L’arbre ENA, la forêt des services publics

le 24 avril 2019

C’est par une démagogique pirouette que le Président espère sortir du grand débat initié sous la contrainte des gilets jaunes en proposant la suppression de l’Ecole nationale d’administration. Les cercles du pouvoir espèrent ainsi noyer les revendications sociales, démocratiques et la soif de participation citoyenne en jetant en pâture une institution certes largement dévoyée, mais censée garantir l’indépendance de la puissance publique, et pour laquelle les ministres communistes Maurice Thorez, son créateur, puis Anicet le Pors ont travaillé à élargir l’accession aux classes populaires. La haute fonction publique deviendrait ainsi le bouc émissaire facile pour camoufler les choix politiques droitiers qui provoquent tant de fractures sociales et territoriales.

Contrairement à l’idée instillée, le gouvernement ne cherche en aucun cas ni à régénérer la promesse républicaine, ni à mettre fin à l’entre soi qui préside trop souvent à la sélection des hauts cadres de la fonction publique, mais bel et bien à renforcer l’endogamie en ouvrant les postes clefs de l’administration publique à des profils formés dans le giron des grandes écoles privées, françaises ou internationales, ou priment le commerce et le management capitaliste.

En ligne de mire se trouve l’idée même du concours, conquête républicaine égalitaire qui garantit le mérite contre l’héritage. Sa suppression laisserait place à un système de cooptation renforcée par cercles d’affinités et de connivences. Le moyen concret d’y parvenir est de défaire le statut de la fonction publique pour laisser place à un système de recrutement contractuel qui permettrait à la fois de précariser les agents publics des catégories inférieures et de dénaturer les missions de service public.

Alors que nous allons célébrer les 230 ans de la Révolution française, il est utile de se rappeler quelques-unes de ses conquêtes fondamentales, notamment celle transcrite dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen en son article 6 et qui indique que « Tous les Citoyens étant égaux (…) sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents »

Le statut de la fonction publique est un verrou tenace que les tenants de l’offensive néolibérale considèrent comme un frein à leur entreprise. C’est la raison pour laquelle les institutions européennes prônent l’instauration de services dit « d’intérêts généraux » (SIG), version rabougrie de services publics plongés dans le mauvais bain de la concurrence.

Le vote du 26 mai prochain aura une influence décisive sur l’avenir de nos services publics. L’intensification de la crise du capital et l’accession au pouvoir des euro-libéraux ou nationaux-libéraux peuvent pousser à des nouvelles attaques contre eux. En France, M. Macron s’y emploie avec zèle en promettant la saigné de 120 000 postes, ou en s’attaquant au statut et au régime de retraite des agents publics. L’offensive contre les services publics transparaît également dans le détricotage de la propriété publique, point d’appui essentiel pour une appropriation sociale des grands enjeux et une réponse durable aux besoins humains et environnementaux.

Il y a donc nécessité absolue d’engager un nouveau rapport de force en France comme dans le futur Parlement européen. C’est ce contenu de lutte et de combat que propose la liste conduite par Ian Brossat, en proposant notamment qu’au lieu de créer de la monnaie pour alimenter les banques privées sans contrôle, la Banque centrale européenne puisse doter un fonds européen finançant de nouveaux services publics dans les transports, le logement, la santé, l’éducation, la formation, l’agriculture et l’eau afin d’impulser un nouveau développement social et environnemental. Telle est l’une des utilités, et pas des moindres, d’utiliser ce bulletin de vote le 26 mai : se donner les moyens d’engager la défense et la promotion de services publics utiles et performants en France et au sein de l’Union européenne.


7 commentaires


rejoleprevost@gmail.com 29 avril 2019 à 7 h 46 min

Défendons les services publics, votons Ian Brossat.

chb 5 mai 2019 à 15 h 23 min

Défendons les services publics, votons contre l’UE. Le rapport de forces que syndicats et jaunes conjugués ne parviennent pas à élever est inatteignable dans le cadre de l’UE, a fortiori avec une poignée seulement de bons députés.

alain harrison 9 mai 2019 à 5 h 31 min

«« Telle est l’une des utilités, et pas des moindres, d’utiliser ce bulletin de vote »»

Pour cela il faudrait que toute la clique UE soit remplacé par….. qui ?

Bon , on peut toujours continuer de rêver, au lieu de casser ce système. Encore des faux choix en perspective. Il y a eu le choix macron au lieu de le Pen, Sont-ils si différents ?
Si Le Pen avait été élue, nous n’aurions pas su qui est Macron réellement.
Un dictateur par procuration.
«« Pouvoir que quelqu’un (donneur d’ordre) donne à un autre (fondé de pouvoir) d’agir en son nom, comme il pourrait faire lui-même. La procuration cesse au décès du donneur d’ordre. Il agit en vertu d’une procuration, par procuration.»»

Si un politicien africain met en place un système basé sur la royauté, l’Occident hurlerait, en tout cas dans l’autre siècle, Aujourd’hui (voir Guaido).
Et pourtant l’état de droit français ressemble étrangement, comme un coupié-collé, de la monarchie d’autres époques ?

Jean-Pierre Massias
Fondateur et Directeur de la Revue Est Europa
Yves Pascouau
Analyste politique au European Policy Centre

Présidence de la République: sortir de l’impasse!

Les pouvoirs et l’autorité du président de la République se sont profondément transformés au cours de la 5ème République. Si cette évolution reflète l’adaptation des institutions aux effets du temps, elle a surtout modifié le paysage politique français et l’a entraîné dans une impasse dont il convient de sortir.
Des pouvoirs progressivement renforcés
Le renforcement des pouvoirs du président de la République à l’issue de la guerre d’Algérie s’est opéré à la faveur d’une révision constitutionnelle, juridiquement discutée, modifiant son mode d’élection. Depuis 1962, le président est élu au suffrage universel direct et non plus par un collège de grands électeurs. En complément de pouvoirs étendus et d’une irresponsabilité politique intégrale, ce mode d’élection a doté le président de la République d’une légitimité politique absolue.
Ce dispositif a profondément modifié le paysage politique en faisant de l’élection du président de la République le centre de gravité de la vie politique française. Aussi cette élection absorbe-t-elle désormais toutes les autres échéances électorales. Qu’elles soient locales ou européennes, les campagnes sont systématiquement nationalisées et les résultats lus à l’aune de la future élection présidentielle. Les scrutins de 2014 n’ont pas échappé à cette règle.
En outre, la modification de la durée du mandat présidentiel, ramené de 7 à 5 ans, et l’alignement de l’élection présidentielle sur celle de l’Assemblée nationale, ont constitué un nouveau facteur d’affermissement des pouvoirs du président au détriment du Parlement. Afin de permettre au Président nouvellement élu de mettre en œuvre sa politique, l’élection législative a jusqu’à présent confirmé l’élection présidentielle. En pratique, le programme du président de la République est porté par les députés de la majorité qui l’ont soutenu lors de la campagne et qu’ils sont tenus de mettre en œuvre une fois élus. De fait, le système français ligote les parlementaires au programme d’un seul.
https://www.huffingtonpost.fr/jeanpierre-massias/presidence-de-la-republiq_b_5488111.html

La 5e République ou Monarchie.
Une analyse lucide mériterait d’être reconduite.

L’UE et ses duchés ?

Ça sent le MOYEN-ÂGE !

alain harrison 9 mai 2019 à 6 h 41 min

««« De fait, le système français ligote les parlementaires au programme d’un seul. »»»

De fait le système français ligote, ou plutôt, prend en otage le peuple français.
D’ailleurs, c’est remarquable comment les politiques mené dans tous les pays, lors des élections ont tous mentis, et cela tout le temps, sauf exception temporaire, lors des levés massives de bouclier citoyen, pour un temps, mettant le projet “affairiste” en réserve pour plus tard. Une méthode infaillible, le compromis volatil, et Macron ne l’a pas compris assez tôt vis-à-vis les Gilets jaunes, ou les pressions du système UE (?) oblige.

L’Algérie, la Soudan, l’Afrique du Sud (déçu des promesses de l’ANC ), trois peuples qui se réveillent pour une alternative.
La Justice (et tout ce que cela implique).
Les Gilets jaunes manifestent aussi cette impulsion, qu’il s’agit de rationaliser ?

La gauche est mal vue, elle a elle même été un grand collaborateur du système UE.
Ne me dites pas que la gauche ne savait pas d’en quoi elle s’embarquait au fur et à mesure que le programme du CNR était largué, et qu’en même temps la gauche polémiquait sur l’idéologie.
Les Gilets Jaunes ne sont plus là, ils sont dans la résistance. le premier pas. Mais sera-t-il suivit ou la polémique ? Le train passe ! Qui le fera dérailler ?

L’Humanité, n’a-t-elle pas le devoir de Jean Jaurès (pour qui…… vous savez), c’est à dire de se prononcer, d’expliquer et de promouvoir l’Alternative (et ce que cela implique), les réponses vraiment adéquates (non des réformettes clef en main pour la récupération) à la crise multi dimensionnelle.
Vue d’ensemble: accès aux tenants et aboutissants, aux causes et acteurs responsables.
La cohérence du questionnement: les solutions réelles.

La FI-JLM jouent le jeu de légitimer l’UE ?
Pareil le PCF-PS. La CGT fait ce qu’elle a toujours fait: gardien des intérêts des travailleurs au sein du système d’exploitation.
Cette réflexion n’est pas fait:
Les patrons sont-ils indispensables ?
Et quand ils dirons: on ne nous ne l’avait pas dit….. HA! Si j’avais su…….
Cachez cette vérité, que je na saurais voir (l’inconscient).

chb 12 mai 2019 à 11 h 33 min

Bonjour Monsieur Harrison
Vous écrivez :
” La gauche est mal vue, elle a elle même été un grand collaborateur du système UE ”
Comme c’est triste, et comme c’est vrai !
“La gauche” complice de Chirac a envoyé aux orties le référendum de 2005.
“La gauche” a appliqué ou entériné les reculs sociaux proposés par l’UE et la finance.
“La gauche” a lancé la contre réforme du Droit du Travail,
“la gauche” s’est satisfaite du délitement des services publics.
“La gauche” a vendu des tonnes d’engins de mort et entériné notre alignement sur l’impérialisme OTAN.
Et j’ajoute : le syndicalisme (subventionné, européiste, inefficace depuis une trentaine d’années) a aussi un problème de crédibilité, dont témoigne l’essor du mouvement Gilets Jaunes.
La montée du fascisme en France, en Europe, dans le monde, c’est aussi à “La gauche” qu’on le doit puisqu’elle n’incarne plus valablement ni l’intérêt ni les valeurs des masses.
L’excellente analyse de P. LH le mène à nous promettre une saine reprise en main de la politique, mais le résultat concret de nos votes pour “la gauche” invalide l’espoir qu’il fait miroiter. Sauver quelques sièges pour une orga ou une autre n’est pas l’enjeu pour nous.

alain harrison 9 mai 2019 à 7 h 01 min

C’est très simple, répétez les vérités, les dirent de façon différente, et les mettre en lien avec la vie du quotidien et les entraves incessantes du système (comme les politiques économiques du un peu ici, moins là……. fragmentaires qui grugent, à l’usure, les acquis__ au Canada c’est basique). Macron en est très intéressé, la systématisation. Il me semble, une info aux nouvelles ?

La répétition des vérités dynamiques et bien articulées est un outil. Se réveiller est une chose, le rester en est une autre.
Je salut le Peuple Algérien et le mouvement des Gilets Jaunes.
La FI a à faire des mises au point.

Le PCF suit la voie du PS par manque de perception ? Hamon a profité de l’engouement du revenu de base (marginal mais utopique ?) qu’une partie de la gauche a rejeté manu militari. Je me demande comment ils voient le salariat de B. Friot ?
Et, que pensent-ils vraiment du concept: tout le PIB à la Cotisation ?
De même les syndicats: CGT…..
Et quel promotion pour les coopératives autogérées ?

Mais avez-vous un début de commencement d’une alternative ? Et ce que cela implique, dans la RÉALITÉ ?

Je pose la question, à la gauche.

alain harrison 9 mai 2019 à 7 h 25 min

Krishnamurti, avait compris que l’emploi des mots est périlleux, aussi, il avait pris l’habitude de leur donner le sens nécessaire selon les auditoires et les personnes rencontrées.

Korzybski, en même temps, avait bien compris que la carte n’est pas le territoire.

Marx avait vue que la lutte des classes s’incère naturellement dans l’évolution naturelle, connaissant la nature de l’homme qui demeure sous le couvert de la culture humaine.
Mais, il ne faut pas laisser de côté, « l’espoir » de J.-J. Rousseau, qui disait que l’homme est foncièrement bon. Aujourd’hui, nous pouvons avoir l’idée que l’homme a le potentiel d’être bon.
La recherche aura beau décortiqué le fonctionnement du cerveau, elle n’enlèvera pas le potentiel de la conscience et sa magnificence dont la Nature nous a doté. Le mot miracle a un sens. La grande diversité et le renouvellement de la Nature après les grands cataclysmes, donne un sens au mot miracle. Les mots ont leur place, il suffit de la trouvé.
Un mot difficile à placer avec justesse est bien le mot spiritualité, instrumentalisé aujourd’hui, mais ayant un sens réel pour des générations avant nous, époque oblige (connaissance et ignorance, un tandem pour l’éternité, si je puis dire).

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