La nouvelle alliance villes-campagnes

le 25 février 2014

salonagri

Le salon international de l’agriculture est encore cette année cet unique lieu de rencontre entre le monde rural et celui de la ville. Il est aussi un immense espace de dialogue entre les travailleurs de la terre et les salariés, les privés d’emploi, les jeunes et les enfants. C’est utile au moment ou une enquête sérieuse vient de montrer que 87% des adolescents ne reconnaissent pas une betterave ou un poireau et ne savent pas d’où vient le lait ou le jambon. Trop souvent, les publicités télévisuelles liées aux conglomérats de l’agrobusiness ont fait oublier que l’agriculture c’est d’abord une nourriture de qualité et équilibrée. De ce fait, c’est aussi la santé. L’enjeu de la qualité alimentaire est fondamental : qualité et sécurité sanitaire comme nutritionnelle ont partie liée avec le bien être et la santé, avec la valorisation des territoires et l’emploi, avec la  gastronomie et la culture, à l’opposé d’une alimentation standardisée dans les grandes usines de la mondialisation capitaliste. Dans l’intérêt des paysans et des consommateurs, il devient indispensable d’entamer un processus de modification des modèles productifs agricoles ainsi que des systèmes de distribution et de consommation. L’efficacité  sociale, économique, sanitaire et environnementale reste possible par une combinaison intelligente entre l’exploitation familiale et la promotion d’une coopération authentique pour partager des coûts de production et une partie du travail jusqu’à la mise en valeur des productions, à condition que les agriculteurs soient réellement maîtres de celle-ci. Le moment du salon permet aussi de mieux connaître la réalité du travail paysan et les dures conditions économiques et sociales qui le régissent. Pourtant, jamais comme aujourd’hui le travail agricole et la production n’ont bénéficié d’aussi importantes avancées de la révolution technologique, scientifique, informationnelle et numérique désormais  très intégrée  au sein des machines agricoles qu’il s’agisse des tracteurs, des machines de semis et de récolte, des salles de traite, de la reproduction animale ou de la biodiversité. Ceci devrait permettre de réduire la pénibilité de certains travaux. Or, la pression permanente à la baisse des prix à la production et le système du crédit conduisent ici, comme dans les usines, à l’intensification du travail, à la soumission du paysan et de la nature à la loi d’airain des forces de  l’argent.

 

La recherche scientifique et écologique pourrait laisser entrevoir un nouvel avenir dès lors que chaque individu sur la planète mangerait à sa faim. Elle ouvre la voie à  la production de biomatériaux ou d’énergie végétale. Certaines cultures  pourraient, dans les années à venir, trouver de nouveaux usages comme le montre déjà des prototypes d’objets en bioplastique réalisés à partir de matières premières agricoles d’origine végétale ! Voilà donc qui pourrait ouvrir un nouvel horizon pour l’agriculture, ses métiers si nobles et utiles. Or, nous assistons à l’exact inverse. La fonction et le métier sont dévalorisés sous l’effet d’une crise sociale et économique extrêmement profonde. Les crises alimentaires successives, dont les paysans ne sont en rien responsables, ajoutent encore aux doutes et aux désarrois. La majorité des travailleurs paysans déconseillent à leurs enfants de reprendre l’exploitation qui constitue pourtant une somme de capital accumulé à la force du travail parfois de plusieurs générations.

 

L’année passée, a été une nouvelle fois marquée par une  baisse  moyenne du revenu paysan de plus de 18%. Plus de 10 000 agriculteurs sont conduits à cesser  leur métier chaque année ! Ceci représente plusieurs « plans de licenciements » dont on parle peu avec tous les effets pervers que celui induit. Et, il y a cette  triste et violente réalité : chaque jour, acculé, rongé par les difficultés financières et le surendettement, accablé par la solitude et l’isolement ou désespéré par l’absence de perspective deux travailleurs – paysans se suicident. De plus en plus enserrés dans la rapacité du capitalisme qui les a enferrés davantage dans les contraintes et les dettes les rendant dépendants des secteurs industriels de l’amont, de l’aval de la production ainsi que des banques, les paysans – travailleurs  payent un lourd tribu à la société. La question fondamentale réside dans la décision inscrite au fronton du système capitaliste de contenir sans cesse les salaires des salariés pour contenir la part des dépenses alimentaires, tout en permettant aux firmes et aux banques d’améliorer leurs taux de profits. C’est pour ce faire qu’il n’y a plus de prix de base garanti à la production et qu’est promue la production de masse, sans tenir compte ni de la biodiversité, ni des qualités nutritionnelles des aliments fabriqués par la suite dans le complexe agro-industriel. Dans ce système le paysan a trop été réduit à un simple « extracteur de minerai » pour fournir l’agro-industrie.

 

C’est pour ces raisons fondamentales que nous n’avons pas voté la nouvelle « réforme »  de la Politique agricole commune. Les déréglementations en cours nous conduisent vers le mur. Peut être s’apercevra-t-on dans un demi-siècle des effets désastreux des choix actuels, non seulement pour les campagnes, l’emploi mais aussi pour la santé humaine.

 

En ce sens la nouvelle « loi d’avenir » pourrait être prometteuse si elle permettait de sortir  la production agricole des mauvais sentiers actuels en favorisant l’agriculture paysanne porteuse de l’agro-écologie ; poussant à une rémunération correcte du travail paysan, modifiant le rapport de force qu’imposent les centrales d’achat et la grande distribution, favorisant une coopération agricole authentique, agissant pour transformer radicalement la politique agricole européenne et la mondialisation agricole, veillant à faire vivre partout le principe de souveraineté alimentaire.

 

Ceci implique notamment de refuser les projets d’accord de « libre échange » avec le Canada et le marché unique transatlantique avec les Etats-Unis qui n’ont pour objectifs que de satisfaire les multinationales de l’agrobusiness et les fonds financiers contre l’agriculture paysanne, la sécurité alimentaire et la santé.

 

Agir pour une autre logique est de l’intérêt supérieur des consommateurs en alliance avec les travailleurs – paysans.


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