Le débat ! Mais pour quoi ?

le 17 janvier 2019

Emmanuel Macron devant les 600 maires à Grand-Bourgtheroulde, en Normandie. Philippe Wojazer/Pool/AFP

Selon toutes les enquêtes, nos concitoyens n’attendent rien ou si peu de la missive postée par le Président de la République pour ce fameux débat. Celui ci avait déjà du plomb dans l’aile, tant a été répété sur tous les tons par les perroquets du macronisme que ses conclusions ne remettraient en cause ni l’action ni les projets du gouvernement. Ce n’est plus le débat, c’est le débarras des questions gênantes. Le retrait de la Présidente de la Commission nationale du débat public ne saurait être réduit à la polémique sur sa rémunération. C’est bien le débat lui-même, son organisation et sa finalité qui font l’objet d’une grande circonspection, jusque dans les hautes sphères de l’Etat.

En lisant attentivement la missive du Président de la République on comprend bien que le pouvoir ne veut rien entendre. C’est le même argumentaire depuis quatre semaines. Le périmètre des questionnements exclut ceux relatifs à l’augmentation des salaires, à l’utilisation de l’argent et au travail, en somme tout ce qui motive le plus les gilets jaunes et la majorité de ceux qui les soutiennent et concerne au premier chef la sphère de l’entreprise et de la production. Ceci au moment où les chiffres des versements de dividendes aux actionnaires par les multinationales à pavillon français atteint 57,4 milliards, soit un nouveau record depuis la crise de 2008. Record scandaleux ! D’une part, parce qu’il témoigne de l’ampleur de l’accaparement privé des richesses produites par le travail humain. D’autre part, parce qu’il est le signe avant-coureur d’un nouvel orage financier, une bonne partie de cette somme astronomique allant nourrir des bulles spéculatives qui menacent d’exploser une nouvelle fois à la face des sociétés. Le fait que l’entreprise Total, directement liée au déclenchement du mouvement contre la hausse des prix du carburant et étroitement concernée par la transition écologique soit la championne de ces versements indécents devrait interroger.

Loin de vouloir en débattre le Président s’est cru autorisé à une nouvelle provocation, déclarant que « Les troubles que notre société traverse sont aussi parfois dus, liés au fait que beaucoup trop de nos concitoyens pensent qu’on peut obtenir sans que cet effort soit apporté, que parfois on a trop souvent oublié qu’à côté des droits de chacun dans la République (…) il y a des devoirs ». Les devoirs de qui ? De ceux qui souffrent le plus quand les « premiers de cordée » sont à la fête. Car cette sentence s’adresse à la France des bas salaires, des sans-emplois, des ouvriers, des paysans, des petits artisans, en aucun cas aux actionnaires et à leurs fondés de pouvoir qui s’attribuent des sommes sans commune mesure ni avec leurs compétences, ni avec leur labeur. Des sommes qui échappent à la rémunération du travail, aux investissements productifs et aux contributions fiscales.

La violence de ces propos, dans la lignée d’autres prononcés en 2018, s’augmente de la violence des réactions policières encouragées par le pouvoir, et de la restriction des libertés publiques, le ministre de l’Intérieur s’attribuant le droit de restreindre le droit constitutionnel de manifester. Ces stratégies d’humiliation sont la seule réponse apportée à une crise sociale et démocratique qui vient de loin et du plus profond de notre société. L’exécutif met de l’huile sur le feu, courant le risque de ne plus être écouté. L’apaisement nécessaire viendra de la capacité qu’aura la population, avec et au-delà des gilets jaunes, à obtenir la prise en compte au sommet de l’Etat des enjeux cruciaux que constituent le besoin d’une ère nouvelle de la démocratie et d’une autre utilisation de l’argent des banques, dont celui produit par la Banque centrale européenne, l’évasion fiscale et la taxation des géants du numérique, les cadeaux sociaux et fiscaux aux grandes entreprises sans résultat pour l’emploi, la transition écologique. Sans omettre que tous ces sujets ont à voir avec le carcan des traités européens. Les prochaines semaines seront cruciales.


13 commentaires


BUSCA 17 janvier 2019 à 18 h 30 min

Ce “grand débat “ainsi que le répète à satiété les éditorialistes proches du gouvernement est un leurre. A t’il organisé une consultation lors de la suppression de l’isf, du changement de statut de la sncf, de la casse du code du travail,de l’augmentation de la csg pour les retraités,de sa décision de ne pas augmenter les fonctionnaires, à t’il demandé que le cice soit orienté vers les petites et moyennes entreprises créatrices d’emplois, à t’il consulté avant de promouvoir cette décision inique à l’encontre des chômeurs… non bien sûr il fait ce pourquoi il a été élu, une politique favorable aux intérêts du capital et il dit lui même qu’il n’en changera pas ,alors à quoi bon,c’est de la poudre aux yeux destinée à tenter de ‘redorer son blason ” Qu’il se prononce pour une véritable augmentation du smic et plus largement des salaires, pour un développement du service public, pour la sécurité sociale, que il prenne l’argent au capital et agisse contre la fraude fiscale etc etc alors ce serait positif,mais il ne le fera pas ,en tout cas pas de lui-même il faudra l’y contraindre. Mon autre préoccupation agissez c’est urgent pour permettre l’émergence d’une véritable alternative politique changement à celle du capital.

alain harrison 20 janvier 2019 à 5 h 25 min

«« décision inique à l’encontre des chômeurs… non bien sûr il fait ce pourquoi il a été élu, une politique favorable aux intérêts du capital et il dit lui même qu’il n’en changera pas »»
Vous avez bien raison.
De même l’UE, il ne changera pas, et la gauche européenne a ses intérêts…..Chercher l’erreur.

Moreau 19 janvier 2019 à 10 h 50 min

Le débat national doit donc être débat sur le smic européen, ça tombe bien, c’est l’année des élections législatives européennes. Mais qui dit smic européen, dit sécurité sociale européenne en même temps. De même la France étant fondatrice de l’Union Européenne, des services publiques ont une envergure européenne.
Parlons d’Europe dans ce débat ! Débattons pour la meilleure construction de l’Union Européenne sans sombrer dans l’extrémisme retranchementiste de droite, de gauche, et d’ailleurs ! Alors le débat passionne ! C’est ainsi dans le pays profond !
Il faut bien sûr associer l’impôt sur la fortune immobilière, et la politique d’éradication de l’évasion fiscale.

alain harrison 20 janvier 2019 à 5 h 36 min

Vous êtes encore dans vos illusions. Macron a dit qu’il ne changerait rien, de même l’UE.

En sortir permet de refaire l’UE avec les peuples organisés.

Les gilets jaunes sont un premier pas vers l’alternative, mais il y a tous ceux qui se disent de gauche (syndic…) et qui sont les fossoyeurs.

Les gilets jaunes qui acceptent le grand débat, se trahissent….

On dirait que l’histoire, ses leçons……je ne sais comment dire.
HA! le double jeu, pas juste une pratique politicienne.

Le dénie de la réalité.
La lecture de Korzybski est devenue impérative, à mon sens.
Même pour ceux qui se nourrissent au Marxisme.
Ce que l’on ne perçoit pas, c’est que notre cerveau fonctionne en boucle.
Si vous prenez le temps de le regarder, vous verrez bien.
Ça peut être une longue boucle………

DOMART Jean-Marc 20 janvier 2019 à 3 h 17 min

C’est quoi cette mise en scène pre-electorale? Macron en chute libre de popularité, se sert de l’argent public pour faire sa campagne, avec tout le déploiement policier dans les environs de la municipalité.
Pareil à Souillac, dont le maire a dénoncé cette mascarade de debat, avec un ministre comme arbitre “neutre”. Débarrassons-nous de ces tristes sires au plus vite, ainsi que du système monarchique de la 5ème République.

alain harrison 20 janvier 2019 à 5 h 19 min

«« le besoin d’une ère nouvelle de la démocratie et d’une autre utilisation de l’argent des banques, »»

Cela ne pourra se faire que par
La Constituante
Le nouveau pacte social
Le nouveau paradigme économique

Et non par un réarrangement du système, qui ne cesse, lui-même, de se modifier tout en restant exactement le même.

Macron avec son fumeux débat est à Hollande avec son men ennemi ne se présentera pas aux élections…..

Alors modifier le système……..

alain harrison 20 janvier 2019 à 5 h 22 min

«« la Banque centrale européenne, l’évasion fiscale et la taxation des géants du numérique, les cadeaux sociaux et fiscaux aux grandes entreprises »»

Nationalisation sur le territoire, en faire des coopératives sociales, expropriation pour sommes du (tous les cadeaux $$$$$, subventions non retournées, etcéééé Paradis fiscaux……

Moreau 20 janvier 2019 à 12 h 30 min

Le débat qui est d’envergure européenne sur la politique forte d’imposition de la fortune immobilière, la justice fiscale qui ne peut se construire que de façon européenne même si chaque pays avance à sa vitesse ; doit porter aussi sur les taxes foncières sur les modestes habitations principales qui sont trop lourdes, il faut une harmonisation allégeante : les gros propriétaires de biens immobiliers doivent payer gros, les modestes propriétaires doivent payer petit ; c’est indispensable aussi pour que les Travailleurs modestes propriétaires puissent arriver à vendre et à racheter pour se rapprocher de leur travail.
Il faut en même temps une politique forte contre toutes les évasions fiscales et faire progresser la sécurité sociale à 90% en pensant à une sécurité sociale européenne au bout.
Le président Macron a bien commencé le changement mais il faut plus de changement et qu’il soit en faveur réelle des Travailleurs, des Pauvres et des Désargentés… C’est à la gauche de faire évoluer ainsi le progrès politique, le président Macron a besoin de compléter sa politique qui à l’origine est libérale sociale, il faut la complémentarité de la république et marche et de la gauche européenne, pour tous en Europe, certes une fois encore, à des vitesses différentes, mais c’est possible et la France devrait faire la course en tête, elle est fondatrice de l’Union Européenne.

Moreau 20 janvier 2019 à 13 h 35 min

L’alternance inédite comportant la Révolution, titre du livre et politique nouvelle du président Macron, ne résout pas tous les problèmes de la malvie gravissime à cause du régime de 1995 à 2017 ; nombreux sont les gens qui le savent ; mais le président Macron a su entraîner la France fondatrice de l’Union Européenne dans la Révolution libérale sociale à laquelle il pensait qui plaît sur le fond parce qu’elle est la Révolution à l’européenne. Il fallait une révolution politique, ça ne pouvait pas continuer, la jacquerie libre a dit que nombreux sont les gens qui n’arrivent pas à vivre et qui redoutent le pire. Il faut le changement nécessaire et indispensable par la Révolution à l’européenne. C’est ce qui est en cours avec la république en marche et avec l’appel à toute la population du président Macron à l’aider ; ce qui veut dire qu’il n’est pas hostile à associer des idées socialistes et des idées communistes pro-européenne, voire pour la Révolution européenne relançant très bien la construction de l’Union Européenne pour un progrès du vingt et unième siècle pour tous. Le pays profond est d’accord avec cette évolution, mais il faut que les partis de gauche fasse leur travail politique pour la meilleure complémentarité, pour associer les politiques porteuses de plus de social dans le respect de la construction de l’Union Européenne. C’est tout-à-fait républicain et cohérent.

Moreau 20 janvier 2019 à 14 h 05 min

Il faut bien sûr l’expression de l’opposition à l’alternance inédite pour discerner les oppositions europhobes d’une opposition systématique, et les oppositions europhiles dont les meilleures sont compatibles et associables à la Révolution à l’européenne guidée par le président Macron. La devise « l’Europe, on la change ou on la quitte ! » est une devise du populisme et de l’europhobie.
L’Europe on la construit en réalisant notamment en France, pays fondateur de l’Union Européenne le changement nécessaire et indispensable avec une politique entièrement nouvelle généralisable dans tous les autres pays de l’Union Européenne selon la vitesse à évoluer de chaque pays.
Ceux qui travaille la construction de l’Union Europếenne n’ont nulle envie de la quitter, c’est très heureux.
La révolte de la jacquerie libre, n’est pas le clivage systématique tant qu’en effet l’europhobie et l’europhilie ne sont ni complémentaires, ni associables. Il faut faire le tri, c’est ce que fait la république en marche qui est un mouvement inédit de gouvernance. Les Gilets jaunes libres se plaignent d’un manque cruel et dangereux de social et le libéralisme social n’est pas l’apport de tout le social nécessaire et indispensable mais mieux qu’une refondation du capitalisme ; il ouvre les pays de l’Union Européenne à un dépassement du capitalisme et la somme nouvelle du social dont tout le monde pourrait être bénéficiaire assez rapidement, dépend de l’opposition républicaine universaliste socialiste et communiste.

Le président Macron ne veut pas des solutions fondées sur l’europhobie (la détestation de l’Union Européenne), mais il peut associer des solutions fondées sur l’europhilie (l’amour de l’Union Européenne). Telle est la vérité qui construit l’Homme et elle est présente dans le pays profond comme dans la jacquerie libre.
Le président Macron est chiche de réaliser la Révolution donnant un autre régime que le régime de 1995 à 2017, un nouveau régime europhile et européen bien sûr dépassant le capitalisme ; personne n’a eu cette approche d’une révolution républicaine universaliste aussi ample, et il ne dépend que de l’opposition républicaine universaliste de bien la compléter pour une somme de social qui permettra à tous d’arriver à vivre.

alain harrison 24 janvier 2019 à 3 h 47 min

Bonjour M. Moreau.

«« Il fallait une révolution politique, ça ne pouvait pas continuer, la jacquerie libre a dit que nombreux sont les gens qui n’arrivent pas à vivre et qui redoutent le pire. Il faut le changement nécessaire et indispensable par la Révolution à l’européenne. C’est ce qui est en cours avec la république en marche et avec l’appel à toute la population du président Macron à l’aider ; ce qui veut dire qu’il n’est pas hostile à associer des idées socialistes et des idées communistes pro-européenne, …. »»
Est-ce que vous entendez ce que vous dites ?

alain harrison 24 janvier 2019 à 4 h 14 min

J’ ai bien l’impression que j’avais, et que j’ai raison, lorsque J’ai dit, sur un autre site, que le cerveau fonctionne en boucle.

alain harrison 25 janvier 2019 à 23 h 42 min

Quand la politique fait de la double contrainte, et que les esprits marchent là-dedans, c’ est que le manipulateur a gagné.

Et Macron est rendu à ce stade critique pour sa survie.

Pour moi c’est claire. La gauche le verra-t-elle ?

La goutte qui fait déborder le vase.

Mais nous sommes tellement soumis à l’argent, nous ne la voyons pas comme un outil mais comme une dépendance.

Le voyez-vous.

Le cerveau fonctionne avec les commandes que nous lui donnons, que nous-nous donnons, c’est tout. Ensuite, c’est une question de renforcer le conditionnement.

Krishnamurti tente de nous faire comprendre cette toute petite affaire.
Comme quoi les évidences nous échappes, tellement nous cherchons le grandiose, ayant perdu le simple fait de la joie de vivre. Pas le plaisir tonitruant dans lequel le système nous a embarqué.

Bien sûr la science peut nous donner des perspectives extraordinaire, au lieu de gadgets, mais nous avons à mettre de l’ordre dans notre cerveau, c’est cela, peut-être, notre prochain pas évolutif (?).

L’avenir dépend des décisions que nous prenons, alors attention à nos décisions.

Et le système a implanté l’homo-entreprenariat.

Comment dire:

Patri Friedman, petit-fils de*…, flotte en eau ultralibérale
Pierric Marissal
Mercredi, 3 Septembre, 2014
«« L’individualisme n’a plus de bornes : si les pauvres ont envie d’être riches, il suffit qu’ils travaillent et fassent des efforts pour y arriver, si d’autres ont envie de devenir esclaves, pourquoi les en empêcher, et si un milliardaire veut devenir un homme bionique immortel, ce doit être un modèle à atteindre. »»
L’Humanité.fr

* Le digne petit-fils de l’économiste ultralibéral Milton Friedman

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