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Rien, strictement rien, absolument rien ne saurait justifier la mise à mort d’un Homme. Un homme qui plus est enseignant, éducateur, passeur d’Histoire et de Géographie, deux matières indispensables pour éclairer le monde et s’éclairer soi-même. L’assassinat d’un enseignant à la sortie de son collège parce qu’il y explique l’Histoire et y défend la liberté d’expression est une victoire de la haine fascisante. Tuer un enseignant c’est tuer le projet d’ouvrir les enfants au monde, et tuer la possibilité de bâtir le leur dès demain.
La douleur est immense et le chagrin sans fond face à cet acte ignoble. Les mots manquent quand les questions s’accumulent dans nos têtes. Elles se résument à quelques adverbes : qui, comment, pourquoi ? On peine à aller plus loin, subjugués par l’atrocité du crime et la stupidité du mobile. Nos pensées sont toutes dirigées vers les proches de ce professeur, sa famille, les enseignants et les parents d’élèves de ce collège, à l’ensemble du corps enseignant et à tous les fonctionnaires d’une Education nationale frappée au cœur.
Les caricatures de Mahomet font désormais partie de notre histoire. En leur nom et contre la liberté de dessiner et de penser, des assassins fanatiques ont décimé la rédaction de Charlie-Hebdo et cherché à répandre la terreur, en France comme ailleurs. Elles doivent pouvoir être montrées, non pour ce qu’elles expriment, mais comme document nécessaire à la compréhension des temps présents. Cette mise à distance est la condition absolue d’une société fondée sur la raison.
La loi du Talion n’a pas sa place dans une société démocratique régie par l’État de droit. Au « œil pour œil, dent pour dent » et à la vengeance, le progrès humain a substitué la justice et l’art du débat. C’est un acquis à valeur universelle sur lequel s’appuient toutes les forces de progrès à travers le monde, en butte face à la dictature ou au fanatisme, et parfois face aux deux. C’est le remède contre le lent mais décidé glissement obscurantiste des sociétés.
La transmission du savoir, tâche des plus nobles confiée aux corps enseignant, doit être absolument sanctifiée et l’éducation nationale renforcée, protégée et aidée dans ses missions dont celle, fondamentale, de forger l’esprit critique et civique des futurs citoyens, quelles que soient leurs croyances ou origines. C’est une évidence qu’il convient de rappeler.
Pour l’heure, l’enquête se dirige vers un Tchétchène né à Moscou en 2002. Cette barbarie ne semble donc pas concerner des français de confession musulmane qu’il faudra protéger des récupérations racistes qui n’ont déjà pas manqué de surgir.
Cet abject assassinat appelle au combat pour renforcer considérablement les fondements d’une République sociale, laïque et démocratique fidèle à ses principes de liberté, d’égalité et de fraternité, à retrouver dans la société la force du débat civilisé. C’est la condition pour recoudre l’unité de la nation. Cette tâche, ardue mais essentielle, est la condition indépassable d’une sécularisation apaisée pour dépasser, ensemble et solidairement, ces terribles épreuves.
Patrick Le Hyaric
Directeur de l’Humanité
17/10/2020
5 commentaires
Tristesse immense. De tout coeur avec sa famille et ses proches. Solidarité avec les enseignants qui ont un rôle fondamental dans notre société. Rien ne peut justifier une telle horreur. La liberté d’expression et d’information est un droit absolu à protéger
Un excellent article de Patrick le Hyaric. Tout est dit. Et j’ai le coeur brisé. Je suis prof à la retraite.
Un excellent article de Patrick le Hyaric. J’ai le coeur brisé.
1/ Le jeune (dix huit ans et demi) tchétchène était, indiscutablement, un islamiste.
2/ Tout un “réseau” islamiste (à connexion marocaine) est mis à jour par l’enquête.
3/ L’Islam n’est pas une race (concept, biologiquement faux, d’ailleurs) ni une nation mais une religion (à prétention universelle).
Renforcer la République, certes.
J’entends aujourd’hui qu’on devrait par exemple éduquer mieux nos futurs citoyens à la laïcité, à la liberté, à l’usage de l’esprit critique : que n’en a-t-on pas eu l’idée quand Blanquer, aujourd’hui plein d’admiration posthume pour le prof exécuté, a réduit considérablement les heures d’Histoire-Géo-EMC au lycée public ?
Patry est un héros de la liberté d’enseigner !? Oui, mais là encore le ministre Blanquer en a fait des tonnes pour la réduire, allant jusqu’à supprimer le contrôle syndical sur les mutations des profs, jusqu’à supprimer l’élaboration républicaine des programmes.
Le meurtre rituel de l’enseignant, et on l’a bien vu par les manifestations convenues (autorisées sous covid ?) en son honneur, c’est surtout pour le pouvoir l’occasion de relancer la division dans le pays par cette promotion du terroriste.
Nos “responsables” sont bien hypocrites.