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Les silences officiels autour du 230e anniversaire de la Révolution française en disent long. L’écho de cet événement fondateur serait-il à ce point dérangeant qu’il faille l’étouffer dans le bruit rituel des Rafale, des parades militaires et le retour des casernes pour nos jeunes ?
Le spectre révolutionnaire, que M. Macron aura contribué à ranimer, tourmente bel et bien notre époque. Face à lui se retrouvent libéraux et nationalistes dans la méfiance ou l’aversion des principes de fraternité, d’égalité et de liberté et, au fond, de toute forme d’émancipation individuelle et collective.
Évoquer ou mettre en débat l’héritage révolutionnaire devient dès lors un acte politique. Et l’on comprend aisément que l’actuel pouvoir refuse de s’y engager, sauf à rappeler à ses dépens que, depuis la prise la Bastille, le peuple s’est érigé en seul souverain contre quiconque prétendrait lui dicter sa conduite.
Qu’y a-t-il aujourd’hui de plus actuel que la souveraineté populaire quand les États détruisent un à un tous les conquis sociaux en donnant carte blanche aux entreprises transnationales qui se développent à l’ombre des traités de libre-échange contre l’intérêt général humain et environnemental ; quand le droit des affaires supplante la loi souverainement définie grâce à des tribunaux d’arbitrage privés ; quand la démocratie représentative s’abîme dans un désaveu massif ; quand le capital s’efforce à défaire tous les cadres d’expression et de délibération démocratiques, ne rechignant plus à saborder les droits et libertés ? La préservation de la civilisation humaine place à l’ordre du jour le post-capitalisme ouvrant la voie à un monde nouveau de partage des savoirs, des avoirs, des pouvoirs, et de protection de l’environnement : un communisme à inventer.
Les partis du consensus capitaliste ont, chacun leur tour ou en coalition, créé les conditions d’un affaiblissement des nations au profit du capital mondialisé. Les multinationales du numérique vont désormais jusqu’à vouloir créer leur propre monnaie et leurs propres tribunaux pour supplanter les États et organiser à leur avantage la vie sociale. Cet affaiblissement des nations, ces « associations politiques » selon Robespierre, est une condition de la dépossession démocratique et du pillage systématisé du travail humain et de la nature. La nation n’est pas un principe figé. Elle n’en reste pas moins aujourd’hui un héritage vivant et un outil puissant pour créer les conditions d’une nouvelle révolution sociale, démocratique et écologique.
« Il n’est de révolution que sociale », écrivait le grand historien Albert Soboul. Celle qui frappe à la porte devrait mettre en procès la propriété capitaliste, et porter l’enjeu de la propriété sociale et publique, un nouvel âge de la démocratie, des libertés et du rapport à la nature.
C’est ainsi qu’un projet internationaliste pourrait émerger pour favoriser des coopérations européennes et mondiales, de nouveaux modes de production, d’échange, de consommation démocratiquement définis, permettant aux êtres humains d’affronter ensemble les immenses défis de notre temps : d’une rémunération juste du travail aux protections sociales tout au long de la vie, de l’éducation à l’émancipation des femmes, du climat à la paix, de l’alimentation à la santé, du numérique aux migrations mondiales.
1789 a mis l’abolition de la monarchie à l’ordre du jour. Le monde en fut ébranlé. Poursuivre l’œuvre révolutionnaire en 2019 commande de travailler au dépassement d’un système capitaliste aussi dangereux qu’inapte à répondre aux besoins humains et écologiques. La nécessité d’une « évolution révolutionnaire », pour reprendre les mots de Marx, chemine dans les consciences. À chacun d’entre nous de la faire collectivement advenir.
3 commentaires
Bien évidemment. On se rappelle aussi la chanson de Jean Ferrat sur le Bicentenaire. Et en cette période de Gilets Jaunes, il y a beaucoup de choses à ne pas rappeler au “bas peuple” qui l’encouragerait dans sa lutte contre les despotismes et monarchiesi de tous acabits, et démontrant son rôle moteur dans,l’histoire si minimise et vilipendé au quotidien dans les médias “grand public”….
Gilet jaune
Merci Patrick Le Hyaric pour ce rappel nécessaire, devant le silence politique et médiatique.. et dans une période troublée par des mouvements qui restent sans réponse, tels les urgences hospitalières, les pompiers maintenant, et tout cette triste actualité.