Fonds européen d’aide aux plus démunis. Quelques précisions.

le 27 mai 2013

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Après l’article que j’ai publié, le mercredi 22 mai, à propos du fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD), je me vois contraint d’apporter quelques précisions,  en réaction à un article d’« Euractiv » ce jour, et des accusations de la fraction française du groupe « socialistes et démocrates » du Parlement européen, selon lesquels : « l’aide alimentaire est mise en danger par les communistes au Parlement européen ».

De quoi s’agit-il ?

D’abord j’ai du mal à supporter qu’on puisse faire de la politique politicienne sur le dos des plus démunis. La chose est bien trop grave ! Il faut au contraire discuter sérieusement des moyens de recréer un fonds d’aide alimentaire, à la hauteur des besoins. Notre groupe de la Gauche unitaire européenne / Gauche verte nordique au Parlement européen, n’a cessé de défendre un tel fonds, avec d’autres groupes.

J’ai travaillé plusieurs mois, m’engageant personnellement sur le rapport de Mme Emer Costello, socialiste irlandaise, dont je salue le travail remarquable, l’écoute, la volonté d’aboutir à un vrai fonds. Nous avons en permanence été d’accord sur les enjeux fondamentaux qui sont :

  • Une participation obligatoire de tous les Etats au FEAD afin d’assurer la pérennité du programme.
  • Un budget ambitieux pour répondre aux objectifs étendus du FEAD, comparé au précédent cadre avec un budget minimum de 3,5 milliards d’euros sur la période 2014-2020.
  • Une nette simplification administrative des cadres proposés par la Commission, prenant en compte les capacités limitées qu’ont des organisations fonctionnant essentiellement avec des bénévoles.
  • Une concentration prioritaire des missions du FEAD sur la fourniture de biens alimentaires aux plus démunis, sans discrimination et sans stigmatisation.

Selon le fonctionnement du Parlement, Mme Costello, comme rapporteure, est contrainte de livrer, en fin de parcours, un rapport avec des « compromis ». De bonne grâce, je m’y suis prêté pour ne pas bloquer la situation, pour donner le maximum de chances d’obtenir un fonds utile aux plus démunis. J’ai même été jusqu’à voter son rapport avec mes deux collègues de groupe dans le souci de ne pas détruire le travail engagé, tout en considérant que le compromis que nous adoptions ne répondait pas toujours clairement aux besoins d’un vrai fonds alimentaire.

C’est la raison pour laquelle, considérant le vote en Commission comme un moment d’avancée, je n’ai pas donné ma voix pour que la Commission négocie directement avec le Conseil européen et la Commission européenne, car, à coup sûr, de nouveaux compromis auraient abouti à un fonds très amputé, voir inefficient. J’ajoute que l’essentiel se décide tout de même au Conseil européen, où siègent le gouvernement français et le Président de la République.

J’ai donc préféré que le débat se poursuive de telle sorte que les associations puissent intervenir et que nous obtenions du Parlement européen, un mandat plus clair, plus précis, plus net.

Voilà ce que nous reprochent  des députés socialistes, à l’unisson avec une députée de l’UMP, en nous assimilant à une « extrême gauche stérile ». Non, le Front de gauche n’est pas l’extrême gauche et accuser les communistes de menacer l’aide alimentaire n’est qu’une petite accusation politicienne sans fondement qui ne grandit pas ceux qui la profèrent.

De quoi s’agit-il ? Examinons les questions !

Concernant le budget.

Le compromis adopté en Commission représente un progrès comparé à la proposition de la Commission qui était de seulement 2,5 milliards d’euros. Mais, contrairement à ce qui a pu être avancé, le vote de la Commission emploi ne porte pas les financements du FEAD à 3,5 milliards. C’est pourtant le strict minimum demandé par les organisations caritatives rencontrées.

La formulation retenue dans le compromis est celle-ci : « les ressources disponibles pour l’engagement budgétaire sur la période 2014-2020 ne devraient pas être inférieures en termes réels à l’allocation 2007-2013, pour le programme d’aide alimentaire aux personnes les plus démunies ».

Cette formulation peu claire, a été reprise d’un amendement de la commission parlementaire du contrôle budgétaire afin de rallier le soutien des élus conservateurs et verts des pays du Nord qui contrairement à moi ne voulaient pas inscrire noir sur blanc la somme de 3,5 milliards d’euros. Je l’ai soutenu parce qu’elle fait référence à l’ancien programme d’aide alimentaire, ce que refusaient les libéraux, et elle fixe un minimum qui va au-delà des 2,5 milliards d’euros, proposés à l’origine. Mais il faut avoir conscience que cette phrase n’équivaut pas à 3,5 milliards. En effet, les sommes dépensées réellement au précédent programme d’aide alimentaire sont de 247 millions d’euros en 2007, 344 millions en 2008 puis ensuite 477 millions en 2009, 465 en 2010, 515 en 2011, 512 millions en 2013. Le chiffre 2013 n’est pas encore disponible. Mais en reprenant le chiffre de 2012, cela représente 3 milliards d’euros. Nous ne sommes donc pas aux 3,5 milliards minimum demandés par les associations.

Il est bien évident qu’aller discuter directement avec le Conseil et la Commission européenne sur cette base revient à accepter une somme plus proche de 2,5 milliards que de 3,5 milliards, alors que le fonds a de nouvelles missions. Les associations chiffrent les besoins à 4,75 milliards d’euros.

S’agissant de la participation obligatoire des Etats.

Elle est normalement assurée par le rejet d’un amendement porté par les groupes libéraux et verts nordique qui devait rendre le programme optionnel. Mais un autre amendement de compromis (E) que je n’avais pas soutenu et qui portait sur le champ d’application rend le texte ambigu puisque d’un côté la Commission soutient un programme obligatoire, commençant ainsi : « Le Fonds apporte son appui à des dispositifs nationaux pour la distribution aux personnes les plus démunies, par des organisations partenaires sélectionnées par les États membres ». De l’autre, la version adoptée avec cet amendement (E) rajoute elle, « A la demande de l’Etat membre le Fonds apporte… ».

Malgré les garanties apportées par la rapporteure qui soutient elle aussi la participation obligatoire, je ne pouvais soutenir cet amendement pour ce passage demandé par les tenants d’une option volontaire et qui introduit un flou inquiétant.

S’agissant de la simplification administrative.

Là aussi je n’ai pas pu me retrouver dans les propositions faites. La demande principale des organisations rencontrées était de rendre son fonctionnement le plus simple possible et de se focaliser sur la fourniture de denrées alimentaire.

Or les compromis acceptés intègrent nombre de missions annexes qui viennent parasiter cette première mission fondamentale qui constitue pourtant la base d’activité de la plupart des associations. C’est le cas pour « l’amélioration de l’inclusion sociale et la lutte contre la pauvreté », « la réduction de la dépendance des plus démunis », la lutte contre « le gaspillage alimentaire », ou pour que les associations bénéficiaires « fassent une meilleure utilisation des chaînes d’approvisionnement alimentaires locales ». Tous sont des objectifs louables mais qui ne doivent pas pour autant compliquer la tâche de ces organisations et donc trouver leur place dans les compromis finaux, comme c’est le cas actuellement.

Afin de simplifier le fonctionnement du fonds, j’avais déposé, comme d’autres, de nombreux amendements de suppression dont l’objectif était de supprimer toutes les procédures de surveillance, reportings et autres benchmarkings chères à la culture managériale à l’anglo-saxonne de la Commission.

Or, tous ces amendements ont été rejetés par mes collègues d’un coup, faisant porter pour les organisations caritatives, dont le personnel est souvent bénévole, la menace de devoir se plier à des procédures bureaucratiques extrêmement compliqué. Dans le même temps, les passerelles retenues dans certains amendements de compromis entre le FEAD et le Fonds Social Européen accentuent cette tendance qui m’inquiète.

Le peu d’avancées intégrées sur la simplification administrative, me pousse davantage à vouloir ré-aborder cette question en séance plénière.

*****

Comme on le voit, ceci n’a rien à voir avec les petites accusations selon lesquelles les communistes mettraient à mal l’aide alimentaire. Nous avons travaillé dans un esprit constructif au service des plus démunis, jusqu’à voter un texte qui était un compromis entre groupes politiques, qui continue de ne pas nous satisfaire totalement, tout en étant meilleur que les propositions initiales. D’autre part, nous souhaitons que la démocratie aille jusqu’au bout en permettant aux associations d’intervenir encore et pour que le Parlement européen délibère publiquement.

Il n’y a ni irresponsabilité, ni jusqu’auboutisme stérile là-dedans. Il y a un appel à la démocratie et à la mobilisation.

 
Patrick Le Hyaric
Député au Parlement européen
Vice-président du groupe GUE/NGL


3 commentaires


Dussaut 27 mai 2013 à 19 h 02 min

http://actuwiki.fr/eco/21182
Les Suisses vont voter sur le principe d’une allocation de base, appelée «Revenu de base inconditionnel» (RBI) de 2500 francs suisses par mois (2080 euros) pour tous, sans condition ni contrepartie, selon une initiative populaire qui a réuni les 100 000 signatures requises à cet effet.
Le projet prévoit une rente de 2 500 francs suisses par adulte et 1000 francs suisses par enfant, soit 7000 francs suisses (5800 euros) par mois pour une famille avec 2 enfants.

Le projet prévoit une rente de 2 500 francs suisses par adulte et 1000 francs suisses par enfant, soit 7000 francs suisses (5800 euros) par mois pour une famille avec 2 enfants.

Selon le journal Le Matin Dimanche, il s’agit d’une «des initiatives les plus décoiffantes jamais présentées» au vote des Suisses.

Le système de démocratie directe en vigueur en Suisse permet à tout un chacun de récolter 100 000 signatures sur un texte, appelé initiative, et de le soumettre ensuite au vote de l’ensemble de la population fédérale.

Si le texte est adopté, les autorités politiques ont l’obligation de le mettre en oeuvre, sur la base du principe que le peuple est souverain en Suisse.

En l’occurrence, cette initiative a été déposée par 3 comités, et s’inspirent des thèses de l’utopiste français Charles Fourier (1772-1837).

Pour les comités, le Revenu de base inconditionnel remplace le filet de la sécurité sociale, et «supprime les contrôles avilissants» auxquels doivent se soumettre les bénéficiaires d’allocations sociales, selon les mots de Bernard Jörimann, président du comité B.I.E.N. – Suisse, à l’origine de l’initiative.

Selon un ancien chancelier de la Confédération helvétique, Oswald Sigg, membre du Parti socialiste, «le RBI permet aux salariés de discuter d’égal à égal avec des employeurs, ils ne sont plus obligés d’accepter n’importe quelle tâche pour des raisons purement financières, mais choisissent celle qu’ils ont envie de faire».

Les syndicats ont d’ores et déjà fait part de leur opposition à ce texte, qui «risque de détériorer la situation des bas et moyens revenus». «Les salariés devront continuer à travailler 40 heures par semaine, mais pour un salaire nettement inférieur», estime Thomas Zimmermmann, porte-parole de l’Union syndicale suisse.

Selon Myret Zaki, rédactrice en chef adjointe de la revue suisse Bilan, «il s’agit d’un projet dogmatique qui crée une mentalité de rentier».

Le projet prévoit une rente de 2 500 CHF par adulte et 1000 CHF par enfant, soit 7000 CHF (5800 euros) par mois pour une famille avec 2 enfants.

Après le dépôt des 100 000 signatures auprès des autorités fédérales, il s’écoule en moyenne plus de 2 ans jusqu’à l’organisation du vote.

Source : Agence France-Presse
A quand la France ?!

Cuneaz Françoise 28 mai 2013 à 12 h 44 min

Je suis entièrement d’accord avec les éléments que tu viens d’indiquer. Je suis élue (PCF) ayant en charge l économie solidaire à sainte savine commune de l’agglo de troyes, avec la gestion d’une épicerie sociale, en 2005, 64 bénéficiaires aujourd’hui 118, et moins d’alimentation à distribuer, mais beaucoup plus d’administratif avec une gestion contraignantes des stocks, en indiquant par famille le nombre et la nature des produits distribués, perte de temps et d’argent!….le pire restant sous doute à venir .Fraternellement. Françoise

pery jean pierre 29 mai 2013 à 10 h 01 min

Mais pour tous les ultra libéraux et sociaux libéraux faire appel à la démocratie et au débat doivent faire parti des demandes imbéciles car pour eux seuls eux savent ce qui est bon pour les démunis dont ils se fichent comme la première chemise puisque dans leurs pays respectifs ils ne font rien pour faire reculer la misère bien au contraire! Du coup pour eux des élus qui se préoccupent du bien être de leur prochain devienne incongru dans ce système capitaliste mondialisé. Pauvre Europe, servir par des élus ultra libéraux, sociaux libéraux) plus soucieux de leurs sorts que celui ci des populations qui sont censés représentés à Strasbourg.

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