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Editorial paru dans l’Humanité
Du haut de leurs palais, des sièges capitonnés des banques, de la commission de Bruxelles ou des cénacles du G20, les puissants sont désormais obligés de pérorer sur l’indispensable « régulation économique ». Mais ils n’en font rien. Tout au contraire. Ils ont forcé de diverses manières le peuple irlandais à accepter le traité de Lisbonne. Celui-là même qui est la Bible de la dérégulation sanctifiant la mortifère loi du « marché capitaliste ».
Ils brocardent, tel cet ultra réactionnaire, M. Estrosi, avec un mépris digne de Marie-Antoinette, le peuple français qui vient, avec éclat de faire connaitre son attachement au service public de la Poste.
Un minimum de bon sens démocratique devrait les conduire à entendre la force populaire qui vient de s’exprimer. Ils devraient comprendre que le peuple ne supportera plus les mensonges comme cela a été le cas pour France Telecom et Gdf. Les gouvernements avaient dit que l’ouverture de capital ne conduisait pas à la privatisation. C’est pourtant bien cela qui s’est produit!
Ils devraient entendre qu’un référendum s’impose. Et l’Europe, si elle était démocratique, devrait décider d’un moratoire sur l’application de la directive postale européenne.
Qu’ils viennent dans nos campagnes écouter et entendre la puissance du cri d’alarme et de détresse que lancent les paysans, au bout du rouleau. Leur utilité, leur belle vocation qui sont de nourrir leurs semblables sont bafouées, saccagées, anéanties.
Ils n’ont cessé de travailler dur. Non seulement, ils n’arrivent plus à nourrir leurs familles mais chaque jour qui passe, se termine dans le cauchemar de la perte d’argent. Cent, deux cent, cinq cent euros de perte chaque jour pour certains d’entre eux. Bref, trimer plus pour perdre toujours plus. Tel est leur intolérable sort. Quel est ce monde abominable où les paysans crèvent ici, quand un enfant meurt de faim toutes les cinq secondes là-bas !
« Quel est ce monde abominable
où les paysans crèvent ici, quand
un enfant meurt de faim toutes
les cinq secondes là-bas ! »
S’il en est ainsi, c’est parce que le lait, cet aliment complet déjà élaboré par le travail conjugué de l’homme et de la vache, n’est plus considéré comme une nourriture noble mais comme un vulgaire objet de spéculation sur les marchés.
Voilà pourquoi, les instances européennes au seul service des marchands, ont détruit l’idée d’un prix de base et démantèlent tous les outils de régulation de la production. Par contre les prix à la consommation sont eux aussi libres… mais toujours à la hausse.
Ainsi les producteurs comme les consommateurs se heurtent à un même mur, à un même ennemi : le capitalisme. Les paysans qui manifestaient hier en masse devant le conseil européen à Bruxelles, ne s’y trompaient pas en brandissant ce mot d’ordre : «ultra libéralisme = mort de l’agriculture».
Et la droite française porte cette lourde responsabilité d’avoir affaibli les producteurs face aux industriels et à la grande distribution avec cette fameuse loi dite « de modernisation économique » qui produit la pire des régressions sociales pour les paysans travailleurs.
D’urgence, le gouvernement doit réunir une table ronde avec les syndicats paysans, les banques, les assurances pour des moratoires et la renégociation des emprunts et des aides de trésorerie. Les autorités européennes doivent mettre en place un fond financier de soutien d’urgence aux agriculteurs.
Le plus fondamental est la remise en place d’un prix minimum européen de base à la production et de maintenir la régulation par les quotas. La commission et le Conseil européen avaient, hier, l’occasion de montrer un autre visage de l’Europe : celui de l’humanité. Ils ne l’ont pas fait parce qu’ils agissent pour les intérêts de leurs classes et de leurs castes. C’est contraire à l’intérêt général. Cela s’apparente à de la non-assistance à agriculteurs en danger. N’oublions jamais : il n’y a pas de vie sans paysans.