De quel « JOB » parlez-vous Madame la Ministre de la Santé ?

le 6 octobre 2016

L’hémorragie industrielle et agricole qui se poursuit mine les bases de notre protection sociale et aggrave toutes les insécurités de vie. Moins de personnes au travail, ce seront moins de recettes pour les caisses de la sécurité sociale. C’est dans ce contexte qu’a jailli, à grand renfort de propagande, cette fausse bonne nouvelle de la fin prochaine du fameux « trou de la sécurité sociale ».

Au moment même où nos hôpitaux perdent leur sang, qu’un nombre croissant de nos concitoyens ne peuvent plus se soigner correctement, la ministre de la Santé a déclaré : « En 2017, le trou de la Sécu aura disparu », rajoutant « la gauche fait le job ». Mais de quel « job » parlez-vous au juste Madame la Ministre ?

Si d’un point de vue purement comptable, l’annonce peut satisfaire ceux qui ne voient le monde qu’à travers les chiffres, on aurait souhaité un peu de retenue et de franchise. Car, pour tout « job », ce résultat procède d’un véritable travail de sape d’un des ferments de la République sociale, inscrit dans nos institutions grâce aux combats syndicaux, portés de tout temps par la gauche.

Heureusement que les médecins et personnels hospitaliers ont un tout autre sens des responsabilités. Ils alertent, avec leur cœur et la passion de leurs nobles missions, sur la situation extrêmement dégradée de la santé publique, dénoncent la surchauffe des hôpitaux et la pression terrible qui s’y exerce sur les salariés.

Car pour parvenir à son objectif l’année prochaine, le gouvernement ne compte pas faire cotiser les revenus du capital mais au contraire tenir la barre d’une diminution drastique des crédits accordés à la santé publique. Ainsi, pour le budget des hôpitaux jusqu’en 2017, trois milliards d’euros d’économies sont prévues, dont 860 millions issus de la « maîtrise » de la masse salariale, ce qui va se traduire par la suppression de 22 000 postes, soit 2% des effectifs. A cette mesure s’ajoute une chasse aux lits dans les hôpitaux, ce qu’on appelle dans le jargon libéral « une évolution maîtrisée du développement de la chirurgie ambulatoire ».

Avec les suppressions d’emplois qui s’accélèrent à un rythme soutenu dans les hôpitaux publics et les avantages croissants accordés aux cliniques privées, le service public hospitalier est au bord de la rupture. Désormais, le secteur privé lucratif représente 34 % de l’activité hospitalière en France. Un record !

S’agissant des autres branches de la sécurité sociale, la situation est identique. La droite revendique d’ailleurs la paternité des réformes engagées, notamment concernant les retraites, et promet d’aller encore plus loin, plus vite et plus fort !

Une politique progressiste devrait prendre le contre-pied de ces orientations et s’engager dans la création d’un pôle public du médicament qui permette, de la recherche à la distribution, une maîtrise publique de ce secteur très lucratif. Les profits colossaux des multinationales du médicament sont réalisés grâce à des stratégies commerciales qui ont tout à voir avec  l’argent-roi et rien avec des objectifs de santé publique. Pourquoi ne pas considérer que si un produit est efficace, il doit être remboursé à 100% alors que se multiplient les remboursements partiels de médicaments, dont une bonne part a des vertus curatives loin d’être évidentes.

Ces attaques ont leur cohérence, à savoir une opposition au principe même d’une socialisation des richesses produites. Chaque année, on en trouve la trace dans les ponctions opérées lors du vote de la loi de financement de la sécurité sociale. La conception même de cette loi annuelle s’inscrit dans les thèses libérales et les objectifs du capital financiarisé, qui tournent les dos à l’ambition des concepteurs de la protection sociale, dans un pays pourtant exsangue au lendemain de la seconde guerre mondiale.

Il est d’ailleurs étrange que l’on s’attaque aux fondements de la sécurité sociale, à ses missions et à son financement au moment où, aux Etats-Unis, monte l’exigence d’un véritable système de santé publique. Rappelons que dans ce pays où la santé est libéralisée, les dépenses qui lui sont liées représentent 17% des richesses produites, avec des résultats médiocres alors qu’en France, elles ne représentent que 11% de nos richesses nationales !

Or, amener les caisses de protection sociale à l’équilibre voire excédentaires est possible. Le plein-emploi réel y contribuerait grandement, tant les cotisations sont dépendantes du niveau de chômage et de précarité. La fraude aux cotisations patronales, quant à elle, représente aujourd’hui plus de 20 milliards d’euros. Et imaginons ce qu’apporterait une politique contributive visant à créer de nouvelles recettes grâce à une participation des entreprises, modulée selon qu’elles créent de l’emploi, aident à la formation ou s’engagent pour le bien commun. Parallèlement, les exonérations de cotisations seraient supprimées et les revenus du capital financier mis à contribution. Sans parler de la manne que dégagerait une chasse conséquente à l’évasion fiscale comme le montre abondamment ce numéro de notre magazine.

Bref, un nouvel âge de la protection sociale est possible. Elle est indispensable notamment pour répondre au grand enjeu de l’autonomie des personnes âgées. C’est à un nouveau progrès de civilisation, à inscrire dans la mémoire collective d’une Nation, auquel il faut s’atteler et non à un cri, triomphal et comptable, mais de bien peu de poids  humain!  C’est toute la différence avec ce qui pourrait être un acte fondateur d’une sortie de l’enfer néolibéral dans lequel sont plongées nos sociétés avec une gauche de plain-pied dans les potentialités qu’offre notre époque, respectueuse de ses combats historiques et de l’héritage de ses ainés, parmi lesquels le Ministre communiste Ambroise Croizat. Tel est le débat, Madame la Ministre !


4 commentaires


Pierre 6 octobre 2016 à 22 h 04 min

Allons jusqu’au bout de la logique dite “libérale” (un bien beau mot pour une pensée hideuse…):

-1er temps: fabriquer des pauvres (facile, il suffit de délocaliser et fermer les usines, de supprimer les aides financières en les rebaptisant “assistanat”.)

-2 ème temps: Faire comprendre aux pauvres qu’ils doivent avoir honte et disparaître…Pas difficile: il suffit de prendre le contrôle des médias…(Aujourd’hui, c’est fait.)

-3 ème temps: dresser les pauvres les uns contre les autres…C’est bien entamé avec le discours politique dominant.(“clivant”, comme ils aiment dire.)

-4 ème temps: Faire disparaître ces pauvres, soit par la guerre civile, soit par un conflit généralisé…(un air de déjà-vu avec 14-18 et 39-45.).
Tout autre moyen de disparition (maladies, suicides, émigrations massives, etc…) sera le bienvenu…

Ce funeste programme est en train de se mettre en place, sous nos yeux, avec la complicité active de gens qui, honte à eux, se disent “de gauche”….
Et il est sans doute déjà trop tard pour tenter de le freiner.

Mais Il y a une erreur chez les “libéraux”…
Cette erreur réside dans le fait que la finance, qui est le coeur de la “pensée” libérale, n’a à proprement parler aucun projet de société, son seul but avoué est d’entasser de l’argent inutilement, jour après jour…Toujours dans les mêmes poches…

Ce sera son talon d’Achille, car, comme disait le vieux chef indien: “Un jour, quand tu auras tout confisqué, tu verras que l’argent ne se mange pas…”

mouréreau michel 7 octobre 2016 à 17 h 21 min

ce qui est dramatique c’est que là comme souvent, ce n’est qu’au moment où le problème vous agresse de façon brutale que l’on en prend conscience: le milieu de la santé est un vase clôt et la grève, pourtant légale, est impossible: Bachelot (Droite et la T2A) Weil (Droite et la suppression du 100% ‘ordonnance bi-zone), C. Evin (PS et le “déremboursement), Juppé( le Plan Juppé), Le numérus clausus” (Weil, Droite) pour organiser la pénurie de médecins etc….Bref le libéralisme

BOUDET Pierre 9 octobre 2016 à 16 h 13 min

Ce qui est aussi dramatique et n’exclu pas les autres causes du prétendu déficit dont la sinistre ministre prétend qu’il est sur le point d’être éradiqué est qu’elle ment en toute connaissance.
Parmi les multiples causes de l’impossibilité de combler ce déficit voulu et organisé afin de satisfaire la volonté des compagnies d’assurances privées qui n’ont jamais digéré la création de la sécu par le ministre communiste AMBROISE CROIZAT à la libération, donc parmi ces multiples causes une des plus importantes réside dans l’exonération annuelle de 30 milliards de cotisation des entreprises depuis le début des années 80, ce qui cumulé aboutit au détournement de 1000 milliards des caisses de la sécu, ces exonérations ont été accordées selon les différents gouvernements successifs dans le but de favoriser la création d’emplois et conforter la trésorerie des entreprises, avec pour résultat un chômage en augmentation constante, une diminution de l’investissement productif et le placement de cette manne dans des opérations financières spéculatives

zelectron 11 octobre 2016 à 13 h 58 min

la politique du TOUT FONCTIONNAIRES-COLLATÉRAUX ET AUTRES 620 000 ÉLUS + comités Théodule porte enfin ses fruits : on voit le bout du tunnel de l’anéantissement de l’industrie, de l’artisanat et de l’agri-agroalimentaire, il était temps ! on va enfin pouvoir se gaver de rap, de cloud, de palais du département ou de la région avec les rond-points giratoire en apéritif (délicieux avec une sauce feux-rouges), et déguster les discours éculés des apôtres du socialisme triomphant ! Ainsi l’administration pourra s’administrer elle-même (principe de Parkinson, l’autre) pour son plus grand bien devant un banquet plantureux de briques à la sauce cailloux relevé d’un bouillon de culture si cher à la pensée unique.

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