Déchirer le pacte des rapaces

le 14 avril 2011

Une nouvelle fois, des dizaines de milliers de salariés, retraités, jeunes, venus de toute l’Union européenne, se sont retrouvés à Budapest pour un rassemblement contre l’euro-austérité. Le même jour le peuple islandais refusait pour la seconde fois, par référendum, la demande de son gouvernement de payer les énormes pertes de l’une de leurs banques, dues à la spéculation. Ce refus est normal. Ce qui, par contre, est ubuesque et odieux, c’est qu’on ait pu leur poser la question.

Cette nouvelle solidarité de lutte des populations doit encore se renforcer, s’élargir, pour faire reculer les tenants de l’Europe du capital qui tentent de réussir un incroyable coup de force : ils veulent transformer  une crise financière et bancaire, dont ils sont seuls responsables,  en une crise de la dette publique qu’ils entendent faire supporter au monde du travail et de la création. Après avoir abaissé les recettes fiscales provenant des grandes sociétés et du  capital, ils ont  mobilisé les États pour soutenir les banques en difficulté, lesquelles, aujourd’hui, assèchent les caisses des dits États eux-mêmes. Pour boucler la boucle, ces derniers appliquent des politiques d’austérité et  démantèlent les services publics.

Les institutions européennes veulent codifier ceci dans un silence assourdissant, grâce à une orientation nouvelle baptisée : « Pacte pour l’euro plus ». Ce texte, encore plus précis que le traité de Lisbonne, constitutionnalise des choix économiques applicables sans ménagement à tous les peuples. En effet, il est imposé aux États d’inscrire dans leur Constitution le refus de faire des déficits publics. Comme il n’y a aucun critère pour atteindre cet objectif, il est clair que cela se fera en abaissant sans cesse les prélèvements sur le capital, en augmentant les impôts indirects et en diminuant les services publics.

Les parlementaires qui, en France, se prêteraient à une telle forfaiture, sous le prétexte de réduire les déficits, se rangeraient clairement et nettement du côté des forces de l’oligarchie contre les travailleurs. Pire ! Derrière ce projet se cache l’idée selon laquelle il n’y aurait qu’une seule politique possible quelle que soit la majorité élue. Autrement dit, nous pourrions rentrer dans l’ère de l’autoritarisme au seul service des marchés financiers, après que des gouvernements successifs leur aient lâché la bride, par des déréglementations successives.

Ceci vient d’être démontré pour le Portugal, lors de la réunion du Conseil des ministres des finances avec la Commission européenne et M. Trichet, président de la Banque centrale européenne. Alors que les électeurs de ce pays sont appelés à élire leur Parlement le 5 juin, le Conseil européen vient de décider d’une sorte d’oukase en conditionnant  une aide de 80 milliards d’euros, d’une part à un plan d’austérité et d’autre part, à un consensus entre les partis dans ce pays. Ce sont donc les institutions européennes qui imposent les choix et demandent aux syndicats et aux partis de les accepter « par consensus » ou « par capitulation », au choix. Les forces politiques devront « parvenir à un accord interpartis permettant que le programme d’ajustement … soit mis en œuvre de manière rapide après la formation d’un nouveau gouvernement… » écrit l’Euro-groupe des finances. Et le programme qui doit être imposé aux portugais est une nouvelle et violente purge sociale. Le gouvernement a déjà appliqué plusieurs plans d’austérité. Le salaire minimum y est de 485 euros. Dans le secteur public les salaires ont déjà été abaissés de 5%. Aujourd’hui, on leur demande un plan de réduction budgétaire, des modifications structurelles pour restaurer la « compétitivité », incluant un programme de privatisations, l’augmentation du prix de la scolarité, la  privatisation de la santé, des mesures pour restaurer le profit des banques qui ont pourtant déjà  fait de « juteuses affaires ». Et comme si cela ne suffisait pas, la Banque centrale européenne a décidé d’augmenter les taux d’intérêt, rendant l’argent du crédit encore plus cher et favorisant la spéculation au détriment du travail.

Le ton doit monter partout, de chaque entreprise, de chaque quartier et village, de toute l’Europe contre ce pacte des rapaces, écrit et imposé pour servir les requins de la finance.

Au moment où les partis politiques mettent en débat des programmes en vue des élections législatives et présidentielles, il convient d’être clair et précis. Des candidats ou des partis qui ne dénonceraient  pas nettement ce « pacte pour l’Euro plus » et ne chercheraient pas à sortir des carcans des traités européens, ne peuvent pas dire sérieusement qu’ils changeraient réellement la vie des gens.

La preuve ! Ce document secret baptisé « programme national de réforme » qu’est en train de rédiger le gouvernement français pour le Conseil européen. Celui-ci a pour objet de décliner dans notre pays, « le pacte pour l’Euro » qu’a coécrit M. Sarkozy au sein de ce même Conseil.

Pour ne prendre qu’un exemple de ce long document, on relève cette obsession à « abaisser le coût du travail », alors que les profits explosent. « Le gouvernement a (ainsi) décidé de ne pas octroyer un « coup de pouce » et de s’en tenir aux règles minimales de revalorisation pour la 5ème année consécutive. (…) Le gouvernement a privilégié des dispositifs alternatifs (RSA, prime pour l’emploi) (…) » est-il écrit. Et pour être tout à fait clair : « Le renforcement des allégements généraux sur les bas salaires vise également à contenir le coût du travail (…). Le gouvernement envisage de procéder à la « barémisation » des ces allègements, mesure qui consiste à intégrer dans le barème des cotisations sociales ces allègements généraux. L’intérêt de cette mesure est double : pérenniser la politique jugée efficace de baisse des charges sur les bas salaires et clarifier l’articulation de cette politique de l’emploi avec le financement de la sécurité sociale ».

Ce programme est baptisé « PNR – 2011 – 2013 » est donc destiné à aller au-delà des élections présidentielles et législatives. Son mot d’ordre est : austérité, austérité, toujours pour le peuple. C’est le vrai programme sarkozyste. Toute la gauche sociale et politique doit le rejeter clairement. S’en détourner c’est proposer de changer l’Europe et changer en France. Sans attendre, le combat pour obtenir des augmentations de salaires, des retraites, des prestations sociales et contre les hausses inconsidérées des produits de première nécessité, revient à remettre en cause ces choix antisociaux.

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0 commentaires


Canelle 14 avril 2011 à 10 h 50 min

L’exemple des pays tunisiens ne leur à pas servi d’exemple ; ils veulent la guerre, faisons leur la guerre, et faisons tomber cette Europe.

C’est justement ce qu’ils craignent…. !

TOUS ENSEMBLE CONTRE CETTE EUROPE ANTI-SOCIALE !

Christian Schneider 14 avril 2011 à 14 h 17 min

Le problème du déficit ne date pas d’aujourd’hui. Il date du 3 janvier 1973, lorsque Giscard d’Estaing, alors ministre des finances de Georges Pompidou, ancien fondé de pouvoir de la Banque Rotschild, interdisait à l’Etat d’emprunter gratuitement à la Banque de France. Une législation aussi juteuse pour les Banques fut logiquement étendue à l’Union européenne dans le traité de Maastricht.

Le déficit du budget est actuellement de 1600 milliards dont 1300 ne sont que le cumul des intérêts. Or ces intérêts ne sont dus qu’en vertu d’une spoliation par des politiciens qui voulaient voler l’état au profit des banques.

Si nous voulions rétablir la situation qui prévalait avant le 3 janvier 1973, nous devrions dénoncer les traités, en clair sortir de l’Union européenne. Nous devrions refuser de payer les intérêts de la dette. Cette proposition peut paraître révolutionnaire, mais ce serait la seule solution de sortir des griffes des rapaces dont parle Patrick Le Hyaric.

Si nous voulons que la gauche de transformation change la vie des gens, elle doit le dire très fort et être offensive. Elle ne doit pas attendre que Marine Le Pen se fasse passer comme l’adversaire de la mondialisation et le rempart de la souveraineté nationale auprès de l’électorat populaire.

Le figuier rouge 15 avril 2011 à 15 h 28 min

Inutile, en effet, de s’accrocher à une Europe dont la construction n’a été qu’une manière masquée de mettre en place le néo libéralisme dont on peut mesurer les effets dévastateurs .
On peut toujours rêver à une Europe sociale…Il vaut mieux sortir de l’OMC, abolir le libre échange, mettre en place une autre façon de gérer les accords économiques, écologiques et culturels. Pour cela, il faut se libérer de l’Union européenne et de ses institutions mortifères basées uniquement sur le profit au détriment des besoins humains les plus élémentaires.

philippe 15 avril 2011 à 9 h 32 min

justement les candidats du parti socialiste pour 2012 ne font aucuneùment mention de ce pacte!n’est-ce pas inquiétant?

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