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Editorial paru dans l’Humanité
L’encre du communiqué du G20 n’était pas encore sèche que les faits contredisaient les belles paroles. Prenons seulement trois décisions prises au même moment.Le géant bancaire britannique, HSBC décidait de déménager sa direction de Londres à Hong-Kong. La firme « Général Motors » annonçait que sa filiale Delphi France à Strasbourg et à Tremblay en France n’était pas dans son plan de reprise. Face aux déficits abyssaux que crée le pouvoir en octroyant cadeaux sur cadeaux aux plus fortunés et des aides aux banquiers, M. Fillon annonce les prémisses d’un super plan d’austérité d’augmentation des prélèvements sur les salariés, les malades, les accidentés du travail, les consommateurs. Aucune décision d’augmentation du SMIC. Les grands de ce monde salissent donc autant le mot « réforme » que celui de « régulation ». Les débats sur les bonus, les normes comptables sont d’autant plus fumeux qu’aucun moyen n’est décidé pour les contrôler et les faire appliquer. Mais les vraies causes de la crise ne sont jamais traitées. Les mettre en lumière reviendrait à faire le vrai procès du capitalisme lui-même. Depuis des mois des sommes considérables ont été injectées dans le système bancaire. Pour quel résultat ? Pas pour un accès facilité au crédit pour le travail, l’éducation, la formation, les services, la recherche d’un nouveau mode de développement mais pour leur permettre de reconstituer leurs marges et leurs profits. Et le plan dit de « relance » de 5000 Milliards de dollars n’a que cet objectif.
En même temps, la crise sert à une hyper-concentration du système bancaire, industriel et à l’appropriation privée des services et de la protection sociale. Ce G20 n’aura pas eu un regard pour le milliard quatre cent millions d’êtres humains qui survivent avec 1,25 dollars par jour. C’est pourtant bien le gouffre des inégalités entre le Sud et le Nord, et à l’intérieur de chaque pays au seul service du grand capital industriel et financier dans le cadre de la liberté totale de circulation des capitaux et des marchandises qui est la cause de la crise.
La bonne question à se poser désormais est celle de savoir qui contrôle le capital des banques et pour quels objectifs. Il n’y aura pas de banques au service de l’intérêt général et du bien commun sans qu’elles soient propriétés publiques, citoyennes avec une gestion démocratique. L’urgence de pôles publics bancaires pour un crédit nouveau du local au mondial, utile à l’emploi, aux salaires, à de nouveaux équipements écologiques est plus indispensable que jamais. Le fond monétaire international devrait être radicalement réformé en ce sens. Ses premières décisions devraient être l’annulation de la dette des pays pauvres et l’abolition du système qui la produit.
Sans relance du pouvoir d’achat, de l’amélioration des protections sociales, de projets de défense du travail et de l’activité, la crise risque de porter le monde à l’abîme à un terme rapproché. A force de réduire la demande intérieure avec la baisse du pouvoir d’achat, la guerre économique va encore s’amplifier. Chaque pays cherchera en effet à exporter davantage. Dans le cadre de l’austérité mondiale, cela aura pour conséquence une guerre monétaire amplifiant encore la crise. Le fait que le G20 s’érige en directoire mondial au motif que les pays membres représentent 85% des richesses produites en dit long d’une part sur l’ampleur des inégalités, d’autre part sur l’escalade de la guerre économique qui se prépare avec les dégâts humains et écologiques supplémentaires que cela induira.
La combinaison de la dette privée et de l’augmentation de la dette publique prépare une nouvelle amplification de la crise que les pouvoirs feront payer aux peuples. Tel est le sens des annonces de M. Fillon.
La dette mondiale doit dépasser à ce jour 36.000 milliards de dollars. La charge de cette dette qui alimente les marchés financiers, se paie en augmentation d’impôts, en coupes claires dans les dépenses publiques et sociales utiles, en privatisations supplémentaires. La bible des traités européens fixait à 60% de la richesse produite, l’endettement acceptable. Or, dans les dix pays les plus riches de la planète, ce taux est de 78% et risque d’atteindre… 114% en 2014. Il faut donc avoir la lucidité et le courage de dire que sans une réorientation, une transformation fondamentale, un dépassement de ce système, nous courrons vers la catastrophe mondiale. Est-ce pour le cacher ou tenter de résoudre une partie de ces problèmes que messieurs Sarkozy, Brown et Obama tendent à ce point la corde avec le tyran iranien, le menaçant de l’utilisation de la force militaire, avec les conséquences désastreuses que cela induirait. La question doit être posée. La guerre est trop souvent le moyen pour le capitalisme de chercher à résoudre ses contradictions.
Bref, le G20, qui exclut toujours l’Afrique, a été une nouvelle fois, inconsistant, muet, inefficace sur l’essentiel : la vie des peuples. Or des dispositions doivent être étudiées et mises en débat. Celles de l’accès au crédit, l’amélioration du pouvoir d’achat et la lutte contre les inégalités, le travail, l’éducation et la formation pour toutes et tous, l’annulation de la dette des pays pauvres, la coopération pour un développement humain durable, une monnaie commune mondiale, la taxation des mouvements de capitaux, l’extinction des paradis fiscaux. Face à la gravité de la situation, c’est à l’invention démocratique d’un post-capitalisme mêlant projet social, démocratique, écologique, pacifique que les peuples et les gauches doivent s’attacher. Elles n’ont pas le droit de laisser filer le monde vers la catastrophe. Le monde doit changer de base ! Travaillons-y !
Phrases de relance :
1/ « Pas un regard sur le milliard quatre cent millions d’êtres humains qui survivent avec 1,25 dollars par jour »
2/ « Continuer ainsi c’est prendre le risque de porter le monde à l’abîme à un terme rapproché ».