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M. Attal vient de lancer une nouvelle opération de diversion. Derrière son site baptisé « en avoir pour ses impôts », le bon ministre nous parle de « coûts ». Coûts de scolarisation d’un lycéen, coûts d’un accouchement, dépenses de santé. Il s’agit d’un élément de la guerre idéologique contre les travailleurs et les citoyens. Les conditions d’accès à l’éducation, à la santé, à la justice pour toutes et tous, n’ont rien à voir avec des « coûts » toujours présentés comme insupportables. Il s’agit de notre vie en commun, du ciment de nos destins communs, de réparation d’une partie des inégalités que crée le système. Ajoutons que le financement de l’éducation ou des infrastructures augmente la productivité du travail social.
L’initiative de M. Attal, vise une nouvelle fois à culpabiliser les travailleurs, à les diviser. Elle veut faire croire que les couches moyennes paieraient pour les plus démunis qui en apparence seraient exonérés d’impôts. Or, ces derniers paient les impôts les plus injustes qui soient : les impôts indirects, particulièrement la TVA et les taxes sur les carburants que chaque citoyen, riche ou pauvre acquitte sans même le savoir. Ainsi, les augmentations de prix dans les supermarchés ou à la pompe à carburant permettent d’augmenter les recettes fiscales dans des proportions de plus en plus importantes. Désormais, les recettes de la seule TVA représentent 35 % des recettes du budget de l’État, soit 102 milliards d’euros, alors que celles de l’impôt sur le revenu sont descendues à 23,8 %, soit 86,8 milliards, l’impôt sur les sociétés rapportant 58,9 milliards et les taxes sur les produits énergétiques 17,9 milliards, alors que les rentrées de l’impôt sur la fortune immobilière se sont effondrées aux alentours de 1,5 milliard d’euros. Autrement dit derrière la propagande permanente du pouvoir autour des « baisses d’impôts » nous assistons à un transfert des impôts dits de production (ou sur le capital) vers les impôts de consommation comme la TVA. Le pouvoir accentue donc l’injustice fiscale au détriment de celles et ceux qui vivent déjà le plus difficilement. Pour tenter de culpabiliser les citoyens et de les diviser, le site gouvernemental ne dit rien sur quelques enjeux essentiels. Par exemple, combien pourrait-on construire d’écoles, de crèches, d’hôpitaux si on asséchait l’évasion fiscale ? Combien pourrait-on embaucher d’enseignants, d’infirmières, d’agents de propreté, de conducteurs de trains, de magistrats et de greffiers, de surveillants de prison ou de policiers, d’aides à domicile ou dans les maisons de retraite avec les énormes sommes octroyées aux entreprises ? 157 milliards soit le tiers du budget national. Une manne qui a augmenté de plus de 30 milliards d’euros en moins de vingt ans sans que la France ne recouvre sa souveraineté agricole ou industrielle, sans que ses services publics s’améliorent, sans une articulation de la reconquête et de la transformation de notre appareil productif avec l’indispensable transition écologique. Bien au contraire. Les pouvoirs successifs assurent la sécurité sociale du capital au détriment de la sécurité sociale du travail et des retraites. Le travailleur est spolié deux fois dans son mois : une première fois, en n’étant pas rémunéré à hauteur de son dur labeur. Une seconde en étant lourdement ponctionné avec les impôts indirects dont une partie est restituée au grand capital. La part des aides publiques comparée aux richesses produites augmente de 7,2 % par an, alors que ces mêmes richesses ne progressent que de 1,5 %. C’est là qu’il faut rechercher une part des difficultés du pays alors que les taux de profits et les versements de dividendes ne cessent de progresser, alimentés par ces aides publiques sans contrepartie. Ajoutons qu’une partie de ces prélèvements servent à nourrir les marchés financiers, les institutions financières, prêteurs qui prélèvent désormais plus de 50 milliards d’euros au titre des intérêts de la dette. Cette somme est presque aussi importante que le budget de l’éducation nationale.
C’est au nom de ces choix que le pouvoir et le grand patronat sont en campagne permanente pour « compresser les dépenses publiques ». C’est ce que prépare M. Attal avec son site. Il est lancé la même semaine où le gouvernement français expédie à la Commission de Bruxelles son programme dit « de stabilité », soit la préparation d’un nouveau programme d’austérité. Il comprend la réduction de ce qu’ils appellent « la dépense publique », c’est-à-dire les crédits sociaux destinés aux services et à la fonction publique. L’empressement du pouvoir de mener son coup de force pour reculer l’âge de la retraite s’explique par sa décision d’inscrire les économies escomptées par cette loi dans sa trajectoire des finances publiques postée aux autorités de Bruxelles. Ils n’ont évidemment pas choisi de réduire les cadeaux aux puissances d’argent ou d’obtenir de nouvelles recettes en luttant contre l’évasion fiscale. Pour les fondés de pouvoir du capital, un accouchement ou un lycéen est une dépense, tandis que les cadeaux fiscaux et sociaux aux grandes entreprises sont des investissements prétendument « productifs ».
Que M. Attal nous dise ce que l’on pourrait faire avec 157 milliards de cadeaux aux entreprises, avec 80 milliards d’évasion fiscale, 50 milliards d’intérêts de la dette, avec l’augmentation des dépenses d’armements sans parler de la rémunération des différents cabinets de conseils qui hantent les allées du pouvoir. La caste capitaliste toute tremblante vient d’adresser un avertissement à ses fondés de pouvoir. L’agence de notation financière Fitch dégrade la note de la France de AA à AA-.
Pas de quoi fouetter un chat en apparence. Pourtant, ceci constitue un fait d’importance. L’avertissement n’est pas expédié d’une agence basée aux États-Unis, mais des beaux quartiers de Paris, à deux pas de l’Élysée. Cette agence est détenue par M. Ladreit de Lacharrière, tête de pont du capitalisme français qui fait pression pour que le président de la République ne cède en rien, y compris sur le programme de « réduction des dépenses publiques » en projet, et sur la baisse des impôts – sur le capital et les plus fortunés bien sûr. C’est aussi un appel pour que les autorités européennes ne relâchent pas la pression sur notre pays. Sous couvert de transparence M. Attal organise donc la diversion et la culpabilisation des classes populaires. Celles qui depuis des mois relèvent la tête. Ce mouvement qui vient encore de se fortifier à l’occasion du 1er mai ne va pas se relâcher. En s’alimentant de propositions dont celle d’une révolution fiscale, d’un programme progressiste de progrès social, démocratique et écologiste constituant une alternative neuve il peut trouver un débouché politique positif.
Patrick Le Hyaric
2 mai 2023
2 commentaires
Bravo pour cette information. Faites en un pamphlet à distribuer dans les manifs.
Comprendre que le problème structurel est le système économique et non l’État, qui doit être le gardien des évolutions sociales (les acquis).
Ne laissons pas s’éteindre le Siècle des Lumières.
Ne laissons pas détruire les avancés de la Révolution Française (Liberté , Égalité , Fraternité).Donnons Vie à ce que réclamait Jean Jaurès (pour Jean Jaurès ….).