Jusqu’où la guerre ?

le 31 janvier 2023

Avec la livraison de chars allemands de type Léopard, couverte par l’envoi de chars Abrams américains à l’armée ukrainienne, nous entrons dans une nouvelle phase de la guerre. Une nouvelle étape dangereuse. Une guerre que les protagonistes veulent durable au mépris des intérêts des peuples.

L’agresseur, la Russie de Poutine, en violation du droit international, n’a certes pas atteint ses objectifs d’occupation de la totalité de l’Ukraine et du remplacement du gouvernement de Kiev, mais elle sème depuis des mois un interminable cortège de morts et de blessés, d’atrocités, de privations et d’exodes, de destructions d’équipements et de services publics. Tout en bombardant régulièrement des villes et des villages, son armée semble se concentrer sur le flanc Est, théâtre d’immondes boucheries.

Des militaires ukrainiens témoignent que de jeunes Russes enrôlés dans l’armée d’occupation sont offerts comme chair à canon, quand ce ne sont pas les prisonniers intégrés – souvent de force – à la tristement célèbre milice privée Wagner.

L’Ukraine réarmée, par les États-Unis et les puissances de l’OTAN, résiste et la fourniture d’armes galvanise le président ukrainien qui désormais réclame des avions de combat et des missiles supersoniques.

S’il se le permet, c’est qu’il a l’autorisation de l’OTAN de parler ainsi, au risque de la confirmation d’un changement de la nature de la guerre. L’insistance de sa demande d’envois de chars sophistiqués occidentaux incite à réfléchir à au moins à une question. L’armada des chars ukrainiens est-elle détruite alors que les médias occidentaux ne cessent de vanter les déboires de l’armée russe ? Après être passés d’une guerre quasi interne entre le pouvoir de Kiev et les régions séparatistes de l’est à une guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, nous assistons à une guerre internationalisée entre la Russie et l’OTAN.

En tout état de cause, l’envoi de chars signe la certitude d’une guerre longue, souhaitée de part et d’autre, sur le dos du peuple ukrainien. Car ce sont les enfants, les femmes, les hommes, les travailleurs ukrainiens qui subissent le déluge de souffrances et de peines d’une guerre sanglante et destructrice, pour laquelle ils ne sont en rien responsables.

L’Ukraine est désormais la proie économique et géopolitique entre impérialismes antagoniques. Il faut faire cesser cela ! et vite ! Les enfants de la Russie et les familles populaires en paieront aussi le prix du sang et des larmes. Au-delà, l’internationalisation de la guerre a déjà des effets collatéraux en cascade contre les peuples du monde entier.

Pendant ce temps, les spéculateurs et quelques grandes firmes, souvent à base nord-américaine, de l’armement, de l’énergie, de l’agro-alimentaire, des transports engrangent des masses énormes de capitaux tout en reconfigurant le capitalisme mondialisé. Ainsi, leur domination, rendue encore plus agressive, s’accroît pour soumettre les travailleurs du monde entier et les peuples aux sacrifices et aux restrictions de libertés.

Les dirigeants américains ont donné le ton dès le début de l’année, puis les ministres européens de la défense réunis sur la base militaire américaine de Rammstein, le 26 janvier, ont exécuté. La secrétaire adjointe à la défense a été claire sur les intentions : donner à l’Ukraine tous les moyens dont elle aura besoin pour inverser la dynamique, percer les lignes de défense russe et reconquérir ces territoires.

C’est donc l’enterrement définitif des accords de Minsk. Il ne s’agit donc plus d’aider l’Ukraine à se défendre, mais de passer à l’offensive. On glisse peu à peu sur la dangereuse pente d’une co-belligérance et d’une confrontation, de plus en plus directe, entre les pays de l’OTAN et la Russie.

La voie serait ainsi ouverte à tous les risques, à tous les imprévus, à l’erreur fatale. Ce n’est donc pas de sommet de guerre dont a besoin l’humanité aux prises d’une multitude de crises, interagissant entre elles, au point d’en menacer l’existence.

Ce sont des sommets pour la paix, la sécurité humaine et environnementale globale qui devraient être convoquées en urgence. On ne peut accepter la reprise de cette folle course aux armements sur le continent européen, alors qu’il y a tant de besoins à satisfaire pour les services de santé, d’éducation, pour le droit à une alimentation de qualité, à l’énergie décartonnée, au travail émancipé.

Le lien entre progrès social, écologique, humain va de pair avec les combats pour la paix et le désarmement. Il y a urgence à le faire entendre. La guerre ne sera gagnée par et pour aucun peuple. Par contre, l’union des peuples peut faire gagner la paix. Les conditions d’une négociation après un cessez-le-feu sont connues : repartir des frontières du 21 février 2022 ; respecter et garantir la souveraineté territoriale de l’Ukraine et de la Russie ; retourner aux accords de Minsk avec l’organisation d’élections sous le contrôle de l’ONU dans les quatre régions de l’Est de l’Ukraine ; statut de neutralité de ce pays en lien à la mise en place d’une architecture de sécurité commune aux deux pays et à l’Europe tout entière, comme alternative à l’OTAN – qui n’aurait plus lieu d’être.

Au lieu de s’asseoir docilement dans le fourgon américain, la France devrait porter une diplomatie de paix. Encore faudrait-il pour cela que le Parlement puisse en débattre régulièrement afin de décider d’initiatives, non pas de livraisons de chars Leclerc ou d’avions-Rafale, mais de discussions entre les dirigeants ukrainiens et russes, en lien avec l’Organisation des Nations unies.

La France pourrait produire des actes en direction de la Chine ou de l’Inde pour peser avec elles en faveur d’une sortie de la guerre.

Nous ne sous-estimons pas le niveau des efforts à produire, les contradictions à dépasser, les pressions à lever. Mais la voie de la paix est la seule pour la construction durable de notre humanité commune.

Patrick Le  Hyaric

Le 30 janvier 2023


12 commentaires


Moreau 2 février 2023 à 10 h 11 min

Tous les Hommes de la Terre sans exceptions, ne sont-ils pas des esclaves plus ou moins des guerres de toutes les sortes, il est urgent d’apporter la meilleure réponse que n’ont jamais apporté de siècle en siècle la culture savante et la culture marchandise écrasant d’une suffisance respective la culture populaire majeure lisible, et altérant forcément par tant de domination nombre d’oeuvres de la culture populaire majeure lisible.
La culture marchandise n’est pas beaucoup appréciée dans ce vingt et unième siècle, en France pour parler de notre exemple, nombreuses sont les personnes, femmes et hommes, qui disent et réitèrent qu’il n’y a que des bêtises à la télévision (même avec plus de quarante chaînes).
Ma conviction est que les étatismes et les guerres sont des conséquences de sectarismes culturels privilégiant de façon inhumaine la culture savante et la culture marchandise. La culture populaire majeure est un thème absent dans la classe politique ; faut-il rappeler encore que le mot “PAIX” est un mot parmi les mots qui définissent le mot “POÉSIE”, c’est important le dictionnaire et l’honnêteté à l’égard des mots.

Larue 5 février 2023 à 13 h 54 min

Merci Patrick pour ces propos clairs sur cette inquiétante situation. Ce que veulent les peuples russes et ukrainiens c’est tout simplement la paix

Alain Harrison 6 février 2023 à 20 h 35 min

Bonjour, dans votre lettre:

« On ne fait pas la guerre pour se débarrasser de la guerre », Jean Jaurès.

Je suis revenu cette semaine sur les dangers que recèle la guerre déclenchée par la Russie contre le peuple ukrainien (lire plus bas et appel du collectif pour la paix).

Mais qu’est-ce qui a déclenché la guerre (2014 ou 2022) ?

L,honnêteté dans les faits ?

Alain Harrison 6 février 2023 à 20 h 55 min

Le coup d’état en Ukraine (revoir la suite des événements et des ententes Est-Ouest ?). Les référendums ? La poursuite systématique de l’OTAN en UE ?
La destruction de pays et le chaos, Irak, Libye, Printemps Arabe caduque, le retour des extrémistes en Afghanistan (tout ça pour ça, le sort des femmes et des enfants _ conditionnement ?). L’Occident au consumérisme, que les jeunesses désirent. La Chine aura, un jour ou l’autre , à faire face à ses contradictions.
La lecture de:
L’ultime retour des barbares
Fethi Gharbi
D’où venons-nous, qui détermine le chemin à parcourir (de l’hominisation à l’humanisation).

Alain Harrison 6 février 2023 à 21 h 31 min

Dépasser notre conditionnement est probablement un des prochains pas ? L’Évolution, mais nous y sommes si peu attentifs, ne cessent de nous surprendre, aujourd’hui seulement nous en avons la perspective, les moyens déployé par les recherches concernant la paléo, l’antropo, l’archéo et la génétique nous la livre progressivement, parfois par bond.

Un document à recommander pour tous, vue sa dimension:

Un Grand Pas Pour L’Evolution – Episode 1 – L’Intelligence

La vie est apparue sur Terre il y a quatre milliards d’années. Depuis, des millions d’espèces différentes ont vu le jour, rudimentaires ou complexes, parfois dotées de facultés étonnantes. Mais aucune n’a jamais pu égaler le degré d’intelligence de l’homo sapiens sapiens, pas même le grand singe, plus proche cousin de l’Homme. Comment les humains en sont-ils arrivés à développer cette faculté supérieure ? Quels mécanismes complexes sont à l’oeuvre ? Des d’images de synthèse, des enquêtes scientifiques menées sur le terrain et des allers retours entre le passé et le présent permettent d’appréhender cette vaste question.

https://www.youtube.com/watch?v=_7rR322JmL8

Toutes les visions culturelles (base religieuse, voir USA) sont partielles et partiales. Et vue l’instrumentalisation de la science (en plus les réseaux sociaux s’en mêlent….) de tout bord tout côté, comment la connaissance peut-elle devenir un guide viable avec la culture majeure (toujours pas claire).

Alain Harrison 6 février 2023 à 22 h 24 min

«« théâtre d’immondes boucheries. »»
Le monde de hiérarchie (religieux, politique, idéologique ou du travail), semble indépassable, vue notre condition humaine, et cela doit être mis en lumière, et la science en soulève des coins, encore éparse.

Alain Harrison 6 février 2023 à 22 h 50 min

Quand l’occident bombarde, le mot boucherie …………

Les milliers de bombes sur Bagdad…. boucherie…..collatérale…. non responsable…..
Cuba sous embargo…..comment dire?
Le Chili d’Allende …. les Us: affamé le peuple…

Deux poids deux mesures pour la boucherie de part et d’autres. Condition humaine

Alain Harrison 6 février 2023 à 22 h 54 min

La révolution russe tout comme la révolution française, sabordé.

Il demeure: Cuba, Vénézuéla……

Que reste-t’il de la France ? Le symbole de l’espoir !

Alain Harrison 7 février 2023 à 6 h 47 min

La gauche a le don de détruire toute initiative qui a le potentiel de régénérer celle-ci tout en réduisant son potentiel d’intégrer les causes (écolo, égalité femmes hommes,…). la NUPES n’était-elle pas dans cette voie, son programme n’était-il pas une synthèse raisonnable comme premier pas vers le pouvoir ? L’approche à reculon (certains égo) des divers partis est une manie. Voir conditionnement d’attitude de part et d’autre. La NUPES était le dernier rendez-vous ?
La question se pose en regard de l’évolution de la gauche depuis la fin de la guerre 1945.

Alain Harrison 7 février 2023 à 8 h 15 min

«« Les conditions d’une négociation après un cessez-le-feu sont connues : repartir des frontières du 21 février 2022 ; respecter et garantir la souveraineté territoriale de l’Ukraine et de la Russie ; retourner aux accords de Minsk avec l’organisation d’élections sous le contrôle de l’ONU dans les quatre régions de l’Est de l’Ukraine ; statut de neutralité de ce pays »»

Du déjà vue, les deux pays: Palestine et Israël, jamais respecté.

Alors imaginer cette entente Occident – Russie. Avec ou sans US-OTAN ?
Sous l’union des peuples, l’ONU ?
Ou la communauté internationale, les 192 ou les 50 – US ?

Quels arguments pourraient unifier la France d’abord ?

Macron a le 49-3, imparable.
La question de la retraite, si elle ne sert pas à faire tomber Macron et ses députés pour de nouvelles élections présidentielles et législatives, n’aura servi à rien ?

Si le peuple ne veut pas arrêter la guerre, les injustices économiques, il n’a qu’à ne pas s’intéresser ;a une Constituante Citoyenne dans laquelle il devra s’impliquer. C’est la seule voie. Vous le voyez ?

Alain Harrison 10 février 2023 à 6 h 54 min

Que la gauche s’unisse comme l’UE contre la Russie. Mais qui mène vraiment le bal des conflits ?
S’unir contre la privatisation de la retraite étape suivante de la réforme.

Après la Russie, entente entre US-Chine (?) deux pays capitaliste, ce sera l’Amérique Latine dont l’OTAN américain forme la principale force militaire (ses bases et son influence tout le long de la deuxième moitié du siècle dernier, et de plus toute l’influence religieuse occidentale suprématiste.
Enfin, la fabrication de robots militaires, carrément la terreur.
Quel gouvernement aura le courage de criminaliser la robotisation militaire ?
Maintenant les drones font parti intégrante de la guerre.
Cette guerre est devenue mentale (la durée relayé par les médiats) comparativement à l’Irak ou la Libye. Il n’y avait rien derrière, aucun soutient versus la Syrie. L’Afghanistan a été un point tournant ?
Cette guerre cessera-t’elle par la prise de conscience des pertes humains à un moment donné ?

Alain Harrison 23 février 2023 à 21 h 33 min

Bonjour.

Maintenant, au mordus de politiques (radio-canada), des images de destruction en Ukraine me font penser aux destructions au Liban (d’avant 2000 __ qui était l’agresseur ?) Je ferai quelque recherche. Si quelqu’un peut amener quelques infos sur le chaos qui régnait au Liban, une guerre urbaine qui a duré plusieurs années.

Ça me fait dire, que la différence des guerres réside dans le suivi, et aujourd’hui les médiats sont le nerf de la guerre. Quand aux réseaux sociaux, on peut questionner leur véritable effet dans le temps, selon les stratifications des réseaux et internes de ceux-ci (les influenceurs plus ou moins suivi).

Chili d’Allende, Liban, Irak, Libye, …… Ukraine. Quelles différences ?

Un peu d’histoire: Résumé environ une page.

Liban
Le « pays du Cèdre » en souffrance
https://www.herodote.net/Le_pays_du_Cedre_en_souffrance-synthese-116.php

Qui a déclenché la guerre du Liban ?
Israël
Après ses victoires sur ses voisins arabes lors des guerres des Six Jours et du Kippour, Israël doit admettre que la résistance palestinienne n’est pas morte, même si elle se manifeste de façon plus diffuse.

6 juin 1982 – Israël déclenche la guerre du Liban – Herodote.net

Avant, c’était une guerre civile entre différents clans en quelque sorte.
Depuis, c’est la diaspora des identités religieuses qui se sont partagés le pouvoir, jusqu’à la catastrophe du port.

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