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En ces temps si troubles où l’on veut que la télévision commerciale remplace les bibliothèques, où l’histoire est piétinée jusqu’au fond des poubelles, où la culture est méprisée, où les concepts sont retraités dans de grandes lessiveuses médiatiques, où les mots sont transmutés, voilà que M. Sarkozy, qui avait déjà pris Guy Môquet et Jean Jaurès en otages, prépare un nouveau vol sous notre nez. Il veut ripoliner son parti « l’UMP » avec un simple mot, « Les Républicains ». Parce que ce n’est pas banal, il ne faudrait pas que cela passe comme une lettre à la poste. Ainsi sa machine de guerre électorale capturerait pour elle seule ce mot devenu système, si original en France, fruit d’une longue et belle histoire de luttes pour la souveraineté populaire.
La République, c’est mot pour mot « la chose publique ». C’est en République que chacune et chacun se définit comme citoyen. Tous composent la Nation.
Certes, il existe dans le monde de nombreuses républiques. Mais, en France, on ne prête serment ni sur la bible, ni sur le billet de banque quand on accède à la fonction suprême. Notre pays a cette particularité d’être une « République indivisible, laïque, démocratique et sociale », selon le préambule de la Constitution. Notre République n’a pas de véritable équivalent en Europe. La laïcité par exemple n’est nulle part un principe constitutionnel.
Le projet sarkozyste qui malaxe le mot laïcité pour le réduire aux menus des cantines à l’école, qui a éteint la lumière vacillante de la démocratie quand il a foulé au pied le résultat du référendum sur le traité constitutionnel européen, il y a déjà dix ans, et qui a jeté par-dessus bord le mot « social » au profit des intérêts des milieux d’affaires, est à rebours du projet républicain issu de 1789.
Après avoir créé un ministère de « l’identité nationale », pour porter main forte à la fausse mais violente théorie du « grand remplacement », alors que l’immigration ne représente que…0,36% de notre population, il a bafoué l’idéal universaliste de la République française, blessé la citoyenneté qui dépend d’un statut de droit et non d’un tri par situation, servant notamment à refuser le droit de vote à une partie des créateurs de richesses de notre pays, contributeurs aux caisses sociales et du trésor public.
Le hold-up en préparation ne vise pas seulement à imiter le parti américain ou à tenter de rejeter les autres forces en dehors du concept républicain, il vise à voler un nom, propriété de tous les citoyens pour dévoyer un projet, des concepts, un sens, des valeurs.
Cela se fait sur un fond « d’alternance » politique pour de mêmes choix économiques, sociaux, culturels, éducatifs, soumis à Bruxelles et aux milieux d’affaires, alors que le Premier ministre lui-même appelle le parti auquel il appartient à se débarrasser du mot « socialiste » pour peut-être devenir « démocrate », au nom d’une « révolution copernicienne » annoncée.
Rappelons que le clivage entre la droite et la gauche est précisément né avec la naissance de la République. Le 28 août 1789, lors du débat sur le veto royal à la Constituante, les députés opposés à cette mesure et hostiles à la toute- puissance du clergé, se regroupent à gauche du président du bureau, tandis que les partisans du veto royal, de la sauvegarde de la monarchie et de la prépondérance de l’Eglise catholique, se placent à droite. Ainsi sont nées droite et gauche. Certes, depuis, la droite a endossé les habits de la République. Le combat acharné des républicains du 19ème siècle pour que la Nation épouse les principes fondamentaux de la République et pour rendre irréversible ses conquêtes, permit d’intégrer dans ses rangs bon nombre de ses anciens adversaires. Ce fut une victoire républicaine de longue haleine qui ne gommait en rien les clivages intenses, désormais bordés par les principes universels. Ceux qui persistaient à la nommer « la Gueuse » se situaient à l’extérieur de son périmètre.
Ainsi, la République peut-elle être réactionnaire, autoritaire ou coloniale, mais aussi sociale, laïque et démocratique.
En se déclarant très à droite par rapport à l’histoire de la droite depuis la Libération, en insistant sur le rôle supérieur « du curé ou du pasteur » sur l’instituteur, en menant campagne sur l’opposition entre l’identité française et d’autres fantasmées ou en opposant la démocratie à la République – l’une étant le régime du laisser-faire, l’autre celui de l’ordre et de l’autorité – N. Sarkozy joue avec les limites du cadre républicain, intimement mêlé à la laïcité, à l’Ecole publique, à la démocratie, aux services publics, à l’égalité des droits.
Ajoutons qu’à travers cette manœuvre, Nicolas Sarkozy, qui n’a jamais caché sa fascination pour le modèle américain, cherche à en transposer ici ses caractéristiques politiques afin de fédérer, à l’image du Parti Républicain, l’ensemble des composantes de la droite et d’une bonne partie de son extrême sur une orientation particulièrement dure : prédominance de la loi de l’argent et du religieux, ultralibéralisme, négation du principe d’égalité, néo conservatisme. Tout un programme pour notre pays !
Ainsi, cherche-t-il avec opportunisme à réduire la République à une vision étroite qui flirte avec ses limites, une version rabougrie de la République, césarienne, anti démocratique, soumise aux grands vents de la finance mondialisée.
La République ne dit pas tout mais elle dit beaucoup. La République française n’existe que si elle appartient à chacune et chacun de ses citoyens, de droite comme de gauche. Elle est le bien commun de tous les français, le cadre bordé par les principes de liberté, d’égalité et de fraternité. Vouloir se l’approprier sur une orientation politique qui en nie les principes fondamentaux, relève du vol pur et simple et d’un profond mépris pour l’ensemble et la diversité de ses citoyens.
Nous persistons à penser, avec Jaurès, que « sans la République, le socialisme est impuissant, sans le socialisme, la République est vide », que la République poussée jusqu’au bout, logique avec elle-même, qui ne trahit pas ses principes fondamentaux, qui n’est pas en porte-à-faux avec sa devise, pose les jalons d’une société du bien commun, de la propriété collective, de la démocratie, de la solidarité humaine et de la défense de l’environnement. Bref l’opposé de celle que propose M. Sarkozy !
Car, au fond, est-ce défendre la fraternité que d’appeler « assistanat » les principes de solidarité qui régissent nos systèmes de sécurité sociale, de retraite et d’assurance chômage ?
Est-ce défendre la liberté que d’encourager la toute- puissance du capital sur la vie quotidienne des millions de salariés, d’empêcher tout pouvoir décisionnel au monde du travail dans l’entreprise et sur la production ?
Est-ce défendre l’égalité que de justifier en permanence le règne de la compétition de tous contre tous ou de stigmatiser une partie de nos concitoyens en raison de leur religion ?
Est-ce enfin « républicain » que de manier le fameux « ni-ni » en renvoyant dos à dos l’extrême droite et les partis républicains ?
Répondre à ces questions c’est prendre conscience que la République, bien plus qu’un ordre figé, est un combat permanent pour que se réalise aujourd’hui, dans le monde réel, ses principes universels. Que tous les républicains fassent que N. Sarkozy en soit pour ses frais !
14 commentaires
D’accord avec tout cela, mais le silence qui s’y oppose… Vous parlez tout bas, et ils parlent si haut…
Un pressentiment d’âges sombres, à venir, qui nous épuise ?
Tout à fait d’accord avec cette analyse. J’avais, moi-même été choqué par l’outrecuidance de Sarcozy d’usurper ce terme et de faire main basse sur une notion qui ne lui appartient pas. Cela s’apparente, en plus grave, à la pratique de jouer de la sémantique pour tromper les citoyens. C’est la base de la langue de bois.
Par exemple le statut d’EdF qui qualifie les “retraités” de : personnel en inactivité de service; cela a été , par certains, détourné en “personnel en libre activité” !!!
oui, c,est de l,enfumage
Ne peut on pas légalement l’en empécher ?
Si tout à fait ! Nous avons lancé une action collective judiciaire pour demander la nullité du dépôt de la marque à l’INPI. Vous pouvez signer la pétition (plus de 2 000 signataires en 3 jours) http://noussommeslesrepublicains.org/petition/
Bonjour.
Je suis du Québec.
Est-ce que les citoyens d’autres pays peuvent signer cette pétition ?
Le terme Républicain appartient à nous tous, empêchons Sarkozy de s’en emparer à des fins politiciennes et malhonnêtes.
Il est coutumier de cette attitude, il a tenté d’utiliser Jean Jaurès et Guy Moquet, nous devons nous opposer de toutes nos forces à ce hold-up.
Bonjour.
Ce n’est pas la première fois, le fn a bel et bien volé le nom sacré des patriotes: le Front National. Qui a gagné en justice. Un précédent.
J’ai retenu ce paragraphe de la pétition.
«« Le risque d’une déception, tant le bonapartisme semble être l’impensé de ce parti politique, est d’autant plus patent qu’il est en contradiction avec la promesse d’une République exemplaire qui tient à cœur à tous les Républicains. »»
Le bonapartiste, ou les monarchistes ont la nostalgie d’un passé révolu. Ils font parti du vieux monde qui a accouché de deux guerres mortelles pour les pays d’europe. Ce sont des gens conditionnés par la pensée archaïque. Cette pensée qui alimente les intégrismes de tout acabit. Sarkozy en fait parti par opportunisme, comme les lepen pour le Front National des Patriotes.
Sarkozy, obnubilé, veut introduire la gouvernance binaire US.
On peut employer cette métaphore:
À l’image et à la ressemblance….
Une majorité de la population ne voit pas plus loin que le bout de son nez. Mais, il demeure qu’ils ont été trahis par une gauche AMALGAMÉE.
Maintenant, la gauche a à se réécrire.
Quel sera son discours, son contenu rassembleur qui réveillera, la place citoyenne.
Chacun et chacune doit se reconnaître dans la République !
C’est la course aux dénominations, qui s’appropriera les meilleurs mots, les plus accrocheurs ou les plus rassembleurs.
Des mots pleins de sens perdu aux mains des fourbes sarkozystes, mais conservant des signications détournés mais obnubilant pour mieux manipulés les conditionnés, ou des mots liés à du contenu concret libérant.
Lisez:
Lorsque les psychopathes prennent le contrôle de la société
Ken Magid, Carole A. McKelvey
The Psychopaths Favorite Playground : Business Relationships (Le terrain de jeu préféré des psychopathes : les relations de travail):
Extrait:
«« Tous ceux qui ont été attirés initialement par l’idéologie originale prennent conscience qu’ils ont désormais affaire à quelque chose d’autre, quelque chose qui a pris la place de l’idéologie originale et qui se présente sous le même nom. La désillusion vécue par ces anciens partisans idéologiques est extrêmement amère. »»
Le néo-libéralisme, alias capitalisme sauvage (années 80), a contaminé
les polulations pendant des dizines d’années, systématiquement.
Quelle réponse à cela ?
Podemos: plus de milles…à travers le pays.
Albert Einstein: un problème insoluble est un problème mal posé.
Un agenda politique sans contenu, un agenda politique amalgamé….
Un agenda politique rassembleur.
Le questionnement est la lumière, le questionnement est le saint-esprit.
Krishnamurti: il faut crevé les symboles…
Il faut crevé les mots pour avoir accès à la réalité !?
Marx résumé: les patrons sont-ils indispensables ?
Jean Jaurès l’exprime sans équivoque…..
Mettons nos énergies sur les fondamentaux, sur le périphérique, on y perd son énergie.
Voyez le potentiel synergique des fondamentaux.
Il faut prendre le pouvoir politique, les citoyens au centre et maître d’oeuvre.
Quel est le discours qui peut rendre compte….
Certains sur Facebook les ont déjà appelés les “ripoublicains”, ça va leur coller à la peau, ce sont bien des ripoux !
comme la 5e est en grande partie l’enfant de De Gaulle, les vrais gaullistes qui restent devraient partager ces sentiments.Sarkozy est un devergonde.
Merci à Patrick pour cet article.
Mais il me semble que l’attitude de S. s’inscrit bien dans la confusion presque généralisée actuelle.Il compte en profiter.
Ainsi les sociétés (thermo) industrielles modernes qui repo-sent sur ce qu’on extrait du sous-sol (énergies et minerais)ont été développées à crédit: c’est leur substrat et ce qui les alimentent.Ce sont des “stocks” NON renouvelables, NON durables.Les énergies fossiles c’est 85% de l’énergie primaire consommée dans le monde. Les énergies renouvelables sont moins efficaces que le pétrole , ou même que le charbon.Ces énergies fossiles -abondantes et pas chères- ont fait notre richesse économique, mais elles vont décliner “prochainement” inexorablement.Il faudra faire avec de moins en moins d’énergie et de minerais et réduire
fortement les inégalités…Sinon…Bonjour les dégâts !
Mais on nous parle de développement durable, de croissance verte…d’un nouveau type de croissance…Des voeux pieux en ignorant les réalités .
Bon courage. Roger LUCE 94320
Il est capable de tout, n’a honte de rien.C’est un fils de l’immigration qui n’hésite pas à tirer sur les candidats à l’immigration, soulignant le sens de la phrase “Le dernier arrivé ferme la porte”. Ses liens avec le côté sombre de la finance américaine sont patents, avec lui le TAFTA pourrait bien être adopté ! Soyons vigilants !!!
Excellent article de Patrick Le Hyaric dont je partage pleinement le contenu. C’est en effet un hold up, un braquage, auquel s’apprête à se livrer Sarkozy. Pour paraphraser une citation célèbre, on pourrait dire “République, que d’infamies à-t-on commises en ton nom !” Il est donc nécessaire, urgent, indispensable de dénoncer cette tentative d’usurpation comme le fait si bien M. Le Hyaric. Mais cela me semble insuffisant. Selon moi, cette dénonciation n’a de sens que si elle est le prélude à une contre offensive d’ampleur : pétitions, courriers individuels de citoyens au siège de l’UMP, étudier la possibilité de recours légaux pour empêcher que le forfait n’ait lieu. Je souhaite ardemment que les lecteurs de l’Huma et de l’Humanité Dimanche donnent à cet article la suite qu’il mérite en le diffusant largement autour d’eux afin d’organiser la riposte qui s’impose.
Dès que je l’ai appris, j’ai proposé en commentaire que le nom “Les Républicains” qui appartient à tous les citoyens favorables au régime républicain, soit transformé en “Les Ripoublicains” lorsqu’il s’agira de nommer ce parti. Je sais que cela ne vole pas haut, que ce n’est pas du correctement politique, mais c’est peut-être le plus efficace. Je suis contente de savoir que c’est déjà courant sur Facebook. Je suppose que nous sommes nombreux à y avoir pensé car cela est une évidence.