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Au cœur de la crise globale se profile le lourd risque d’une autre crise : celle de l’insécurité alimentaire et de la faim. Dans de multiples zones déjà, de la corne de l’Afrique au Sahel, du Niger au Burkina Faso, de Gambie au Mali et au Tchad des millions de personnes sont dépourvues de nourriture et d’eau potable. Ceci risque d’aller en s’amplifiant avec la hausse brutale des prix des matières premières agricoles.
En Europe et aux États-Unis, l’austérité qui déjà, sème difficultés et douleurs parmi les familles populaires, sera encore aggravée par l’augmentation de l’alimentation. Le pain comme la viande dépendent des prix des céréales et de l’augmentation de l’énergie qui flambent si rien n’est fait pour les contrecarrer. Les causes de cette augmentation sont connues. Il y a la vague de sécheresse qui touche le sud de l’Europe et surtout les États-Unis ; l’imbécile et criminelle production de biocarburants alors qu’il faudrait réserver toutes les productions agricoles à l’alimentation et enfin une augmentation de la demande alimentaire mondiale. Celle-ci augmentera de 70% d’ici l’année 2050, selon l’Organisation des Nations-Unies pour l’agriculture et l’alimentation. A cela s’ajoutent les modifications climatiques, l’accaparement des terres par des pays et des multinationales, mais aussi les destructions de terres par l’urbanisation et la dégradation climatique ou par l’érosion des sols. Ces causes et ces prévisions sont connues de tous.
Pourtant, aucune structure gouvernementale n’intervient. Aucun plan prévisionnel mondial n’est mis en débat. La réforme de la politique agricole commune en cours de discussion ne prend nullement en compte ces données fondamentales. Au contraire, elle laisse totalement ouverte les portes de la dérégulation, de la déréglementation et de la spéculation sur les matières premières agricoles. L’une des causes grandissantes de la volatilité des prix est le développement d’une spéculation effrénée sur les matières premières agricoles qui servent de valeur refuge aux « fonds financiers » qui en tirent encore plus de profits que des actions en bourse ou des obligations d’état.
Ce que l’on appelle « les actifs agricoles » ne dépassaient pas dix milliards en 1990. Ces produits financiers, indexés sur l’agriculture, vont dépasser les 200 milliards cette année. Ces produits financiers, indexés sur les indices des matières premières agricoles s’achètent et se vendent à la BNP Paribas, au Crédit agricole ou chez Barclays, l’avaleur du groupe Doux, et font du blé, du maïs, du soja, du café, un placement financier comme l’or. Leurs pratiques sont aussi curieuses que scandaleuses. Ces gens achètent et revendent des produits agricoles sans jamais les voir. Ils achètent même des récoltes qui ne sont pas encore semées. C’est ce qu’on appelle des contrats à terme. Ces mécanismes qui représentaient à peu près 770 milliards de dollars l’année 2003, atteignent aujourd’hui plus de 7500 milliards de dollars. Autrement dit, cette minorité de spéculateurs et de rapaces fait du fric avec votre blé. Et vous payez plus cher votre pain et votre viande, jusqu’à s’en priver dans certaines familles populaires, tandis qu’un milliard d’individus meurent de faim et souffrent de malnutrition.
Ces mécanismes inhérents au système capitaliste financier et mondialisé sont abjects. Il faut en finir avec eux. Dans l’immédiat, le gouvernement devrait demander avec la FAO, en alliance avec des pays du Sud, le lancement d’une conférence mondiale pour des prix stabilisés des matières premières agricoles et le démantèlement de tout système de spéculation sur l’alimentation. Cela implique une réflexion sur une nouvelle révolution verte et écologique pour nourrir la planète.
Dans le cadre du débat sur la politique agricole commune à venir, l’enjeu de la fixation de prix de base pour une quantité donnée de production moyenne dans chaque pays européenne, doit être remis avec plus de force sur le tapis. L’agriculture et l’alimentation ne peuvent être laissées dans la grosse mâchoire des rapaces de la finance.
21/08/2012
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