Sauver la génération Covid

le 29 juillet 2020

L’éditorial de L’Humanité Dimanche du 30 juillet – par Patrick Le Hyaric.

La raison non seulement voudrait qu’on mette définitivement au placard la contre-réforme des retraites mais aussi qu’on revienne à la retraite à 60 ans pour permettre aux centaines de milliers de jeunes en âge de travailler de remplacer celles et ceux qui auraient droit à une retraite bien méritée. De même, une réelle diminution du temps de travail hebdomadaire permettrait de créer des centaines de milliers d’emploi. Les crédits publics qui viennent en aide aux grandes sociétés devraient être conditionnés à cette nécessité : faire de la place aux jeunes. Ce n’est pas le choix du pouvoir qui, derrière son projet « un jeune, une solution », utilise la pandémie pour accentuer encore le reformatage du droit du travail tout en faisant bénéficier les entreprises d’un nouveau cadeau royal.

Le premier ministre ne s’en est pas caché, promettant « un dispositif exceptionnel de réduction des coûts du travail ». De fait, le pouvoir utilise la situation pour exonérer les employeurs de cotisations sociales pour toute embauche temporaire d’un jeune jusqu’à la valeur de deux SMIC. Cela fait plus de quatre décennies que ces recettes sont appliquées. Résultat : le chômage, la précarité, les inégalités augmentent à la vitesse d’un cheval au galop et les actionnaires se régalent. En vérité, le pouvoir et ses soutiens veulent profiter de l’angoisse et de la peur qu’engendre la crise sanitaire pour faire des jeunes des appendices corvéables de la machine et des pions du grand patronat. Pas un jour ne passe sans que celui-ci ne réclame la réduction de la dépense publique. Voici pourtant que, dans le plan gouvernemental, l’Etat prendra en charge la valeur des cotisations ainsi perdues pour les caisses de protection sociale. Autrement dit, ceux qui n’ont pas de mots assez durs contre l’emploi public, inventent le financement public de l’emploi privé !

Le grand patronat va utiliser ce dispositif comme un effet d’aubaine pour toucher des subventions publiques et accentuer la concurrence en vue de diminuer les rémunérations du travail. La jeunesse devient ainsi le nouveau terrain d’expérimentation du remodelage capitaliste par la mise en concurrence exacerbée entre travailleurs expérimentés et jeunes entrant dans les entreprises. Cette division sera d’autant plus accentuée que la contre-réforme scélérate de l’assurance chômage empêche chaque jeune qui n’a pas travaillé continûment durant six mois d’être indemnisé.

Le conditionnement à une activité durant deux ans devrait être levé pour qu’un jeune puisse bénéficier du revenu de solidarité active (RSA). Une distinction devrait être faite entre l’aide aux petites entreprises et aux artisans et celles aux grandes sociétés bénéficiant déjà d’avantages fiscaux sans contrepartie. Ajoutons qu’avec la Banque publique d’investissement, il serait possible de se donner des moyens pour aider les entreprises qui s’engagent dans des initiatives d’embauches durables et de formations correctement rémunérées.

Au-delà, l’accès au travail des jeunes devrait s’inscrire dans un véritable plan sur plusieurs années tirant les leçons d’une crise sanitaire qui n’en finit pas. Celle-ci pose des défis potentiellement riches en millions d’emplois. La reconquête industrielle et agricole et le déploiement d’une économie de la mer en lien avec une alimentation de qualité adossés à une stratégie de transition environnementale réclament autant de formations que de travail. De grands projets sont nécessaires pour développer les transports publics en ville comme à la campagne, pour consolider la SNCF et l’aider à impulser le fret ferroviaire, pour rénover et construire des logements à prix abordables, aider collectivités locales et associations à monter des projets urbains soucieux de l’environnement, pour une restauration scolaire de qualité, ou une agriculture urbaine riche en emplois et formations. L’avenir ne passe pas par la flexibilité et la précarité du travail mais par une sécurité de vie dont celle du travail et des formations, incluant une garantie de rémunération.


2 commentaires


marie claude malaquin 31 juillet 2020 à 15 h 20 min

je suis entierement d accord.

VIJAY SHINGH 15 août 2020 à 21 h 35 min

I always appreciate your thoughts while reading. Keep it up .

Thanks
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