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Le formidable élan de solidarité mondiale envers le peuple haïtien fait chaud au cœur. L’ampleur des solidarités populaires reste plus forte que les égoïsmes que les puissants voudraient nous inculquer. C’est plutôt rassurant sur la nature humaine. Il faut continuer !
Saluons une nouvelle fois toutes les ONG, les professionnels de la santé, de la sécurité civile pour leur courage et leur dévouement. Il est dommage que la coordination de cette aide ne soit pas mieux organisée. Il ne faudrait pas rajouter du chaos au chaos ! C’est l’urgent ! Il manque de tout là-bas : d’eau potable, de médicaments, de médecins, de couvertures, de nourriture. Ce peuple courageux et digne, envers qui nous avons une immense dette, doit affronter l’insupportable, l’horreur de la mort provoquée par un séisme si puissant qu’il a réduit la solidité du sol à la fragilité d’une feuille de papier. Injuste, rageant, révoltant que cette île, baptisée du beau nom de « perle des caraïbes », ait pu être ainsi transformée en un vaste champ de ruines, en un amas de décombres. L’un des pays les plus appauvri du monde subit une des plus grandes catastrophes qu’ait connue la planète. Depuis des jours nos frères haïtiens survivent en enfer.
Oui, révoltant, car il n’y avait aucune fatalité à tant de dévastations et de fauchages de vies humaines. Si les bâtiments avaient été plus solides, si le système de santé et de services publics avaient été en situation de réagir, si l’Etat n’était pas sous tutelle, si ce peuple n’avait pas été, depuis si longtemps, acculé à la pauvreté, à la misère, ponctionné hier par de fortunés blancs esclavagistes et aujourd’hui victime d’une puissante sangsue répondant au nom de Fond Monétaire International, il en eut été autrement.
Bien sûr, ce ne sont pas les pouvoirs mondiaux qui organisent les tremblements de terre! Mais notre révolte naît de cette violente injustice qu’un séisme de même amplitude ne provoque pas les mêmes dégâts selon qu’il se produit à Port-au-Prince ou à Tokyo. Celui-ci va peut être faire plus de victimes que le tsunami. Comment expliquer que des avions militaires, des satellites qui scrutent le sol en permanence, au dessus de l’Irak et de l’Afghanistan, ne soient pas mis au service du bien commun, de la vie ? Comment justifier que des centaines de milliards de dollars soient gaspillés chaque jour dans la course aux armements et que, non seulement, on laisse un peuple démuni, mais on continue à le dépecer de tout. Depuis deux cent ans, l’ancienne Hispanola, la petite Espagne de Christophe Colomb s’épuise à rembourser une odieuse dette sans cesse grossie de ses intérêts. Il y a à peine cinq ans, après le cyclone « Jeanne », Haïti a dû débourser des dizaines de fois plus d’arriérés de créances pour obtenir à peine dix pour cent de ce qui lui avait été promis pour sa reconstruction.
Encore une fois les institutions financières internationales portent une lourde responsabilité, jusqu’à faire perdre à ce peuple sa souveraineté politique et économique.
Et même si nous saluons les efforts de solidarité des Etats-Unis depuis le séisme, le dévouement de ses médecins, de ses spécialistes de la sécurité civile, nous mettons en garde. Les dirigeants nord-américains, présidents d’hier et d’aujourd’hui, alliés pour la circonstance, ont un comportement qui ressemble à un « colonialisme de la solidarité ». Y-a-t-il besoin de 12 000 marines pour envahir l’île ? Au nom de quoi se sont-ils emparés de l’aéroport ? Pourquoi ne pas avoir réuni le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations-Unies pour organiser une coopération mondiale de solidarité, sinon pour écarter et discréditer l’ONU, une nouvelle fois ?
Le séisme ne doit pas fournir l’occasion aux dirigeants nord-américains d’occuper l’île, de l’administrer et d’installer des bases militaires dans la région, après celles qui l’ont été en Colombie et après les coups en sous-main au Honduras.
Et on ne peut que déplorer que l’Union européenne, qui paraît-il s’est doté d’un Président stable et d’une ministre des affaires extérieures, avec le traité de Lisbonne, soit restée si longtemps silencieuse, inactive, en tant qu’institution et communauté.
Tout en participant à l’indispensable solidarité avec le Secours Populaire Français, nous nous engageons à ne pas oublier, les enfants, le peuple d’Haïti. Sans attendre, les institutions financières, les Etats doivent annuler, sans condition, toutes les dettes. La France et les Etats-Unis doivent réparer les effets de leurs politiques depuis l’indépendance de l’île. Une grande conférence de reconstruction et de développement durable d’Haïti, créant les conditions de sa souveraineté économique et politique, doit être organisée sous l’égide de l’ONU. Nul humaniste ne peut vivre tranquille tant que nos semblables à Haïti et ailleurs devront supporter l’insupportable souffrance. Ce peuple n’a jamais rien eu que son courage. Ne le laissons pas tomber!