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Les vagues de sondages d’opinion sur les régionales et surtout les élections présidentielles (qui n’auront lieu que dans un an) vont toute dans le même sens. Reflet du réel, il convient donc de les regarder, de les étudier, de comparer avec ce que l’on nous dit sur les marchés, dans les rencontres organisées ou en famille. Mais ces sondages ont aujourd’hui un gros inconvénient : ils sont utilisés pour influencer. En quelque sorte ils agissent auprès des électrices et des électeurs comme une pré-sélection, voire de primaires à l’intérieur de chaque bloc partisan.
Le Journal du Dimanche a publié cette semaine une enquête très poussée sur les rapports de force, les comportements des électeurs, et des prévisions de score. Evidemment, on ne vote pas dimanche prochain. Il est donc difficile de préjuger d’un vote qui au aura lieu dans un an. Cependant il faut se saisir de ces enquêtes non pas pour acter des situations mais pour les faire évoluer, les transformer. Les récentes enquêtes sont conformes à ce que nous observons dans le monde entier et c’est préoccupant. Nier cela reviendrait à s’empêcher de combattre les lourdes tendances à l’œuvre. Le rapport de force politique en France est désormais dominé par les forces de droite traditionnelle, de la droite macroniste et de l’extrême droite. Ces droites captent 70% du corps électoral. Ce que l’on appelle les forces de gauche incluant les écologistes vont au maximum jusqu’à 30% des électrices et électeurs (encore que l’électorat écologiste est bien plus fluctuant comme ses dirigeants qu’on a retrouvés dans le gouvernement Hollande et Macron).
Du reste 82% de nos concitoyens considèrent la situation de la gauche comme mauvaise. Ajoutons que plus de quatre Français sur dix refusent désormais de se positionner à gauche. Evidemment ce mot « gauche « devient ambiguë car il est quasi-uniquement associé à la gestion social-libérale (et, non plus social-démocrate) du pouvoir de Hollande et des socialistes. En effet, la grande rupture s’est faite durant le quinquennat Hollande. Au début de celui-ci la gauche était mesurée aux alentours des 46 à 48% ; elle se retrouve à 25-30% aujourd’hui. Les dégâts sont considérables. Cette situation dont une partie préexistait évidemment avant les dernières présidentielles a conduit à multiplier la mise sur pied de mouvements ou de partis sociaux-démocrates fragmentant encore plus le parti socialiste. Même avec cette stratégie, ce courant ne décolle pas. Elle n’a plus à son flanc une force communiste comme cela était le cas dans de grandes périodes de montée de la gauche et de conquêtes pour les travailleurs et les créateurs (j’y reviendrai).
J’insiste. Bien sûr ces sondages qui occupent une place de plus en plus centrale dans la vie politique ont vocation à nourrir la machine médiatique et à préparer les esprits à des scénarios déjà fomentés. Reste cependant le tableau d’une situation politique très inquiétante. Par exemple quand dans cette enquête il est relevé que l’extrême droite serait élue face à un candidat de gauche au second tour. On peut se dire à juste titre que le sondage lui-même fait voter « anti-Le Pen » dès le premier tour soit pour Macron ou par exemple Xavier Bertrand et donc affaiblit encore plus « la gauche ». Mais on peut aussi sonner l’alerte et se mettre en situation de bataille pour relever ou redresser la gauche. Affronter l’actuelle situation politique, pour un révolutionnaire, exige des analyses fines sans simplisme trop répandu dans l’objectif de transformer ce panorama. Ce n’est pas en niant les problèmes qu’on peut les combattre. La droitisation du paysage politique, perceptible depuis plusieurs années voire décennies, trouve de nouveaux prolongements dans la situation présente, héritière d’une longue décennie de politiques d’austérité qui auront ravagé le continent et bloqué les perspectives d’émancipation individuelle et collective. Situation aggravée par la pandémie et ses conséquences, notamment l’atonie du corps social. On compte par exemple 21 millions d’adhérents d’associations en France. L’impossibilité de se voir, d’échanger, de partager dans le cadre associatif favorise indéniablement le repli sur soi et porte un lourd préjudice à la politisation, au sens le plus large, de la population.
La gauche dans ses différentes composantes apparait ainsi durablement affaiblie. Le phénomène n’est guère nouveau. Ce que l’on appelait « gauche » au siècle dernier, c’est-à-dire l’alliance parfois conflictuelle de la social-démocratie et du communisme, ne parvient pas à se réinventer. L’affaiblissement des partis communistes dans la foulée de l‘effondrement du soviétisme s’est notamment traduit par un recentrage de la social-démocratie, abandonnant toute velléité à contraindre le capital au compromis social pour lui confier un rôle de plus en plus important dans l’organisation des sociétés. Amputée de sa jambe communiste, la gauche est tombée à la renverse et la social-démocratie s’est enfoncée dans l’abime.
Aujourd’hui, la gauche est engluée dans des débats orchestrés par ses adversaires, dont l’aigreur et l’intensité nourrissent la division, et dont les thématiques fertilisent le terreau de la droite et de l’extrême droite. Ceci pourrait paraître secondaire si ces différentes forces étaient en capacité de trouver des terrains d’entente sur des sujets fondamentaux, économiques et sociaux, démocratiques et sociétaux, propres à mobiliser de larges pans de la population. Ce n’est malheureusement pas le cas et les facteurs de division sont régulièrement mis en avant au détriment des facteurs d’unité et, avec eux, des facteurs d’espoir. C’est, in fine, le découragement qui gagne l’électeur de gauche.
Les tentatives de rénovation de la gauche par le raccourci populiste ont fait long feu, en France comme en Italie ou en Espagne. D’autant que ces entreprises politiques étaient très circonstanciées, en prise étroite avec le calendrier électoral, et non assises sur des blocs sociaux durables. Ces stratégies zigzagantes ne parviennent ni à rassembler assez largement, ni à engager un rapport de force durable avec la domination du capital et des grands monopoles, et la domination idéologique de la droite identitaire. Les politiques de compromis comme celle de Syriza en Grèce, trop isolée et faute de soutien, ont tout autant échoué.
On peut craindre que M. Macron soit tenté de s’inspirer, malgré les contraintes d’un système institutionnel très différent, de la stratégie de son quasi-homologue italien Mario Draghi. A savoir l’incorporation d’une partie des oppositions dans un vaste bloc politique, de manière à s’assurer une majorité sociale et politique pour terminer la métamorphose de la République sociale héritée de la Libération en République libérale et autoritaire. Nous sommes en effet à ce moment où le capitalisme mondialisé et financiarisé est très contesté et ou la guerre intra-capitaliste va se redévelopper avec pour conséquences de considérables pressions pour de nouvelles régressions sociales et démocratiques, mais aussi le dénigrement des savoirs, des penseurs et de la culture malmenée sous l’effet de réactionnaires comme M. Blanquer mais aussi de l’intrusion qui se prépare des géants du numérique dans les secteurs des loisirs et de l’enseignement des enfants.
Ajoutons que le programme de stabilité envoyé à la Commission européenne ces derniers jours confirme que M. Macron n’entend pas dévier de son ultralibéralisme qui reste la charpente de sa politique. Celui-ci fait d’un côté fuiter dans la presse qu’il considère les critères de Maastricht périmés pour mieux stipuler, d’un autre côté, dans sa missive aux autorités européenne, qu’il compte ramener les déficits sous la barre des 3% en 2027, soit à la fin de ce qu’il espère être son second mandat. Et ceci en maintenant les baisses d’impôts et en refusant de mener une politique de relance comme le font les Etats-Unis. Ce sera donc la dépense publique qui servira encore et toujours de variable : allocations chômages, retraites et services publics… Ultralibéralisme et droitisation semblent être la pente que suit notre pays. Une pente qui fait parfaitement l’affaire d’une extrême droite qui recentre son discours économique et social vers les thèses libérales chères aux institutions européennes.
D’évidence, le pays dans sa majorité ne veut pas d’un tel scénario. Car si la gauche est en piteux état, les thématiques censées la porter sont au cœur des préoccupations : emploi, justice sociale, écologie. C’est tout le paradoxe du moment qui témoigne plus d’une inadéquation entre l’offre politique et les exigences populaires que d’une disparition du peuple de gauche. Paradoxe auquel s’ajoute la manifestation, à travers l’expérience de la pandémie, d’un monde gouverné par l’absurde où les travailleurs les plus utiles et exposés sont les moins payés et considérés, où la nature est entrée en conflit avec l’humanité et où les inégalités ont explosé jusqu’à menacer la cohésion des nations. Des mouvements sociaux s’organisent dans des secteurs aussi différents que la santé, la culture, l’industrie. La jeune génération frappée par la pandémie refuse d’être sacrifiée à l’autel d’un marché de l’emploi qui lui ferme la porte. Les revendications féministes et les combats antiracistes remettent également en cause les rapports sociaux institués.
L’hégémonie actuelle des droites en compétition et surenchère permanente n’est donc pas une fatalité. Il y a un impérieux devoir d’invention des forces de gauche pour aider à la construction d’une unité populaire à visée post-capitaliste. Celle-ci ne pourra se réaliser qu’en puisant dans le mouvement réel ses conditions d’émergence. Ceci confère comme d’autres périodes des responsabilités historiques au courant communiste et au Parti communiste lui-même. L’enjeu est de travailler à construire une unité populaire, à partir des intérêts de celles et ceux qui sont aujourd’hui exploités, précarisés et dominés tout en nouant de nouveaux lien avec le monde de la culture, de la science et de la création. La mise à disposition des citoyennes et citoyens de la force communiste, entreprise par entreprise, quartier par quartier, village par village, circonscription par circonscription pour tenter de défricher avec les travailleurs, les jeunes et les privés de travail une perspective politique de changement durable tout en appelant à une mobilisation permanente y compris en cas de victoire des forces démocratiques et progressistes.
De ce point de vue il est très intéressant qu’à partir de la lutte dans des lieux de culture soit posé un combat rassembleur qui regarde toute la société : la mise en cause de l’assurance chômage. Il sera utile d’y revenir. Dans un tel contexte, accéder à un spectre large d’idées et de propositions à débattre reste plus que jamais nécessaire ; je n’insisterai jamais assez sur la lecture de l’Humanité et de L’Humanité Dimanche alors que nous fêtons le 117ème anniversaire de la fondation du journal par Jean Jaurès.
Lire l’Humanité est une discipline émancipatrice qui va à contrecourant des simplismes des réseaux sociaux lesquels livrent une information prémâchée, standardisée, uniformisée, et du big-business décervelant de l’information en continue. C’est l’actuel contexte qui me conduira à lancer à l’occasion de ces 117 ans de combats et de débat un appel à réaliser des abonnements de parrainage pour élargir encore l’audience de l’Humanité. Une contradiction doit en effet être surmontée dans la bataille des idées : l’espace majoritaire dont jouissent les droites alors que souvent, dans les mêmes enquêtes, les citoyens défendent et aspirent en majorité aux valeurs de gauche. C’est le dépassement de cette contradiction dans le débat et la création politique collective qui peut aider à ouvrir une voie d’espoir.
***
Ce texte est extrait de la Lettre du 17/04/2021
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5 commentaires
Il faudrait dans la situation extrêmement difficile dans laquelle beaucoup de personnes se trouvent, des syndicats du vingt et unième siècle capables de représenter les travailleurs et les consommateurs qui ne sont plus suivis et ne sont pas représenter, de façon à ne laisser personne de côté ainsi que d’avoir des syndicats intelligents et forts.
La FI: L’UE, on la change ou on la quitte ?
Le point fondamentale de la division ?
La reconnaissance des obstacles et leurs priorisations doivent figurer dans un agenda politique pour une alternative, simultanément aux éléments pertinents à sa constitution.
Un parti résolument de gauche au pouvoir, même avec un vote important, ne changera à l’affaire.
«« Les politiques de compromis comme celle de Syriza en Grèce, trop isolée et faute de soutien, ont tout autant échoué. »»
Pourtant le vote était au rendez-vous:
«« Référendum grec : le non l’emporte à 61,31%, Tsipras veut renégocier la dette »»
Pourquoi ? Parce que l’UE est un cul de sac.
Alors, quand on nous parle d’apprendre des leçons. Dans la gauche, il y a ceux qui voient le problème, d’autres qui s’acharnent et ceux qui qui font des sinusoïdes.
La prise du pouvoir insuffisant, même si 60%
Avec une organisation complexe de comités citoyens (officieux) soutenus par une masse active, il y a des chances. Mais encore là ?
Avec, en plus, une Constituante Citoyenne (des comités officiels) nourris par les comités citoyens (et leurs satellites)……
Il faut une organisation complexe (solidaire, cohérente et coordonnée).
Regarder comme le capitalisme est complexe.
Mais les initiatives autonomes citoyennes, dans différents secteurs ont atteint une grande complexité. Tous les organismes de la société civile……..
Que chacun ait la vue d’ensemble………
L’avenir de la gauche dépend comme tout l’indique de la gauche authentique universaliste de spécificité socialiste et de spécificité communiste, voire de la gauche des honnêtes personnes qui n’ont jamais trahi les honnêtes personnes.
Monsieur Biden a en partie raison comme assez souvent, il manque en France des Syndicats riches de personnes syndiquées, mais pour cela, ce qu’il ne dit pas, c’est qu’il faut repartir de zéro : le vingt et unième siècle n’est pas le vingtième siècle. Et il faut au vingt et unième siècle des Syndicats des travailleurs et des consommateurs, ce qui va dans le sens de laisser personne de côté pour répondre à la crise de pouvoir d’achat aggravée par l’interminable pandémie ; de s’adapter voire d’associer plutôt que d’opposer, le vingt et unième siècle est un siècle d’associativités plutôt que d’oppositions complètement à côté de la plaque comme dit l’autre. Pour cela, il faut des vraies syndicalistes, il faut le talent syndical universaliste.
Les retards pour s’adapter avec un syndicalisme du vingt et unième siècle profitent encore à l’extrême droite, la gauche commencerait à regagner des points si les Syndicats devenaient riche de travailleurs et de consommateurs syndiqués et de talent syndical. Ma conviction est que la crise du pouvoir d’achat telle en Union Européenne et notamment dans la France fondatrice de l’Union Européenne ne peut pas devenir dépassée sans l’évolution syndicale que je décris. Je ne connais pas la vie quotidienne en Amérique du Nord, mais je doute que l’Amérique du Nord puisse résoudre tous les problèmes de pouvoir d’achat sans le syndicalisme du vingt et unième siècle que je décris.
J’ai retenu ce commentaire.
Séminaire S01E05 // Les droits à ressources sont-ils des droits économiques ? (B. Friot)
Lemoine Michel
il y a 2 ans (modifié)
La solidarité c’est le lien de dépendance réciproque entre les membres et les groupes d’une société. Il n’y a pas de société sans solidarité. On produit toujours pour l’autre et on ne vit que par les autres. Je mange ce que d’autres ont produit, ils n’ont produit qu’avec les outils créés par d’autres (qui se sont aussi nourris), et ces outils exigeaient des connaissances développées par d’autres etc. Ce lien s’étend dans le temps. Chacun est solidaire de tous les autres comme la pièce d’un mécanisme l’est de l’ensemble des autres pièces agencées pour fonctionner. Il n’y a, par conséquent, aucun inconvénient à dire qu’on bénéficie de la solidarité d’autrui et qu’on est soi-même solidaire d’autrui . C’est juste énoncer une évidence. L’évidence que je ne suis pas un Robinson ! Il est superflu de qualifier cette solidarité de communiste. Cela ne peut que servir ceux qui voudraient en bénéficier sans payer de retour.
C’est ce que fait le capitalisme. Il produit pour le profit et non en vue d’un besoin (celui du capitaliste et celui d’autrui). En tant que capital, il n’est pas solidaire d’autrui.(cela devient évident quand le profit rejoint un paradis fiscal et sort de la société). Il met la société à son service au lieu d’en être un élément. Il exploite le travail et le travailleur au lieu de le mettre au service des besoins de tous.
L’usage capitaliste du mot de solidarité, que critique B. Friot, est un exemple de novlange. Il fait de la solidarité non la base de toute société mais une forme institutionnalisée de la charité (dont le capitaliste s’exonère autant qu’il peut) et veut occulter la solidarité véritable qui englobe le retraité, le jeune, le travailleur ou tout autre membre de la société. Le capitaliste ne veut pas payer l’impôt, les charges etc mais il aime soutenir une fondation, sponsoriser, parrainer, être un mécène ! Il se place hors et au-dessus de la société. Il rompt la chaîne des solidarités sociales. Le summum capitaliste de la solidarité, c’est les restos du cœur et leurs bénévoles, le téléthon et toutes ces “grandes causes” qui fonctionnent comme un véritable impôt sur la charité en remettant aux sentiments de chacun ce qui devrait être la priorité des politiques publiques et qui, par cela même, met ces grandes causes hors du mouvement solidaire de la société ceci au nom usurpé de la solidarité.
Une question plus que jamais d’actualité.
Le problème est comment y arriver.
Prendre un chemin qui mène nul part.
Initier l’organisation citoyenne multilatérale.
Toutes les initiatives originales, les regroupements sociaux, et tous les mouvements revendicateurs (qui couvent) et les organisations (travailleurs) de tous les secteurs d’activité économiques, et plus officielles (syndicats), etc., pour une Constituante Citoyenne, le parti de transition (politiques internes et externes, patriotisme et universalisme dont indissociables, tout comme la solidarité individu-communauté. Un nouveau pacte social. Mais tout ceci, sans un nouveau paradigme économique cohérent avec la solidarité……. KAPUT à échéance et retour à la case départ: exploitant exploité (de la condition humaine).
Le principe manipulation-conditionnement doit être compris. Pas sous forme idéologique, mais sous forme condition humaine, dans un premier temps.
Voir le chapitre 1……….
Que les choses soient mis à leur juste place, pour mieux voir leur interrelation et leur effet collatéral.