Mouvement populaire contre duperies gouvernementales

le 21 janvier 2025

Quand une internationale postfasciste parcourt le monde et s’incruste dangereusement dans notre pays, quand les États-Unis de Donald Trump engagent un remodelage du monde basé sur la destruction des institutions internationales tout en nourrissant le projet d’écraser le continent européen et de mettre nos pays au service du grand capital américain, le bêchage de la division des forces progressistes est une folie.

Quand un président de la République, massivement rejeté, refuse obstinément de reconnaître les résultats de plusieurs élections, il faut éteindre les vilaines querelles sans fin et allumer les phares du possible espoir à construire.

Quand François Hollande et Jean-Luc Mélenchon jettent des seaux d’acide sur le sol déjà pollué de la politique, ils ne font que couper l’appétit à celles et ceux qui mettent leur espoir dans la construction du Nouveau Front populaire (NFP).

Que ces deux-là ne l’oublient pas ! Le NFP, cet outil gros d’espérance, a été voulu par le peuple travailleur et par la jeunesse. Et ce sont ces derniers qui doivent, plus que jamais, en être les maîtres actifs pour mettre un terme aux duperies gouvernementales.

Telle est la question de l’heure. Elle sonne l’urgence.

Cette urgence s’enracine au cœur du combat de classe. Quand le compte en banque d’un quart de nos concitoyens est à découvert au milieu de chaque mois, qu’un tiers d’entre elles et eux se prive sur la nourriture ou sur le chauffage alors que les quarante entreprises cotées à la bourse de Paris distribuent à leurs propriétaires près de 100 milliards d’euros de dividendes, on ne peut transiger. On ne peut faire mine d’être satisfait d’avoir obtenu « du mieux » pour les classes populaires derrière les murs d’un bureau ministériel. C’est René Char qui écrivait : « Méfie-toi de ceux qui se déclarent satisfaits, parce qu’ils pactisent. »

C’est ce que cherche le pouvoir exécutif au nom de la classe capitaliste. Le niveau de la dette que le premier a créée en faveur du second leur sert à éteindre tout débat, à éliminer toute proposition alternative d’augmentation des salaires, de défense et de modernisation des services publics et de la protection sociale, à nier les corps fatigués par le dur labeur en voulant appliquer coûte que coûte l’inique contre-réforme des retraites.

Leur seul crédo est l’austérité pour les familles populaires et l’abondance pour le capital. Voilà la cause du désordre et des fractures ! Voilà la source de la dramatique impasse qui s’avance !  

Au moment où l’agressivité américaine ne va pas tarder à faire sentir ses effets négatifs, cette stratégie est mortifère pour l’intérêt général du pays et celui des classes populaires. La reconfiguration des marchés financiers qui se prépare, combinée à une nouvelle cure d’austérité, risque de faire s’abattre sur notre pays, sur nos industries, sur l’agriculture, sur les services et sur l’environnement, une tornade destructrice alors que l’Union européenne s’est trop peu investie dans les technologies nouvelles et dans l’innovation. Si on y ajoute les dépenses pour une nouvelle militarisation, on peut craindre un déclassement durable du Vieux Continent, une profonde récession et une accélération de la paupérisation de larges couches de la société.

Dans ces conditions, un gouvernement de droite qui refuse d’améliorer les recettes fiscales à partir d’une plus grande contribution du capital, tout en servant près de 60 milliards de rente aux institutions financières par le biais du service de la dette, doit être vigoureusement combattu.

 Il doit être combattu non pas pour des raisons politiciennes, mais pour la raison fondamentale qu’il pousse le pays dans le mur et les citoyens dans un abime de souffrances. De ce point de vue, le programme élaboré par le Nouveau Front populaire, sans être un programme de transformation structurelle, est un chemin anti-austéritaire qui permettrait de mieux faire face aux matamores de Washington, tout en améliorant la situation des familles populaires. C’est ce programme qui devrait en ce moment être la boussole des forces progressistes au sein du Parlement.

Dans ces conditions, dès lors que le Premier ministre refusait de soumettre son programme général à la confiance de l’Assemblée nationale, il était naturel que la gauche utilise l’arme constitutionnelle de la motion de censure. Dès lors que l’extrême droite a, depuis le début, déclarée qu’elle ne voterait aucune motion de censure, le faux argument de la « stabilité » tombait de lui-même. Par contre, 80 % de nos concitoyens qui ne font plus confiance au pouvoir politique se sentiraient plus forts, plus respectés, plus associés, si, ensemble, les groupes de la gauche et de l’écologie produisaient des actes qui ouvrent un chemin neuf. Dire ceci n’est pas chercher querelle aux parlementaires de gauche qui ont refusé de voter la censure, tout en déclarant vouloir réserver ce couperet lors du vote du budget s’ils le jugent nécessaire.

Sans être d’accord avec cet argumentaire, je me refuse à insulter, dénigrer, vilipender celles et ceux qui, à gauche, n’ont pas voté dans le sens que j’aurais souhaité à l’Assemblée nationale. Je préfère, et de loin, l’argumentation, la démonstration, le déchiffrage des faux engagements du roué M. Bayrou.

Gare aux stériles querelles et à leurs puissants venins qui se répandent sur la terre pour la brûler. Elles ne feront  germer que  démobilisation,  démoralisation, sentiment d’impuissance et  dégoût chez celles et ceux qui ont urgemment besoin que leur vie s’améliore. À l’inverse, répéter à l’envi, comme certains dirigeants socialistes, qu’ils ont obtenu des « concessions » grâce à la « négociation », non seulement cache d’insupportables aggravations que vont subir nos concitoyens, mais revient aussi à empêcher ce que redoute le plus le monde des affaires et le capital international qui rôdent au-dessus du volcan budgétaire : l’unité populaire et les mobilisations sociales, écologiques, féministes  et démocratiques.

Avec l’abrogation de la contre-réforme des retraites, la gauche doit placer en haut des combats à mener, l’amélioration substantielle des salaires, la défense des 300 000 femmes et hommes menacés dans leur emploi. Et elle doit le faire avec les intéressés.

Toute prétendue négociation avec le gouvernement sans impulser l’intervention populaire revient par devers soi à blanchir une politique dure pour les plus humbles, douce pour les privilégiés de la fortune.

Celle-ci se mène au nom de l’assainissement des comptes publics. Mesurons de quoi nous parlons !

Depuis sept ans, l’accaparement des richesses par un infime pôle de la société est si important que le patrimoine des 500 plus grosses fortunes françaises, qui représentait déjà 20 % des richesses produites (ou produit intérieur brut) en 2017, atteint 45 % de la valeur de ces mêmes richesses à la fin de l’année 2022.

Et ce sont les mêmes politiques des gouvernements successifs, impulsées sous François Hollande puis sous Emmanuel Macron, qui ont creusé une dette abyssale. Non pas parce que la « dépense publique » est trop importante, comme le répètent les zélés serviteurs du capital, mais parce que, durant ces sept dernières années, les cadeaux fiscaux et sociaux offerts aux plus fortunés et au capital ont aggravé la dette de 1 000 milliards d’euros.

Il s’agit donc bien de choix politiques partagés par les droites, par E. Macron et par F. Hollande, dont on nous dit désormais qu’il est à l’initiative de ce négatif compromis avec M. Bayrou.

Cette orientation consiste à transférer toujours plus de ressources de l’État vers des intérêts privés. C’est ainsi que le bien commun est durement amputé par la dette, pendant que de voraces créanciers de l’État se régalent. Pendant ce temps, le droit du travail a été durement attaqué, le chômage progresse plus vite que dans les statistiques grâce aux radiations comme au travail précaire ; les allocataires du RSA doivent accepter 16 heures de travail gratuit, et celles et ceux qui ont un travail ne seront pas en reste, car le pouvoir envisage de leur demander sept heures d’exploitation de plus à titre gracieux ; les étudiants voient diminuer leurs aides financières et allongent de plus en plus les files d’attente devant les soupes populaires ; les prix des biens de première nécessité augmentent. Et, ils se discutent dans les couloirs des ministères le projet d’une nouvelle dîme à prélever sur les retraités.

Quand on est de gauche, on ne peut donc accorder une once de  confiance à Bayrou le mystificateur. On le peut d’autant moins que la partie recette du budget est bouclée et que les séquences de discussions dans les bureaux des ministres, suivies d’un courrier aux groupes, ne sont que des jeux de rôle visant à ôter toute dynamique au mouvement social et au Nouveau Front populaire, en le divisant en son sommet, pour bloquer toute amélioration de l’existence  de celles et de ceux qui n’ont que leur travail ou leur retraite pour vivre. Même des choix de « statu quo » par rapport aux politiques précédentes ne seraient pas acceptables. Ici, il s’agit d’aggravations projetées.

De l’écran de fumée qu’a installé Bayrou sort une lettre qui comprend vingt-trois points dont la plupart sont totalement fictifs. En effet, dix-neuf d’entre eux étaient déjà actés par M. Barnier avant qu’il ne soit censuré. Mais ces dispositions n’étaient pas des améliorations pour les gens, mais des promesses de non-aggravation, c’est-à-dire de ponction ou de réduction de services. Les quatre éléments restants ne sont pas des progrès sociaux : l’abandon du déremboursement des consultations médicales se fera au prix d’une augmentation du taux de prélèvement des mutuelles. Les économies sur les « dépenses » de santé qui devaient être de 5 milliards ne seraient que de 3,7 milliards d’euros. Qui peut considérer qu’un recul même adouci est un progrès ?

Alors que le Parti socialiste défendait un plafonnement de la réduction des loyers de solidarité pour une somme de 1,3 milliard d’euros, Bayrou lui accorde royalement 300 millions d’euros. Les députés avaient voté une aide de 175 millions aux maires « bâtisseurs » et Bayrou descend cette somme à 100 millions. Et les ministres défilent depuis quelques heures devant le Sénat pour lui demander des coups de rabot supplémentaires sur la recherche, sur l’enseignement supérieur, sur les crédits d’investissement, sur l’écologie et les mobilités durables, sur les crédits de paiement du « fonds vert » et un considérable recul de 2,7 milliards d’euros de l’aide publique au développement (APD). Une infamie !

L’actuel gouvernement aggravera le programme d’économies du précédent sur les services publics d’environ 10 milliards d’euros. Bayrou passe maître dans l’art de la duperie.

Enfin, les conclaves, missions flash et autres audits sur les retraites ne serviront qu’à faire avaliser définitivement la contre-réforme des 64 ans, puisque l’on sait que les syndicats patronaux feront obstacle à tout avancement de l’âge de départ. Même le retour devant le Parlement après la discussion du fameux « conclave » est un leurre. Dès lors que tout changement doit se faire à dépense constante, toute proposition parlementaire de financement supplémentaire se verra opposer ce que l’on appelle « l’article 40 » qui agit comme un couperet, car on ne peut engager de dépenses sans les gager sur des recettes. 

Les motifs défendus par une partie des responsables socialistes pour ne pas censurer le gouvernement Bayrou ne résultent donc pas d’un compromis positif. Les raisons fondamentales de cette entente avec Bayrou sont à rechercher ailleurs : la pression des puissances industrielles et financières et des institutions européennes pour défendre coûte que coûte la « stabilité » de leur système bien mal en point. Nombre d’électrices et d’électeurs socialistes, avec d’autres à gauche, s’en émeuvent et s’en inquiètent à raison.

Ces dernières et derniers savent que cette orientation politique avait empêché François Hollande d’être candidat à sa propre succession, tant ses compromissions avec le grand capital étaient condamnées. Ce sont ces mêmes choix qui valent à E. Macron de n’être soutenu que par une infime minorité de la population. L’immense majorité souhaite son départ anticipé. Et, les vents mauvais qui soufflent des États-Unis et caressent puissamment le continent européen démontrent qu’une gauche d’adaptation au système ouvre grand la voie aux droites extrêmes et aux extrêmes droites.

S’agissant des retraites, on peut mieux comprendre l’insistance mise ces derniers jours sur les « coûts des retraites de la fonction publique » en lisant attentivement la dernière note de l’institut Molinari, explicitée dans le journal « pro-business » L’Opinion du lundi 20 janvier. Le pouvoir, serviteur des institutions financières, va pousser progressivement et habilement les feux de la retraite par capitalisation.

Le projet est en effet de transformer le fonds de réserve pour les retraites (FRR) en un fonds souverain qui prendrait en charge les retraites de tous les agents publics. Comme par hasard ledit institut, au service des milieux patronaux, pousse à une montée en charge de ce fonds pour financer 60 milliards de retraites d’agents publics par an. Comme par hasard, c’est exactement le chiffre des économies que veut imposer le pouvoir ! un projet qui s’inscrit parfaitement dans les préconisations du rapport Draghi sur l’Europe. Rien n’incite donc à se faire quelque illusion que ce soit sur le gouvernement Bayrou.

L’heure n’est pas à la toxique organisation d’un duo-duel entre Hollande et Mélenchon. Ensemble, forces démocratiques, syndicales, associatives, progressistes et écologistes, militants de la paix, internationalistes, avec les abstentionnistes en quête de changement, doivent s’unir pour élargir et solidifier le Nouveau Front populaire, propriété des travailleurs et des citoyens.

Ce sont ces derniers qui doivent mettre les partis politiques au pied du mur de l’unité dans l’action. Rien ne devrait détourner ces partis de l’objectif qui leur a été assigné : animer un mouvement populaire irrésistible qui parte des lieux de travail, d’études, de recherche, des villes comme des campagnes, afin de construire sans attendre un processus audacieux de transformation sociale, démocratique, écologiste, féministe et porteur de paix.

Tout y invite, tant les manœuvres gouvernementales préparent de désastres, tant les dangers s’installent sur le pas de nos portes.

Patrick Le Hyaric

21 janvier 2025


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