Une autre agriculture pour la vie

le 20 février 2019

Le salon international de l’agriculture ouvre ses portes alors que les consommateurs et les agriculteurs expérimentent les effets d’une nouvelle mystification du pouvoir. Celui-ci leur a promis que la loi dite « agriculture et alimentation » permettrait de mieux rémunérer le travail agricole grâce à une augmentation des prix alimentaires. Les prix à la consommation augmentent en moyenne de 4% alors que  les salaires restent inchangés, mais cela ne profite en rien aux paysans ! Nous le savions d’avance dès lors que les grandes centrales de distribution n’ont aucune obligation de répercuter les augmentations que supportent les consommateurs sur les prix agricoles de base. Ajoutons qu’en général, la part du coût des matières premières dans les produits alimentaires de plus en plus transformés diminue continuellement comparée aux autres coûts en emballages, publicité, transformation et transport. Les seuls gagnants de cette opération sont donc les grands secteurs d’aval qui augmentent ainsi leurs profits en renforçant l’exploitation du travail.

Au lieu de ce qui a été décidé, il aurait fallu inventer un mécanisme empêchant la grande distribution de multiplier par trois ou quatre les prix alimentaires comparés au prix de la matière première agricole. Alors que commence une renégociation de la Politique agricole commune, le gouvernement comme les organisations professionnelles et syndicales devraient porter le fer sur la nécessité de mettre en place, à l’échelle européenne, des prix de base intra-communautaires pour une quantité donnée de productions par exploitation et par secteur de telle sorte que le « marché » puisse être régulé. Au-delà de la quantité déterminée par des négociations annuelles, les prix deviendraient dégressifs. C’est le moyen de favoriser les exploitations familiales paysannes contre l’agriculture industrielle

C’est là un enjeu majeur à l’heure où protéger le climat et les écosystèmes devient question de civilisation. Or l’agriculture industrielle qu’a privilégié le capital s’oppose au principe agricole fondamental qui veut que le processus de production soit d’abord basé sur le vivant, à commencer par les sols, l’eau, les plantes, les écosystèmes et les êtres humains.

Le modèle poussé par les instances internationales et l’Union européenne s’oppose donc tout à la fois à une juste rémunération du travail paysan et à la protection de la nature. Il organise, par les importations de protéines ou de pétrole, une dépendance de plus en plus grande des paysans comme des consommateurs à des conglomérats internationaux tout en détruisant, entre autres exemples, la forêt amazonienne pour produire des protéines importées alors que les produits chimiques font mourir les sols, polluent l’eau et rendent malades ceux qui les manipulent. Chacun sait désormais que ce modèle n’est viable ni socialement, ni humainement, ni écologiquement, ni économiquement. Une grande bifurcation du modèle agricole est plus que jamais nécessaire.

En ce sens, la politique européenne agricole devrait devenir une politique agricole et alimentaire commune permettant une transition vers un nouveau modèle de production alimentaire, riche en emplois durables, soucieux de la santé et de l’environnement, à partir des nouvelles recherches en robotique et de l’énergie solaire. Cette agro-écologie permet l’avancée vers un autre modèle de société où primeraient l’Humain et la nature. Une nouvelle agriculture paysanne est aussi l’une des conditions d’une ruralité vivante. Cette France délaissée et méprisée qui se fait entendre depuis l’automne dernier réclame aussi de pouvoir vivre au « pays » dans des territoires vivants, dynamiques soutenus par des services publics utiles et performants, des réseaux de transport, téléphoniques et numériques efficaces, des commerces de proximité, un artisanat et des petites entreprises qui puissent vivre, à l’opposé de la stratégie dite des « métropoles » qui assèchent les territoires et captent la richesse pour alimenter les circuits financiers. Lorsqu’elle coopère avec la nature, l’agriculture, c’est la vie !


1 commentaire


Beatrice BRUN 23 février 2019 à 13 h 59 min

Excellent article !

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