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Le contraste est saisissant, violent, douloureux !

D’un côté, le valeureux capitaine d’un remorqueur de haute mer,  Philippe Martinez, qui l’été dernier sauva la vie de mille huit cent vingt-huit migrants en perdition sous le soleil de plomb de la méditerranée. De l’autre, presque au même moment, une opération coordonnée des polices européennes en lien avec les agences Frontex et Europol décidée dans l’opacité et le secret total par la présidence Italienne du conseil Européen vise à ouvrir une chasse à « l’immigré ».

L’objectif de démantèlement de réseaux de passeurs va  servir  de prétexte à de grandes opérations d’interpellations  de migrants ou de « sans papiers » et à  la collecte de multiples informations les concernant. Lors d’opérations précédentes du même type, quasiment aucun passeur n’a été arrêté. Par contre, les rafles de « sans papiers » les ont conduits dans les centres de rétention et vers l’expulsion manu-militari, sans tenir compte du degré de danger auquel ils doivent faire face à leur retour. Aucun élément n’est donné sur le sort qui sera réservé aux personnes interpellées, ni sur l’utilisation qui sera faite des données personnelles. Cette vaste opération, ouverte cette fin de semaine jusque la fin du mois et qui répond du nom « Mos Maiorum » va mobiliser pas moins de dix huit mille policiers et militaires. Elle a été décidée le 10 juillet dernier et les documents « très confidentiels » qui en attestent ne nous sont parvenus que le 6 octobre. Le Parlement européen n’en a pas été informé. J’ai questionné le Conseil européen sur ces documents et cette décision. J’attends la réponse. C’est au moment même ou est lancée cette nouvelle opération qu’est stoppée l’initiative dite « Mare Nostrum » qui a pourtant permis de sauver cent mille personnes .

Notre marin breton et ses camarades du remorqueur Léonard Tide  font de l’assistance sur les plateformes pétrolières au large de Tripoli. Toutes affaires cessantes, ils sont venus en aide aux malheureux qui flottaient sur de fragiles barcasses surpeuplées au gré des vents et des courants. Ils sont l’honneur de l’Humanité. A l’opposé de cette solidarité et de cette générosité, les membres du Conseil européen,  du fond de leurs bureaux climatisés, décident en secret que le migrant peut être un délinquant en puissance ou que, conformément à une loi Italienne datant de l’année 2002, prêter secours aux migrants peut être assimilé à une « complicité d’immigration illégale ». Ceux-là ne font que nourrir  les pires sentiments de rejet de l’autre, la suspicion et la haine. Ceux-là alimentent les Fournaux des extrêmes droite.

Philippe Martinez raconte pourtant très bien que sur cette mer, il a sauvé des migrants déshydratés, affamés, apeurés, rackettés par des mafias qui les placent sur ces bateaux moyennant une rançon allant de huit cent à deux mille trois cent soixante dix euros par personne. Il y a croisé des familles nigériennes, ghanéennes, libériennes, somaliennes, syriennes, irakiennes, sri-lankaises  palestiniennes, fuyant l’enfer des guerres, des maladies et de la misère. Ils n’ont donc pas choisi ! La situation le leur impose ! Ils sont des migrants de force qui n’ont plus pour seul espoir que celui de parvenir à rejoindre les côtes européennes. Encore que depuis l’année 2000, pour trente-milles d’entre eux, leur fil d’espoir s’est éteint au fond du cimetière marin ! Cela ne rend que plus insupportable la vaste opération policière décidée par le Conseil Européen. Comme si l’immigration était un crime et le migrant un coupable alors qu’il n’est qu’une victime. Se comporter en être humain devrait au contraire conduire à protéger les migrants dont une bonne partie ne doivent leur insupportable situation qu’aux choix politiques néo-colonialistes de nos pays occidentaux ou à des  guerres qui, comme en Lybie, ont été déclenchées par des pays européens, à commencer par La France. Le droit de la mer comme tous les droits humains des migrants doivent être respectés. L’absence de mécanismes communs de sauvetage en mer et de dispositifs européens d’accueil des migrants va de pair avec cette frénésie sécuritaire et policière. D’ailleurs, les réseaux mafieux n’existeraient pas si des voies d’entrée légales étaient organisées pour les migrants et les réfugiés. Les parcours devraient être sécurisés car les dangers commencent dès les pays de départ. Peut-être conviendrait-il aussi de créer des centres de migrants pour les informer de leurs droits en partant de la situation singulière de chacune de ces populations. Des programmes de réinstallation en Europe devraient être imaginés afin qu’ils ne prennent pas la mer.

C’est surtout sur les causes de leur départ qu’il faut agir car  il n’y a pas de fatalité aux guerres, aux famines, aux crises sociales et environnementales. Sur tous ces enjeux, les institutions européennes doivent changer de politique et agir pour une mondialisation solidaire et écologique et cesser de se comporter comme une forteresse, voire un univers carcéral pour populations immigrées.

C’est évidemment une toute autre option que celle qui consiste à considérer un demandeur d’asile comme un potentiel fraudeur et à assimiler le séjour dit « irrégulier » à un délit criminel, à l’opposé d’ailleurs des arrêts de la Cour de Justice de L’Union Européenne. L’organisation des Nations Unies comme le Conseil de L’Europe appellent à cesser l’actuel hécatombe en Méditerranée en facilitant l’accès au territoire européen. Pourtant les proclamations de la Commission européenne appelant à « mettre fin aux drames de la migration » restent sans effets concrets.

Philippe Martinez est le visage de la générosité, de la solidarité, de la belle fraternité humaine. Il mérite d’être salué. Son engagement est l’incarnation de l’humanisme.

L’opération « Mos Maiorum » en est l’exact contraire. Le choix de ce nom est lourd de sens puisqu’il était l’un des mots d’ordre de la dictature mussolinienne renvoyant à  un imaginaire des valeurs de l’ancienne Rome rappelant la prétendue haute moralité des « mœurs des anciens » pour faire face à la déferlante des barbares qui seraient à « nos » portes. Elle inclut l’idée qu’il faut défendre la forteresse luttant pour défendre « la pureté de la civilisation » contre le chaos qui frappe à sa porte. Ces concepts  très  inquiétants nous font faire de grandes enjambées en arrière et portent  la très mauvaise odeur de la bête immonde.

Nos valeurs sont celles du généreux marin.

Nos combats se dirigent contre la froide Europe, pour la solidarité internationaliste et la fraternité humaine.

Traduction du document adopté le 10 juillet 2014 par la présidence du Conseil de l’Union européenne

Documents de la Présidence du Conseil de l’Union européenne aux délégations.

Sujet: Opération Commune “Mos Maiorum”

Le document est accompagné sur chacune des pages de la mention “diffusion limité”

_____________________________________________________________________

Les délégations trouveront ci-dessous la proposition d’opération de Police conjointe “Mos maiorum”, établie sur la base des lignes directrices énoncées dans le Guide des  Opérations de Police Conjointe – JPOs (doc. 16825/10 ENFOPOL 343 JAI 995 COSI 76).

1. INTRODUCTION

L’Opération Conjointe (OC) “MOS MAIORUM”, sera mise en oeuvre du 13 au 26 octobre 2014, dans le cadre de la présidence italienne du Conseil de l’Union européenne.

Cette O.C. est une continuation des opérations précédentes, tenues au cours des dernières présidences du Conseil de l’Union européenne, et a été préparé sur la base des lignes directrices énoncées dans le Guide des  Opérations de Police Conjointe

– JPOs (doc. 16825/10 ENFOPOL 343 JAI 995 COSI 76).

Le J.O. “MOS maiorum” sera une opération visant à affaiblir les capacités des groupes de crime organisé à organiser l’immigration clandestine vers l’Union européenne et sera axée sur le franchissement illégal de la frontière. Un autre objectif de cette opération est de recueillir des informations, à des fins de renseignement et d’enquête, sur les principales routes suivies par les migrants pour entrer dans la zone commune et le modus operandi utilisé par les réseaux criminels pour faire passer des gens vers le territoire de l’UE, en se concentrant également sur ​​les mouvements secondaire.

2. OBJECTIFS

L’O.C. “MOS MAIORUM” va être mis en œuvre pour:

-> appréhender les migrants en situation irrégulière et recueillir des informations pertinentes à des fins de renseignement et d’enquête;

-> identifier, poursuivre et gêner les groupes de crime organisé

-> donner une image claire et mise à jour de la situation sur la zone opérationnelle, des modus operandi, des principales tendances et éventuels changements rapides de ces points;

-> renforcer les mesures communes afin d’avoir un impact sur l’immigration clandestine (contrôles aux frontières et activités de surveillance des frontières);

-> effectuer (sur la base des résultats des analyses de risque) des contrôles le long des principales routes d’immigration clandestine sur les principaux itinéraires empruntés par les réseaux de migration clandestine (dans l’espace Schengen et sur les frontières extérieures);

-> recueillir et analyser les informations également relatifs aux mouvements dits secondaires.

3. PAYS PARTICIPANTS

Tous les États membres et Pays Associés à l’espace Schengen (PAS) vont être invités à participer à l’opération. Selon l’organisation interne de chaque pays, divers autorités légales seront impliqués dans l’opération, en particulier les autorités de police des frontières.

Les États membres et Pays Associés à l’espace Schengen sont priés d’envoyer la confirmation de leur participation à:

– Secrétariat général du Conseil (gavriil.kampouroglou@consilium.europa.eu)

– Le Ministère de l’intérieur italien – Direction centrale de la police des frontières et de l’immigration (gruppo.frontiere@interno.it)

Indicant, d’ici le 5 septembre 2014, les coordonnées (e-mail et numéro de téléphone) du coordinateur national, responsable pour l’OC “Mos maiorum”.

4. GESTION ET SOUTIEN

L’OC “Mos maiorum” sera coordonné par la Direction centrale de la police des frontières et de l’immigration du ministère de l’Intérieur italien, en étroite coopération avec l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (FRONTEX).

FRONTEX contribuera à l’opération en soutenant l’Administration italienne en fournissant des analyses de risques, transmettent les ‘informations liées aux mouvements secondaires et les données recueillies aux frontières extérieures.

5. COLLECTE DE DONEES ET PROCEDURES DE RAPPORT

Tous les pays participants, seront invités à recueillir, plus particulièrement, les informations suivantes:

A) les détails d’interception: date et heure de détection, la localisation et lieu d’interception, moyens de transport;

B) information sur les migrants: nationalités, sexe et l’âge, point et date d’entrée dans l’UE;

C) itinéraires des migrants: routes, moyens de transport la dates avant que l’interception n’ait lieu dans l’UE; routes choisis après l’interception et destination finale des migrants;

D) modus operandi: documents de voyage faux/falsifiés saisis, demandes d’asile, indication sur les passages de migrants en situation irrégulière, nationalité et pays de résidence du passeur, argent payé pour le voyage par chaque migrant;

E) observations: texte libre pour d’autres informations utiles concernant le modus operandi ou les facilités.

Différents formulaires, avec les mêmes champs d’information, seront fournies pour les “frontières extérieures – formulaire rouge” et “mouvement secondaire – formulaire bleu” (données relatives aux migrants illégaux détectés à l’intérieur du territoire, sur des vols internes ou des zones transfrontalières entre les États membres, etc).

Les deux modèles de rapports seront au format Excel et ils devront être remplis pour chaque personne détectée. Toutefois, si, dans la même interception, il y a un groupe de personnes, qui fournissent les mêmes informations, il sera possible de ne remplir qu’un seul formulaire. Des consignes seront fournies pour expliquer comment remplir les formulaires et le rapport final que tous les participants devront envoyer à la fin de l’OC.

Tous les formulaires remplis doivent être envoyés quotidiennement, avant 11:00, par chaque coordinateur national à l’adresse électronique suivante: gruppo.frontiere@interno.it

6. COUTS PREVISIONNELS

Il n’y a pas d’estimation des couts généraux de l’opération comme chaque pays participant et FRONTEX devront couvrir les coûts financiers liés à leur participation à cette opération.

7. SUIVI

Le rapport sur les résultats opérationnels finaux effectués au cours de la mise en œuvre de l’opération “Mos maiorum” sera présenté au Groupe de Travail sur les Frontières, le 11 Décembre 2014, et au Comité Stratégique sur l’immigration les Frontière et l’Asile le 12 Décembre 2014.

Les résultats opérationnels seront également envoyés à tous les États membres et Pays Associés à l’espace Schengen avant la date mentionnée (11 Décembre 2014).

Document adopté le 10 juillet 2014 par la présidence du Conseil de l’Union européenne (en anglais)

NOTE
From: Presidency
To: Delegations
Subject: Joint Operations “Mos Maiorum”

Delegations will find below the proposal for the Joint Police Operation “Mos Maiorum”, prepared
on the basis of the guidelines set out in the Guide for Joint Police Operation – JPOs (doc. 16825/10
ENFOPOL 343 JAI 995 COSI 76).

1. INTRODUCTION

The Joint Operation (JO) “MOS MAIORUM”, will be implemented from 13 to 26 October 2014,
in the framework of the Italian Presidency of the Council of the European Union.
This J.O. is a continuation of previous operations held during the last Presidencies of the Council of
the European Union, and was prepared on the basis of the guidelines set out in the Guide for Joint
Police Operation – JPOs (doc. 16825/10 ENFOPOL 343 JAI 995 COSI 76).

The J.O. “MOS MAIORUM” will be an operation aiming at weakening the capacity of organized
crime groups to facilitate illegal immigration to the EU and will be focusing on illegal border
crossing. Another goal of this operation is to collect information, for intelligence and investigation
purposes, regarding the main routes followed by migrants to enter in the common area and the
modus operandi used by crime networks to smuggle people towards the EU territory, focusing also
on the secondary movements.

2. OBJECTIVES

The JO “MOS MAIORUM” is going to be implemented to:

-> apprehend irregular migrants and gather relevant information for intelligence and investigative purposes;

->  identify, prosecute and disrupt organized crime groups;

-> give a clear and updated situation picture concerning the operational area, modus operandi,

main trends and possible rapid changes in these aspects;

-> consolidate joint measures to achieve an impact on illegal immigration (border checks and 

border surveillance activities);

-> carry out (based on the outcomes of the risk analysis), control along the main routes of illegal 

immigration on the main routes followed by illegal migrant networks (within the Schengen
Area and at the external borders);

->  collect and analyze information related also to the so called secondary movement.

3. PARTICIPATING COUNTRIES

All Member States and Schengen Associated Countries (SAC) are going to be invited to participate
in the operation. Depending on the internal organization in each country, various law enforcement
authorities will be involved in the operation, especially border guard authorities.

Member States and Schengen Associated Countries are requested to send the confirmation of their
participation to:

– the General Secretariat of the Council (gavriil.kampouroglou@consilium.europa.eu) and
– the Italian MoI – Central Directorate for Immigration and Border Police
(gruppo.frontiere@interno.it)
indicating, by 5 September 2014, the contact details (email and phone number) of the national
coordinator, that will be responsible for the JO “Mos Maiorum”.

4. MANAGEMENT AND SUPPORT

The JO “Mos Maiorum” will the coordinated by the Central Directorate for Immigration and Border
Police of the Italian Ministry of Interior, in close cooperation with the European Agency for the
Management of Operational Cooperation at the External Borders of the Member States of the
European Union (FRONTEX)

FRONTEX will contribute to the operation by supporting the Italian Authority in providing risk
analysis, forwarding information related to secondary movements and data gathered at the external
borders.

5. DATA COLLECTION AND REPORTING PROCEDURES

In particular, all participating countries, will be asked to collect the following information:

A) interception details: date and time of detection, location and place of interception,
means of transportation;

B) migrants’ details: migrants’ nationalities, gender and age, point and date of entry
in the EU;

C) migrants’ routes: routes, means of transportation and date before interception followed
to arrive in EU; stated routes after interception and migrants’ final destinations;

D) modus operandi: false/falsified travel documents seized, asylum application, indication
of smuggling of irregular migrants, facilitators’ nationality and country of residence,
money paid for the trip by each migrant;

E) observations: free text for other useful information regarding modus operandi or
facilitation.

Different forms, with the same information fields, will be provided for “external borders – red
form” and “secondary movement – blue form” (data related to illegal migrants detected inside the
territory, on internal flight or trans-border area between Member States, etc.).

Both the reporting templates will be in Excel format and they should be filled for each detected
person. However if, in the same incident, there will be a group of people, that provide the same
information, it will be possible to fill only one form. Instructions will be provided to explain how to
fill the forms and the final report that all participants shall send at the end of the JO.

All the filled forms should be sent daily, by 11.00 AM, by each national coordinator at the
following email address: gruppo.frontiere@interno.it

6. FORECAST COSTS

There is no estimation of the general costs of the operation as each participating country and
FRONTEX should cover any financial costs relating to its involvement in this operation.

7. FOLLOW UP

The report on the final operational results made during the implementation of “Mos Maiorum”
operation will be presented to Working Party on Frontiers, on the 11 December 2014, and to SCIFA
on 12 December 2014.

The operational results will be also sent to all Member States and SACs participants before the
mentioned date (11 December 2014).

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