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L’organisation de la conférence sociale marque une nette rupture avec le sarkozysme. Au seul service des possédants, l’ancien président de la République convoquait les syndicats pour leur expliquer ses choix et ne les écoutait plus, voir les méprisait avec violence comme on a pu le voir avec la « contre-réforme » réactionnaire des retraites. Le président de la République la conçoit non comme une fin, mais comme le début d’un processus. La conférence se tient dans un lieu symbolique du débat et de l’élaboration de propositions : le Conseil Économique et Social, et non pas à Élysée ou à Matignon.
Le contexte enfin ! Que cette conférence commence avant le débat sur le collectif budgétaire et la préparation du budget 2013 peut constituer un atout pour que les salariés et les retraités se mobilisent en faveur d’un nouveau progrès social et démocratique.
Le contexte, c’est évidemment aussi la profondeur et l’ampleur de la crise, avec un endettement considérable de l’État dû, pour une large part, à l’insuffisance de recettes causée à la fois par les cadeaux fiscaux et sociaux octroyés par la droite aux plus fortunés et au capital, et par le ralentissement de l’activité économique. Mais c’est aussi l’urgence de dresser un barrage contre les menaces de fermeture d’entreprises qui s’apparentent à une hécatombe. Plus de 100 000 projets de licenciements sont en cours. Du jamais vu dans notre pays en un laps de temps aussi court.
Ces assises sont déjà le lieu d’un formidable bras de fer du grand patronat contre le monde du travail, qui a besoin d’être enfin écouté, de disposer de plus de droits et de pouvoirs dans l’entreprise, une nouvelle répartition des richesses plus favorable au travail, de nouvelles réflexions et élaborations sur la place du travail dans la société et dans la vie des individus, l’égalité professionnelle réelle entre les hommes et les femmes, le renforcement des systèmes de protection sociale. Autant d’enjeux que les forces du capital ne veulent pas voir abordés car elles considèrent que – parce qu’elles sont propriétaires des moyens de production et d’échange – elles en appellent au retour du pouvoir de droit divin. Seule compte « la compétitivité » des entreprises pour Mme Parisot. Afin de gagner les citoyens à ses thèses, elle brandit sans cesse ce que l’on a désormais baptisé le « coût du travail ». Le travail pour eux n’est qu’un coût. Il faut donc le réduire, le pressurer, l’éliminer en toute liberté. Jamais n’est évoqué le coût de l’argent qui domine aujourd’hui l’activité des entreprises. Après avoir bénéficié ces dernières années d’un cadeau de 175 milliards d’euros d’exonérations de charges sociales et fiscales, après avoir littéralement transféré 195 milliards d’euros de revenus du travail vers le capital, les entreprises versent aujourd’hui plus de 300 milliards d’euros en frais financiers et en dividendes à leurs actionnaires. Voici un grand sujet de débat. Au terme de celui-ci une nouvelle philosophie devrait émerger, y compris pour la défense des petites et moyennes entreprises et de leurs salariés. Elles sont d’abord victimes de la financiarisation de l’économie et de la domination des grands groupes. L’action contre la malfaisance des marchés financiers et pour un nouveau crédit public pour l’emploi, la formation, le développement des filières industrielles et agro-alimentaires devient urgente.
Le gouvernement de gauche a pris de premières décisions annulant celles de la droite : la fin de révision générale des politiques publiques, une première mesure sur la retraite à 60 ans qui ne touche que 150 000 salariés, la mise au rebut de la TVA sociale, l’augmentation de la prime de rentrée scolaire. Dans son discours de politique générale, le premier ministre a annoncé une amorce de changement visant à prélever d’abord sur les plus hauts revenus et le capital. Il faut évidemment aller plus loin. Non pas par esprit de surenchère, mais parce que c’est la condition du redressement économique et du bien-être social. Il est juste que la priorité soit enfin mise sur l’école. Par contre le choix consistant à ne procéder que par redéploiement de crédits dans les services publics est inquiétant. En effet, il y a des secteurs comme la santé ou les transports qui sont aujourd’hui à bout, et où tout peut exploser. Il est inquiétant que le pacte de croissance européen signé la semaine dernière appelle à aller plus loin dans « l’ouverture à la concurrence dans le secteur des entreprises de réseau ». La conférence sociale ne peut pas être le lieu d’élaboration d’une pédagogie d’acceptation des critères de la mondialisation capitaliste et des injonctions européennes. Or les pressions sont fortes.
C’est de Bruxelles qu’on pousse pour des « accords compétitivité-emploi », qui placent les salariés dans un piège : choisir entre un emploi, même précaire, ou une baisse de salaire. La pression est tout aussi forte pour faire accepter la flexibilité et la précarité du travail au détriment d’une sécurisation des parcours professionnels et des formations indispensables. Ce sont encore les institutions européennes qui poussent à un nouveau recul de l’âge de la retraite et à leur privatisation progressive.
Pour la gauche et les syndicats, l’enjeu est de trouver les moyens de juguler la crise. Ceci ne peut se faire qu’en sortant de l’austérité, tout en menant une action d’envergure pour solidariser les peuples européens, afin de réorienter radicalement la construction européenne. Ce n’est pas le progrès social qui provoque la crise. Il permet d’en sortir. Voilà pourquoi l’heure est à l’invention d’un nouveau contrat social, démocratique et écologique, pour sortir de la crise. Celui-ci appelle une nouvelle loi pour de nouveaux droits et pouvoirs des travailleurs, l’application du droit au travail effectif dans le cadre d’un grand projet à la fois éducatif, culturel, d’innovation et de recherche, d’un nouveau partage de la valeur ajoutée en faveur du travail, la création de nouveaux services publics, de refus de la précarité, d’une action ténue pour un salaire minimum au sein de l’Union européenne, le retour de la retraite à 60 ans à taux plein et la modernisation de la sécurité sociale, en y faisant contribuer les revenus financiers du capital au lieu d’augmenter la CSG.
L’enjeu d’une répartition plus juste de la valeur créée par le travail en faveur de celui-ci et d’une nouvelle manière de produire, de se transporter, de se loger ou d’utiliser l’énergie, devient un enjeu crucial d’avenir pour sortir de la crise globale.
En définitive, le débat amorcé par la conférence sociale doit porter loin : celui d’un nouveau contrat social, démocratique, écologique.
12/07/2012
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Avant de parler de nouveau contral social, démocratique et écologique, il faut refuser le TSCG.