La jeunesse n’est pas dupe !

le 23 mars 2016

manifnonalaprecarite

Par Patrick Le Hyaric

Un souvenir hante les cercles dirigeants, celui des luttes victorieuses de la jeunesse sur les menaces proférées contre elle et son avenir.

Elle fut victorieuse contre le Contrat Première Embauche. Elle a obtenu gain de cause en 1986 face à M. Devaquet, ministre de J. Chirac, qui voulait introduire la sélection à l’entrée des universités. Elle a fait plier le gouvernement Balladur en 1994 contre la régression qu’incarnait le Contrat d’Insertion Professionnelle. Chaque fois, la jeune génération a refusé les sous-smic que les pouvoirs successifs voulaient imposer au service du grand patronat. Elle a obtenu gain de cause en parvenant à repousser des projets discriminatoires à son égard, soutenue en cela par ses ainés.

Dire cela, ne signifie nullement accepter sa situation actuelle, sous-estimer l’ampleur de la précarité qui mine son quotidien et son avenir. S’il s’agissait, avec le projet de loi dit « travail » d’y porter remède, nous applaudirions cette ambition et y contribuerions de toute notre énergie.

Mais c’est tout le contraire que porte ce projet de loi : la démolition du droit du travail, imaginé par un gouvernement qui répond aux exigences voraces du MEDEF. Il vise à parachever ce que ses prédécesseurs ont rêvé sans pouvoir l’imposer.

Voilà qui explique l’acharnement des cercles dirigeants. Ils usent de toutes les manœuvres de division possibles et imaginables.

Les brutalités policières se sont multipliées comme autant de provocations pour scinder le mouvement large et unitaire qui commence à se former dans les lycées et universités, quand quelques casseurs surgissent opportunément ici où là. La propagande médiatique bat son plein pour diviser une jeunesse aux aspirations communes entre étudiants, lycéens, jeunes travailleurs et jeunes sortis du système éducatif. Le ministre de l’économie est envoyé en éclaireur pour pousser les jeunes à la résignation, leur proposant en réalité de choisir une précarité accrue plutôt que le chômage. Et le maître chanteur de leur vanter les mérites de ce choix à l’œuvre en Allemagne, en Espagne ou en Italie. Mais que ne lui vient-il à l’esprit que la jeunesse ne voulait ni l’une, ni l’autre, mais juste pouvoir vivre décemment de son travail, être respectée et mener une vie non subordonnée aux aléas, de plus en plus turbulents, du capitalisme mondialisé ? Bref, pourquoi serait-il obligatoire de ne « sécuriser  que les profits » en condamnant les nouvelles générations à ne connaitre que l’insécurité de vie ?

Ce texte de loi s’insère dans un vaste dispositif visant à instaurer la grande régression des droits sociaux, salariaux, des libertés individuelles et collectives.

L’inscription de plus en plus poussée et forcée de notre pays dans le grand jeu  du capitalisme et de la concurrence mondiale réduirait la jeune génération à n’être qu’un fantassin de la guerre économique qui détruit tout sur son passage : les protections sociales et salariales, les conditions de travail, comme les équilibres écologiques.

Comme la majorité du pays, les jeunes savent s’être fait duper par François Hollande qui promettait en 2012 d’en faire sa priorité. Elle est la mieux placée pour en juger et ne se gêne pas pour le faire savoir. D’autant plus, qu’elle ne tolère pas d’être méprisée quand elle reçoit pour seules réponses à ses légitimes aspirations, soit qu’elle n’est pas concernée, soit qu’elle n’a pas lu le texte de loi !

Ces jeunes, certes dans des situations différentes, forment une seule et même génération, prise dans les filets de la précarité, touchée de plus en plus par le chômage. S’il est vrai qu’un jeune non diplômé est toujours plus exposé au chômage qu’un diplômé, il est tout aussi vrai qu’un diplômé est trois fois plus exposé au chômage aujourd’hui qu’il y a quinze ans !

Quoi d’étonnant à ce que ce soit la jeunesse des lycées et universités qui soit à la pointe de la mobilisation quand il est devenu si difficile de trouver des lieux de dialogue collectifs pour la jeunesse précarisée dont le travail est de plus en plus émietté ou qui est poussée dans les bras solitaires de l’auto-entreprenariat ou plutôt de l’auto-exploitation ?

Les générations actuelles se singularisent par un niveau élevé de connaissances et bénéficie de possibilités d’accès aux savoirs inédites, avec la révolution numérique.

La jeunesse a des exigences nouvelles et manifeste son désir de participation, d’engagement collectif. C’est peu de dire qu’elle ne trouve pas dans les cadres anciens de l’action politique de réponses à ses attentes. Observons le puissant désir d’égalité qui s’exprime dans les cortèges et, au-delà, à travers son expression multiforme, le refus d’une vie assujettie aux impératifs financiers.

Ces aspirations rejoignent celles d’une grande partie de la société. La jonction intergénérationnelle est possible aujourd’hui pour que l’égalité et la justice retrouvent droit de cité.

Certes, le pouvoir manœuvre en recul notamment à l’égard des jeunes, mais la philosophie de son projet demeure intacte puisqu’on ne touche pas aux facilités données aux chefs d’entreprises pour licencier, en se contentant d’une baisse du chiffre d’affaire pour toute justification. La garantie qu’apportent les accords de branche en matière de durée du travail n’existe plus, la flexibilité reste le maître-mot et il faudrait, in fine, travailler plus pour gagner moins.

Pour donner le change, le gouvernement a introduit dans la nouvelle mouture des éléments de la « garantie jeunes ». La formule est digne d’intérêt puisque ce dispositif s’applique aux jeunes qui sont en situation de grande vulnérabilité. Il s’agit de leur proposer une formation intensive accompagnée d’une garantie de ressource d’environ 460 € par mois. Actuellement, 50 000 jeunes sont concernés. Le projet de loi dit « travail » sous sa nouvelle mouture annonce sa généralisation pour toucher environ 840 000 jeunes sans emplois, sans étude ni formation. Outre l’inconnu du financement, prépare-t-on avec des crédits publics l’accoutumance à ce petit revenu mensuel pour les jeunes ?  Comment ne pas y voir un procédé somme toute classique d’enfumage pour freiner la mobilisation, alors que les enjeux sont colossaux ?

La jeunesse ne veut plus de promesses en l’air. Le chômage des jeunes de 18-24 ans reste proche des 25%, le taux de pauvreté y est à 20%. Il est trois fois supérieur à celui de la classe d’âge des 65-69 ans. En 1970, c’était l’inverse ! L’âge moyen d’obtention d’un premier emploi à durée indéterminée est passé de 22 ans en 1992 à 28 ans aujourd’hui. Julien Lauprêtre, Président du Secours populaire, indique : « En 2010, nous aidions 105 000 jeunes. En 2014 nous en aidions 249 000 dont 25 000 étudiants peu ou pas soutenus par leur familles et qui nous ont sollicités avant tout pour l’aide alimentaire ».

François Hollande avait fait de la jeunesse sa grande priorité et demandait à être jugé sur les progrès dans ce domaine. Le jugement des jeunes est d’une extrême sévérité, à la hauteur des promesses non tenues.

Que la jeunesse s’empare de son avenir en affichant haut et fort ses ambitions pour la France de demain, au bénéfice de tous. Là, est l’espoir.


8 commentaires


Michel Berdagué 23 mars 2016 à 19 h 29 min

Bien sûr que les 18 – trentenaire ont tous les droits d’ avoir un avenir et c’ est en cela que la proposition de Bernard Friot est des plus importantes , le salaire à vie à partir de 18 ans basé sur les cotisations . Cf réseau salariat .
La Sécurité sociale à 100 % .
La Sécurité Emploi/Formation …
Les adultes jeunes de la citoyenneté de 18 / 3O ans doivent avoir un CDI avec cette notion révolutionnaire et structurante de co-propriétaires d’ usage qu’ avance le très jeune retraité Bernard Friot .
Et non pas ce que j’ ai entendu sous la coupole de ces Lundis de g . , de la part d’ un généticien proposé un Hulot un très jeune candidat “primaires” à plus de 100 000 euros par mois : insupportable .
J’ ai donc signé cette pétition : http://vivelepcf.fr/5286/nous-demandons-la-sortie-sans-plus-attendre-du-pcf-du-processus-des-primaires-pour-2017/#petition
et signé pour une autre base commune et une seule …

Colombe 24 mars 2016 à 17 h 21 min

Je ne suis pas chaud pour les primaires ,je pense que le piège est la.
Les “frondeurs” ne viennent pas vers nous ,j’ai peur que nous ,nous allions vers eux ,avec un projet a minima.
Et puis les medias feront la pub pour la droite ,l’extreme ,Hollande et Mélenchon.
Ceux qui quittent le PS ne viennent pas vers nous ,mais vers Mélenchon.Le but est toujours le meme :détruire le PCF.
Et puis ces gens du PG ,ils viennent d’ou ? Combien d’ouvriers ?
Mélenchon me fait penser a la stratégie de Mitterrand lors de la création du PS au congrés d’Epinay en 1971.
Le programme du PS “Changer la vie” était plus “révolutionnaire” dans les mots que le notre ,c’était une tactique pour pomper nos électeurs ,il l’a avoué au congrés de l’international socialiste en 1972 ,et il a réussi.On a vu la suite avec le tournant de la rigueur de 1983.
Dans la direction du PCF (Conseil national compris)j’aimerais savoir le pourcentage d’élus ( dans les instances de la République ,maire,député etc…)si celui ci est fort j’ai peur qu’ils influencent la politique du parti ,qu’ils voient les choses plus en tant qu’élus , que gestionnaires , qu’ils ne voient pas les choses comme quelqu’un qui travaille dans une boite .D’ou la préférence d’alliance avec le PS.
On nous annonce un nouveau krach et avec la révolution informationnelle en cours ,le numérique,la robotisation ,je pense que le PCF a mieux a proposer que des primaires.
Il doit proposer une perspective claire et des luttes immédiates.
Rien ne se fera sans les citoyens conscients.

Michel Berdagué 24 mars 2016 à 20 h 42 min

Oui et alors que les camarades de la commission économique du Parti annoncent en effet un nouveau Krach et pire que ceux de 2007/2008 et du siècle dernier , toutes les mobilisations et échanges en réseaux des communistes auraient été intenses et apportant toutes les réflexions et analyses pour clarifier la situation simple à comprendre , la lutte de deux classes à intérêts contradictoires et complexe à la fois du fait des parasitages pour brouiller le débat de classes ce qui entraînent de la méconnaissance , du détournement du regard ( le rejet multiple voire l’ écoeurement ) , vers l’ indifférence grave ( les proprios lucratifs nantis décident de tout et par l’ individualisme tu deviens un petit “maître” de toi , , y a de l’ un ! croit – il ! ). Dans ces entreprises nous sommes loin du commun , de la commune , du communisme , et du collectif conscient pour faire.
Seule la Lutte de la citoyenneté des prolétaires conscients peut offrir une perspective nous mettant en résistance au sacrifice pour une perspective de vie , encore faut- il que le PCF le propose et en clair par son Projet/Programme , le Congrès des communistes s’ offre l’ occasion historique .
Tu demandes le pourcentage, oui ce serait bon à savoir mais je pense qu’ il est très important de retrouver et de mettre le paquet par la présence politique communiste dans les lieux de travail cellules /sections , là au coeur de l’ exploitation capitaliste , des managements créant du malaise du toujours plus pour la pléonexie – vouloir posséder toujours plus – du vrai pathos – ( remis en lumière par Dany – Robert Dufour à lire ces livres intervenant samedi dernier à la Sorbonne ” Marx au XXIe siècle , l’ esprit et la lettre” ) et satisfaire les dividendes en exponentiel par la précarité en pression et les plans de licenciements.
Le personnel , la personne , traité en ressources certes humaines mais où l’ humain est malmené par ce toujours plus de profits , car le formatage voire l’ aliénation sont patents .

alain harrison 24 mars 2016 à 20 h 40 min

Bonjour.

«« qu’un diplômé, il est tout aussi vrai qu’un diplômé est trois fois plus exposé au chômage aujourd’hui qu’il y a quinze ans ! »»

La compétitivité est un leur, il y a bien des étudiants,on l’a vue au Québec avec les carrés verts pervertissant la démocratie,en opportunisme ils ont judiciarisé le droit démocratique de manifester, sont près aux plus basses soumissions.

«« Pour donner le change, le gouvernement a introduit dans la nouvelle mouture des éléments de la « garantie jeunes »…….
…..Comment ne pas y voir un procédé somme toute classique d’enfumage pour freiner la mobilisation, alors que les enjeux sont colossaux ? »»

Et bien lisez cet article, vous verrez des similitudes.

«« Les programmes progressistes de Kirchner ont été basés sur le boom du prix des matières premières. Quand ceux-ci se sont écroulés, la « cohabitation » capital-travail s’est dissoute et l’alliance des entrepreneurs, de la classe moyenne et du capital étranger, avec à la tête Macri, a profité de la fin du modèle pour arriver du pouvoir.

La lutte de classes poussée depuis le bas s’était trouvée gravement affaiblie par l’alliance du monde du travail avec le régime de Kirchner, non parce qu’elle en bénéficiait économiquement , mais parce que le pacte a démobilisé les organisations de masses actives dans la période 2001-2003. »»
http://www.mondialisation.ca/fin-de-lere-post-neoliberale-en-argentine-et-ascension-de-la-droite-pure-et-dure/5510853

la « garantie jeunes »…….Un enfumage, un pacte avec le diable. Pourquoi pas un six pack, tant qu’à y être !

C’est de par le monde, la mondialisation, après le contrôle financier de l’économie, le contrôle du travail.

Les deux fondamentaux, les voyez-vous clairement ?

alain harrison 24 mars 2016 à 20 h 41 min

Maintenant la question de l’UE ?

alain harrison 24 mars 2016 à 21 h 26 min

Certaines relations humaines ont des caractéristiques partagées avec certaines politiques.

Elles sont régis sous le signe de la perversité.

Une manifestante seins nus arrêtée après le verdict pour Ghomeshi (info MSN, Canada)

Ce Monsieur, est probablement un pervers, vous savez ces manipulateurs de haut niveau, le narcissisme ultime se mute en perversité.

Si c’est cas, ou bien la justice a banalisé la perversité, ou bien elle a été manipulée par un avocat manipulateur….La question reste ouverte.

Erdogan, est-il un pervers narcissique ?

Il y a des choses à lire sur le sujet.

Il y a le concret et l’invisible, ici c’est clairement l’invisible. Il est très difficile de rendre visible une manipulation, à moins de lier expérience et étude sur la question.

Par contre, il y a toujours des signaux, au demeurant intuitif, qui n’ayant pas été rationalisés, rend le phénomène de manipulation d’autant plus destructeur. Pris dans la brume, il est impossible de s’orienter. Seul, l’intuition se prête aux interprétations, souvent funeste pour la personne piégée. Que dire d’un peuple ?

Hermann Göring

«« Bien entendu, le peuple ne veut pas de guerre. Pourquoi est-ce qu’un pauvre gueux dans une ferme voudrait risquer sa vie dans une guerre dont il ne peut espérer au mieux qu’il en reviendra entier ? Naturellement, le commun de la population ne veut pas de guerre ; ni en Russie, ni en Angleterre, ni en Amérique, ni, en ce qui nous concerne, en Allemagne. C’est bien entendu. Mais, après tout, ce sont les dirigeants d’un pays qui en déterminent les lignes d’action, et ce n’est jamais qu’une question simple que d’entraîner le peuple, que ce soit dans une démocratie, une dictature fasciste, un Parlement, ou une dictature communiste. […] Le peuple peut toujours être converti à la cause des dirigeants. Cela est facile. Tout ce qu’il suffit de faire, c’est de leur dire qu’ils sont attaqués et dénoncer les pacifistes pour leur manque de patriotisme qui expose le pays au danger. Cela marche de la même manière dans tous les pays. »»

Et cette recette faut fureur depuis la dernière décennie de l’autre siècle.

Mais maintenant, elle a des variantes: guerre humanitaire au nom des droits de l’homme, guerre de basse intensité…….guerre contre le terrorisme.
Les médiats y participent à fond, n’est-ce pas.

La boîte de Pandore a été ouverte.

Mais comment la refermé ?

Il faut finir ce que l’on a commencé ?
Les énergies à consacrer, et surtout un consensus internationale….et l’après…..
Mais les jeux politiques, financiers et terroristes. Juste un exemple: Erdogan, 3 milliards et entré dans l’UE, un cocktail empoisonné. Mais qui sont les empoisonneurs ?

Le.Ché 26 mars 2016 à 15 h 52 min

D’après le PEP ( Parti de l’Émancipation du Peuple)le texte de la loi sur le code du travail a été rédigé par l’U.E et le MEDEF donc il est normal que ce texte soit pour l’exploitation à fond des salariés. Hollande et Valls veulent appliquer ce texte parce qu’ils sont dans une dérive de droite à la Schroder et que leur modèle est les USA.

chb 31 mars 2016 à 17 h 14 min

Le texte de la loi Travail, porté par la si souriante M. El Khomri, est apparemment inspiré de ce que l’UIMM cherchait à imposer en négo de Convention de branche.
Dommage que les petits patrons, qui n’auraient pourtant pas grand chose à y gagner, se laissent mener par le bout du nez encore une fois.

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