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Du déplacement du Président de la République la semaine dernière à Dijon, il ne reste qu’une petite musique « a-démocratique ». Annoncé comme le moyen de renouer le dialogue avec les citoyens, il s’est terminé avec l’annonce de l’utilisation par le gouvernement des ordonnances pour légiférer et gouverner.
Elle fait écho à la décision du Premier ministre d’adopter le prétendu accord, sur un texte écrit par le Medef, en procédure dite accélérée, c’est-à-dire avec une seule lecture par les deux chambres du Parlement. C’est inquiétant et dangereux. La combinaison de l’application automatique du dernier traité européen, des règlements européens austéritaires comme ce qui est appelé le « two-pack », voté, dans le plus grand silence, par une majorité du Parlement européen la semaine dernière, la volonté de mettre en œuvre des accords entre syndicats minoritaires et le Medef, et maintenant les ordonnances déshabilleront notre République de ses attributs « démocratique et sociale ». L’empressement du gouvernement à faire voter cet « accord national interprofessionnel » tient à plusieurs facteurs, dont celui du refus d’un débat populaire approfondit sur les conséquences de ce texte n’est pas le moins important. Il y a sans doute plus sournois et plus inquiétant encore. La représentativité des syndicats signataires, telle qu’elle est issue de la loi de 2008, n’est pas démontrée. Ce vice de forme très grave conduirait, au sens vrai du terme, à obliger le Parlement à voter un texte issu directement des directives du Medef. Voilà qui affaiblit considérablement l’argument gouvernemental selon lequel cet « accord » démontre « le succès d’une méthode, celle du dialogue ».
Pas étonnant que la prêtresse du grand patronat, Mme Parisot, demande que la représentation nationale vote son texte sans amendement. Pas étonnant non plus qu’une cohorte d’anciens premiers ministres de droite comme JP Raffarin, F Fillon, appellent à voter le texte en l’état. Contre les travailleurs, F Fillon et JF Copé se retrouvent toujours plus facilement que pour la présidence de leur parti. Nous disons fraternellement aux parlementaires de gauche : laissez la droite voter seule le texte de Mme Parisot. Utilisez votre droit constitutionnel à amendements ! Prenez le temps de tirer les enseignements de tous les dispositifs dont ont bénéficié les grandes sociétés multinationales ces dernières années !
Plus les lois sur le travail ont été assouplies, plus elles ont bénéficié de cadeaux sociaux et fiscaux, plus la désindustrialisation s’est accélérée, plus le chômage a augmenté. La vérité c’est qu’au lieu d’inventer un système nouveau pour défendre et sécuriser le travail et la création, les gouvernements, sous couvert du mot « crise », n’ont fait que placer les entreprises, le travail, les services, l’Etat lui-même dans la loi de la jungle de la féroce concurrence mondiale, sous domination des marchés financiers, qui provoque partout souffrances et insécurité sociale.
L’idée selon laquelle la flexibilité du travail permet de maintenir l’emploi est fausse. Elle doit être combattue avec énergie. Les capitalistes tentent de faire croire que le travail n’est qu’une marchandise, « achetable » en n’importe quel lieu de la planète depuis que, de l’Organisation mondiale du commerce aux traités européens, tout a été réduit à un vaste « marché ouvert où la concurrence est libre ». Dès lors, dans une période de compression de l’activité économique, pour cause d’austérité et de récession, les sociétés multinationales misent de plus en plus sur « l’offre supérieure de travail », proposée par les travailleurs mis en concurrence à l’échelle du monde entier et une réduction de la «demande de travail » pour la dévalorisation sans fin des qualifications, des connaissances, des individus et du travail afin d’augmenter leurs taux de profits. Voilà où se situe le cœur de la lutte de classe dont les intérêts sont antagoniques.
Nous sommes ici au cœur de la combinaison du pacte de compétitivité, qui n’est qu’un nouveau cadeau de 20 milliards aux grandes entreprises, sans contrepartie pour l’emploi et du fameux accord « ANI » auquel il faudra ajouter les réductions des crédits publics, l’abaissement de l’assurance chômage, du niveau de certaines retraites. Autrement dit, la part des richesses orientées vers l’accumulation capitaliste va encore augmenter.
L’origine de la crise et de son aggravation est là. Rien à voir donc avec le prétendu haut niveau des salaires. Au contraire ! La compression des salaires que les capitalistes ont imposée, tout en développant un crédit cher aux ménages et aux petites entreprises, a provoqué une sorte de bulle de crédit, avec de considérables frais financiers qui étouffent les familles et les entreprises. L’endettement a bien été choisi en lieu et place de la rémunération du travail. Son blocage ou sa diminution, associés à la réduction des budgets publics et à un euro trop cher, réduisent la demande, donc la création de richesses et le travail nécessaire à leur production. Là se trouve l’origine du chômage de masse. C’est dire que ni le pacte de compétitivité, ni le projet de flexibilité du travail, ni la réduction des budgets publics ne permettront de sortir de la crise puisque ces potions amères en aggravent les causes. La gauche au pouvoir doit donc accepter le débat, la confrontation d’idées avec celle qui n’y est pas, avec les syndicats comme la CGT ou la Confédération Européenne des syndicats qui proposent d’autres choix, avec le mouvement associatif pour chercher les moyens d’un autre cap à gauche. L’élection législative partielle de Beauvais doit faire réfléchir sérieusement. Elle confirme, s’il en était besoin, le niveau de la déception et la dangerosité de la situation qui est en train de se créer.
Si derrière l’objectif de « l’inversion de la courbe du chômage », il n’y a en fait qu’une diminution factice du chômage, calculée dans de froides statistiques, parce que le nombre de travailleurs et de retraités placés en situation de précarité et de pauvreté augmenterait sans cesse, tandis que les autres travailleurs subiraient une surexploitation renforcée, toujours moins rémunérés, alors il y a beaucoup à craindre pour l’avenir.
Cette orientation ne nous ferait passer qu’à une étape supérieure de la crise que subiront le monde du travail et les retraités. Les générations futures connaîtraient alors une société plus dure que celle que nous avons connue jusque là.
A l’évidence, cela mérite que les citoyens expriment leur opinion sur les choix à opérer pour s’en sortir. Tout le contraire de la gouvernance par ordonnances, sous les ordres des institutions européennes et du Medef. Il est de plus en plus clair que le problème du gouvernement ne tient pas à un déficit d’explication de sa politique. Le problème c’est la politique suivie elle-même. A moins d’avoir la prétention exorbitante de considérer qu’il n’y en a pas d’autre possible, rechercher des alternatives par le débat public devient la question décisive pour redonner espoir et confiance à nos concitoyens. Le plus tôt sera le mieux.
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Sur l’ANI, des députés, dignes de représenter les travailleurs, doivent utiliser leur droit constitutionnel à rejet et non leur droit constitutionnel à amendements. Comme le dit Gérard Filoche, il n’y a rien à prendre dans ce texte, tout est à rejeter. Ce texte n’est pas amendable.