Les banlieues méprisées

le 30 mai 2018

Malgré les sonnettes d’alarme tirées, les habitants des quartiers populaires viennent une nouvelle fois d’être royalement méprisés. Dans un discours en forme de rideau de fumée, le chef de l’Etat a enterré le rapport qu’il avait lui-même commandé à Jean-Louis Borloo. Les banlieues demeureront donc un sujet annexe pour le nouveau pouvoir. Si le rapport Borloo écrit avec les acteurs de terrain pouvait évidemment être discuté, il aurait pu être une base utile pour ouvrir un chantier de réflexions, permettre de dégager des pistes d’actions pour faire revivre le lien social, moderniser les services publics, améliorer l’habitat accessible à tous, les réseaux de transports, discuter de moyens nouveaux pour l’éducation, le sport, la culture. Mais la méthode comme les principaux axes de travail ont été balayés d’un revers de main, avec des arguments spécieux empruntés au discours racialiste, dont M. Macron fait en creux la démonstration qu’il ne contrevient en aucun cas aux logiques libérales les plus brutales.

Qu’un président de la République s’autorise pareille désinvolture en dit long sur sa conception de ladite République. Enfilant un costume de directeur général de ce qu’il croit être la start-up France, il se montre prêt à discuter de tout sauf de la brûlante question sociale et du traitement inégalitaire que subissent les villes et quartiers populaires.

Nous sommes en droit d’attendre autre chose d’un Président de la République. Renvoyer les difficultés structurelles des quartiers populaires à un problème d’initiative individuelle permet d’écarter l’indispensable grand projet collectif novateur de création d’une sécurité sociale pour le travail et la formation. C’est d’une République fidèle à sa promesse d’égalité sociale dont les banlieues, comme tous les autres territoires, ont ardemment besoin. Or, l’étranglement progressif et programmé des collectivités locales renforcera partout les inégalités sociales et territoriales.

Si les banlieues souffrent de ce traitement discriminant, elles le doivent à la fonction qui leur est assignée dans le cadre d’une mondialisation capitaliste qui prend appui sur le phénomène de métropolisation. Sas de populations et de capitaux, elles sont devenues des territoires laissés à la merci des logiques de marché, dans une insécurité et une précarité permanente. Les résistances que leur opposent les services publics et le tissu associatif, politique ou syndical permettent aux populations qui y vivent de tenir malgré les difficultés.

Les habitants des banlieues, avec nombre de leurs élus et associations, ne réclament pas de traitement différencié mais la stricte égalité républicaine, qui leur est aujourd’hui refusée. Ils ne réclament pas l’aumône, mais le droit de se soigner, d’étudier, de se former, se loger, se déplacer. Bref de vivre normalement ! Le désintérêt présidentiel pour ces enjeux nous conduit à les mettre en débat pour les partager et les enrichir. Notre magazine qui change pour mieux vous servir va animer toutes les semaines à venir, aux côtés des habitants, des élus, des associations, une campagne de longue haleine pour obtenir des résultats et sortir du mépris.


2 commentaires


Christian Cabille 2 juin 2018 à 15 h 45 min

J’ai soixante huit ans et depuis tout ce temps passé, je n’ai jamais vu ni entendu qu’un banquier aurait fait du social. Alors que ce soit pour les banlieues Parisiennes ou pour les autres salariés, retraités, campagnards, et tout autre catégorie sociales n’ont plus qu’a prendre leur mal en patience durant les quatres dernières années de règne de notre Président.

Moreau 2 juin 2018 à 17 h 26 min

Personne de la classe politique ne peut et ne pourra faire du social au sens littéral sans un projet de nouvelle société, qui est, soit absent, soit promesses qui ne sont jusqu’à ce jour que du vent ; le social n’est plus qu’un nom commun qui ne sert qu’à sa prononciation, en politique depuis 1995, social est un mot qui sonne de plus en plus creux. C’est démagogique de débattre des banlieues, c’est de l’Europe sociale dont la France partie qu’il faut débattre de façon constructive réelle, c’est-à-dire avec un projet. A moins d’un an des prochaines élections européennes : zéro projet lisible, ça promet une forte abstention en 2017 et peut-être un chaos européen irréparable. Il y a des raisons fortes d’être pessimiste : plus de 300 partis politiques en France et ça va très mal !

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