De Gaza à Tel-Aviv, faire vivre l’inconditionnelle humanité

le 7 novembre 2023

Pour qui comme moi s’est rendu à de nombreuses reprises à Gaza et garde en mémoire ces visages de travailleurs ingénieux, de femmes aussi courageuses que souriantes et accueillantes, de jeunes femmes et hommes cultivés et d’enfants agiles dans les allées grouillantes des villes et des camps de réfugiés ou dans les champs, ces visages de créateurs et d’intellectuels aux impressionnantes connaissances, de dévoués responsables d’agence de l’ONU ou d’institutions européennes, la douleur et la tristesse sont immenses, les larmes sans fin, le cœur et les poings serrés.

Aucun crime ne peut réparer un autre crime. Pire, le déluge de fer et de feu, et les flots de sang qui coulent dans les rues, les quartiers, les camps de réfugiés à Gaza finissent par former les couveuses d’intégristes et de terroristes de demain, les incubateurs des tueurs d’après-demain.

Alors que les familles et la société israéliennes enterrent les morts résultant des horribles crimes du Hamas, et attendent dans une indescriptible angoisse des nouvelles des 242 otages détenus par les terroristes, le pouvoir de Tel-Aviv sème à son tour la terreur, la mort, la désolation et le chaos à Gaza. Dans le même temps, cette même armée israélienne protège les colons de Cisjordanie qui, par la force, grignotent hectare après hectare les terres des Palestiniens, accaparent une à une les maisons à Jérusalem-Est. Les paysans et les travailleurs qui s’y opposent sont tués, emprisonnés, déplacés manu militari.

Ce n’est pas un « choc de civilisation » mais, à coup sûr, le choc des barbaries.

C’est l’humanité qui s’étiole. C’est l’humanité qui se fracasse contre les murs de l’intolérance, du viol de plus de quatre cents résolutions des Nations unies. Ce droit qui doit servir à régir les rapports sociaux, à favoriser une vie harmonieuse entre tous les êtres humains au sein des sociétés et du monde, à protéger notre commune humanité. Ce droit international, matrice de la paix.

Il est urgent que toutes les chancelleries du monde, à l’unisson du secrétaire général de l’ONU et du pape François, le rappellent, s’y appuient et le fassent appliquer. Faute de le faire, c’est le droit à l’humanité pour les Palestiniens et les citoyens israéliens qui continuera d’être nié. Cette négation, grosse  de tensions, d’embrasements et de guerres, nous touchera forcément toutes et tous.

Ce n’est pas le « soutien inconditionnel » au pouvoir d’extrême droite israélien qu’il faut promouvoir, mais la défense inconditionnelle de la vie de chaque côté du mur, la défense inconditionnelle de chaque enfant qu’il soit palestinien ou israélien et quelle que soit l’arme pointée sur sa poitrine.

Mesure-t-on la hauteur de la douleur des mamans de Gaza, inscrivant au marqueur les noms de leurs enfants sur leur peau afin qu’ils puissent être identifiés au cas où ils seraient déchiquetés par les bombes israéliennes qui tuent, toutes les dix minutes, un enfant de Gaza.

Mesure-t-on, l’effroyable nouveau drame que vit le réfugié palestinien, repoussé vers le sud de l’enclave, entassé avec ses frères et sœurs d’infortune dans de nouveaux « camps » en toile, alors qu’il ne reverra plus la maison qu’il avait construite de ses mains.

Rendons-nous bien compte ! L’armée israélienne a largué depuis le 7 octobre, 25 000 tonnes d’explosifs sur la bande de Gaza. La propagande répète à l’envi qu’il s’agit « d’éradiquer le Hamas ». Cette même propagande se vante de l’élimination de 15 commandants du groupe fondamentaliste islamiste depuis le début de cette nouvelle guerre. Or, il y a, à l’heure où ces lignes sont écrites, au moins 9 000 morts à Gaza. Autrement dit : le gouvernement d’extrême droite colonial et militaire israélien dirigé par Benjamin Netanyahu tue 600 Palestiniens pour un chef du Hamas.

Pour la propagande, le Palestinien n’a pas de visage, pas de larme, pas d’émotions. Il est un vulgaire chiffre brandi dans de froids communiqués comme  une victoire sur le « mal ». Et le monde entier serait prié de féliciter le colonisateur au risque de se faire qualifier « d’antisémite ». Rien de plus commode pour empêcher tout débat public sensé ! Comme en miroir de l’anti-humanisme du Hamas qui déclare qu’« Israël est un pays qui n’a pas sa place sur notre terre », répond cet autre anti-humanisme du pouvoir israélien dont le ministre de la Défense Yoav Gallant déclare qu’il « combat des animaux humains » et qu’en conséquence, il faut « tout éliminer à Gaza » ; ou encore ces mots d’un haut commandant de son armée expliquant que Gaza « sera une zone de mort ».

Pour parvenir à commettre ces crimes, les dirigeants israéliens plongent Gaza dans le noir absolu, coupent les réseaux de communication et empêchent les journalistes de travailler ou les tuent. Tout comme les crimes du Hamas, tout ceci relève de poursuites devant la Cour pénale internationale. Qui va enfin le dire ?

De fait, Gaza prison à ciel ouvert se transforme en cimetière pour des milliers d’enfants, de femmes et d’hommes qui n’ont rien à voir avec les crimes de guerre du Hamas. Un cimetière sans sépulture. Des morts palestiniennes transformées en chiffres auxquels ne s’ajoutent que des zéros. Enfermées dans cet enclos, sans possibilité d’en sortir, entassées désormais, dans la partie sud, menacées d’être déplacées vers le désert, des milliers de familles entières sont punies de mort. Celles qui survivent manquent du minimum vital : de  nourriture, d’eau, de médicament, d’électricité. Quand l’agence onusienne pour les réfugiés (l’UNRWA) tente de les protéger, ses bâtiments sont détruits comme déjà cinquante d’entre eux. Et, voici que depuis quelques jours, Netanyahou avoue que le but final est un « contrôle –accaparement » total de Gaza.

Les gouvernements du monde, notamment celui des États-Unis, et les institutions européennes ont le devoir de sauver Gaza et d’être aussi fermes dans la dénonciation des crimes de guerre du pouvoir israélien qu’ils le sont à propos de ceux commis par le Hamas. À chaque moment, à chaque déclaration, à chaque initiative, ils devraient avoir à l’esprit qu’il y a là-bas un occupant et un occupé, un colonisateur et un colonisé. Ils ne peuvent sans cesse parler de crimes de guerre en Ukraine et ne pas voir ceux commis par l’armée israélienne. Ils devraient lire les rapports des experts indépendants et les avertissements qualifiant cette insupportable réalité de « génocide ».

Ils ont le pouvoir de faire cesser ce massacre, en cessant de financer les efforts de guerre et les technologies israéliennes. L’Union européenne peut immédiatement rompre l’accord d’association qui l’unit à Tel-Aviv. Avec le secrétaire général de l’ONU et le pape qui multiplient les appels à la paix, ils peuvent activer la résolution 377 de l’ONU, votée le 3 novembre 1950, donnant pouvoir à l’Assemblée générale pour la résolution des conflits et la résolution du Sommet mondial des chefs d’État votée en 2005 invoquant la « responsabilité de protéger* ». La Chine vient de faire savoir sa disponibilité pour coopérer à une issue de paix.

Ce n’est pas seulement de « trêve humanitaire » ou de « conférence humanitaire », sorte de morphine injectée à un agonisant dont la Palestine a besoin, mais d’un cessez-le-feu combiné à l’envoi d’une mission de Casques bleus pour protéger les Palestiniens, étant entendu qu’Israël dispose d’une armée pour protéger sa population. Ces efforts diplomatiques doivent aussi engager les pays arabes, notamment l’Égypte et le Qatar, pour la libération des otages israéliens dont on doit souligner que nombre d’entre eux sont des militants de la paix et de la coexistence entre deux États.

La mobilisation populaire mondiale commence à faire bouger certaines lignes aux États-Unis et en France où on arrive désormais à prononcer les mots de « cessez-le-feu » et de « solutions à deux États ».

Raison de plus pour amplifier les prises de position et actions en faveur de la paix et pour la reconnaissance d’un État palestinien viable dans les frontières de 1967, aux côtés de l’État d’Israël.

Loin des éructations des philosophes de plateaux, des commentateurs professionnels aussi creux que confusionnistes et que la pensée complexe a quittés pour la propagande « inconditionnelle » à l’inexistant « droit de se venger », le mouvement mondial en cours peut aider les peuples palestinien et israélien à dégager l’issue positive consacrée par le droit international : vivre côte à côte en sécurité et en paix, en rejetant l’un et l’autre tout projet de pouvoir théocratique. Le chemin pour les deux peuples est d’impulser un processus démocratique et progressiste.

Quand les travailleurs israéliens doivent payer un lourd tribut à l’effort de guerre alors que les travailleurs et les femmes de Palestine ont besoin de devenir souverains sur leur terre, leurs intérêts peuvent converger.

Pour les deux peuples, pour l’ensemble du Proche-Orient, il est temps d’assécher les rivières de sang et de haine, et d’ouvrir de nouveaux chemins d’humanité.

La libération des prisonniers politiques palestiniens, la libération de Marwan Barghouti constituerait un pas décisif vers la liberté de toutes et de tous, vers l’harmonie, une nouvelle vie démocratique tout en marchant sur les sentiers de la paix. Moyen décisif aussi pour empêcher l’embrasement général.

N’en déplaise aux faux spécialistes en commerce extérieur : le conflit ne s’importe pas ! Nous sommes toutes et tous concernés par la paix mondiale et « l’inconditionnelle » humanité.

Patrick Le Hyaric

6 novembre 2023

*La responsabilité de protéger vise à mettre fin aux pires formes de violence et de persécution. Elle a pour objet d’en finir avec le décalage existant entre les obligations des États membres, en vertu du droit international humanitaire et des droits humains, et la réalité vécue par des populations victimes de risques de génocide, de crimes de guerre, de nettoyage ethnique et de crimes contre l’humanité.


4 commentaires


Guini 13 novembre 2023 à 22 h 25 min

la lettre est précise et claire. Crime de guerre, génocide, crime contre l’humanité sur ordre et pouvoir du gouvernement d’extrême droite aux yeux de l’opinion publique internationale responsabilise sans distinction le peuple israélien. Juif pas juif égal israélien égal humain d’ici et d’ailleurs. Les confessions ne sont qu’apparat fastueux des propagateurs de l’obscurité exploiteurs de la misère humaine …..sabre et goupillon ….pas nouveau et pépite pépite….

Alain Harrison 14 novembre 2023 à 2 h 34 min

Utilisation de bombe (s) au phosphore blanc ??

Une enquête !

Alain Harrison 14 novembre 2023 à 7 h 53 min

Nos médiats occidentaux ignorent systématiquement les aises provenant de pays d’Amérique latine (les aides de Cuba en matière de médecins _ Italie, COVID _ par exemple), Aujourd’hui:

«« Autre mouvement social d’envergure et qui ne se contente pas de mots, le Mouvement des Sans Terre du Brésil (MST), qui vient d’envoyer deux tonnes de nourriture de sa production aux habitant(e)s de Gaza. La cargaison de riz, de farine de maïs et de lait en poudre a été transportée par un avion de l’armée de l’air brésilienne. Le Mouvement enverra au total 100 tonnes de nourriture, avec le soutien du gouvernement Lula. La dirigeante nationale des Sans Terre Cassia Bechara souligne l’importance de la solidarité avec le peuple palestinien : « Les personnes qui ne meurent pas des bombardements risquent fort de mourir de faim, de manque d’eau potable, de manque de nourriture, ce qui explique l’urgence de cette actions. Depuis le 21 octobre, l’aide humanitaire arrive par la frontière égyptienne, mais l’ONU et les organisations travaillant à Gaza font savoir que le volume est devenu nettement insuffisant, ne passe plus qu’au compte-goutte. C’est pourquoi nous devons exiger un cessez-le-feu et garantir les moyens de la solidarité avec le peuple de Gaza. ». Le 3 novembre un autre mouvement social, le Mouvement de Travailleurs de l’économie informelle de Buenos Aires, a annoncé avoir collecté 10 tonnes de nourriture pour les envoyer au peuple de Gaza avec l’appui du Ministère des Affaires Étrangères argentin et du Croissant Rouge Égyptien. »»

L’AMÉRIQUE LATINE FACE AU GÉNOCIDE DU PEUPLE PALESTINIEN
Venezuela Info WordPress

Les US non seulement font des blocus, mais aussi commande les info, qu’est-ce que les médiats ont ou n’ont pas le droit de publier !
Et tous obéissent à l’unisson.

M. Le Hyaric, continuez votre travail pour la vérité.

Le texte ” l’ultime retour des barbares ” _ Fethi Gharbi donne une explication de la situation actuelle, dont le conflit Israélien-palestinien. Mais, qu’est-ce qui a provoqué l’intervention russe en Ukraine ) 2014 et un autre massacre ?

Commnt la terre d’Israël fut inventée, selon Shlomo Sand
Pierre STAMBUL

Comment la terre d’Israël fut inventée !« Dans la guerre israélo-palestienne, il y a un aspect qu’il ne faut jamais mésestimer. Le sionisme a opéré une gigantesque manipulation de l’histoire, de la mémoire et des identités juives. C’est cette manipulation qui permet l’adhésion majoritaire des Juifs (aussi bien en Israël que dans le reste du monde) à un projet colonialiste et militariste qui détruit chaque jour un peu plus la Palestine et généralise l’apartheid. » Pierre Stambul, dans le texte (…)

Comment fut inventé le peuple juif
Shlomo SAND

Déconstruction d’une histoire mythique. Les Juifs forment-ils un peuple ? A cette question ancienne, un historien israélien apporte une réponse nouvelle. Contrairement à l’idée reçue, la diaspora ne naquit pas de l’expulsion des Hébreux de Palestine, mais de conversions successives en Afrique du Nord, en Europe du Sud et au Proche-Orient. Voilà qui ébranle un des fondements de la pensée sioniste, celui qui voudrait que les Juifs soient les descendants du royaume de David et non – à Dieu ne plaise ! – (…)

Ne pouvons-nous pas réfléchir sur l’influence de la préhistoire sur l’émergence des civilisations et les constructions culturelles ainsi que les identités qui perdurent aujourd’hui ?

Les vieux conflits persistent. Pourquoi ?
Le processus d’identification au passé non assumé, non intégré mais continuellement instrumentalisé pour exacerber les identités qui tendent à se scléroser * !

On le voit à travers les discours des conflits: ce sont des animaux, des sous-hommes et d’autres formules de la part de dirigeants et d’autres personnalités en vue.

* être sclérosé
S’altérer, se durcir sous l’effet de la sclérose : Tissu qui se sclérose.
Perdre toute capacité de réagir à des situations nouvelles : Une direction qui se sclérose.
Synonymes : se fossiliser – se momifier – s’encroûter (familier) – s’engourdir.

Krishnamurti: réaction du passé face à la nouveauté, au présent.

J.-M. Abgrall : réaction conditionnée.

Sur le plan biblique: prophétie auto-réalisé (voir les évangélistes)

Évangélistes:

Le sionisme chrétien est un courant chrétien selon lequel la création de l’État d’Israël en 1948 est en accord avec les prophéties bibliques et prépare le retour de Jésus comme Christ en gloire de l’Apocalypse.

Cette croyance se distingue du soutien apporté par d’autres chrétiens à Israël et au sionisme pour des raisons autres que religieuses. Par sa compréhension biblique littérale du sujet, elle se distingue également du caractère « non religieux » du sionisme. Les évangéliques considèrent que l’existence même de l’État d’Israël ramènera Jésus sur terre, le fera définitivement reconnaître comme Messie et assurera le triomphe de Dieu sur les forces du mal, pendant que le peuple juif se convertira au christianisme.

Le sionisme chrétien s’est progressivement développé aux États-Unis, où il est devenu une composante de la droite évangélique et bénéficie de la bienveillance du conservatisme sociétal.

Wikipédia

Pour ma part:
Le méta-conditionnement ou conditionnement historique (culture fermé au questionnement et à la connaissance actuelle du Monde), le dénie de l’Évolution Naturelle ou instrumentalisation biaisé de celle-ci. Encore! des formules du genre: les voies de dieu sont impénétrables !

Alain Harrison 21 novembre 2023 à 8 h 32 min

Les femmes sont la voie de l’avenir. Un exemple d’Amérique Latine:

VENEZUELA : UNE ARMÉE DE FEMMES CONSTRUIT LA RÉVOLUTION DU LOGEMENT
10 mars 2023
Communauté et autosuffisance
Alors que leurs maisons sont sur le point d’être achevées, les hommes et les femmes de l’Assemblée du logement de l’aumônier Jorge Rodríguez veulent devenir les garants de la poursuite de la Grande mission logement du Venezuela en aidant d’autres constructions de logements autogérés à démarrer.

Ils ne vendent pas non plus de la poudre aux yeux. Elles ont été certifiées par des architectes et des ingénieurs qui ont inspecté le site et certaines d’entre elles, dont les dirigeantes Ircedia Boada et Ayari Rojas, ont même obtenu des diplômes dans leurs domaines de spécialisation respectifs.

« Transmettre notre savoir aidera davantage de femmes à s’autonomiser, à construire leur maison et à améliorer leur vie. Avant Chávez, les femmes étaient invisibles, même les héroïnes qui se sont battues pour la liberté de notre pays. Il est temps de libérer les héroïnes que nous portons dans notre sang », a déclaré Boada.

Un autre plan d’avenir est le développement de l’agriculture urbaine, conformément à l’ordre de Chávez selon lequel les organisations du pouvoir populaire doivent être autosuffisantes et posséder les moyens de production. Alors que le Venezuela est soumis à une agression impérialiste constante, ces initiatives de production autogérées ont vu le jour dans tout le pays, mais surtout dans les communes rural.

Source originale: VenezuelaAnalysis

Autrice : Andreína Chávez Alava

Traduit de l’anglais par Bernard Tornare

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