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Ce 5 juin est le triste jour anniversaire de cinquante-sept années d’occupation militaire israélienne de la terre de Palestine. Nous parlons ici de l’occupation armée d’un État par un autre, la plus longue de l’histoire. Cinquante-sept années.
Et le président de la République française estime qu’il faut encore attendre qu’arrive un hypothétique moment, prétendument « utile », pour enfin déclarer la reconnaissance officielle de l’État palestinien par la France. Utile pour qui et pour quoi ? Pour permettre au colonisateur, à l’occupant, de poursuivre sa sale besogne ?
Dans la même phrase, il s’est dit « indigné » par les frappes militaires israéliennes contre des civils aux mains nues à Gaza.
Alors combien de morts, combien de vies brisées, combien de jeunesses massacrées, combien de temps faut-il encore attendre ? Nous, nous avons honte. Nous avons mal à la France. Elle a à sa tête un pouvoir qui donne quitus à une coalition de droite et d’extrême droite à Tel-Aviv. Un pouvoir qui refuse un acte politique et juridique majeur qui modifierait le rapport de force en faveur du respect du droit international.
La France doit rejoindre et conforter les 145 États membres de l’ONU qui ont déjà reconnu l’État de Palestine. En rejoignant les onze États membres de l’Union européenne, qui ont déjà posé un tel acte, la France modifierait la donne mondiale et pousserait les États-Unis à faire de même. Notre colère ne nous conduit pas à dire ici que rien ne se fait. Nous nous réjouissons du vote positif de la France à l’ONU, il y a quelques jours, pour que la Palestine soit membre à part entière des Nations Unies. Une fois de plus, les États-Unis y ont opposé leur veto.
L’enjeu est important, car être membre à part entière donne le droit de voter à l’Assemblée générale et donne une certaine influence politique. Dès lors que plus des deux tiers des membres de l’ONU se sont prononcés en faveur de la reconnaissance conformément à la charte des Nations unis, il ne reste plus qu’à faire lever ce veto américain.
Cela compterait. On le voit déjà. En effet, le mouvement qui se développe en France pour la reconnaissance de l’État palestinien a poussé le Premier ministre israélien à s’adresser à nos concitoyens par l’intermédiaire du groupe privé de télévision propriété de Bouygues, TF1-LCI. Nul hasard dans cette intervention de Netanyahu avec la complicité d’un média porte-voix des intérêts du grand capital. Il n’y a eu aucune gêne à faire parler le responsable d’un État qui a fait l’objet d’une sévère ordonnance de la Cour internationale de justice l’enjoignant à stopper son offensive meurtrière à Rafah. Ce même Premier ministre fait l’objet d’une émission d’un mandat d’arrêt international par le procureur général de la Cour pénale internationale (CPI). Cela n’a pas gêné TF1. Les enjeux économiques dans la région, dont les immenses réserves de gaz au large des côtes de Gaza et d’Israël sont pour les tenants du grand capital bien plus importants que le droit international.
Mais l’intervention télévisée du Premier ministre israélien est aussi la manifestation d’une certaine fébrilité. Il redoute que la France, membre du conseil de sécurité de l’ONU, reconnaisse officiellement la Palestine comme État.
Tant que nos gouvernements successifs bavardent sur la solution à deux États sans que jamais cela soit suivi d’effets, le pouvoir de Tel-Aviv est tranquille pour réaliser dans le vol, le feu et le sang son projet d’annexion totale de la terre de Palestine.
Contrairement à certaines assertions, la reconnaissance de l’État de Palestine est le seul moyen aujourd’hui de donner un peu d’espoir à un processus de paix et de sécurité. À force de bafouer l’Autorité palestinienne, de l’amputer de pouvoirs politiques réels, les dirigeants des institutions européennes et des États-Unis se sont privés d’un interlocuteur susceptible de peser dans les négociations, hier de lever le blocus sur Gaza, et aujourd’hui pour un cessez-le-feu, pour la libération des otages, et pour établir les conditions de la sécurité des citoyens israéliens et palestiniens.
C’est bien le choix du Hamas comme seul « interlocuteur » qui a été promu dans les négociations actuelles. Ce choix de lui donner de l’importance tout en rabâchant qu’il est une organisation terroriste, permet de justifier le massacre des enfants palestiniens innocents. C’est aussi le moyen de laisser se déployer la colonisation-annexion en Cisjordanie et à Jérusalem.
Il faut en finir avec ces hypocrisies. Il est urgent maintenant de reconnaître le droit aux 14 millions de Palestiniens de disposer de leur terre, de leur pays et de construire leur État.
Il est urgent de reconnaître les droits pleins et entiers à ce peuple, son droit à l’autodétermination et à une vie digne, le droit de contrôler ses frontières établies en 1967 avec Jérusalem capitale des deux États, voisins, israéliens et palestiniens.
L’Autorité palestinienne peut être la structure politique qui porte le projet de construction de l’État palestinien, avec une considérable aide financière internationale.
Pour qu’elle puisse se réformer, se moderniser, se démocratiser, il convient de la libérer de la « gestion » de l’occupation qui lui est imposée.
Il ne peut y avoir de démocratisation de la société palestinienne sans laisser les Palestiniens choisir leurs institutions et leurs élus en organisant des élections. Celles-ci ne peuvent avoir lieu qu’en libérant tous les prisonniers politiques qui souvent sont maires, responsables d’associations, ou députés.
Dans ce cadre le combat pour la libération du député et responsable du Fatah, Marwan Barghouti, enfermé dans les geôles israéliennes, doit être de la même intensité que celui qui a libéré Nelson Mandela des geôles de l’apartheid sud-africain. Marwan Barghouti est une solution que le pouvoir d’extrême droite israélienne refuse. Il faudra le lui imposer dans la lutte. M. Barghouti est le dirigeant capable de fédérer la nation palestinienne, de construire l’État, incluant Gaza libéré de la domination du Hamas.
Ne pas agir aujourd’hui est criminel. Cela revient à soutenir implicitement la direction suprémaciste du gouvernement de Tel-Aviv dont le projet est l’annexion totale de la Palestine pour un grand Israël.
Les discussions en cours dans les chancelleries de plusieurs pays européens, dont la réunion de Paris ce 6 juin en vue de rechercher une plateforme commune avec des États arabes, doivent déboucher sur des initiatives nouvelles. Il convient de ne pas laisser s’évanouir le projet d’une solution politique à deux États, deux peuples vivant côte à côte en paix et en sécurité. Il ne suffira pas de le répéter, il est temps pour le pouvoir européen et pour M. Macron d’agir conformément aux résolutions votées à l’Assemblée nationale et au Parlement européen. La France peut beaucoup, avec d’autres pays européens, au sein du G7 et du Conseil de sécurité de l’ONU, pour changer le rapport de force. Une majorité de la population mondiale sait que le peuple palestinien existe. Elle réclame qu’il dispose de son État.
Patrick le Hyaric
5 juin 2024
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