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L’éditorial de TaF – Travailler Au Futur (N°3 – sept. 2020) – par Patrick Le Hyaric.
Il aura fallu traverser la douloureuse épreuve de la crise sanitaire pour qu’une évidence – cette même évidence qui justifiait le lancement de cette revue – saute aux yeux : c’est le dévouement d’innombrables travailleuses et de travailleurs qui a permis de faire front, bien loin des récits rances sur l’individualisme irrépressible ou l’inutilité sociale de ceux qui ne seraient rien.
Ce sont eux et beaucoup elles qui ont soigné, sont venus à notre secours en urgence, ont agencé les supermarchés, distribué le courrier ou le journal, cultivé la terre et transformé l’alimentation, conduit trains, métros et camions. Ce sont elles et eux qui, loin de leur lieu de besogne, ont fait fonctionner les services en télétravail sans en avoir toujours les moyens, ces enseignants dont on ne saluera jamais assez l’admirable dévouement et les trésors de patience pour partager des connaissances et des savoirs à des enfants déboussolés.
Une part de la réponse à la crise et aux difficultés qu’elle a engendré se trouve là, dans ces actes de courage et d’abnégation, dans ce dévouement, cette solidarité. Bref, dans ces formes de civisme et de vivre ensemble loin des tables de calcul dénonçant la dépense publique comme le mal du siècle, l’Etat social comme l’ennemi à abattre, les services publics et les droits sociaux comme des fardeaux alors qu’ils ont empêché l’écroulement total.
Les dramatiques insuffisances des infrastructures de santé, les conséquences néfastes de la désindustrialisation, la destruction des souverainetés populaire vis-à-vis des marchés financiers poussent au désastre. Le lien ténu entre changement climatique, saccage de la biodiversité et vulnérabilité aux maladies apparait crument, tout comme l’accaparement de la santé, donc des vies, par les multinationales des médicaments. Les questionnements sur un monde qui marche sur la tête gagnent des esprits.
En ce temps où une infime minorité ramasse les dividendes à la pelle et où les marchés financiers se gavent jusqu’à l’indigestion, on ne peut plus tolérer que celles et ceux « d’en bas », dont chacun loue le dévouement, continuent de stagner en bas du système de rémunération, de protection et de considération. Ce n’est pas en leur jetant quelques médailles ou en les invitant au défilé du 14 juillet qu’on leur rendra justice. C’est par des choix radicalement nouveaux, portant en leur cœur le partage des richesses et une autre manière de les produire pour bâtir une économie du bien être durable. Cela passe par une révolution fiscale, une autre utilisation du crédit, de nouvelles orientations pour une formation permanente, la valorisation du travail et le déploiement de nouveaux services publics démocratisés.
Cette crise appelle à repenser de fond en comble l’organisation de notre société. Elle pourrait être le début d’une réflexion d’ampleur sur une économie des besoins, à rebours des gâchis et des inégalités que nous impose le système capitaliste. Plus, elle doit être l’occasion de repenser ce qui figure à la base de toute société, le travail humain et son rapport à l’environnement. Notre revue et la plateforme coopérative « Travailler Au Futur » sont à votre service pour cela.
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