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114 ans après sa promulgation, la loi de Séparation des Eglises et de l’Etat et le principe de laïcité qui la sous-tend font l’objet de polémiques aussi aigres qu’intenses. Au prix d’un paradoxe ennuyeux : plus on parle de laïcité et moins on la comprend.
La puissance de la laïcité, telle qu’elle est transcrite dans la loi, réside pourtant dans sa simplicité. « La République assure la liberté de conscience. » stipule l’article 1 de la loi de Séparation. « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte » poursuit l’article 2. La loi proclame ainsi la neutralité, non pas de la société, mais de l’Etat qui s’efface pour garantir en dernier ressort l’égalité en droit, la liberté de conscience et d’expression, instituées par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.
Elle établit une séparation nette entre la sphère publique et la sphère privée – qui ne sont réductibles ni à l’espace public ni à l’espace privé – et rend ainsi possible l’exercice démocratique, transformant le sujet ou l’individu aliéné en citoyen de droit universel, capable de se hisser hors des assignations naturelles, cultuelles ou culturelles, pour forger en toute autonomie son jugement et délibérer dans le sens de l’intérêt général. Elle conditionne dès lors la formation d’un esprit critique inhérent à l’exercice de la citoyenneté. Elle chemine dans les pas des Lumières et du mouvement historique général qui, par le développement du droit, des sciences et des techniques, a placé la raison et l’exigence d’égalité au fondement de la société. Depuis plus de deux siècles, elle a accompagné et conditionné le mouvement général de l’humanité vers la liberté, la souveraineté populaire, la démocratie et l’égalité, rendant inéluctable l’égalité en droit des femmes et des hommes.
Ainsi, l’œuvre de laïcité est indissociablement liée à la construction d’une République démocratique et sociale et, dans ses soubassements, d’une instruction publique universelle fondée sur la raison. La loi de 1905 n’a pu voir le jour qu’après que l’Affaire Dreyfus n’ait faillit faire succomber la République, qu’après le vote de la loi de 1901 sur la liberté d’association, qu’après les lois républicaines sur l’instruction. Ce fut le grand souci des législateurs de 1905 que de lier en permanence le principe de laïcité à l’édification d’une instruction publique fondée sur la raison ; à l’établissement d’une riche vie associative indépendante de l’Etat ; au refus, enfin, des discriminations religieuses et raciales.
On peut dès lors s’étonner de la prévalence de la laïcité dans certaines bouches quand ses conditions d’existence sont à ce point malmenées : éducation nationale en berne, services publics saccagés, financement tarie des associations; quand les normes libérales supplantent en permanence la loi souverainement définie ou quand l’inflation de lois opportunistes contrevient à l’universalité du principe législatif ; quand, enfin, le corps social subit les assauts différencialistes calculés, les discriminations afférentes, et l’atomisation des espaces collectifs de discussion et de délibération.
C’est ainsi que la laïcité, fruit des Lumières, des penseurs du socialisme et du communisme, se trouve travestie aussi bien par les partisans du capitalisme qui parcellisent la société, que par une extrême droite qui, récusant toute forme d’universalisme, tente d’en faire un principe discriminatoire. Tout l’inverse, donc, de ce qu’elle est !
Au-delà de son usurpation vengeresse, ses fondements philosophes et politiques furent sérieusement écornés. Transformée aussi bien par le Général de Gaule que par Nicolas Sarkozy en principe de tolérance – qui est toujours concession ou fait du prince – la laïcité a vu s’émousser sa vocation égalitaire. Jaurès affirmait dans son important discours sur la laïcité en 1910 : « Nous n’avons pas de la tolérance, mais nous avons, à l’égard de toutes les doctrines, le respect de la personnalité humaine et de l’esprit qui s’y développe. » La laïcité ne saurait donc s’abaisser à la coexistence ou à la coercition des cultes. Elle se place au-dessus des mêlées contingentes pour garantir l’exercice critique du jugement, la liberté de croire ou de ne pas croire, et l’égalité des citoyens.
Elle se révèle ainsi être une condition nécessaire à tout projet émancipateur, comme elle fut un ferment de tous les combats menés par le mouvement révolutionnaire et ouvrier, de 1789 à la Commune, de 1793 à la Libération où elle fut instituée grâce à un amendement des députés communistes Georges Cogniot et Etienne Fajon.
Pour sortir du piège dans lequel elle a été placée, la laïcité réclame une nouvelle organisation de la société. Seule une République sociale, laïque et démocratique, garantissant l’effectivité des droits reconnus, un nouvel âge de la démocratie assis notamment sur une Education nationale vigoureuse, pourra garantir son plein exercice et libérer ses potentialités égalitaires et émancipatrices. Et faire cesser, aussi, ce bavardage assourdissant et contingent qui l’emprisonne.
1 commentaire
Bonjour.
Excellent texte que tous devraient lire.
Certains ne reconnaissances pas la laïcité comme pas (un petit pas pour l’homme, un pas immense pour l’Humanité__je signe), facteur déterminant pour la co-existence, mais n’est encore que de la tolérance seulement, aujourd’hui. Mais aussi, il y a l’instrumentalisation politique des croyances, et nous savons que les politiques sont téléguidées par la finance. Bien des voiles sont tombés.
Bolivie : Le Gouvernement de fait engage des agents israéliens
27 Décembre 2019, 18:10pm | Publié par Bolivar Infos
«« Le journaliste étasunien Wayne Madsen a écrit dans un article publié le 17 décembre sur le site d’Alt World qu’avec le renversement des Gouvernements progressistes dans toute l’Amérique Latine et leur remplacement par des régimes néofascistes de droite, les conseillers israéliens anti-insurrection, plus connus comme « trafiquants de la mort » sont revenus en Amérique Latine. Les Gouvernements de droite au Brésil, en Bolivie, en Colombie, au Pérou, en Equateur, au Honduras, au Paraguay, au Guatemala et au Chili, inquiets d’en finir avec la vague de protestations, ont invité les Israéliens à revenir dans leur pays pour les conseiller. Certains de ces pays cherchent le dépeuplement des régions indigènes de façon aussi systématique que ce que le régime israélien a fait avec les Palestiniens en Cisjordanie et à Jérusalem Est. »»
À regarder le monde de la finance et sa PUB, on pourrait y superposer la religion et sa Bonne Parole.
L’instrumentalisation d’une idée, aussi belle soit-elle, la répétition en fait perdre son sens à la longue.
Krishnamurti : la répétition (ad nauseam) abruti.
La victime qui se fait bourreau.