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Par Patrick Le Hyaric
Le terrorisme fondamentaliste n’en finit plus de frapper. La France, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, la Tunisie, l’Irak, la Lybie, la Syrie, le Pakistan, et la Belgique touchée en son cœur, à Bruxelles. Une cellule terroriste a été démantelée dans la banlieue parisienne. Ce sont plus de dix attentats qui ont été déjoués sur notre territoire depuis 2015. C’est dire si la menace est grande, inquiétante et sérieuse !
L’attentat de Bruxelles s’affirme comme une réponse à l’arrestation d’un des présumés responsables et acteurs des attentats de Paris du 13 novembre dernier. Le caractère organisé et prémédité ne fait aucun doute. Ce sont donc des réseaux structurés et idéologisés qui sèment terreur et effroi.
Il est indispensable de rassembler tout un faisceau de données pour comprendre et combattre le phénomène du terrorisme fondamentaliste tel qu’il se développe depuis quelques années. Redisons qu’il salit une religion, l’islam, comme d’autres fondamentalismes salissent d’autres religions en se réclamant d’elles pour commettre tant de crimes contre l’humanité.
Ce que certains spécialistes appellent le troisième âge du djihadisme, porté ces dernières années par les succès de Daech en Syrie, en Irak et en Lybie, se singularise par la nature de son projet politique qui vise à mettre des bâtons de dynamites dans les failles de nos sociétés en crise. Les théoriciens moyenâgeux, mais non dénués de subtilité, de l’organisation Etat islamique ont analysé les fractures des sociétés européennes, son chômage de masse, sa précarité, les discriminations subies par les nouvelles générations issues de l’histoire coloniale, le ressentiment puissant qui s’exprime contre les élites, la transformation oligarchique des sociétés contemporaines, la crise politique et culturelle qui les taraude. Bref, ils analysent la régression qui a fermé la porte aux perspectives attrayantes et aux lendemains qui chantent. Ils cherchent à embrigader une partie infime de la jeunesse désabusée et passée par différents degrés de délinquance pour la retourner contre la société qui l’a enfantée. Ils comptent ainsi en faire les porte-voix d’une minorité qu’ils espèrent fédérer.
C’est donc sur le malaise social et moral des sociétés européennes et sur le dos de la crise du capitalisme qu’entend prospérer la gangrène fondamentaliste. Ses promoteurs comptent sur la fatigue nerveuse de nos sociétés pour y semer la division, jouant sur les utilisations détournées du principe de laïcité, sur le racisme qui s’exprime de plus en plus ouvertement, la stigmatisation de la pratique religieuse de nos concitoyens musulmans. Ils comptent aussi, sur les moyens de communication modernes qui leur assurent, partout sur la planète et en temps réel, la publicité de leurs crimes pour activer la peur de masse qu’ils considèrent, non sans raison, comme leur atout le plus efficace.
Avec les bras armés de jeunes endoctrinés, ils espèrent créer dans les banlieues défavorisées, une fracture de type identitaire. Leur stratégie fait monter les idées de l’extrême droite, qui leur sert de miroir inversé, et conduit donc à attiser les clivages identitaires qui, de part et d’autre, prospèrent sur les fractures sociales. La thèse du choc de civilisation leur agrée. Elle vise à faire disparaître dans l’imaginaire et les comportements les contradictions de classe.
Ainsi, le terrain social et politique est celui sur lequel cherche à se déployer la barbarie fondamentaliste. C’est pourquoi leur combat fanatique, de type fasciste, concerne tous les progressistes, tous les militants du progrès, de la justice sociale et de l’antiracisme. Leur combat est porté contre ce que pourquoi nous agissons : l’égalité, la justice sociale, la laïcité, la solidarité internationaliste. Ils visent à empêcher l’émergence de la question sociale, l’unification du monde du travail au-delà des identités qui structurent chaque individu.
Dire cela n’entre aucunement en contradiction avec la nécessité d’assurer un niveau maximal de sécurité à tous nos concitoyens. Face à la menace, la police comme la justice doivent disposer des outils le plus efficaces pour empêcher que de nouveaux attentats soient perpétrés sur notre sol. En premier lieu, il faut renforcer leurs moyens humains, les mieux à même d’identifier sur le terrain les comportements annonciateurs de passages à l’acte, avant que ces derniers ne sèment la mort et la désolation. Pour parvenir à un plus haut degré d’efficacité, un haut niveau de coopération entre les Etats est nécessaire. Ceci semble avoir progressé. Seul un renseignement plus efficace parce que mieux coordonné aura raison de cellules terroristes qui s’apprêtent chaque semaine, chaque mois, à faire couler un sang innocent.
Surtout, le combat contre le terrorisme fanatique doit s’appuyer sur un changement profond de l’action extérieure de la France et de l’Union Européenne. En difficulté sur le terrain en Syrie, les cellules terroristes se réveillent sur le vieux continent. Chacun sait que le problème puise ses racines dans les évolutions du conflit qui déchire le Moyen-Orient. Le fondamentalisme se nourrit du poids et de l’autorité des pays-rentiers du Golfe comme des thèses réactionnaires défendues par le Président Erdogan en Turquie. Le peu d’entrain manifesté par ces pays pour s’attaquer au fanatisme djihadiste, voire son encouragement, et la légitimation des thèses obscurantistes qui servent de soubassement à l’action terroriste, sont un des facteurs explicatifs du succès rencontré par le djihadisme international.
Il est indispensable de repenser le processus d’alliances, parfois intimes, nouées par notre diplomatie et certains cercles de pouvoir avec les théocraties fondamentalistes du Golfe. Il s’est effectué sur la base de raisonnements essentiellement économiques alors que le monde qui vient n’est pas celui des ventes d’armes comme moyen d’équilibre de nos balances commerciales, ni celui du tout pétrole. Il convient donc de redéfinir une pensée globale au service à la fois de la Paix, de la coopération, d’une planète économiquement et écologiquement durable.
La France doit porter l’aspiration des peuples à l’autonomie dans un Moyen-Orient en pleine recomposition. En s’appuyant sur les attentes et espoirs des population, l’espace existe qui permette d’accompagner la mutation des états nations syriens et irakiens vers un système fédéral, seul capable de porter les exigences populaires qui s’expriment chez les kurdes, les sunnites, les chiites comme chez les différentes minorités qui constellent le paysage politique local. En même temps, la France doit porter avec énergie sa proposition d’une conférence internationale pour l’existence de l’Etat Palestinien. L’Europe doit impérativement se tourner vers le sud et initier sans attendre des forums de la reconstruction et de la coopération avec d’une part, les pays du Proche et Moyen-Orient, d’autre part, tout le Maghreb et l’Afrique. Au-delà des gouvernements, de tels projets doivent associer des forces sociales et démocratiques. Il n’y aura pas de progrès sans laisser les peuples inventer leur démocratie.
Isoler les porteurs de haine qui sévissent dans les quartiers populaires commande la mise en œuvre de politiques publiques audacieuses pour que reculent toutes les discriminations. Les engager revient à fermer les brèches sociales et politiques dans lesquelles cherchent à s’infiltrer le djihadisme et le fondamentalisme. C’est une urgence sans laquelle toutes les politiques de sécurité mises en place resteront vaines et incomprises. Les investissements considérables nécessaires pour retisser le lien social sont incompatibles avec l’austérité et les injonctions de la Commission européenne. De même, l’atomisation néolibérale de nos sociétés qui s’incarne aujourd’hui dans les politiques gouvernementales à travers les lois Travail ou Macron, va à l’encontre de l’esprit de solidarité et de tolérance qu’il convient de réanimer. Les défis sont immenses. Les prendre bras le corps commande de hisser notre niveau d’exigence en lui donnant pour ambition l’émancipation humaine. C’est le moyen de faire reculer et d’assécher les semeurs de haine et de mort.
8 commentaires
Je pense exactement le contraire. Nous voyons là un changement radical de ce qui est important en politique et devient constitutif de la politique. Vous écrivez : “C’est donc sur le malaise social et moral des sociétés européennes et sur le dos de la crise du capitalisme qu’entend prospérer la gangrène fondamentaliste.” Sûrement pas. Il y a des attentats en Afrique, il y a une guerre entre les sunnites et les chiites… Il y a de l’indéterminé qui apparaît dans la société (Castoriadis).
http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-renversement-de-l-axe-du-176063
La loi Macron ou la loi travail n’ont rien à faire avec le djihadisme, ce sont des phénomènes incommensurables (Adorno)
Pour bien réagir et éloigner la menace, ce qui n’est pas facile du tout, il faut bien poser le problème.
Vive l’autodétermination et le choix souverain pour chaque peuple. Ouais, mais l’homogénéité ? ?
Alors quand PLH écrit que la France doit “porter l’aspiration des peuples à l’autonomie dans un Moyen-Orient en pleine recomposition”, ça doit bien faire plaisir à la clique Juppé-Fafa, à l’état théocratique d’apartheid qui ne cesse de mettre le feu au Moyen-Orient, à l’OTAN, aux adeptes du plan Yinon etc. Et réjouir aussi, en passant, l’organisation Etat Islamique qui promet le tombeau aux alaouites, le couteau aux chiites et l’expulsion (au mieux) aux chrétiens.
Alors l’autonomie sur la base des particularismes religieux, tribaux, ethniques : et puis quoi encore ? Ce serait la porte ouverte à toutes épurations, et la certitude de l’atomisation de la zone. La puissance impériale pourra y détruire ses cibles sans susciter l’opposition des voisins : le rêve en effet pour Washington.
J’observe que l’irrédentisme kurde est toujours le prétexte pour Erdogan à plus de stigmatisation, de répression ; que les kurdes du nord de la Syrie ne sont pas nombreux à vouloir leur indépendance, d’autant que le Rojava s’est construit politiquement en incluant des druzes, des sunnites, divers chrétiens et des athées…
La Syrie elle-même, avec tous ses défauts, a vu cohabiter jusqu’en 2011 (et même depuis, sur le territoire contrôlé par Damas !) toute une mosaïque de communautés. Parlant seulement de rites, les sunnites majoritaires mais dispersés en diverses obédiences voisinent avec les orthodoxes greco/byzantins, les ismaéliens, les assyriens apostoliques, les nestoriens, les alaouites, les syriaques, les maronites, les coptes, les chaldéens, les arméniens répartis en 2 ou 3 rites différents, les cathos romains et protestants, et un peu de juifs, de yézidis, pas mal de chiites druzes et autres, et j’en oublie. L’autonomie, vous la fourgueriez auxquels de ces peuples ? De quel territoire chacun sera-t-il exclu, ou attributaire exclusif ?
On l’a vu après la mort de Tito ou suite à l’élimination de Khadafi : faire vivre côte à côte des rites et des tribus différentes, c’est du sport, et la réussite tient parfois à un “régime” particulier. Mais on sait aussi que seule la cohabitation pacifique garantit au peuple (au singulier) un peu plus d’égalité et de prospérité : y en a marre des ghettos, des pogromes.
Bon article, à part ça.
Un détail encore : assigner un rôle, dans ce Moyen-Orient compliqué, à la France ex-puissance coloniale et désormais caniche de l’OTAN suppose au moins de reconnaître d’abord son rôle peu glorieux de soutien aux putschistes de ce « printemps révolutionnaire » qui a si mal tourné pour le peuple.
N’est-on pas encore tout sucre et miel avec les saoudiens et avec Erdogan ? Ceux-ci ont pourtant directement aidé au développement du terrorisme en Syrie, et ils continuent apparemment après que la diplomatie française a mis en sourdine son admiration pour al Qaida « qui fait du bon boulot ».
Accuser les jihadistes ou leurs parrains les plus visibles, OK, mais ne pas leur faire porter le chapeau de nos propres turpitudes.
Notre République en effet a été le concierge de la mascarade des “Amis du Peuple syrien”, elle a porté aux nues et aidé les “brigades internationales” contre le président (légitime au sens de l’ONU) al Assad, elle a mis de l’huile sur le feu syrien, elle a contribué à faire capoter les négociations… la honte, à répétition, depuis 6 ans.
Ne réclamons pas pour ce criminel vassal de l’empire la présidence de l’organisation d’un nouveau charcutage à la Sykes-Picot.
C’est bien le capitalisme qui est la clef de tous ces malheurs, et malheureusement nous n’avons pas la volonté de le reconnaitre et de nous unir pour en finir une bonne fois pour toute avec lui, c’est dommage car on pourrait construire une autre société pour bannir le malheur humain.
Bonjour.
«« Isoler les porteurs de haine qui sévissent dans les quartiers populaires commande la mise en œuvre de politiques publiques audacieuses pour que reculent toutes les discriminations. »»
Et bien, est-ce possible dans le cadre de l’UE et son idéologie économique financière ?
Le politiques publiques requièrent les sommes
correspondantes.
La haine fondamentaliste a son écho chez nous, et pas seulement dans les vitupérations racistes des FN et consorts. Cet écho, on l’entend dans le traitement européen du “problème” migratoire, à Calais mais aussi quand est violée la Convention Réfugiés par notre sous-traitant Erdogan, rémunéré grassement pour cela. On l’entend aussi dans la cascade de mesures liberticides, qui préparent un peu partout le retour du fascisme. On l’entend, sans aucun doute dans sa variante lutte de classes, dans la bouche de Gattaz qui aujourd’hui prend en otage les négociations sur la retraite, ou dans celle des faux-cialistes qui le bichonnent. Or, leur capacité de nuire (et d’enrichir la caste gloutonne), c’est celle qu’on veut bien leur laisser : si l’on se bat contre cela ensemble, le roi n’est-il pas nu ?
Et on entend claironner la propagande (ciblant Saddam Hussein, Gbagbo, Ahmadinejad, Poutine, Assad… moins contre Saoud, Yats ou Netaniahu) et tonner le canon en Afrique, au M-O, en Ukraine encore.
La protection des réfugiés, la défense des droits démocratiques, la résistance aux attaques sociales et la lutte contre la guerre et le militarisme sont inséparables. Y a-t-il un parti en Europe prêt à lever les masses pour atteindre ces objectifs ?
On a besoin d’un parti qui ORGANISE l’opposition à la guerre, à la dictature, contre les coupes dans les dépenses sociales, et qui fournisse une perspective politique indépendante de l’OTAN et des banquiers.
Dépénaliser la consommation personnelle du pot, oui.
Mais la légalisation à but récréatif, pour se payer une bonne rigolade, vaut mieux y penser comme y faut !
ET faire une législation vraiment adéquate, en tenant compte de certains paramètres humains, comme la maturation du cerveau. Ce qui n’est tenu aucun compte de la consommation d’alcool, abusive chez les ados. J’ai été ados, alors n’essayez pas de m’en compter. Aux cas où!
Et bien sûr la PUB y va tout de go.
Et pourquoi pas sous le thème:
Y a de la joie, avec coca cola….
Bonjour.
En suivant le conseil de Cousteau: être capable de faire des liens entre des choses qui semblent ne pas en avoir.
«« Elle ouvre son cœur au fil de ses rencontres avec des enfants de plus en plus cabossés par la dureté de la vie. Elle s’indigne sur mille sujets : le racisme, l’individualisme, l’intransigeance des religions. Les reculs sociaux qui minent la vie des familles, celle des enfants, le métier d’enseignant. Et nourrissent son envie de partir. »» ««« des enfants de plus en plus cabossés »»»
http://www.humanite.fr/au-chevet-des-enfants-comme-les-medecins-face-leurs-malades-602192?IdTis=XTC-FT08-GAA6YP-DD-DE35I-FVGD#comments
Avec l’ensemble des événements entourant le sort des enfants à travers le monde, du père qui abuse de ses enfants, des enfants faces aux drogues et à l’alcool, aux enfants soldats, maintenant entraînés au terrorisme, il y des questions fondamentales concernant nos sociétés qui doivent être soulevées. N’est-ce pas !
Il y a un événement fondamental qui est déterminant dans la composition de la personnalité à venir de l’enfant, qui est encore laissé pour contre, et sa capacité de résilience aux aléas de la vie. Il s’agit de la naissance, que d’aucun, sauf quelques personnages laissés pour contre, ne considère comme un événement essentiel.
Le Boyer à démontrer que la naissance sans violence est possible, il en a fait mille. Il a reproduit mille fois un événement complexe avec tous ses inconnus, et ce, dans des conditions spécifiques. Il a répondu à l’exigence du protocole scientifique: des résultats identiques dans des conditions données. Et pourtant, la naissance n’a rien de commun avec les procédures scientifiques. Cherchez l’erreur ! Mais la société des médecins a été ébranlée ?
Je vous conseille :
Le ««« chapitre 5. comme si l’on voulait savoir, du livre de Alice Miller.
La connaissance interdite. Aubier 1990. »»»
Le chapitre Accueillir pp 119-145, de Danielle Rapoport. les cahiers du nouveau né 1et 2. Naître….et ensuite? Stock 1991. »»»
Dans ««« le chapitre « Intimité et liberté » dans le livre « L’enfant du possible » (Question de/Albin Michel 1991), le Dc. Michel Odent montre la diversité du mode de naissances de différentes cultures dans le temps. Chez les sioux, la femme accouchait sur un drap soutenu par quatre guerriers….. »»»
De tout temps les cultures avaient leur façon de gêner la naissance, et aujourd’hui nous avons les nôtres. Pour résumer, c’est l’incompréhension crasse du besoin d’intimité et la soumission à l’idéologie techno-médical.
Ainsi, vous vous donnerez une idée avant ou après avoir vue le document Naissance sans violence. Il est sur internet. Tapez naissance sans violence, vidéos. Soyez attentif, il y a un fil conducteur………