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Le groupe de transport aérien Ryanair vient de connaître la plus grande grève de pilotes de son histoire, celle-ci faisant suite à celle des personnels de cabine il y a quelques semaines. Les revendications de ces mouvements européens – les pilotes en Allemagne, en Belgique, en Espagne, au Portugal, aux Pays-Bas, en Suède y participent – portent sur les conditions de travail et de rémunération. Le bas- coût, «low-cost », cible d’abord les salaires. La brutalité des dirigeants de l’entreprise est de haute intensité, refusant, jusqu’à ces derniers temps, de reconnaître le moindre syndicat. Plus de la moitié des pilotes de cette compagnie ne sont pas salariés de l’entreprise mais des sous-traitants, embauchés par le biais d’agences de placement avec des contrats de droit irlandais quel que soit le pays où ils travaillent, nombre d’entre eux exercent même sous le statut d’auto-entrepreneur.
Ce mécanisme permet à Ryanair de ne payer aucune cotisation sociale dans les pays où se trouvent les pilotes, s’ils veulent une couverture sociale et une retraite, les salariés payent eux-mêmes leurs cotisations, la course au « moins disant social » consistant à utiliser la législation du pays considéré du point de vue de la compagnie la plus avantageuse. Mieux, le pilote n’est payé qu’à partir du moment où les moteurs de l’avion sont allumés. Il doit acheter lui-même ses uniformes de travail, son badge d’accès à l’aéroport, payer ses formations. Même l’entretien d’embauche est payant ! La direction de la compagnie confirme bien sa brutalité lorsque, face à ce mouvement social, elle menace de délocaliser l’entreprise en Pologne. Ce faisant elle démontre par l’absurde que l’Europe sociale n’existe pas, que les institutions européennes garantes des traités prônant « la concurrence libre.. » organisent cette situation qui a des répercussions négatives sur l’ensemble des compagnies aériennes européennes. Cette complicité qui, de fait, crée une « inégalité de concurrence » pousse les autres compagnies aériennes à faire pression à la baisse sur l’ensemble des droits sociaux.
Parce qu’il met en cause ce dogme européen de la libre concurrence et réclame une amélioration des droits sociaux, ce mouvement européen doit être plus soutenu et valorisé. L’harmonisation sociale vers le progrès et l’égalité de traitement doit être portée avec force dans les mouvements sociaux européens contre les divisions entre travailleurs que suscite le grand patronat. C’est la convergence sociale qu’il faudrait arriver à porter au lieu d’une convergence économique servant les profits et les marchés financiers. Le droit de grève doit être enfin reconnu et opposable devant une cour de Justice européenne qui, enfin, prendrait d’abord en compte le progrès social et les droits d’intervention des salariés dans la gestion et l’organisation des entreprises exerçant sur l’ensemble de l’Union européenne, et non plus les libertés économiques fondamentales qui ne sont rien d’autre que la liberté d’exploiter. Au lieu de l’organisation de la concurrence entre compagnies dans le ciel européen, c’est à un nouveau mode de coopération qu’il faudrait travailler avec des complémentarités entre compagnies, l’exploitation en commun de lignes et d’aéroports dont il faut cesser les ventes au privé, et arrêter de considérer les aides publiques ou bancaires comme des distorsions de concurrence alors que les pays du Golfe et d’autres subventionnent leurs compagnies aériennes.
Souhaitons que le mouvement européen des pilotes et personnels de cabine de Ryanair permette d’ouvrir ce débat pour qu’advienne l’Europe du travail.
1 commentaire
Bien d’accord avec vous. Il y a bien longtemps que je pense que cette Europe est construite sur une concurrence déloyale entre les peuples européens afin d’assouvir les requins de ce monde de la finance. Ils sont les puceaux esclavagistes de notre monde soit disant moderne. Malgré tout, il manque un leader qui expliquerait aux peuplex européenx que l’individualisme est destructeur et qu’en fait tous unis, ils détiennent le pouvoir et pour tout le reste aussi comme la male bouffe…