Des leçons à tirer de la situation des usines GAD

le 20 août 2014

Gad 3

Au mois d’octobre 2013, les huit-cent salariés de l’entreprise Gad à Lampaul-Guimilliau dans le Finistère ont eu à affronter la liquidation de leur abattoir, et leur licenciement. Il en était de même de l’usine de Saint-Nazaire. Nous avions à l’époque, montré comment en passant d’une entreprise familiale jusque l’année 1983, rachetée par des groupes plus importants, puis à nouveau rachetée par le groupe coopératif CECAB, à partir d’un montage financier dit LBO, c’est-à-dire par endettement au prix de taux d’intérêts extravagants, on en était arrivé à ces lourdes difficultés financières. La concurrence acharnée des centrales d’achat faisant pression sur les prix du porc à la production, et l’utilisation de «travailleurs détachés »  dans ce même type d’abattoir en Allemagne aggravaient encore la situation. Au lieu de traiter ces questions au fond, une grande partie de la presse, mais aussi les responsables gouvernementaux laissaient se développer une campagne plus proche du traitement de faits divers que d’indispensables réflexions et actions sur de nouvelles stratégies industrielles et agricoles créatrices d’emplois durables. On laissa même croire aux salariés de l’autre abattoir situé a Josselin (dans le Morbihan) qu’en fermant l’usine du Finistère on sauvait la leur. L’affaire alla si loin que le 23 octobre 2013, quand les travailleurs de Lampaul-Guimilliau se rendirent chercher à Josselin la solidarité de leurs camarades, ils furent très mal accueillis et des bagarres éclatèrent même. La direction du groupe vient de déclarer la semaine dernière que l’usine de Josselin ne pouvait supporter le plan de continuation décidé par le tribunal et qu’en conséquence le risque sérieux existe de la prochaine fermeture du site avec à nouveau près de mille licenciements. La division organisée des travailleurs s’est une fois de plus retournée contre eux sans bénéfices pour la région, ni d’ailleurs pour le groupe coopératif CECAB. En effet il semblerait que l’entreprise a continué à creusé ses pertes. La CECAB qui, dans le cadre du plan de redressement, s’était engagée à apporter 35 millions d’euros sur quatre ans aurait déjà dépensé cette somme pour financer les pertes d’exploitation de l’usine de Josselin. Ceci est compréhensible dès lors qu’on ne s’est pas attaqué aux problèmes fondamentaux de la filière porcine d’une part, et aux enjeux de financement des entreprises d’autre part. Parmi ses difficultés fondamentales persistent la concurrence avec l’Allemagne, la valeur élevée de L’Euro qui constitue un handicap pour nos exportations, et depuis le mois de janvier dernier, l’embargo Russe. Celui-ci a déjà conduit à un recul de la production porcine. Faute de taper du poing sur la table vis-à-vis de l’Allemagne, et de la Banque centrale européenne, le gouvernement continue de mettre nos entreprises dans d’inextricables difficultés. La France n’a pas à continuer ainsi à se soumettre. Elle doit agir avec fermeté pour d’autres choix, prendre des initiatives nationales permettant de défendre nos productions et l’emploi. D’autre part, le pouvoir doit traiter tout autrement les enjeux d’accès aux financements des entreprises. On ne peut continuer d’accepter que la Banque centrale européenne qui joue le rôle de banquiers des banques européennes fournisse aux banques de l’argent à taux quasi-nul que celles –ci replacent en prêts à taux plutôt élevés pour s’enrichir sur les dos des particuliers et des entreprises de production. Dans ce cas c’est d’autant plus urgent, que les difficultés de GAD risquent de contaminer toute l’économie de la coopérative CECAB, dont le cœur de l’activité est traditionnellement les légumes (marque d’Aucy). Ajoutons que les tensions internationales aggravent encore la situation puisque l’embargo russe est encore renforcé et que d’autres foyers de tensions feront perdre des possibilités d’exportations aux entreprises. Dans un tel contexte, un modèle agricole et agro-alimentaire comme celui développé en Bretagne, est plus que jamais précaire. Depuis des mois nous avons réclamé ici même une conférence régionale associant les salariés et les paysans et leurs syndicats, les dirigeants d’entreprises, les élus, les banques, des économistes pour une réflexion et un nouveau plan d’action pour l’emploi, la vie et un développement durable et solidaire en Bretagne. Celle-ci est encore plus indispensable aujourd’hui. Il se dit que le groupe « Intermarché » pourrait devenir le repreneur de l’usine de Josselin. Pour l’instant il tergiverse dans la presse régionale car il veut vraisemblablement imposer ses conditions financières et de reprise de l’emploi, voir même les prix d’achat du porc à la production. « Il nous faut construire un business plan qui soit durable et qui nous permette de dégager de la rentabilité.. » a expliqué son PDG dans un journal régional. A la suite de quoi il sera présenté comme un sauveur après avoir essoré l’emploi et les salaires et peut-être bénéficié au passage de quelques subventions publiques. Ses profits seront assurément largement sauvegardés tandis que les salaires et les revenus des producteurs trinqueront. Même si la situation est urgente faut-il laisser toute l’économie d’une région à quelques groupes intégrés orientant à la fois les productions et les qualités alimentaires ? N’y aurait-il pas un autre modèle à inventer a partir de la coopération agricole originelle c’est-à-dire moins dépendante des groupes financiers mais plus proche des territoires, des agriculteurs, cherchant à mieux répondre aux besoins des consommateurs, dont les orientations stratégiques et la gestion seraient aux mains des paysans qui en sont membres et des salariés qui y travaillent ? Bref un autre avenir est à reconstruire à partir de celles et ceux qui travaillent et non à partir des rapaces de la finance. Ce nouveau cas montre que les ouvriers comme les paysans n’ont aucun intérêt à la division.


3 commentaires


alain harrison 22 août 2014 à 19 h 06 min

Bonjour.
L’embargo contre la Russie a pour effet de mettre en péril des secteurs agroalimentaires.
La guerre civile en cours en Ukraine et les bagarres entre des travailleurs dans le secteur agroalimentaire doivent nous éveiller à trouver des solutions adéquates pour éviter les éclatements sociaux à venir.
Nous devons continuer à trouver les causes de ces conflits, mais nous devons surtout nous pencher sur les solutions.
Nous devons nous dégager du continuum politico-financier conflictuel qui sans cesse se renouvel (les médiats monopoles).
Un conflit n’attend pas l’autre (armé ou économique). Ils captent nos attentions et nos énergies.
Il faut se lancer dans la recherche des solutions et être pro-actif.
Nous ne cessons de tomber dans le piège de la réaction, épuisante.
Énonçons des solutions clairement.
Est-ce si difficile?
Nous avons peur de quoi?
Si oui, notre peur ne relève-t’elle pas de nos peurs psychologiques.
Il n’y a pas de solutions qui seraient concrètes et qui par le fait même nous ferait bouger.
Mais qu’est-ce qui cloche.

Extrait:
«« L’affaire alla si loin que le 23 octobre 2013, quand les travailleurs de Lampaul-Guimilliau se rendirent chercher à Josselin la solidarité de leurs camarades, ils furent très mal accueillis et des bagarres éclatèrent même. La direction du groupe vient de déclarer la semaine dernière que l’usine de Josselin ne pouvait supporter le plan de continuation décidé par le tribunal et qu’en conséquence le risque sérieux existe de la prochaine fermeture du site avec à nouveau près de mille licenciements. La division organisée des travailleurs s’est une fois de plus retournée contre eux sans bénéfices pour la région, ni d’ailleurs pour le groupe coopératif CECAB.»»

««« ils furent très mal accueillis et des bagarres éclatèrent »»»

Les travailleurs de tous les secteurs ne se battent que lorsque leurs “intérêts” sont mis en cause et même prêt à trahir leur confrère. (MANIPULATION?!?)

Nous avons les gouvernements que nous méritons.

Cela dit, nous pouvons jauger notre niveau de conscience, individualiste et consumériste. (CONDITIONNEMENT!?!)

Nous sommes loin de l’individu coopératif, du mouvement humain vers le coopératisme libérateur, où le partage des responsabilités, de la production, des profits, de la libération du temps de vie pour se recréer, car nous avons tous le don de créativité, c’est une question d’éducation juste.
Le questionnement en est la clef.
Mais notre éducation s’apparente encore à de l’instrumentalisation et au conformisme cet éteignoire du questionnement.
Nous devons mener plusieurs batailles sur plusieurs fronts.
Mais prenons conscience que la crise est multidimensionnelle.
Mais si nous continuons à nous séparer dans nos intérêts respectifs, nous ne serons jamais au rendez-vous.

Si nous ne voyons pas les solutions nous nous diviserons encore plus.

Extrait:

«« Au lieu de traiter ces questions au fond, une grande partie de la presse, mais aussi les responsables gouvernementaux laissaient se développer une campagne plus proche du traitement de faits divers que d’indispensables réflexions et actions sur de nouvelles stratégies industrielles et agricoles créatrices d’emplois durables. On laissa même croire aux salariés de l’autre abattoir situé a Josselin (dans le Morbihan) qu’en fermant l’usine du Finistère on sauvait la leur.»»

«« On laissa même croire aux salariés de l’autre abattoir situé a Josselin (dans le Morbihan) qu’en fermant l’usine du Finistère on sauvait la leur.»»

Le questionnement et l’auto-éducation sont incontournables, ce sont nos prises de conscience qui feront la différence.

Lisez le chapitre 1 du livre de Jean-Marie Abgrall, tous manipulés tous manipulateurs.

Il ne s’agit pas d’opinions (conflit entre le mien et le tien, pure perte de temps et d’énergie) mais de faits.

Vous pouvez vérifier par vous-mêmes, en vous-mêmes pour vous-mêmes.

Il y a une intiative citoyenne (pro-actif) européenne sur le revenu de base.

Reconnaître les rendez-vous!

alain harrison 22 août 2014 à 20 h 00 min

La beauté de la chose.

««« ils furent très mal accueillis et des bagarres éclatèrent »»»

Nos émotions nous disent dans quel état nous sommes à un moment donné, mais les manipulateurs ont le pif pour détecter ça, et notre pensée aussi qui s’amuse à jouer dedans.
Nos émotions s’enflamment au carburant de nos petits conflits internes et le questionnement est oblitéré.
Le processus est simple, mais nous tombons bien souvent dedans, à fortiori lorsque les enjeux sont gros. La perte d’un emploi, préjugée, à cause de l’autre en compétition pour des gains ou perte de marché ne devrait-elle pas être perçue comme sain pour tout travailleur?
Après tout les règles sont claires: la compétitivité non-faussée, au meilleur de l’emporter.
La pensée unique que vous avez épousée: je suis une ressource disposable et si je gagne la course de l’employabilité je serai récompensé.????

Faudrait savoir ce que nous voulons.
Le problème des banques, c’est peut-être simple:
Retirons nos argents et payons-nous “cache” des coopératives à temps partagé. Tant qu’à se serrer la ceinture, faisons le pour quelque chose qui nous permettra de nous la desserrer.
Avis aux étudiants, ce sera votre monde, et le temps passe vite.
Le revenu de base couplé aux coopératives autogérées à temps partagé.

Nous pouvons faire nos propres investissements.

Je suggère les tables de réflexion informelle à temps partagé.
C’est simple:
4 personnes se partagent les rencontres (1 fois par semaine, 4 rencontre par mois).
Sujet restreint: ex. coopérative, inviter à faire la liste, échange sur les avantages, un consensus.
Quand une personne est prête, ça fait 5 et ainsi de suite….
Un simple véhicule de conscientisation.
Les locaux de différents groupes sociaux peuvent servir avec un horaire. Un paiement adéquat pour aider l’organisme.
Réfléchir à rendre les organismes indépendants avec leur local bien à eux devrait être en marche.
Se libérer des épées de démoclès.
Mais nous ne sommes pas en démocratie mais dans des états de droits contrôlants portés sur le conformisme. Adieu la créativité, le questionnement.
Que veulent dire ces mots:
LIBERTÉ
ÉGALITÉ
CONVIVIALITÉ
(la fraternité: trop récupéré et conditionnant__ça JOUE DANS LES ÉMOTIONS)
À bon entendeur salut.

Dubant 28 août 2014 à 22 h 23 min

Ne pas oublier le problème structurel de la production porcine bretonne, en majorité de moyenne et faible qualité. Il est difficile de payer des salaires décents dans une filière où la faible valeur ajoutée est aggravée par la prédation de la grande distribution, qui veut d’ailleurs reprendre l’abattoir.
Du point de vue écologique, la concentration de production porcine dans la région bretonne est une catastrophe dont les effets se renforcent. Une hypothèse de travail est la diversification de l’agriculture bretonne (volailles, viande bovine, ovine et porcine, céréales, etc) et son déploiement vers une production de haute qualité capable de s’exporter.

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