux, s’il ignore ce processus, nous fourvoie et nous expose à des répétitions dramatiques de guerres et de spoliations. Et il passe pour un doux rêveur, que les lepénistes vont renvoyer chez les Bisounours, à l’aise.
Bonne fête, l’Huma.
L’asile est un droit humain. Circuler de son pays à un autre et, éventuellement, d’y revenir aussi (art. 13 de la DUDH). “Les discours ont perdu la France” a dit Pétain -quoi que j”en pense par ailleurs-. Un truisme qu’il faudrait aussi appliquer à la majorité des pays de l’UE. La France a toujours ignoré les réfugiés, l’exemple le plus concret est la manière dont elle a accueilli comme des criminels, dans des camps fermés, les réfugiés espagnols fuyant le franquisme. Elle tolère les migrants quand elle les fait venir comme main d’oeuvre manuelle pour ne pas salir ses “cols blancs”, tellement plus fréquentables. Puis les “jette” lorsqu’ils ont “servi”, il n’y a qu’à constater la manière dont elle traite les chabanis pour ne rien dire des supplétifs de l’armée française comme les thaïs ou les harkis. A l’exception des anciens satellites soviétiques, les autres pays européens, malgré une remontée générale de l’extrême droite, ne sont pas aussi intolérants et ne bafouent pas aussi ouvertement les traités internationaux de protection des individus et des enfants. “Les droits de l’Homme et du Citoyen, connais pas” semble être le credo de beaucoup de nos con-citoyens.
Oui, les USA et les pays de l’OTAN en général dont la France est membre ont agi comme des inconscients et ont déstabilisé une partie du monde qui était déjà en équilibre précaire et, pour la plupart, sous la botte de dictateurs.
Mais dire : “c’est la faute à autrui” est une manière commode de se débarrasser de toute culpabilité et, surtout, de toute responsabilité.
A la base et en filigrane de cette tragédie, c’est la convoitise, la rapacité des multinationales et des gouvernements qui est à l’oeuvre pour se saisir des terres, de leurs richesses, de leurs ressources en gaz et pétrole mais aussi en eau pour quelques unes. C’est le capitalisme pur et dur qui en a été le premier facteur et la contre-éducation des peuples au consumérisme élevé au rang de religion qui les incite à rejeter l’étranger, l’autre, qui pourrait (conditionnel) s’installer et, horreur!, il faudrait alors partager les richesses ou leurs miettes.
La Cimade, dont je suis équipière, a une formule magnifique : “Il n’y a pas d’étranger sur la terre”. Il serait peut-être temps que les gouvernants, les élus et surtout les citoyens lambda s’en emparent et s’en persuadent. Y compris vis-à-vis des Européens circulant dans l’espace Schengen tels les Rroms. Ce qui se passe à la Courneuve (avec un maire qui se dit communiste) alors qu’ils fuient les pays des Balkans dans lesquels ils sont persécutés (et ce n’est pas une image) est symptomatique de la mentalité franco-européenne à réformer et transformer.
La mondialisation n’apporte rien aux peuples, car c’est une mondialisation capitaliste, au contraire elle met le désordre et la guerre. Il est urgent de dé-mondialiser, en tout cas c’est mon sentiment et c’est la cause des migrants actuels, il faut prendre le mal à la racine.
Les gouvernements français Sarkozy et Hollande on une grande responsabilité dans la cause de ces migrations qui viennent de l’autre coté de la méditerranée.
La cause est essentiellement le pétrole, mais ça personne n’en parle.
Je partage entièrement qu’il n’y a pas d’hommes étrangers sur la Terre, et la liberté qui peut mener les pas de l’Homme sur une terre d’asile, est un droit humain, n’est pas un sujet de causette et n’est pas un thème politique, les Droits de l’Homme et du Citoyen ne sont pas des thèmes politiques pour des causettes et des fêtes de menteurs pour confisquer les droits humains.
Je me demande ce qui est appelé mondialisation de nos jours tant il y a du désordre et des divisions (le présidents Hollande parle de nostalgiques, de déclinistes, et de “la France qui va bien”, c’est dire qu’il y a au moins trois France ! Et un tel constat doit ressembler à celui d’autres pays. La Poésie, ensemble de toutes les poésies, ce n’est pas de la mondialisation je pense car le mot “mondialisation n’est pas dans mon dictionnaire de poésie ; c’est de l’Universel mais l’Universel n’a jamais été synonyme de Mondialisation puisque la construction universelle du Monde se fait grâce à la République démocratique laïque universaliste qui décide pour sa nation économique propre, et grâce aux institutions mondiales républicaines ; il n’y aucun mondialisme dans tout cela, encore faudrait-il proposer à la population la première vraie République universaliste !Les Hommes perdent un temps fou à ne pas insérer la Poésie et les poètes.
Bonjour.
«« de l’humanité qu’il nous reste à construire. »»
«« Pour cela, il faudra avoir le courage de s’attaquer aux racines des maux du monde, »»
Deux choses s’opposent: l’Humain d’Abord et l’exploitation de l’homme par l’homme.
Faire le diagnostique et appliquer le remède.
À la fête de l’humanité, le temps des choix est-il périmé ?
Continuer à se sabotter ou faire consensus.
La gauche de la dernière chance……