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On aura commémoré cette semaine, deux événements importants. En filiation directe entre eux, ils sont significatifs de l’action du mouvement progressiste français depuis la Révolution française.
L’un, le centenaire du discours historique de Jean Jaurès, aux côtés de Marcel Cachin et du communard Edouard Vaillant, au Pré-Saint-Gervais. Prévu à l’origine pour commémorer la Commune de Paris, il s’était transformé sous la pression de l’actualité et des tensions, en un grand rassemblement contre la guerre et pour l’amitié entre la classe ouvrière allemande et française.
L’autre, ce 27 mai, marquant le 70ème anniversaire de la première réunion du Conseil national de la Résistance qui prépara la rédaction et l’adoption du programme du Conseil national de la Résistance. Comparaison entre ces deux événements décisifs ne serait pas raison. Pas plus que leur valorisation aujourd’hui pour tenter de les recopier. L’histoire ne se répète jamais. Chaque génération doit inventer avec son temps. Mais, le fil rouge de la paix, de la solidarité internationaliste, du progrès social et humain, relie ces actes du passé au présent et à l’avenir. Tout comme la passion du rassemblement populaire pour la liberté, améliorer le sort de l’immense majorité et pour l’émancipation. C’est au regard de leur immense portée qu’il nous faut nous résoudre à constater douloureusement comme une fracture entre ce que portait ces femmes et ces hommes et ce que subissent actuellement nos concitoyens. Le 25 mai 1913, Jaurès appelle au rassemblement pour la paix, au refus de la loi des trois ans du service militaire, pour que soit mis en place un système de retraite. En mai 2013, le gouvernement achète deux drones militaires aux Etats-Unis, défend l’intégration, poussée par N. Sarkozy de la France dans l’OTAN et envisage une nouvelle contre-réforme pour reculer encore l’âge ouvrant droit à la retraite. Quel contraste avec le programme du Conseil national de la Résistance dans une France détruite par la guerre et les retours en arrière que subissent nos concitoyens, dans un pays aux potentialités considérables. Le Conseil national de la Résistance prône « l’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l’éviction de grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie », et « le retour à la Nation des grands moyens de production (…) des sources d’énergie, des richesses des sous-sols, des compagnies d’assurance et des grandes banques », « un plan complet de sécurité sociale », géré par l’Etat et les salariés.
C’est le chemin inverse qui est pris au grand galop depuis le retour de la droite au pouvoir en 2002. Malheureusement, le nouveau Président de la République et son gouvernement n’ont pas décidé de résister aux coups de boutoir des droites, du syndicat du grand patronat et des milieux financiers, des institutions européennes qui visent à démanteler le code du travail, la protection sociale et les biens publics. Il ne résiste pas. Bien au contraire ! Il obtempère aux injonctions de Bruxelles qui en demande toujours plus dans le démantèlement de nos systèmes sociaux, de retraites ou de protection sociale, en attaquant les entreprises publiques et les services publics. Autant de choix qui ne font qu’aggraver les crises économiques, sociales, écologiques partout. Pire, voici que le Président de la République, en déplacement au congrès du parti social- démocrate allemand, a vanté des contre-réformes menées là-bas qui aboutissent à une augmentation de la pauvreté, avec sept millions de salariés gagnant moins de 700€ par mois. M. Hollande a donc, la semaine dernière, franchi un nouveau pas dans ce cap dangereux, prônant le démantèlement des acquis sociaux des travailleurs et particulièrement celui d’un salaire minimum. Il a choisi de valoriser un modèle aux antipodes de ceux de Jean Jaurès, du Conseil national de la Résistance où siégeaient ensemble gaullistes, catholiques, socialistes et communistes.
Rien aujourd’hui ne justifie de livrer ainsi une part toujours plus grande des richesses produites au vorace appétit de la finance. C’est au contraire en s’y opposant par la mobilisation des forces sociales et politiques, prônant le progrès social, qu’on peut sortir de la crise et des souffrances sociales qu’elle engendre. La crise et les valeurs de la gauche appellent une relance du progressisme en France et en Europe avec une renaissance industrielle, agricole et des services, s’inscrivant dans l’indispensable mutation écologique de nos systèmes productifs et de nos modes de consommation. Le meilleur service que peut rendre la gauche au pays et à nos concitoyens, consiste à inventer avec eux un nouveau pacte social, démocratique et écologique, dans le débat le plus large, à partir de chaque usine, quartier, laboratoire, école, village. On nous rétorquera que la tâche est difficile. Elle l’est ! Elle l’est d’autant plus que des forces de droite et d’extrême-droite, alliées à celles des milieux de l’europeïsme ultralibéral et du capital international, sont à l’offensive pour obtenir sans cesse du gouvernement toujours plus de décisions rétrogrades. Ce n’est pas en leur cédant toujours que la situation s’améliorera et que la gauche se renforcera. Au contraire ! La politique actuelle prépare un affaissement dramatique du pays. Or, comme à d’autres périodes de l’histoire, les forces existent, disponibles pour se mobiliser dans l’unité afin d’obtenir d’autres choix, porteurs des résultats qui manquent tant à ceux mis en œuvre aujourd’hui. Tel est le sens de la proposition d’un nouveau contrat politique en mobilisant toutes les forces de la gauche politique, sociale, intellectuelle pour réinventer la République sociale et une démocratie régénérée, indissociable d’une refondation de la construction européenne.
C’est pour contribuer à en créer les conditions que se tiendront les Assises nationales contre l’austérité et pour le changement à gauche, le 16 juin prochain à Montreuil, auxquelles participeront des centaines de délégués et une vingtaine d’organisations et d’associations. Là vont revivre, de plein pied dans notre époque, les idéaux de Jaurès et du Conseil national de la Résistance pour que viennent « les jours heureux ».