S’expliquer, débattre, combattre les impasses que propose F. Hollande.

le 22 janvier 2014

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Pendant que se développait ce creux débat passionné autour des fumeux thèmes du statut d’une hypothétique « première dame » ou de « la frontière entre vie privée et vie publique » du Président de la République, ce dernier poursuivait sa mue libérale en actes. Sa conférence de presse du 14 janvier est la poursuite et l’amplification de l’énoncé des thèses exposées lors de celle du 13 novembre 2012. L’ancrage, désormais assumé, est à l’opposé des orientations de la gauche depuis Jaurès. Ainsi, le primat est donné aux politiques dites « de l’offre », au détriment de celles de « la demande », c’est-à-dire de la réponse aux besoins sociaux et humains. C’est la voie choisie depuis longtemps par les travaillistes anglais et par le parti social-démocrate allemand sans que la démonstration ne soit faite -et pour cause- que le monde du travail et de la création y serait mieux traité qu’ailleurs ! C’est l’application à la lettre de la ligne de conduite dictée par les institutions européennes. D’ailleurs, le porte-parole de la Commission européenne a immédiatement adressé ses félicitations à F. Hollande : « Nous considérons que les objectifs du pacte de responsabilité sont en ligne avec les recommandations que nous avions faites l’année dernière. Nous avions fixé un cap et nous sommes contents de voir que les propositions d’hier vont dans la bonne direction », s’est-il réjoui. Autrement dit, le socialisme est dissous dans les préceptes de l’Europe ultralibérale.

 

La politique dite « de l’offre » consiste à favoriser d’abord les propriétaires des grandes entreprises, au prétexte que les dépenses sociales et publiques seraient inefficaces, qu’elles obligeraient à augmenter la fiscalité pesant sur les coûts de production et donc sur la « compétitivité » des entreprises.

 

De plus, celles-ci souffriraient, selon le Medef, d’un « coût du travail » excessif, à cause de l’existence d’un salaire minimum, de la protection sociale et jusqu’à la protection de l’emploi pourtant inscrite dans le code du travail. C’est à partir de cette logique que l’idéologie dominante tente de gagner les travailleurs et tous nos concitoyens à cette thèse de l’ultralibéralisme déchaîné. Celle-ci permet certes de redoubler l’exploitation du travail et d’alimenter les dividendes versés aux actionnaires, mais c’est elle qui mène l’Europe et notre pays dans le mur d’une crise sans fin.

 

Ces politiques ne réduisent pas les dettes publiques et tuent dans l’œuf tout projet de relance économique. Et la récession qui en résulte conduit à augmenter les déficits car elle engendre moins de recettes fiscales. Les économies réalisées en diminuant sans cesse les dépenses sociales et publiques utiles, ne servent qu’à rembourser les intérêts de la dette de l’Etat, elle-même source de spéculations sur les marchés financiers. Ce sont donc bien les politiques d’austérité sociale et budgétaire qui conduisent à une croissance quasi nulle. Ce choix, mis en œuvre dans tous les pays européens, simultanément avec des réformes structurelles régressives, conduit à réduire le pouvoir d’achat des ménages et déprime toute l’activité dans l’Union européenne.

 

Le manque de débouchés aboutit à sous-utiliser les capacités productives, à ne pas investir et donc à détruire l’outil de travail et les emplois. A ceci s’ajoute, avec les déréglementations, l’incitation à spéculer plutôt qu’à investir. C’est donc une toute autre logique que nous devons mettre en débat. Celle de la réponse à la demande populaire, qui passe par l’augmentation des rémunérations, la défense et l’amélioration de la protection sociale, ainsi qu’un nouveau plan audacieux de relance des services publics de l’éducation et de la formation, des transports, de l’eau, du crédit et des banques, de la santé, de l’énergie, du logement. La « compétitivité » ne se gagne pas dans l’appauvrissement, le recul de l’accès aux biens communs humains, la destruction des protections sociales au bénéfice de l’augmentation des dividendes pour les actionnaires et  des rémunérations pour les dirigeants des grands groupes. Elle passe par la formation, la qualification des salariés, l’intérêt qu’ils trouvent dans leur travail, l’investissement dans la recherche et l’innovation pour ouvrir de nouveaux chantiers, notamment ceux associés à la transition écologique. Il y a tant à faire pour  les transports, le logement, la ville, l’énergie, l’agriculture, la mer et les océans et de multiples systèmes productifs. Autant de domaines qui répondent à des attentes souvent urgentes et qui représentent de considérables gisements d’emplois. La voilà bien la priorité à retenir plutôt que de s’engager dans la remise en cause des lieux de gestion et de démocratie de proximité que sont les communes et une modification de la carte des régions de France pour la calquer sur ceux des länder allemands. Or, la France est une République une et indivisible et non un pays fédéral.  C’est au contraire vers une nouvelle étape de la démocratie qu’il faudrait aller, notamment dans la cité et au sein des entreprises.  Contrairement à ce qui est sans cesse répété, les choix retenus n’ont rien de « social-démocrate ». La social-démocratie était justement calée sur le principe du « compromis social » pour un certain partage des richesses. F. Hollande lui tourne le dos en faisant droit aux seules demandes du Medef et pousse le curseur vers la satisfaction du grand capital contre le travail. La droite n’en revient pas et ne trouve plus qu’un mot à dire : chiche !

 

Mais prenons garde ! Dans la période que nous vivons, où tout est fait pour intégrer le monde du travail et l’ensemble des populations à « la révolution copernicienne » et à une sorte « d’union nationale » pour le service du capital, il est indispensable de mener une grande campagne d’explications et de porter les débats et l’action au niveau des lourds enjeux auxquels notre peuple et la gauche sont désormais confrontés.


11 commentaires


Michel Berdagué 23 janvier 2014 à 10 h 13 min

Nos analyses depuis toutes les dénonciations de cette U.E. au seul service de la bourgeoisie et du c

papini 23 janvier 2014 à 10 h 56 min

Anghela Merkel est entrain de l’instaurer “le salaire minimum” sous la pression il est vrai et le medef voudrait le supprimer aidé par le revi de l’élysée ….

breteau jean claude 23 janvier 2014 à 11 h 27 min

L’Europe conduit une politique qui maintient ,voire accroit un taux de chomage élevé .C’est utile pour imposer les salaires les plus bas et les réduire .Sauf un big bang électoral au mois de mai ,cette politique criminelle continuera .Les délires élyséens sur la baisse du chomage ne sont que mensonges .Peut-on faire confiance aux patrons pour créer des emplois ,dema

Michel Berdagué 23 janvier 2014 à 12 h 42 min

c…, capital lui -même mutant en tout financier d’ argent facile gagnant à tous les coups s’ avèrent justes et vraies. Et le décalage avec ces analyses et notre morcellement, notre stagnation, pose des problèmes pour une alternative efficace. Les notions et fonctions dans cette société de ce que sont le Prolétariat avec la classe ouvrière et la bourgeoise possédant les moyens de production , d’ échanges , toute la spéculation d’ un au delà de l’ exploitation classique , ces notions/fonctions sont barrées , voire tellement enfouies que les confusions s’ installent et favorisent le plus que malaise . La bourgeoisie possédant la presque totalité des média audio et visuels nous matraque à longueur de seconde notre coût , notre non compétitivité , la culpabilité tout azimut , c’ est votre faute etc…; brouille jusqu’ à ton appartenance de classe : la dite “classe” moyenne introduite pour barrer le choix de certains pour la classe bourgeoise ne sert que tampon et ce n’ est pas pour rien que la rue solférino cible les cadres moyens et supérieurs . En effet si ces cadres choisissaient le monde du travail celui qui n’ a que son salaire pour vivre ou survivre , la bourgeoisie ne pourrait plus se permettre de casser toutes les avancées issues des Luttes. De proposer une Alternative gagnante et victorieuse passe par la reconnaissance de son appartenance au Prolétaire/Citoyen mis en avant par Aline Béziat avec la structurante Démocratie Communiste. Le boulot d’ explications est fondamental et surtout la conviction que la réussite est au bout si nous nous y mettons tous et toutes , pour construire , tout le monde peut faire le constat de l’ échec du stade suprême du capitalisme encore faut- il qu’ un nombre important croit à une alternative de vie libérée de l’ exploitation de ce système , que nous allons conquérir par la lutte et engagements, des avancées certaines. Les ” ils sont trop forts” , les ” pas possibles”, les ” vous ne faîtes rien” , les ” c’ est le moins pire ” , sont des indications de toutes les lâchetés où le maître/capitaliste favorise toutes les servitudes.

breteau jean claude 23 janvier 2014 à 15 h 29 min

souvent ,ici et ailleurs ,nombreux sont ceux qui dégoutés,par cette construction antidémocratique capitaliste,libérale et réactionnaire proposent d’en sortir sans vraiment réfléchir .En quoi cela serait une bonne chose que de se replier sur une France antidémocratique, capitaliste,libérale et réactionnaire à l’image de l’Europe .Ce dont nous avons besoin ,ici et sur le continent c’est l’exacte opposé avec une nouvelle république ou chaque citoyen à son mot à dire .Est-ce si difficile? J’ai beaucoup apprécié ce dessin paru dans l’Huma ce jour ou un journaliste ,un vrai tend un titre “les journalistes doivent assumer leur role de propagandistes .du FN” Au moins c’est clair

Canelle 23 janvier 2014 à 16 h 53 min

C’est bizarre, tout le monde semble découvrir que tous les gouvernements qui se succèdent n’ont qu’un but : déconstruire le programme du CNR…..
Avant même de recevoir les billets de Patrick, je le savais. Tout comme je me doute que tous les partis, je dis bien tous, tendent vers un même but, mais par des chemins détournés.

Colombe 25 janvier 2014 à 20 h 15 min

Pour démolir le programme du CNR ils pratiquent le pick end go comme les mélées en rugby. La droite enfonce le clou et dés qu’elle ne peut plus avancer elle passe la balle au ps qui enfonce le clou un peu plus et ainsi de suite.

guéret 23 janvier 2014 à 17 h 00 min

Tout à fait d’accord avec toi Patrick, j’ajouterai qu’il faut reconstruire une industrie digne de la France et la Nationalisation des des entreprises du CAC40.

Bernard 24 janvier 2014 à 10 h 28 min

attention capitaine iceberg droit devant

curti 24 janvier 2014 à 22 h 26 min

Ce pacte de responsabilités européen, toutes les décisions austéritaires mise au service du capitalisme, tout cela pourrait changer, en effet, bientôt le peuple va être appeler aux urnes
une élection à un tour c’est le moment de changer de cap en Europe et de voter pour le parti de gauche européen (PGE)massivement. Surtout ne pas se réfugier dans l’abstention, Dte, extrême ou même socio- libéral, car aujourd’hui se sont déjà ces gens là qui dirigent l’Europe et brisent les vies de millions de gens.

pellizzoni 27 janvier 2014 à 16 h 50 min

les socialistes nous mènent dans le mur, je ne suis pas technocrate, mais une simple citoyenne, qui constate au fil des jours l’appauvrissement de la France, et l’incapacité de nos dirigeants à la redresser, le chômage, l’insécurité,la supposée crise, mais pas celle de tous, l’avenir de nos jeunes enfants où petits enfants, les catastrophes environnementales, tout un système des plus démoralisants ? Mais où sont les bonnes idées pour nous sortir de l’ornière où nous nous trouvons ? Ce sont là de vraies questions ? J’attends des réponses concrètes

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