Sortir des corsets européens

le 7 octobre 2010

 

 

Plus de cent vingt mille manifestants de tous les pays européens à Bruxelles la semaine dernière. Une grande journée d’action en Espagne. D’autres à venir au Portugal, en Italie, Roumanie, Bulgarie. Trois grandes manifestations en France ce mois de septembre avec plusieurs millions de personnes, dont trois millions en fin de semaine dernière. Les peuples européens commencent à réagir fortement aux plans d’austérité et de destruction de leurs droits sociaux, coordonnés par les gouvernements et la Commission de Bruxelles.

Dans toute l’Union européenne, les choix ultralibéraux sont de plus en plus contestés pour leur injustice, mais aussi pour leur inefficacité. La purge économique et sociale mène l’Union européenne dans le mur de la récession, qui aggravera encore la crise. De fait, l’Union européenne est le seul ensemble de pays à ne pas chercher de relance par l’amélioration des rémunérations, une lutte efficace contre la pauvreté et le chômage, une politique coordonnée de développement de la recherche, de l’industrie et d’une agriculture paysanne.

A l’opposé d’une telle recherche, la Commission européenne et le Conseil des ministres de l’économie et des finances ont prévu la semaine dernière de resserrer encore le garrot contre les États, sous couvert de déficit excessif. Dans le même temps, la Commission, qui n’a pourtant pas vraiment de légitimité populaire, s’érige à la fois en « gendarme des États » et en agence de notation de ceux-ci, avec un pouvoir de les sanctionner financièrement. Un État qui ne respecterait pas les critères de déficit inscrits dans le Traité de Lisbonne serait taxé à hauteur de 0,2 % de son produit intérieur brut. Projet très cocasse, qui aggravera les… déficits publics. De surcroît, à partir de sa propre appréciation, la Commission s’érige en tribunal, obligeant les États à modifier leurs politiques fiscales et salariales.

C’est l’inquisition au service des marchés financiers. Déjà, de premières phases de plans d’austérité drastiques sont à l’œuvre en Grèce, en  Irlande, au Portugal, avec une baisse des salaires de 5 % et une hausse de la taxe sur la valeur ajoutée, en Espagne, en France avec le blocage des salaires, la suppression des emplois publics, de nouveaux prélèvements sur le travail, et l’abrogation de la retraite à 60 ans, pour préparer un système de retraite par capitalisation. La banque Goldman Sachs, celle qui a fait tomber la Grèce, dit clairement à quoi servent ces plans de super-austérité. Citons-la : « les annonces de nouvelles mesures par Paris, Dublin, Lisbonne, sont les dernières en date d’une série d’initiatives gouvernementales cette année pour rassurer les marchés ». Voilà qui est clair. L’austérité, les privations, le chômage pour les peuples, afin de favoriser le dieu-argent. Désormais, même le bureau international du travail s’inquiète d’une telle orientation dans une note récente, relevant que « la reprise de l’emploi qui était attendue en 2013 devrait plutôt arriver en 2015 »

A l’opposé des dangereux nationalismes qui pointent, la solidarisation des peuples européens et l’amplification de leurs actions dans chacun des pays doit encore prendre de l’ampleur pour contrer la nouvelle phase de décisions aussi injustes qu’inefficaces qui s’annonce. A celles-ci pourrait s’ajouter une guerre monétaire mortifère pour les peuples, pour les industries, les services, l’agriculture européenne, et donc l’emploi. Ceux qui ont répété hier que l’euro protégeait les peuples ont menti. Nous pourrions le payer demain en chômage et en pauvreté aggravés.

Il est certes urgent de réduire les déficits. Mais cela ne peut se faire que par l’amélioration des conditions salariales, par une fiscalité nouvelle, dissuadant la rente et la spéculation et favorisant le travail et les activités humaines. C’est la régression sociale qui aggrave les déficits. La nature des dettes d’État doit être examinée et rendue publique. Une part essentielle de celles-ci est totalement illégitime et ne constitue qu’un moyen pour spolier encore plus les travailleurs, les retraités, et réduire les services publics. En effet, un haut niveau d’endettement sert, grâce aux taux d’intérêts élevés, à grossir les coffres-forts des institutions financières. La Banque Centrale Européenne doit avoir pour mission de racheter l’essentiel de ces dettes par création monétaire nouvelle et par un refinancement à bas taux d’intérêt des systèmes bancaires ou des États, dans un objectif de progrès social et écologique.

 

On ne peut laisser faire cette spéculation destructrice. Il faut donc que l’Union européenne ait le courage de taxer les mouvements de capitaux spéculatifs. Les sommes obtenues en lien avec la création monétaire de la BCE pourraient permettre de lancer un fonds européen pour le développement social, humain et écologique contre l’austérité, et avec l’objectif d’impulser et de développer de nouveaux services publics utiles aux populations, un développement agricole et industriel de type nouveau. Autant d’objectifs de plus en plus partagés sur le continent européen.

 

Au pacte d’austérité opposons un pacte de progrès social et écologique. A l’Europe du capital il y a urgence à  substituer une Europe des peuples. Les luttes actuelles constituent le ferment d’une autre Europe, sociale, solidaire, démocratique, écologique, actrice du désarmement, de la Paix, et d’un autre monde.


0 commentaires


Colvert-Spartakoid 7 octobre 2010 à 14 h 57 min

Dans ce sens le mouvement actuel reprend une ampleur nouvelle avec les dépots de grèves reconductibles qui se multiplient chaque jour.
Tous ensemble le 12 0ctobre !http://spartakoid.no-ip.org/

MARAT EL MOKRANI 7 octobre 2010 à 17 h 10 min

Oui ,il faut une Europe des Peuples et j’ajouterai des Nations souverains!alors la oui à une telle Europe fraternelle et pacifique.

Patrick Albert 8 octobre 2010 à 7 h 30 min

Oui à une Europe au service des travailleurs. Mais pour commencer, il faut rompre avec cette Europe fondée sur les traités qui gravent dans le marbre qu’elle doit être construite dans le cadre de l’ultra-libéralisme, sur la concurrence libre et non faussée, sur la destruction des services publics…

HERODE Joël 7 octobre 2010 à 21 h 23 min

Hélas, un milliard de fois hélas, moi qui suis un pacifiste convaincu, qui se bat pour la démocratie contre la violence, je redoute des révolutions sanglantes, même, et surtout en France ! Il y a un moment où la soupape de sécurité explose et où la cocotte minute chauffée à blanc éclate ! Toutes ces tensions, en Europe, en France et dans le monde nous mènent, de façon inéluctable, vers des mouvements de plus en plus durs. Quand des gouvernements, comme le nôtre, font le jeu de l’extrême droite et affichent un mépris total envers leurs peuples, on peut et on doit craindre le pire.
Avis personnel à monsieur le Président de la République: “Vous gardez un mauvais souvenir de mai 68, faites bien attention que 1789 ne vous arrive pas en pleine figure.”. A bon entendeur salut !

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