Contre le choc de la finance, mobilisation du peuple

le 19 juillet 2012

Comme un symbole négatif, c’est à quelques kilomètres du lieu où François Hollande a désigné « le monde de la finance » comme l’ennemi dans son grand discours du Bourget le 22 janvier dernier, qu’est annoncée, à peine deux mois après son installation à l’Elysée, la fermeture définitive de l’une des plus grandes usines françaises : Peugeot à Aulnay-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis. Avec elle, des dizaines de suppressions d’emplois sont programmées dans d’autres usines, dont celle de Rennes.

Voici que ces villes et le département de Seine-Saint-Denis subissent violemment l’offensive de « la finance », ses exigences de profit et de rétrocession de dividendes à d’égoïstes actionnaires-propriétaires. « La finance », cette pieuvre sans foi ni loi, qui s’oppose au travail, à sa valeur accumulée de laquelle ces groupes industriels tirent leur richesse. La violence de l’annonce de la fermeture de cette usine et de la suppression de milliers d’autres emplois est d’autant plus révoltante qu’elle survient après un mensonge répété. Tout était prévu et programmé depuis au moins deux ans. La CGT l’avait révélé. Le gouvernement de droite et la direction de l’entreprise l’ont nié, pour les besoins de la campagne électorale.

De fait, c’est depuis l’installation de la gauche au gouvernement qu’ont été annoncées près de 150 000 suppressions d’emplois à Arcelor, Bouygues Télécom, Doux en Bretagne, Hersant presse, Sanofi, Air-France, Castorama… Auxquelles il faudrait ajouter les dizaines de milliers d’emplois chez les partenaires et sous-traitants de ces entreprises. Un véritable massacre social ! L’intérêt général commande de ne pas laisser faire. Chaque cas doit évidemment être examiné de manière contradictoire, avec l’expertise des salariés. Mais, dans celui de Peugeot, on ne peut accepter que ce groupe ait pu toucher des aides publiques par milliards d’euros, verser des dividendes considérables à ses actionnaires, disposer d’un trésor de guerre de plus de dix milliards d’euros, et choisir aujourd’hui de fermer l’usine d’Aulnay en sacrifiant des milliers d’hommes et de femmes dont la vie serait brisée. Il est scandaleux de voir les dirigeants de l’entreprise espérer réaliser  une juteuse opération immobilière en vendant les 160 hectares qu’ils possèdent à Aulnay, grâce notamment à l’arrivée du métro automatique Grand Paris Express. La valeur de ces terrains a déjà triplé en moins d’un an, pour bientôt atteindre, selon plusieurs sources, un milliard d’euros. Voilà ce que cache la ronflante formule de « reconversion du site pour de nouvelles activités industrielles ». Ce qu’il est advenu des terrains de l’Ile Seguin, de la sidérurgie et de bien d’autres encore,  fait davantage penser à une friche industrielle supplémentaire qu’à l’implantation de nouvelles activités. L’enjeu n’est donc pas d’accepter ou non le plan de licenciement « en l’état ». Il est d’empêcher la fermeture de cette entreprise et d’autres.

Ne pas mener ce combat, c’est accepter que, dans les vingt ans qui viennent, la France, déjà très diminuée,  soit dépourvue de toute capacité de production industrielle. Depuis 1980, deux millions d’emplois ont été supprimés dans l’industrie. Depuis 2009, neuf cents sites industriels ont été fermés. Mais les grands groupes ont accumulé 287 milliards d’euros de trésorerie qui ne servent pas au bien commun. Le tissu des PME et PMI n’en voit pas la couleur. Elles aussi sont sous la coupe des grands groupes. Ajoutons que l’austérité imposée en Europe, la pression sur le pouvoir d’achat et surtout l’ampleur du chômage réduisent les débouchés intérieurs dans tous les pays et alimentent donc encore plus… le chômage, alors que les salaires sont contenus. Or, l’enjeu est de libérer le travail et la production de la poigne de fer de la finance. Ce ne sont pas les coûts salariaux qui sont trop élevés. Ce sont les dividendes et les frais financiers qui minent l’activité réelle : ils représentent une ponction de 305 milliards d’euros sur le travail.

La gauche a la responsabilité historique d’inverser cette tendance et de revaloriser le travail dans le cadre d’un nouveau système productif alliant à la fois le progrès social, le travail, et les nécessités de la mutation écologique des productions. Ainsi, la voiture de demain, non polluante, économe en matières premières, nécessite d’investir considérablement dans la recherche-développement et la formation. Le pouvoir ne doit pas suivre le grand patronat dans son entreprise de terrorisme intellectuel sur le thème de la « compétitivité ». On ne parle ici que de la possibilité de faire pression sur les salaires et les droits salariaux ou de délocaliser la production. Or ce sont les coûts financiers qu’il faudrait abaisser et non les coûts du travail. La mise en concurrence des salariés entre eux, en Europe et à l’échelle de la planète, aboutit à la terrible crise actuelle qui laisse tant d’êtres humains sur le bord du chemin. Au seul service de la rentabilité capitaliste, elle détruit des capacités productives et menace le devenir de la planète. La gauche doit inverser cette logique et s’engager dans le combat pour l’égalité partout. Elle n’y parviendra pas en recherchant  une sorte de « pacte économique » avec le grand patronat dont les perdants seraient à coup sûr les travailleurs et les privés d’emploi. Ainsi, chacun comprend que remplacer la « TVA anti sociale » par l’augmentation de la CSG, qui pèse d’abord sur les revenus du travail, ou promouvoir des accords dits « compétitivité-emploi » aurait pour résultat de compromettre gravement le changement voulu par la majorité de nos concitoyens.

En vérité, l’économie souffre de la disproportion entre les exigences de rentabilité financière et celles de la rémunération du travail, de l’investissement dans les capacités de production, de l’innovation, de la recherche et pour la transition écologique.

Comme cela est déjà arrivé, lorsque la gauche accède aux responsabilités, les milieux patronaux et financiers veulent imposer leur logique et faire du gouvernement leur allié, au nom des prétendus seuls choix possibles, contre les travailleurs et leurs attentes. L’accepter reviendrait à renoncer à répondre à l’intérêt général. Ce qui est donc à l’ordre du jour, c’est de construire un rapport de forces avec toute la société pour relever l’immense défi de la justice sociale et écologique. Y parvenir suppose d’affronter les forces de droite et d’extrême droite, le monde de la finance très organisé et déterminé. Ils utilisent sans cesse la dette – qu’ils ont eux-mêmes créée – comme une contrainte qui s’imposerait à tous et justifierait donc que le monde du travail et de la culture accepte de nouveaux sacrifices alors qu’il n’a aucune responsabilité dans la situation. Seules  la mobilisation populaire et la libération de toutes les énergies pour inventer les chemins inédits du changement, pourront déjouer ce marché de dupes. Dans un livre écrit en 2006, François Hollande appelait à ne pas se reposer sur « la vertu du candidat élu », et appelait à construire dans « le pays, ses profondeurs, ses mouvements, ses syndicats, ses associations » une majorité politique. Nous y sommes ! Et nous sommes d’accord avec cette démarche.

L’impulsion du changement, face aux obstacles qui se dressent, a besoin de la mobilisation sociale et politique de toute la gauche. La préparation de la Fête de l’Humanité et la Fête elle-même sont partie intégrante de cet indispensable mouvement pour le changement.

19/07/2012


0 commentaires


Guéret 20 juillet 2012 à 9 h 14 min

Je suis d’accord avec l’analyse de Patrick le Hyaric, c’est toute l’industrie française qui est menacée et ce qui se passe chez Peugeot
est un tournant dans cette lutte et pour le gouvernement de Gauche,
“pour la légitimité”.

bouron 20 juillet 2012 à 9 h 31 min

Pourquoi le FdG ne se servirait pas de chaque jour férié pour “instruire le peuple ” de ce que ces jours fériés soient ?C’est à dire : le 1e Mai ne serait-il pas un moment d’explication sur son histoire mais aussi les revendications actuelles et les propositions du PCF et FdG en matière sociales , emplois santé etc …Le 14 juillet serait un moment privilégié aussi pour redonner force à nos revendications sur un changement de république et quelle république nous proposons au peuple .Les 11 novembre et le 8 Mai sont des jours de commémoration.Pourquoi ne pas mettre à profit ces journées pour dire STOP , les guerres , nous en avons assez, nous voulons un monde de paix .Nourrissons , aidons les peuples en souffrances pour ne plus voir cette misère que ce système génère .!! Je dis Merci à Patrick dont je lis tous ces textes et lui souhaite bon courage !!!!

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