La pire des dettes

le 10 août 2017

Cameron Strandberg from Rocky Mountain House, Alberta, Canada

Notre planète se consume et la mise en œuvre des décisions de la conférence mondiale sur le climat est d’une extrême lenteur quand elle n’est pas contrecarrée par le président nord-américain et les grands groupes capitalistes transnationaux. Le 2 août dernier fut le jour dit du «dépassement», celui où l’humanité a fini de consommer l’ensemble des ressources que la nature peut renouveler en une année. En 1985, ce jour était le 5 novembre. Ainsi ce que l’on peut qualifier de « dette verte » équivaut à cinq mois de reproduction des ressources naturelles. Elle a des conséquences incommensurablement plus importantes et graves que les dettes comptables dont les libéraux nous rebattent les oreilles. Ce dont il s’agit ici, c’est de savoir si la terre restera une planète habitable, capable de garantir l’avenir de nos enfants, et de toutes les générations à venir. Quel monde leur laisserions-nous si la biodiversité s’éteint, si le niveau des eaux continue de monter sous l’effet de la fonte de glaciers, si les abeilles indispensables à la production alimentaire continuent de disparaître comme les paysans d’ailleurs, si les sécheresses épuisent sans cesse les réserves en eaux ? Que produiraient  les migrations forcées de populations provoquées par la montée des niveaux des mers aux abords des zones côtières où vit un être humain sur deux ? Celles dues à la sécheresse et aux pénuries d’eau ? Autant de conditions génératrices de nouveaux conflits, de nouvelles guerres qui rendent  dérisoires bien des débats qui trop souvent occupent le devant de la scène médiatique.

Or, l’impact des mutations climatiques et environnementales est déjà à l’œuvre.  Les saisons apparaissent comme déréglées, les vignobles sont plus précoces et on peut désormais les cultiver plus au Nord, le niveau de la mer s’élève jusqu’à dix centimètres de plus à Marseille, une sécheresse des sols profonds, la perte de terres arables, davantage de grands incendies dévastateurs sont autant de faits incontestables qui partout devraient conduire à décréter l’état d’urgence absolue, avec de grandes initiatives d’informations et de débats populaires  autour de ces enjeux. Elles devraient s’appuyer sur des expertises contradictoires pour affronter les immenses défi que pose l’incontournable processus de transformation de nos systèmes de production, d’échanges et de consommation, en les liant   aux enjeux démographiques. Une telle démarche ne peut se frayer un chemin que par la participation et la coopération citoyennes planétaires, dans un cadre qui dépasse le système politique actuel dont la courte vue ne va pas au-delà de cinq ans, sauf pour la satisfaction des demandes des puissants. Surtout, elle ne peut s’accommoder d’un capitalisme financier dont les maîtres-mots sont « la productivité » et la « compétitivité », incompatibles avec les cycles de la nature. La reproduction naturelle de l’eau, de l’air pur, d’une part importante de l’énergie, de la fertilité des sols, des espèces sauvages indispensables à la vie humaine, ne peut résister aux limites sans cesse repoussées d’un productivisme capitaliste  à tout crin.

De ce point de vue, la fusion des groupes Bayer et Monsanto il y a quelques mois n’est pas une bonne nouvelle pour la nature, pas plus que l’alignement du gouvernement sur l’Allemagne dans l’acceptation d’un certain nombre de pesticides, ni les diminutions d’aides publiques à l’agriculture biologique. Le respect de la planète ne peut pas   s’accommoder non plus de la destruction des services publics et de l’austérité. En témoignent les grands incendies qui sont tout à la fois le résultat des modifications climatiques, du recul de la petite paysannerie et du nombre d’agents qui permettaient d’entretenir les forêts, comme de la suppression de six milles postes de pompiers et du manque d’investissement dans nos moyens de lutte contre les incendies. Il est tout de même scandaleux que deux canadairs français soient cloués au sol faute de réparations confiées depuis quelques années à… une société privée ! Les décisions du pouvoir de réduire les moyens publics et ceux des collectivités territoriales ne vont pas arranger les choses ! De même, pour que « les Etats généraux de l’agriculture et de l’alimentation » soient utiles à toute la société, il conviendrait d’y traiter  de la rémunération du travail paysan comme  des modes de production, de la qualité alimentaire et de la santé publique.

Aucun discours, aucune mesure ne sera crédible si en même temps sont signés des traités de « libre échange libéral », comme celui avec le Canada que le Conseil constitutionnel vient de valider avec un argumentaire inquiétant. Notre planète ne pourra être vivable et durable que si on y promeut la coopération et le partage. Voilà un chantier décisif que les citoyens de toute L’Europe devraient imposer aux institutions. Ce serait le chemin de nouveaux investissements utiles pour le bien commun pour un nouveau plein emploi, le  développement de la recherche et de la formation. La résorption de  « La dette verte » appelle l’engagement dans un processus démocratique qui place au-dessus de toute autre considération l’intérêt des êtres humains et de leur environnement. Le temps presse.


7 commentaires


Moreau 10 août 2017 à 13 h 01 min

A mon avis, tout est de la faute des Mondialisateurs et des Démondialisateurs qui ont fait les uns et les autres ce Monde en excluant bien des Citoyens et en provoquant l’Abstention. Une telle différence ne vaut rien. Vive l’Humanité aux frontières variables !

Le citoyenvet 10 août 2017 à 14 h 34 min

D’accord avec vous,mais,,indifférences généralisées parc que ViE des concitoyens plus confortable QUE LA NA TURE vraie!!!!!!

Problème révéler depuis la moitiee du 19e siècle dans les villes…

Guy 10 août 2017 à 13 h 05 min

Vos éditos disent tellement vrai. Je me plaît à les lire et à les partager pour qu’ils soient lu le plus possible. Pour conclure et comme dit un copain ” ça craint !”.

Le citoyenvet 10 août 2017 à 14 h 27 min

Très bonne analyse,le problème a pris par contre,une courbe exponentiel, par l’incitation continue aux migrations économiques sans limite ,déstabilisant toutes mesures locales de contreproductipn s de dégâts et pollutions bio environnementales et de facilitées et approbations POLITIQUE.

Poulmarch 10 août 2017 à 16 h 16 min

Le problème est parfaitement pose et met en exergue des erreurs de stratégie dans les choix du nouveau gouvernement .

EVRARD 11 août 2017 à 6 h 14 min

Constat effectivement effrayant de réalisme ! Je le partage avec la même inquiétude .

Merci de contribuer si brillamment à nous ouvrir les yeux .

Patrick 14 août 2017 à 22 h 14 min

Il y a en effet cette course folle de l’ humanité vers un destin tragique dans une irresponsabilité incroyable. A cela, il ne faut pas oublier le problème démographique qui démultiplie l’ impact de l’ Homme sur son environnement et annule systématiquement tous les petits progrès en matière écologique…
On est dans la merde…

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