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Passerons-nous du « poulet Doux » au « poulet Barclays » ? Barclays est le nom de cette banque britannique qui s’est subitement associée à M. Doux, à qui le tribunal de commerce de Quimper a donné sa confiance le 1er août pour un plan de « continuation » du groupe Doux.
La période d’observation, après le redressement judiciaire va se poursuivre jusqu’au 30 novembre, avec une audience intermédiaire le 9 octobre pour évaluer la situation. Ce plan se fait à grand fracas de casse sociale puisque le pôle frais et produits élaborés, c’est-à-dire les usines où s’élaborent le plus de valeur ajoutée, est séparé du groupe car jugé moins rentable. Ainsi, 1570 salariés, notamment à Pleucadeuc et Sérent dans le Morbihan, Graincourt dans le Pas-de-Calais risquent de se retrouver sans travail si d’ici quelques jours ils ne sont pas repris par d’autres groupes.
Ainsi, « Doux-Barclays », choisit la voie du démantèlement du groupe en écrémant les secteurs jugés financièrement les plus rentables, notamment l’exportation. Celle qui bénéficie de fonds publics européens sans contrôle. Ceci se fera contre la filière avicole française, qui, pourtant pourrait encore se développer en poulets de qualité et en produits élaborés.
Les importations de volailles représentent en effet, déjà 40% de notre consommation provenant pour l’essentiel du Brésil, là où Doux s’était implanté et « embourbé » depuis 1998 en rachetant l’entreprise Frangosul. Il ne faudrait pas croire que nous sommes au bout de l’affaire !
On aurait grand tort de se satisfaire de ce montage et de considérer que le groupe Doux est sauvé et qu’il faudrait désormais regarder ailleurs. Il est de la responsabilité du gouvernement d’intervenir plus radicalement. On ne peut laisser 1500 salariés glisser dans les affres du chômage. Il y a aussi le sort de près d’un millier d’éleveurs à qui Doux reste à devoir entre 60 000 et 120 000 euros par élevage.
Mais allons plus loin ! Le montage financier est totalement baroque. Voilà M. Charles Doux acceptant ce qu’il refusait hier, c’est-à-dire la cession de 80% de son entreprise à la banque Barclays qui, par ce biais ne cherche qu’une chose : récupérer sa créance de 140 millions d’euros. Barclays ne s’intéresse pas aux poulets mais à son argent.
Au nom de cela, la Banque qui fait partie du Gotha mondial du système bancaire détiendra demain 80% du capital, et BNP Paribas 6%. Dans ces conditions, M. Doux descendra à 14%, encore qu’on ne connaisse pas le véritable statut d’un client saoudien du groupe Doux qui apporte 12 millions d’euros, ni de celui de la société d’affacturage Factor pour 3 millions d’euros.
Autant parler clair ! Le monde financier international prend le contrôle de la majeure partie de la filière avicole. Ceci peut avoir de redoutables conséquences d’ici quelques mois quand on connaît le taux de profit que recherchent les banques en ce moment.
Car, il nous faut aller encore plus loin, notamment sur les agissements de Barclays. Voici une banque internationale qui, d’un côté investit dans le poulet et qui de l’autre cherche à revendre d’ici fin septembre ses activités en France dont sa banque de détail, d’assurance et de crédit-bail. Cette même banque Barclays qui se retrouve au cœur du scandale financier actuel, le Libror (London Inter Bank Offered Rate). Il s’agit en résumé d’un accord entre plusieurs banques mondiales pour fixer les taux d’intérêt du loyer de l’argent. Barclays a été reconnu coupable ces derniers jours de manipulation du Libror en soumettant des taux plus élevés. Elle vient d’être sanctionnée d’une amende de 450 millions de dollars pour cela. Mais l’affaire est loin d’être terminée.
Et il faudrait laisser la filière avicole entre de telles mains ? Devant de tels risques, il n’est pas encore trop tard pour le gouvernement d’agir. Il doit créer les conditions pour que tous les éléments de cette affaire soient mis sur la table. Puis, il doit prendre toutes les dispositions pour réunir une conférence inter-régionale sur l’emploi et la filière avicole, avec le groupe Doux, les éleveurs, les syndicats de salariés, les banques, les transporteurs, les élus régionaux de Bretagne, Pays de Loire, du centre et du Pas-de-Calais, les maires, pour décider d’un plan solide de développement et de la valorisation de la filière avicole française.
Dans un premier temps, le fonds stratégique et des moyens du grand emprunt doivent être utilisés pour prendre les relais financier nécessaires afin de rembourser les éleveurs et les transporteurs. L’Etat doit agir maintenant. Et ne pas laisser plumer la filière avicole par les rapaces du monde de la finance.
07/08/2012